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17/02/2023 | FRANCE | N°21NT03649

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 17 février 2023, 21NT03649


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 26 février 2019 par lequel le maire de la commune de ... a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont elle a souffert et de ses congés pour maladie du 12 avril 2018 au 29 février 2019, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ou, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale sur l'imputabilité au service de cette pathologie.

Par un ju

gement n° 1902404 du 22 octobre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 26 février 2019 par lequel le maire de la commune de ... a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont elle a souffert et de ses congés pour maladie du 12 avril 2018 au 29 février 2019, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ou, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale sur l'imputabilité au service de cette pathologie.

Par un jugement n° 1902404 du 22 octobre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 décembre 2021, Mme C..., représentée par

Me Matel, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du

22 octobre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 février 2019 du maire de la commune de ... et la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale afin de déterminer notamment si la maladie contractée pour la période allant du 12 avril 2018 au 29 avril 2019 présente un lien direct et certain avec les conditions d'exercice de ses fonctions au sein de la commune ;

4°) de mettre à la charge de la commune de ... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les décisions contestées sont entachées d'une erreur d'appréciation, s'agissant de l'imputabilité au service de l'affection dont elle a souffert et qui a entraîné sa mise en congé pour maladie du 12 avril 2018 au 29 février 2019 ;

- à titre subsidiaire, dans le cas où la cour s'estimerait insuffisamment éclairée, une expertise devra être ordonnée avant-dire-droit sur le fondement de l'article R. 621-1 du code de justice administrative afin de déterminer l'imputabilité au service de sa maladie.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 février 2022, la commune de ..., représentée par Me Lahalle, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme C... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés ;

- si la cour ordonnait une expertise médicale, il conviendrait de demander à l'expert désigné de se prononcer sur la part d'imputabilité des symptômes de Mme C... qui résulteraient de l'exercice de ses fonctions au sein de la commune de ... et sur celle des symptômes qui sont imputables à l'exercice de ses fonctions au sein du centre communal d'action sociale de la commune.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,

- et les observations de Me Cazo, représentant la commune de ....

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... C..., née le 26 novembre 1975, a été recrutée en 2005 par la commune de ... pour y exercer les fonctions d'agent administratif de 2ème classe au sein du service enfance-jeunesse de la commune et au sein du centre communal d'action sociale (CCAS). Le 12 avril 2018, Mme C... a été placée en congé pour maladie pour une durée de quinze jours en raison d'un syndrome anxio-dépressif réactionnel. Ces congés pour maladie ont été renouvelés à plusieurs reprises jusqu'au 29 février 2019. Mme C... a demandé à la commune de reconnaître l'imputabilité au service de ces arrêts de travail. Le 24 janvier 2019, la commission de réforme a rendu un avis favorable sur cette demande. Par un arrêté du 26 février 2019, le maire de ... a toutefois refusé de reconnaître l'imputabilité au service de ces arrêts de travail. Mme C... a présenté un recours gracieux contre cet arrêté, qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet. Celle-ci a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler cet arrêté et cette décision. Par un jugement du 22 octobre 2021, le tribunal a rejeté ces demandes. Mme C... relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".

3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduise à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

4. Mme C... exerçait, lors qu'elle a contracté le syndrome anxio-dépressif en litige, des fonctions au sein des services de la commune de ... et de son CCAS, en étant plus particulièrement chargée du service " enfance-jeunesse ". Dans son rapport médical du 16 avril 2018, le médecin de prévention a estimé que ce syndrome s'était développé en réaction aux conditions de travail de l'intéressée et a relaté les déclarations de celles-ci concernant le manque d'organisation des services, le fait qu'elle était, selon elle, laissée en autogestion, surchargée de travail, ce qui l'a conduite à douter de ses compétences. De même, le Dr A... médecin psychiatre a considéré, dans son rapport du 3 décembre 2018, dont la commission de réforme a suivi les conclusions, que Mme C... présentait une réaction dépressive liée au travail, pouvant évoquer une maladie professionnelle. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier, et notamment du second rapport, que Mme C... s'est vu refuser en octobre 2017 une revalorisation salariale, puis plus d'un mois après, la prise en charge d'un bilan de compétence, ces pièces ne permettent pas d'établir que les conditions de travail de la requérante auraient été de nature à entraîner une dépression réactionnelle, l'existence d'une surcharge de travail ou d'une désorganisation des services en cause n'étant pas démontrée par les seules déclarations de celle-ci aux médecins qui l'ont examinée. De plus, le médecin psychiatre, mandaté par la commune de ... pour examiner Mme C... dans le cadre d'une contre-expertise, a conclu à une absence de lien direct et certain entre les pathologies anxio-dépressives en cause et l'exercice des fonctions, dès lors que ses tâches et leur évolution ne paraissaient pas en cause par elles-mêmes. Il a, par ailleurs, relevé que la personnalité fragile de la requérante paraissait bien davantage avoir été responsable de sa pathologie en entraînant des difficultés d'adaptation et de tolérance au stress. De même, dans son rapport du 10 juillet 2018, le Dr B... avait conclu à une absence de lien direct de la pathologie de Mme C... avec son activité professionnelle. Dans ces conditions, l'affection anxio-dépressive de Mme C... ne peut être regardée comme ayant été causée par l'exercice de ses fonctions ou par ses conditions de travail. Par suite, la commune n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en refusant de reconnaître la pathologie de l'intéressée comme imputable au service.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de ..., qui n'est pas la partie perdante à l'instance, verse à

Mme C... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter la demande présentée par la commune de ... au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de ... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... et à la commune de ....

Délibéré après l'audience du 2 février 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président de chambre,

- Mme Lellouch, première conseillère,

- M. Catroux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 février 2023.

Le rapporteur

X. CatrouxLe président

D. Salvi

Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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No 21NT03649


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT03649
Date de la décision : 17/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. Xavier CATROUX
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : MATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-02-17;21nt03649 ?
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