Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Sous le n° 1901409, M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 27 septembre 2018 par laquelle le conseil municipal de la commune de Quiberon (Morbihan) a approuvé la modification n° 2 du plan local d'urbanisme ainsi que la décision du 10 janvier 2019 du maire de cette commune refusant de retirer la délibération du 27 septembre 2018.
Par un jugement n°s 1901334, 1901409 du 8 novembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 7 janvier, 9 février, 21 septembre 2022 et le 6 mars 2023, M. E..., représenté par Me Jobelot, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 novembre 2021 du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a rejeté sa demande ;
2°) d'annuler la délibération du 27 septembre 2018 du conseil municipal de Quiberon ainsi que la décision du 10 janvier 2019 du maire de cette commune refusant de retirer cette délibération ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Quiberon la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la commune de Quiberon était devenue incompétente pour approuver la modification du plan local d'urbanisme en raison du transfert de cette compétence par application de l'article 136 de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové et de l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales ;
- l'information des conseillers municipaux, organisée par l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, a été insuffisante en l'absence de communication de la note explicative de synthèse prescrite ;
- les avis des personnes publiques ne devaient pas être pris en compte alors qu'il n'est pas établi que ces avis ont été joints au dossier en application de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme ;
- le classement de sa parcelle en zone Ubb au plan local d'urbanisme, notamment dès lors que ce plan instaure une règle de retrait de 5 mètres dans cette zone, est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 mai et 10 octobre 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune de Quiberon représentée par Me Le Derf-Daniel, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. E... une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,
- et les observations de Me Drouet, représentant M. E..., et de Me Balloul, représentant la commune de Quiberon.
Considérant ce qui suit :
1. Le plan local d'urbanisme de la commune de Quiberon a été approuvé par le conseil municipal de cette commune le 16 octobre 2014, puis a été modifié par une délibération du 23 mai 2017. Le maire de Quiberon a prescrit une seconde modification de ce plan par un arrêté du 17 octobre 2017 et, par une délibération du 27 septembre 2018, le conseil municipal a approuvé sa modification n° 2. M. E..., propriétaire d'une parcelle cadastrée section AX n° 3 située 2 boulevard Anatole France, a demandé au maire de Quiberon de retirer la délibération du 27 septembre 2018. Ce recours gracieux a été explicitement rejeté le 10 janvier 2019. Par un jugement du 8 novembre 2021, dont M. E... relève appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 27 septembre 2018 et de son recours gracieux.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu aux termes de l'article L. 5214-6 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction alors applicable : " I. - La communauté de communes exerce de plein droit au lieu et place des communes membres les compétences relevant de chacun des groupes suivants : 1° (...) plan local d'urbanisme (...). " et aux termes de l'article 136 de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové : " (...) II. - La communauté de communes ou la communauté d'agglomération existant à la date de publication de la présente loi, ou celle créée ou issue d'une fusion après la date de publication de cette même loi, et qui n'est pas compétente en matière de plan local d'urbanisme, de documents d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale le devient le lendemain de l'expiration d'un délai de trois ans à compter de la publication de ladite loi. Si, dans les trois mois précédant le terme du délai de trois ans mentionné précédemment, au moins 25 % des communes représentant au moins 20 % de la population s'y opposent, ce transfert de compétences n'a pas lieu. (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la commune de Quiberon est membre de la communauté de communes Auray Quiberon Terre Atlantique. Si, contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges, la seule opposition de la commune de Quiberon au transfert de compétence en matière de plan local d'urbanisme prévu au II de l'article 136 de la loi du 24 mars 2014 n'aurait pu interdire un tel transfert, il ressort d'un courrier du préfet du Morbihan du 30 mars 2017 que ce transfert n'est pas intervenu en 2017 en raison de l'opposition de la totalité des communes membres de cette communauté de communes. Par suite, c'est sans méconnaitre ces dispositions, ni celles de l'article L. 5214-6 du code général des collectivités territoriales seules opposables aux communautés de communes, que, par la délibération contestée du 27 septembre 2018, le conseil municipal de Quiberon a adopté une modification de son plan local d'urbanisme.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. (...) Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. En cas d'urgence, le délai peut être abrégé par le maire sans pouvoir être toutefois inférieur à un jour franc. (...) ".
5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, la convocation aux réunions du conseil municipal doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut d'envoi de cette note ou son insuffisance entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose toutefois pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés, à qui il est au demeurant loisible de solliciter des précisions ou explications conformément à l'article L. 2121-13 du même code, une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.
6. Il ressort des pièces du dossier que la réunion du conseil municipal de Quiberon du 27 septembre 2018, lors de laquelle la délibération contestée a été adoptée, a été précédée de l'envoi des convocations à ses membres le 21 septembre précédent, ainsi qu'il résulte d'une attestation du maire de Quiberon du 17 octobre 2019, laquelle fait foi jusqu'à preuve contraire. Il ressort de ces mêmes pièces que ces convocations ont notamment été adressées par courriel le même jour et qu'en complément de l'ordre du jour communiqué, pour l'examen du point concernant l'approbation de la modification du plan local d'urbanisme, leurs destinataires ont reçu communication d'un lien informatique les redirigeant vers un dossier de fichiers complémentaires, au titre desquels figurait une note de synthèse rédigée le 20 septembre 2018, avec mention du fait que ce dossier était également consultable à l'accueil de la mairie. Cette note détaille les objectifs de la modification prescrite par l'arrêté du 17 octobre 2017, le nombre d'observations recueillies par la commissaire enquêtrice, l'avis favorable avec une réserve de cette dernière et les suites, motivées, qu'il est proposé d'y réserver par la commune. Ce document recense également les modifications apportées au projet en conséquence de l'enquête publique et des observations des personnes publiques associées. La circonstance que la délibération contestée ne mentionne pas l'existence de cette note de synthèse ne suffit pas à établir qu'elle n'aurait pas été jointe aux convocations. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales doit être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par : / (...) 2° Le conseil municipal dans le cas prévu au 2° de l'article L. 153-8. ".
8. Il ressort des pièces du dossier que le projet de plan local d'urbanisme a été modifié pour tenir compte des avis des personnes publiques consultées. M. E... soutient sans autre précision qu'il n'est pas établi que ces avis auraient été joints au dossier soumis à enquête publique. Cependant il résulte du rapport de la commissaire enquêtrice que ces avis figuraient au dossier soumis à enquête. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme, manquant en fait, doit être écarté.
9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 151-18 du code de l'urbanisme : " Les zones urbaines sont dites " zones U ". Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter. ".
10. Aux termes du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Quiberon : " La zone Ub est destinée à l'habitat et aux activités compatibles avec l'habitat. Sans caractère central marqué, elle correspond à un type d'urbanisation en ordre continu ou discontinu disposant des équipements essentiels. / Elle comprend les secteurs : / (...) Ubb correspondant aux autres secteurs de l'agglomération, à vocation résidentielle dominante. ". L'article Ub 6 " Implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques " de ce règlement précise, pour le secteur Ubb, que : " Sauf indications contraires portées aux documents graphiques du présent PLU, les constructions doivent être implantées en retrait d'au moins 5,00 mètres des voies (publiques ou privées) et emprises publiques. (...) ".
11. Il est de la nature de toute réglementation d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes, ainsi que des zones inconstructibles. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
12. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle de M. E..., d'une superficie réduite, auparavant classée en zone Uaf2 au plan local d'urbanisme de la commune de Quiberon correspondant " au front de mer et à la place Hoche " " où le bâti a été en partie renouvelé en conservant la morphologie générale du front de mer ", est désormais classée en zone Ubb. Cette parcelle est située à l'angle du boulevard Anatole France et de la rue des Ajoncs d'or et comprend sur sa partie ouest, à l'alignement du boulevard, une construction prolongée vers l'est par un jardin. Elle est séparée du bord de mer situé au sud par deux parcelles mitoyennes dont la première d'une largeur correspondant à la construction contiguë de M. B... C... est présentée comme inconstructible par la commune et est aménagée en parking aérien. La seconde, qui correspond notamment à la largeur de la partie de parcelle contigüe non construite de M. E..., est partiellement bâtie.
13. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la parcelle du requérant s'insère dans un secteur " à vocation résidentielle dominante ", ainsi que prévu par le plan local d'urbanisme pour la zone Ubb, alors même qu'elle se trouve être la seule parcelle située au sud de la rue des Ajoncs d'or classée en zone Ubb. D'autre part, si le rapport de présentation du plan local d'urbanisme mentionne que " Depuis la révision du POS en 1993, l'objectif poursuivi est de préserver les trouées paysagères existantes sur ce secteur ", cette considération ne fonde pas à elle seule le classement d'une parcelle en zone Ubb. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que la parcelle de M. E... permet une telle " trouée paysagère " en direction du littoral dès lors que, depuis la rue des Ajoncs d'or, une vue vers le rivage est possible eu égard à la configuration des lieux. La circonstance que le plan local d'urbanisme impose une règle d'implantation de 5 mètres par rapport aux emprises des voies est à cet égard cohérente avec cet objectif visuel et, s'agissant d'une règle applicable à l'ensemble d'une zone, ne peut être utilement contestée, comme en l'espèce, au regard de la situation d'une seule parcelle. Elle ne peut par ailleurs à elle seule révéler l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation dans le classement d'une parcelle alors que ce classement résulte de la définition figurant à l'article R. 151-18 du code de l'urbanisme et de celle, rappelée au point 10, de la zone Ubb donnée par les auteurs du plan local d'urbanisme. Enfin la circonstance alléguée que la parcelle pourrait être classée en zone Uaf2 comme les parcelles mitoyennes, alors même qu'un tel classement n'est pas réservé aux terrains situés en front de mer, est sans incidence sur l'appréciation à porter sur le classement contesté. En conséquence, et alors que les observations de la commissaire enquêtrice ne liaient pas les auteurs de la modification du plan local d'urbanisme, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation du classement de la parcelle de M. B... C... en zone Ubb doit être écarté.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 27 septembre 2018 par laquelle le conseil municipal de la commune de Quiberon a approuvé la modification n° 2 du plan local d'urbanisme communal.
Sur les frais liés au litige :
15. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Quiberon, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. E... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans dépens. D'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge ce dernier une somme à verser à la commune sur ce même fondement.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Quiberon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et à la commune de Quiberon.
Délibéré après l'audience du 31 mars 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 avril 2023.
Le rapporteur,
C. A...
Le président,
J. FRANCFORT
La greffière,
H. EL HAMIANI
La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT00050