La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/03/2023 | FRANCE | N°21NT03692

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 31 mars 2023, 21NT03692


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Flower a demandé au tribunal administratif de Nantes de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010 et des cotisations supplémentaires à la taxe sur les véhicules de société auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2011 ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement n° 1812366 du 29 octobre 2021, le tribunal admin

istratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Flower a demandé au tribunal administratif de Nantes de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010 et des cotisations supplémentaires à la taxe sur les véhicules de société auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2011 ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement n° 1812366 du 29 octobre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 28 décembre 2021 et 18 novembre 2022 la SARL Flower, représentée par Me Baranez, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration fiscale n'est pas fondée à retenir l'existence de recettes omises, en raison de loyers minorés, pour le calcul de son résultat imposable ; en outre les tâches de gestion réalisées par son gérant M. A... n'ont pas été prises en compte ;

- elle pouvait, à bon droit, déduire de son résultat les charges afférentes au bateau de plaisance dont elle est propriétaire, ce bateau ayant été acquis à des fins exclusivement commerciales ;

- la majoration pour manquement délibéré qui lui a été appliquée au titre des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés litigieuses n'est pas fondée ;

- le véhicule dont elle est propriétaire est exclusivement affecté à la location et n'est pas imposable à la taxe sur les véhicules de sociétés.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 juin 2022 et un mémoire enregistré le 21 novembre 2022, qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Flower ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Flower, qui a son siège au Mans (Sarthe), exerce une activité de holding dans le domaine de la gestion immobilière. Elle est par ailleurs propriétaire de la villa L'Arbousière, située à Porto-Vecchio (Corse-du-Sud), dont elle assure la mise en location saisonnière. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2009 au 30 septembre 2011, à l'issue de laquelle, par une proposition de rectification du 29 juin 2012, l'administration fiscale lui a notifié, en particulier, des rehaussements de son résultat imposable au titre des exercices 2008, 2009 et 2010, à l'origine de cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés assorties des intérêts de retard et de la majoration pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 du code général des impôts, ainsi que des cotisations supplémentaires de taxe sur les véhicules de société au titre de la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2011, assorties des intérêts de retard et de la majoration pour défaut de déclaration prévue à l'article 1728 de ce code. La SARL Flower relève appel du jugement du 5 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur le bien-fondé des rappels :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

S'agissant de la minoration de loyer consentie à M. A... :

2. En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Il appartient, en règle générale, à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal.

3. Il résulte de l'instruction que la villa L'Arbousière, maison de standing de 650 m² avec piscine située à Porto-Vecchio, est proposée à la location saisonnière accompagnée de différents services tels que la mise à disposition de personnel de maison, d'un véhicule et, le cas échéant et sur option, d'un bateau de plaisance. L'administration a constaté que la villa avait été louée par la SARL Flower à son gérant, M. A..., du 25 juillet au 8 août 2009 et du 9 août au 15 août 2010 soit en très haute saison pour un tarif journalier deux à trois fois inférieur à celui facturé aux autres clients sur la même période. Si pour justifier la différence entre le tarif appliqué à son gérant et celui des autres clients, la SARL Flower fait valoir que M. A... réalise des prestations de gestion lors de ses séjours à la villa, elle ne l'établit pas notamment par la production d'une attestation peu circonstanciée d'un locataire à l'été 2008 au demeurant à une période où M. A... n'occupait pas la villa. La société requérante ne peut, pour contester le montant de la rectification opérée, se référer aux conditions de la location consentie à la société Ken Club du 20 juin au 8 juillet 2008 soit avant la très haute-saison selon le calendrier pratiqué par cette société, ni faire état de réductions sur les tarifs pratiqués alors que le vérificateur a pris en compte les tarifs effectivement facturés aux clients. Elle ne peut davantage utilement reprocher au vérificateur de ne pas avoir pris en compte des termes de comparaison concernant les loyers pratiqués en Corse au titre de la période vérifiée, qui sont sans rapport avec son activité. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'absence d'intérêt pour l'activité de la société requérante de la minoration du loyer consentie à son gérant. Par suite, c'est à bon droit qu'elle a réintégré dans les résultats de la société la fraction des produits abandonnés correspondant à un tarif rectifié à 1 050 euros la journée soit 8 700 euros et

2 300 euros au titre respectivement des exercices clos en 2009 et 2010.

S'agissant de la déduction des charges afférentes au bateau de plaisance :

4. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " (...) 4. Qu'elles soient supportées directement par l'entreprise ou sous forme d'allocations forfaitaires ou de remboursements de frais, sont exclues des charges déductibles pour l'établissement de l'impôt, d'une part, les dépenses et charges de toute nature ayant trait à l'exercice de la chasse ainsi qu'à l'exercice non professionnel de la pêche et, d'autre part, les charges, à l'exception de celles ayant un caractère social, résultant de l'achat, de la location ou de toute autre opération faite en vue d'obtenir la disposition de résidences de plaisance ou d'agrément, ainsi que de l'entretien de ces résidences ; les dépenses et charges ainsi définies comprennent notamment les amortissements. / Sauf justifications, les dispositions du premier alinéa sont applicables : (...) / c) Aux dépenses de toute nature résultant de l'achat, de la location ou de toute autre opération faite en vue d'obtenir la disposition de yachts ou de bateaux de plaisance à voile ou à moteur ainsi que de leur entretien ; les amortissements sont regardés comme faisant partie de ces dépenses. (...) ".

5. Les dispositions précitées du 4 de l'article 39 du code général des impôts visent les charges qu'expose une entreprise, fût-ce dans le cadre d'une gestion normale, du fait qu'elle dispose d'une résidence ayant vocation de plaisance ou d'agrément, à laquelle elle conserve ce caractère, et dont elle ne fait pas une exploitation lucrative spécifique.

6. La SARL Flower est propriétaire d'un bateau de plaisance, dénommé Flower II, qu'elle a acquis au mois d'août 2008 dans le cadre d'un contrat de crédit-bail au prix de 445 442 euros. Pour réintégrer au bénéfice imposable de la société au titre des exercices clos de 2008 à 2010, sur le fondement des dispositions du 4 de l'article 39 du code général des impôts, la somme correspondant aux dépenses, charges et amortissements relatifs au bateau Flower II, l'administration fiscale a constaté une absence d'exploitation commerciale et de réalisation de recettes. Si pour contester le rejet de ces charges, la société requérante fait valoir que ce bateau a été mis à la disposition des locataires de cette villa dans le cadre de son activité commerciale, il n'en demeure pas moins, d'une part, que la location du bateau, qui est soumise à un tarif spécifique en sus de la location de la villa, n'a donné lieu à aucune facturation spécifique sur la période vérifiée et, d'autre part, que ce bateau n'a totalisé que

47 heures d'utilisation, pour une grande partie réalisées par son gérant lui-même. Dans ces conditions, en l'absence d'exploitation lucrative établie, la SARL Flower ne justifie pas du bien-fondé de l'inscription en charges déductibles de son résultat des divers frais exposés pour ce bateau. Elle n'est, par suite, pas fondée à en contester la réintégration dans son résultat imposable.

S'agissant les pénalités pour manquement délibéré :

7. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".

8. Il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, le moyen tiré de ce que les majorations de 40 % pour manquement délibéré appliquées en ce qui concerne les chefs de redressement susvisés ne sont pas justifiées.

En ce qui concerne la taxe sur les véhicules de société :

9. Il résulte des dispositions de l'article 1010 du code général des impôts que les sociétés sont soumises à une taxe annuelle à raison des véhicules de tourisme qu'elles utilisent en France, quel que soit l'Etat dans lequel ils sont immatriculés, ou qu'elles possèdent et qui sont immatriculés en France. Par suite, l'administration est tenue d'assujettir tous les véhicules qui remplissent l'un des critères alternatifs d'assujettissement ainsi définis, à la seule exception des véhicules exclusivement destinés à l'une des trois activités limitativement énumérées au quatrième alinéa de l'article 1010 du code général des impôts, au nombre desquelles figure la location de courte durée, à la condition que cette activité corresponde à l'activité normale de la société propriétaire.

10. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération.

11. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a estimé que la SARL Flower était soumise à la taxe sur les véhicules de société au titre de la période du 1err octobre 2010 au 30 septembre 2011 à raison d'un véhicule immatriculé dans la catégorie des voitures particulières qu'elle met à la disposition des locataires de la villa L'Arbousière. Il n'est pas sérieusement contesté que ce véhicule est également utilisé toute l'année par le personnel de gardiennage et d'entretien de la villa. N'étant pas exclusivement affecté à la location au sens des dispositions précitées de l'article 1010 du code général des impôts, il entre ainsi dans le champ de l'assujettissement à la taxe sur les véhicules de société.

12. Il résulte de ce qui précède que la SARL Flower n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais liés à l'instance doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Flower est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Flower et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2023.

Le rapporteur,

A. B...

La présidente,

I. Perrot

La greffière,

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 21NT036922


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NT03692
Date de la décision : 31/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : CABINET GUELOT BARANEZ et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-03-31;21nt03692 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award