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23/12/2022 | FRANCE | N°22NT00219

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 23 décembre 2022, 22NT00219


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 18 août 2020 par lequel le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination vers lequel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré.

Par un jugement n° 2009533 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devan

t la cour :

Par une requête enregistrée le 24 janvier 2022 M. B..., représenté par Me Ifrah...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 18 août 2020 par lequel le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination vers lequel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré.

Par un jugement n° 2009533 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 janvier 2022 M. B..., représenté par Me Ifrah, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 août 2020 du préfet de la Sarthe ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges n'ont pas répondu à tous les moyens soulevés à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

sur le refus de certificat de résidence :

- le signataire de la décision n'était pas compétent ;

- la décision n'est pas suffisamment motivée ;

- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie ;

- la décision est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de faire usage de son pouvoir de régularisation ;

- le refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

sur l'obligation de quitter le territoire français :

- le signataire de la décision n'était pas compétent ;

- la décision n'est pas suffisamment motivée ;

- l'annulation du refus de titre de séjour entraîne, par voie de conséquence, l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et cette dernière a ainsi été prise en méconnaissance du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

sur la décision fixant le pays de destination :

- l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français entraîne, par voie de conséquence, l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi ;

- le signataire de la décision n'était pas compétent ;

- la décision n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 mai 2022 le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en remet au jugement contesté et à ses écritures de première instance.

Par une décision du 9 mai 2022, la présidente du bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande de M. B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 19 août 1983, a déclaré être entré irrégulièrement en France en novembre 2015 ou en mars 2016. Par l'arrêté contesté du 18 août 2020, le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination vers lequel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré. M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 16 décembre 2021, le tribunal a rejeté sa demande. M. B... fait appel de ce jugement.

Sur le refus de certificat de résidence :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., entré en France en 2016, s'est marié le 29 décembre 2018 avec une ressortissante algérienne titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 4 janvier 2022, au demeurant renouvelée postérieurement à l'arrêté contesté, et qui est salariée dans une entreprise de transports. Un enfant est né de cette union le 19 janvier 2020, le jeune A... qui est porteur d'une trisomie 21 et fait l'objet à ce titre d'un suivi médical par un cardiologue et bénéficie d'un service d'éducation spécialisé et de soins à domicile (SESSAD). Le préfet ne conteste pas la réalité de cette vie familiale en se bornant à indiquer, dans son arrêté, que l'épouse de l'intéressé pourra faire une demande de regroupement familial. Ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce, le moyen tiré de ce que la décision contestée a été prise en méconnaissance des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être accueilli.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par le requérant, que la décision refusant à M. B... la délivrance d'un certificat de résidence algérien est illégale. Cette illégalité est de nature à en entraîner l'annulation, par voie de conséquence, de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination. M. B... est, dès lors, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

5. Le présent arrêt implique, eu égard au motif qui le fonde, que le préfet de la Sarthe délivre à M. B... un certificat de résidence sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et, dans cette attente, de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au profit de M. B..., sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2009533 du 16 décembre 2021 du tribunal administratif de Nantes et l'arrêté du 18 août 2020 du préfet de la Sarthe refusant la délivrance à M. B... d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Sarthe de délivrer à M. B... un certificat de résidence sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et, dans cette attente, de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente,

- M. Penhoat, premier conseiller,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 décembre 2022.

La rapporteure

P. C...

La présidente

I. PerrotLa greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT00219


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00219
Date de la décision : 23/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : SCP GALLOT LAVALLEE IFRAH BEGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-12-23;22nt00219 ?
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