Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux décisions du 23 mai 2019 par lesquelles le ministre de l'intérieur a rejeté leur recours hiérarchique formé contre les décisions du 8 janvier 2019 du préfet des Hauts-de-Seine rejetant leurs demandes de naturalisation.
Par un jugement n° 1908559 du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2021 sous le n° 21NT03643, M. et Mme B..., représentés par Me Boezec, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 octobre 2021 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler les deux décisions du 23 mai 2019 par lesquelles le ministre de l'intérieur a rejeté leur recours hiérarchique formé contre les décisions du 8 janvier 2019 du préfet des Hauts-de-Seine rejetant leurs demandes de réintégration dans la nationalité française ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que, contrairement à l'appréciation portée par le ministre de l'intérieur, ils remplissent les conditions posées pour être réintégré dans la nationalité française dès lors qu'ils sont financièrement autonomes et qu'ils n'ont pas sciemment méconnu les règles fiscales françaises.
Par une ordonnance n° 21NT03643 du 24 février 2022, le président de la 5ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté la demande d'annulation de ce jugement présentée par M. et Mme B....
Par une requête enregistrée le 28 février 2022 sous le n° 22NT00785, M. et Mme B..., représentés par Me Boezec, demandent à la cour de rectifier l'erreur matérielle entachant l'ordonnance n° 21NT03643 du 24 février 2022 par laquelle le président de la 5ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur demande et l'annulation du jugement du 12 octobre 2021 du tribunal administratif de Nantes dans les conditions et pour les motifs exposés dans leur requête enregistrée le 22 décembre 2021.
Ils ajoutent que c'est au terme d'une erreur matérielle que le premier juge d'appel a opposé la tardiveté de leur requête.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête présentée par M. et Mme B....
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés et qu'en tant que de besoin il y a aura lieu de substituer aux motifs opposés initialement celui tiré du fait que leurs ressources propres ne permettent pas de subvenir de manière pérenne à leurs besoins.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,
- le rapport de M. C...,
- et les observations de Me Boezec, représentant M. et Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme B..., ressortissants algériens nés en 1951, ont sollicité leur réintégration dans la nationalité française. Par deux décisions du 23 mai 2019 le ministre de l'intérieur a rejeté leur recours hiérarchique formé contre les décisions du 8 janvier 2019 du préfet des Hauts-de-Seine rejetant leurs demandes. Par un jugement du 12 octobre 2021, dont M. et Mme B... ont relevé appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Par une ordonnance du 24 février 2022 le président de la 5ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur demande d'annulation de ce jugement. M. et Mme B... demandent la rectification de l'erreur matérielle entachant cette ordonnance et qu'il soit statué sur leur demande.
Sur les conclusions en rectification d'erreur matérielle :
2. Aux termes de l'article R. 833-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision d'une cour administrative d'appel (...) est entachée d'une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification. / Ce recours doit être présenté dans les mêmes formes que celles dans lesquelles devait être introduite la requête initiale. Il doit être introduit dans un délai de deux mois qui court du jour de la notification ou de la signification de la décision dont la rectification est demandée. / Les dispositions des livres VI et VII sont applicables. ".
3. L'ordonnance du 24 février 2022 du président de la 5ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes rejette la demande d'annulation du jugement du 12 octobre 2021 du tribunal administratif de Nantes présentée par M. et Mme B... au motif de sa tardiveté résultant du fait qu'alors que le jugement attaqué leur aurait été notifié le 15 octobre 2021 ils n'ont saisi la cour que le 22 décembre suivant, soit au-delà du délai d'appel de deux mois imparti par les dispositions de l'article R. 811-2 du code de justice administrative. Cependant, il ressort des pièces du dossier que c'est au terme d'une erreur matérielle que cette date de notification a été retenue alors que la notification du jugement est intervenue le 25 octobre 2021. Dans ces conditions, et alors que cette erreur matérielle a exercé une influence sur le jugement de l'affaire, cette ordonnance doit être déclarée non avenue.
4. Dès lors, il y lieu de faire droit à la demande en rectification d'erreur matérielle présentée par M. et Mme B... et de statuer à nouveau sur leur demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. Aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. ". Aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. (...) ". En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le niveau et l'origine des ressources de l'intéressé, lui permettant de subvenir durablement à ses besoins en France, ainsi que les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant.
6. Pour rejeter les demandes de réintégration dans la nationalité française de M. et Mme B..., le ministre de l'intérieur s'est fondé dans ses décisions du 23 mai 2019 sur les motifs tirés du fait que les intéressés ne subviennent pour l'essentiel à leurs besoins qu'au bénéfice de prestations sociales et sur le fait que leur comportement fiscal n'est pas irréprochable.
7. La naturalisation ne constitue pas un droit mais une mesure de faveur pour laquelle le ministre de l'intérieur dispose d'un très large pouvoir d'appréciation.
8. D'une part, il n'est pas contesté que M. et Mme B... ne disposent d'aucun revenu tiré d'une activité exercée en France où ils résident depuis 2009. Dans son courrier du 16 avril 2018 de demande de réintégration dans la nationalité française, M. B... indiquait ainsi " J'ai une couverture sanitaire à 100 % CMUC, et je perçois le RSA " et, au titre de l'année 2017, les intéressés ne déclaraient que 21 euros de revenus de capitaux mobiliers. S'agissant de leurs activités exercées en Algérie ils ne se prévalent que de pensions de retraite d'un montant total mensuel cumulé limité à 460 euros. Par ailleurs, à la date des décisions contestées à laquelle s'apprécie leur légalité, les intéressés fond valoir qu'ils perçoivent de leur fils, ressortissant belge, une somme mensuelle de 500 euros. D'autre part, il ressort des pièces du dossier qu'à cette même date les intéressés n'avaient pas déclaré à l'administration fiscale française cette rente. Dans ces conditions, alors même que M. et Mme B... sont propriétaires du studio qu'ils occupent et que l'essentiel de leur famille proche réside en France, c'est sans entacher ses décisions d'une erreur de fait ou d'une erreur manifeste d'appréciation que le ministre de l'intérieur a rejeté pour les motifs précisés au point 6 leurs demandes de réintégration dans la nationalité française.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 21NT03643 du 24 février 2022 du président de la 5ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes est déclarée nulle et non avenue.
Article 2 : La requête présentée par M. et Mme B... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. A... B..., à Mme D... B... née E... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 14 avril 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Rivas, président de la formation de jugement,
- M. Frank, premier conseiller,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2023.
Le président de la formation de jugement, rapporteur,
C. C...
L'assesseur le plus ancien dans le grade le plus élevé,
A. FRANK
La greffière,
H. EL HAMIANI
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT00785