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02/06/2023 | FRANCE | N°22NT03889

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 02 juin 2023, 22NT03889


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 24 mai 2022 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2203045 du 3 août 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 décembre 2022, M. B..., représenté par Me Le Strat, demande à la cou

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1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes du 3 août 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 24 mai 2022 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2203045 du 3 août 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 décembre 2022, M. B..., représenté par Me Le Strat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes du 3 août 2022 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 24 mai 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 27 février 2023, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 août 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Brisson

- et les observations de Me Le Strat pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant centrafricain né le 3 septembre 1989, titulaire d'un titre de résident temporaire roumain valable du 14 novembre 2018 au 30 septembre 2019, est entré en France le 29 juillet 2019 sous couvert d'un visa Schengen de type C valable pour un séjour d'une durée de quinze jours. Le bénéfice de l'asile lui a été refusé par décision du 29 juin 2021 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par décision du 27 avril 2022 de la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 24 mai 2022, le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 3 août 2022 du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) / 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° (...) ".

3. L'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet d'Ille-et-Vilaine s'est fondé pour obliger M. B... à quitter le territoire français. En particulier, cet arrêté vise les dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et fait état des principaux éléments caractérisant la situation administrative, personnelle et familiale de l'intéressé. Si ce dernier a adressé le 5 mai 2022 un courrier à la préfecture d'Ille-et-Vilaine en vue de solliciter la délivrance d'un titre de séjour "étudiant", il ne justifie pas avoir donné suite à la demande qui lui a été faite de prendre rendez-vous pour l'enregistrement de sa demande. Alors que la demande d'asile présentée par M. B... a fait l'objet d'un rejet définitif et que l'intéressé entrait par suite dans le champ d'application du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des étrangers, la circonstance que l'arrêté contesté ne fait pas état de cette demande du 5 mai 2022 n'est au demeurant pas de nature à entacher la décision obligeant le requérant à quitter le territoire français d'un défaut d'examen de sa situation. Par suite, les moyens tirés de ce que cette décision serait entachée d'une insuffisance de motivation et d'un tel défaut d'examen doivent être écartés.

4. M. B..., fait valoir qu'il réside en France depuis le mois de juillet 2019, qu'il justifie d'un engagement associatif auprès de personnes vulnérables et d'un parcours universitaire qui lui a permis de valider en septembre 2021 un master de sciences humaines et sociales, mention " intervention et développement social ", à l'université Rennes 2 et d'envisager ensuite une inscription en doctorat, concrétisée postérieurement à l'arrêté contesté, en décembre 2022. Toutefois, l'intéressé, qui n'a été admis à séjourner en France qu'à titre provisoire en qualité de demandeur d'asile, n'établit ni entretenir des liens d'une particulière intensité avec son frère et sa sœur qui y résident, ni avoir des attaches fortes sur le territoire français. L'intéressé, qui a déclaré avoir d'autres frères et sœurs, ne conteste pas l'existence de telles attaches dans son pays d'origine, où résident notamment son épouse et sa fille mineure et où lui-même a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de M. B..., en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

5. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

6. M. B... fait valoir qu'il a occupé en 2013 un emploi de secrétaire et de traducteur auprès de la milice Séléka alors au pouvoir à Bangui, qu'il a été pris pour cible à la chute de cette dernière, en janvier 2014, notamment par des membres de son entourage, de confession chrétienne comme lui, qui l'ont considéré comme un traître, que son beau-frère a également travaillé pour le président Djotodia, ce qui a d'ailleurs valu à sa sœur d'obtenir l'asile en France en 2016 et que son profil l'expose à un risque de représailles dans le contexte de tensions communautaires qui prévaut en Centrafrique. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la demande d'asile présentée par M. B... a été rejetée par décisions des 29 juin 2021 et 27 avril 2022 des instances en charge de l'asile, lesquelles ont pris en compte l'ensemble des faits invoqués par l'intéressé et estimé notamment que ses déclarations imprécises, impersonnelles, insuffisamment étayées ou circonstanciées, ne permettaient de tenir ni pour fondées les craintes énoncées ni pour avérée l'existence d'une menace directe et individuelle contre sa vie en cas de retour dans son pays d'origine. Le requérant, dont les allégations ne sont étayées d'aucun élément probant, ne justifie pas davantage, en se prévalant de la reconnaissance, par une décision de la Cour nationale du droit d'asile intervenue le 21 juin 2022, de la qualité de réfugié au bénéfice de l'un de ses frères, pour des motifs propres à la situation de ce dernier, de l'existence d'un risque grave et actuel auquel lui-même serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- Mme Lellouch, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juin 2023.

La rapporteure,

C. Brisson

Le président,

D. Salvi

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22NT03889

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03889
Date de la décision : 02/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : CABINET GAELLE LE STRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-06-02;22nt03889 ?
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