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14/04/2023 | FRANCE | N°22NT00506

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 14 avril 2023, 22NT00506


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C..., M. D... C... et Mme A... C... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision implicite née du silence gardé par le président de la communauté de communes Granville Terre et Mer sur leur demande tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme de Granville en tant qu'il grève la parcelle cadastrée section AB no 76 d'un classement en espace boisé classé.

Par un jugement no 2002106 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur d

emande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C..., M. D... C... et Mme A... C... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision implicite née du silence gardé par le président de la communauté de communes Granville Terre et Mer sur leur demande tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme de Granville en tant qu'il grève la parcelle cadastrée section AB no 76 d'un classement en espace boisé classé.

Par un jugement no 2002106 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 février et 24 août 2022, M. F... C..., M. D... C... et Mme A... C... épouse B..., représentés par la SELARL Juriadis, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision implicite née du silence gardé par le président de la communauté de communes Granville Terre et Mer sur leur demande tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme de Granville en tant qu'il grève la parcelle cadastrée section AB no 76 d'un classement en espace boisé classé ;

3°) d'enjoindre à la communauté de communes Granville Terre et Mer d'abroger le plan local d'urbanisme de Granville en tant qu'il grève la parcelle cadastrée section AB no 76 d'un classement en espace boisé classé, ou, à défaut, de réexaminer leur demande d'abrogation de ce plan, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de communes Granville Terre et Mer une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision contestée est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme ;

- elle est entachée d'erreurs de fait.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juin 2022, la communauté de communes Granville Terre et Mer, représentée par la SARL Martin Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge solidaire des requérants une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique,

- les observations de Me Debuys, substituant Me Gorand, représentant M. C... et autres, et les observations de Me Lucas, substituant Me Donias, représentant la communauté de communes Granville Terre et Mer.

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 29 mai 2017, le conseil municipal de Granville a approuvé son plan local d'urbanisme. Par un courrier du 20 juillet 2020, reçu le lendemain, les consorts C..., propriétaires de la parcelle cadastrée section AB no 76, ont demandé à la communauté de communes Granville Terre et Mer, devenue compétente en matière de plan local d'urbanisme en lieu et place de la commune de Granville, d'abroger ce plan local d'urbanisme en tant qu'il grève leur parcelle d'un classement en espaces boisés. Ils relèvent appel du jugement du 16 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande d'annulation de la décision implicite née du silence gardé par la communauté de communes Granville Terre et Mer sur leur demande d'abrogation partielle du plan local d'urbanisme de Granville.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements. " Aux termes de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme classe en espaces boisés, au titre de l'article L. 113-1, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. "

3. En premier lieu, alors même que la commune de Granville a soumis pour avis à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites de la Manche un dossier relatif à la prise en compte des boisements dans la procédure de révision de son plan local d'urbanisme, incluant l'ensemble des espaces boisés qu'elle envisageait de classer, dont ceux qu'elle s'estimait tenue de classer en application de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment du projet d'aménagement et de développement durables et du rapport de présentation du plan local d'urbanisme, que les auteurs de ce plan ont estimé être tenus de classer en espaces boisés la parcelle détenue par les consorts C... au motif qu'il s'agissait d'un des ensembles boisés existants les plus significatifs de Granville. Dès lors, les requérants ne peuvent utilement soutenir que c'est par une inexacte application des dispositions de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme que leur parcelle a été classée en espaces boisés.

4. En deuxième lieu, il ressort du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Granville que les auteurs de ce plan ont bâti leur " projet environnemental " autour de trois " idées maîtresses ", dont l'une relative à la protection des " éléments naturels qui constituent la matrice naturelle de la commune " dans les zones naturelles et rurales ainsi qu'" à l'intérieur du tissus aggloméré ". A ce titre, les auteurs de ce plan se sont notamment fixé comme objectif de protéger le paysage naturel des deux grandes vallées de Granville, à savoir les vallées de la Saigue et du Boscq. Au sujet de cette dernière, il est indiqué que " la vallée du Boscq joue un rôle fort de coupure verte définissant la limite nord de la commune, en se terminant par le Val des Fleurs qui pénètre à l'intérieur du cœur de ville. Plusieurs actions sont menées dans ce site, dans un souci de préservation du paysage et de l'environnement : / (...) / - préservation des coteaux naturels et des boisements existants, notamment le long de la voie ferrée, afin de conforter le rôle joué par cette vallée dans la trame verte communale. (...) ". Le rapport de présentation du plan local d'urbanisme fait également état de la volonté de préserver les couvertures boisées de la vallée du Boscq et indique que " la rive sud de la vallée du Boscq est composée de coteaux plus ou moins urbanisés, compris entre le plateau urbanisé de la ville au sud et les emprises ferroviaires au nord. À l'extrémité de l'impasse de la rue du Rocher, un espace faiblement urbanisé associe de grandes propriétés et des parcelles boisées. " Ce rapport justifie le classement en espace boisé de la parcelle cadastrée section AB no 76 en mentionnant que " le versant sud de la route est occupé par un boisement plus ancien et plus qualitatif, ce coteau assez pentu est donc classé en EBC pour conserver cet écran végétal bordant des quartiers récents d'habitation ".

5. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section AB no 76, d'une surface de 3 917 mètres carrés, qui fut utilisée comme carrière de rocher de quartz blanc sur environ 80 % de sa surface, est dans sa majeure partie occupée par un boisement de plus de 225 arbres d'essences variées (ormes, frênes, saules, érables, chênes pédonculés et châtaigniers), auxquels s'ajoute une centaine d'érables sycomores en taillis. Si les requérants soutiennent, en se fondant sur le rapport d'un expert forestier, que les arbres existants sur la parcelle sont très communs, que certains sont atteints de maladie ou le seront à l'avenir, et que la plupart des essences sont implantées sur un sol de carrière tassé et sans profondeur qui ne leur convient pas, il ne ressort pas des pièces du dossier que la parcelle en cause, boisée depuis environ 40 ans, ne pourrait pas conserver son caractère boisé à l'avenir, notamment en remplaçant les arbres malades ou inadaptés au sol par d'autres essences. Ainsi, compte tenu des caractéristiques de la parcelle et des orientations du projet d'aménagement et de développement durables, le classement de la parcelle litigieuse en espaces boisés n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

6. En dernier lieu, s'il est vrai que le rapport de présentation du plan local d'urbanisme indique de façon erronée que la parcelle en cause est un " coteau assez pentu ", alors que seule 20 % de celle-ci correspond à un coteau, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette erreur matérielle a eu, en l'espèce, une incidence sur la décision des auteurs du plan local d'urbanisme de classer la parcelle litigieuse en espaces boisés. Si les requérants soutiennent par ailleurs que, contrairement à ce qui est indiqué dans ce même rapport de présentation, le boisement existant sur leur parcelle n'est ni plus ancien ni plus qualitatif que celui qui existait sur le terrain situé à l'est, ils ne l'établissent pas par les pièces versées au dossier. Dès lors, le moyen tiré de ce que le classement litigieux serait fondé sur des faits matériellement inexacts doit, en tout état de cause, être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation des requérants, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, leurs conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Granville Terre et Mer, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que les consorts C... demandent au titre des frais exposés par eux à l'occasion du litige soumis au juge.

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire des consorts C... la somme globale de 1 500 euros à verser à la communauté de communes Granville Terre et Mer au titre des frais liés à l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... et autres est rejetée.

Article 2 : MM. C... et Mme C... épouse B... verseront solidairement à la communauté de communes Granville Terre et Mer une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C..., à M. D... C..., à Mme A... C... épouse B... et à la communauté de communes Granville Terre et Mer.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 avril 2023.

Le rapporteur,

F.-X. E...La présidente,

C. Buffet

La greffière,

K. Bouron

La République mande et ordonne au préfet de la Manche en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 22NT00506


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00506
Date de la décision : 14/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUFFET
Rapporteur ?: M. François-Xavier BRECHOT
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : SELARL JURIADIS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-04-14;22nt00506 ?
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