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16/12/2022 | FRANCE | N°19NT04325

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 16 décembre 2022, 19NT04325


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'établissement public de santé mentale (EPSM) de F... à lui verser diverses sommes en réparation, d'une part, de la violation du secret médical dont il estime avoir été victime et, d'autre part, de ses conditions d'hospitalisation au sein de cet établissement.

Par un jugement n° 1603473 du 5 septembre 2019, le tribunal administratif de Rennes a condamné l'EPSM de F... à lui verser la somme de 15 000 euros.

Procédure

devant la cour :

Par un arrêt avant dire droit du 21 mai 2021, la cour administrative...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'établissement public de santé mentale (EPSM) de F... à lui verser diverses sommes en réparation, d'une part, de la violation du secret médical dont il estime avoir été victime et, d'autre part, de ses conditions d'hospitalisation au sein de cet établissement.

Par un jugement n° 1603473 du 5 septembre 2019, le tribunal administratif de Rennes a condamné l'EPSM de F... à lui verser la somme de 15 000 euros.

Procédure devant la cour :

Par un arrêt avant dire droit du 21 mai 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a ordonné, avant de statuer sur la requête de l'EPSM de F... et les conclusions d'appel incident de M. B..., une expertise, confiée à un médecin-psychiatre, ayant pour mission d'indiquer à la cour si le principe et la durée de la mesure d'isolement prise à l'encontre de M. B... étaient justifiés par son état de santé ou ses traitements et d'éclairer, dans la mesure du possible, la cour sur les conditions matérielles de cet isolement.

Par une ordonnance du 27 mai 2021, le président de la cour administrative d'appel de Nantes a désigné un médecin psychiatre en qualité d'expert.

Le rapport d'expertise a été enregistré le 8 juillet 2022 au greffe de la cour.

Par un mémoire, enregistré le 10 août 2022, M. D... B..., représenté par Me Dubourg, conclut :

1°) au rejet de la requête de l'EPSM de F... ;

2°) par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement en ce qu'il ne fait pas droit à l'intégralité de ses conclusions indemnitaires ;

3°) à la condamnation de l'EPSM de F... à lui verser une somme de 100 000 euros en réparation des préjudices résultant de ses conditions d'hospitalisation et de 155 000 euros en réparation de ceux résultant de la violation du secret médical ; subsidiairement, si la responsabilité de l'EPSM n'était pas engagée à raison de la violation du secret médical, de lui verser cette même somme de 155 000 euros au titre de la tardiveté de l'action de l'EPSM ;

4°) à ce qu'il soit mis à la charge de l'EPSM en faveur de son conseil une somme de 2 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'expertise judiciaire confirme que les mesures d'isolement prises à son encontre pendant plus de deux ans n'étaient pas justifiées et que les conditions de son isolement ne répondaient pas aux exigences de la réglementation en vigueur et qu'elles devaient s'analyser en de la maltraitance ;

- l'expertise révèle en outre un défaut de surveillance médicale et psychologique et un défaut d'information de M. B... des choix médicaux ;

- l'expert s'interroge aussi sur la pertinence du traitement ;

- ces éléments nouveaux révélés par l'expertise justifient une indemnisation plus importante à hauteur de 100 000 euros ;

- l'expert retient en outre une atteinte au secret médical et au secret judiciaire, dès lors que les documents adressés au préfet ne devaient pas porter de diagnostic mais être uniquement descriptifs ;

- l'atteinte au secret médical et le diagnostic incertain lui ont causé un préjudice moral qui doit être évalué à la somme de 155 000 euros ;

- les frais d'expertise doivent être mis à la charge définitive de l'EPSM de F....

Par un mémoire, enregistré le 11 août 2022, l'établissement public de santé mentale de F... maintient les conclusions de sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rennes et au rejet de la demande de M. B....

Il soutient que :

- la mesure d'isolement et son maintien étaient justifiés par la situation clinique complexe de M. B... ;

- les conclusions de la visite de certification de 2018 concluent aux bonnes pratiques d'isolement au sein de l'établissement ;

- pour conclure à des conditions indignes et malveillantes d'isolement, l'expert judiciaire se contente de procéder par affirmations dénuées de toute objectivité que le docteur C... a contestées point par point dans ses dires.

Par courrier du 16 novembre 2022, la cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, qu'elle était susceptible de relever d'office le moyen tiré de l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître des conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables des courriers adressés les 21 janvier 2009 et 15 avril 2009 au procureur de la République qui ont donné lieu à la réouverture de l'information judiciaire pour charges nouvelles, cette transmission n'étant pas détachable de la procédure judiciaire qui a finalement abouti à la condamnation de M. B... par la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine à une peine de 10 ans de réclusion criminelle, et en conséquence l'irrégularité du jugement attaqué pour ne pas avoir relevé l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître de cette partie des conclusions de la requête de M. B....

M. B... a présenté, le 21 novembre 2022, ses observations sur ce moyen d'ordre public.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 21 juillet 2022.

Vu :

- l'ordonnance du 12 juillet 2022, par laquelle le président de la cour a taxé les frais de l'expertise réalisée par le Dr A... à la somme de 2 880 euros ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code pénal ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,

- et les observations de Me Demailly, représentant l'établissement public de santé mentale de F..., et de Me Dubourg, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Dans la nuit du 7 au 8 décembre 1998, M. B... a volontairement donné la mort à son ancienne compagne. Par un arrêt du 23 février 2000, la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine a déclaré l'intéressé pénalement irresponsable en raison de ses troubles psychiatriques et a prononcé un non-lieu. A compter du 13 mars 2000, M. B... a fait l'objet d'une mesure d'hospitalisation d'office au sein de l'établissement public de santé mentale (EPSM) de

F.... Le procureur de la République de Vannes ayant été informé au début de l'année 2009, par les médecins de cet établissement, que leur patient n'était pas atteint du trouble psychiatrique retenu comme cause de son irresponsabilité pénale, l'information judiciaire a été rouverte le 28 avril 2009 pour charges nouvelles et M. B... a été mis en examen le 11 janvier 2010. Par un arrêt du 13 février 2015, la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine l'a condamné à dix ans de réclusion criminelle. Le 1er avril 2016, M. B... a présenté auprès de l'EPSM de F... une réclamation tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison des fautes commises par cet établissement, laquelle a été implicitement rejetée. M. B... a alors saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande indemnitaire. Par un jugement du 5 septembre 2019, le tribunal a condamné l'EPSM de F... à lui verser la somme totale de 15 000 euros. L'EPSM de F... relève appel de ce jugement. Par la voie de l'appel incident, M. B... demande la majoration de la somme qui lui a été allouée par les premiers juges.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En se bornant à soutenir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé sans identifier les carences qu'il entend dénoncer, l'EPSM de F... n'assortit pas son moyen des précisions suffisantes pour permettre au juge d'en apprécier le bien-fondé.

3. Sauf dispositions législatives contraires, la responsabilité qui peut incomber à l'Etat ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative. En revanche, celle-ci ne saurait connaître de demandes tendant à la réparation d'éventuelles conséquences dommageables d'actes non détachables de la procédure judiciaire.

4. Il résulte de l'instruction que par courriers des 21 janvier et 15 avril 2009, des médecins de l'EPSM de F... ont signalé au procureur de la République de Vannes que le trouble psychiatrique retenu comme cause de l'irresponsabilité pénale de M. B... n'était pas justifié. Sur la base de ces courriers, le procureur de la République a sollicité la réouverture de l'information judiciaire pour charges nouvelles et M. B... a finalement été condamné à une peine de dix ans de réclusion criminelle par la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine. Les courriers adressés les 21 janvier et 15 avril 2009 par les médecins de l'EPSM de F... au procureur de la République ne sont pas détachables de la procédure judiciaire qui a conduit à la condamnation de M. B.... Il s'ensuit que l'autorité judiciaire est seule compétente pour statuer sur les conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables de la violation du secret médical alléguée, matérialisée par la transmission au procureur de ces courriers. Il suit de là qu'en se prononçant sur la demande de M. B... tendant à la réparation de cette violation, le tribunal administratif de Rennes a entaché, dans cette mesure, son jugement d'irrégularité.

5. Il y a lieu, dès lors, d'annuler dans cette seule mesure le jugement attaqué, et, statuant par la voie de l'évocation, de rejeter les conclusions en réparation des conséquences dommageables de la violation du secret médical comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, puis, de statuer sur le surplus de la requête d'appel, par la voie de l'effet dévolutif.

Sur les conclusions en réparation des conséquences dommageables du retard de diagnostic :

6. Si M. B... soutient que le doute émis par les médecins de l'EPSM dès son arrivée au sein de cet établissement sur la pathologie qui avait amené l'autorité judiciaire à le déclarer pénalement irresponsable aurait dû conduire les praticiens de l'établissement à poser le diagnostic plus tôt, il résulte de l'instruction, en particulier du caractère divergent des différentes expertises psychiatriques réalisées, que les troubles de la personnalité présentés par l'intéressé étaient très complexes à appréhender et que ce n'est qu'en 2008, après une fugue de l'intéressé, peu de temps avant sa mise en chambre d'isolement, que les psychiatres de l'établissement de santé mentale ont sérieusement remis en cause ce diagnostic. Il s'ensuit que M. B... n'est pas fondé à soutenir que les praticiens de l'EPSM de F... auraient commis un retard de diagnostic fautif susceptible d'engager la responsabilité de cet établissement à son égard.

Sur les conclusions en réparation des conséquences dommageables de l'isolement de M. B... :

En ce qui concerne le principe de responsabilité :

7. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou à des traitements inhumains ou dégradants ". En vertu de l'article L. 3211-3 du code de la santé publique dans sa version applicable au moment de l'hospitalisation de M. B..., lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux est hospitalisée sans son consentement sur décision du représentant de l'Etat, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être limitées à celles nécessitées par son état de santé et la mise en œuvre de son traitement. En toutes circonstances, la dignité de la personne hospitalisée doit être respectée et sa réinsertion recherchée. Eu égard à la vulnérabilité des patients placés en chambre d'isolement et à leur situation d'entière dépendance vis à vis de l'administration hospitalière, il appartient à celle-ci de prendre les mesures propres à leur éviter tout traitement inhumain ou dégradant afin de garantir le respect effectif des exigences découlant des principes rappelés notamment par ces stipulations et dispositions.

8. D'une part, il est constant que, dans le cadre de l'hospitalisation d'office dont il a fait l'objet à compter du 13 mars 2000 à l'EPSM de F..., M. B... a été placé à l'isolement du 6 novembre 2008 jusqu'à son départ pour l'unité pour malades difficiles de l'établissement hospitalier de G... le 24 février 2009, puis, à son retour de cet établissement le 10 septembre 2009, jusqu'à sa sortie de l'EPSM de F... le 1er juillet 2011, soit pendant une durée cumulée de plus de deux ans. Si l'EPSM de F... justifie le placement et le maintien à l'isolement de l'intéressé par ses comportements déviants et transgressifs, à savoir une consommation régulière de produits stupéfiants, des fugues, des attitudes provocatrices, une instrumentalisation de la faiblesse de certains patients, la recherche de relations sexuelles avec des partenaires y compris vulnérables, et plus généralement des comportements de nature à présenter un danger pour lui-même et pour autrui, il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise judiciaire ordonnée avant dire droit mais également de l'expertise du 5 août 2019, que ni les troubles de la personnalité de M. B..., ni son comportement, ni enfin un motif médical ou thérapeutique, ne justifiaient son maintien en chambre d'isolement pendant une si longue période. A cet égard, l'expert judiciaire relève que le dossier médical de M. B... ne comportait de mai 2010 à avril 2011, que deux modèles d'appréciation de son état de santé, reproduits au mot près, et en déduit que le patient n'a pas bénéficié d'une surveillance médicale et psychologique, ni d'une évaluation quotidienne requise afin de permettre aux spécialistes de reconsidérer de manière régulière son maintien à l'isolement tout au long de cette période.

9. D'autre part, il résulte de l'instruction, en particulier de l'expertise judiciaire, que la chambre dans laquelle M. B... a été maintenu à l'isolement pendant une durée cumulée de deux ans était dépourvue de mobilier, en particulier d'un lit, d'une table et d'une chaise, et que M. B... dormait sur un matelas à même le sol, qu'il n'avait pas accès de manière constante à la partie sanitaire du local, ce qui le contraignait à utiliser un seau pour ses besoins naturels, qui restait plusieurs heures dans la chambre avant d'en être soustrait, que la pièce ne possédait pas d'interrupteur utilisable par son occupant qui dépendait du personnel soignant pour allumer ou éteindre la lumière, que la fenêtre était équipée d'un film de couleur jaune empêchant la vue vers l'extérieur, que pendant plusieurs mois, il n'a pu sortir à l'air libre que pour une durée de trente minutes, trois fois par semaine. Il est enfin constant que M. B... a passé toute la durée de son isolement en pyjama, y compris pendant ses sorties, soit pendant une durée cumulée de deux ans. L'expert affirme en conclusion de son rapport que les conditions d'isolement subies par M. B... pendant une durée cumulée de plus de deux ans présentaient un risque d'aggravation et de décompensation de son état psychique.

10. Le maintien injustifié de M. B... de manière continue pendant une durée cumulée de 725 jours, largement excessive, en chambre d'isolement au sein de l'EPSM de F... et les conditions matérielles rappelées au point précédent de cette mise à l'isolement, caractérisent un traitement dégradant portant atteinte à la dignité du patient prohibé tant par les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que par les dispositions de l'article L. 3211-3 du code de la santé publique. La responsabilité pour faute de l'EPSM de F... doit donc être engagée à ce titre.

En ce qui concerne l'évaluation des préjudices :

11. M. B... ne saurait être regardé comme s'étant lui-même placé dans une situation irrégulière qui justifierait d'exonérer l'EPSM de F... de sa responsabilité du seul fait qu'il a été hospitalisé d'office à la suite du crime qu'il a commis, et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction et n'est d'ailleurs pas allégué qu'il aurait simulé une pathologie mentale pour échapper à une condamnation pénale.

12. M. B... a subi un lourd préjudice moral et d'importants troubles dans ces conditions d'existence résultant non seulement de son maintien injustifié à l'isolement pendant une période cumulée de plus de deux ans mais également des conditions indignes et dégradantes dans lesquelles il a été maintenu à l'isolement au sein de l'EPSM de F..., dont il sera fait une équitable appréciation en les évaluant globalement à la somme de 35 000 euros.

13. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que l'EPSM de F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes l'a condamné à réparer les préjudices de M. B... résultant de son isolement au sein de l'établissement public et, d'autre part, que celui-ci est fondé à demander que l'indemnité qui lui a été allouée en première instance soit portée à 35 000 euros.

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

14. M. B... a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 35 000 euros à compter du 4 avril 2016, date de réception de sa réclamation préalable par l'EPSM de

F.... La capitalisation des intérêts ayant été demandée le 2 août 2016, date d'enregistrement par le greffe du tribunal du recours de M. B..., les intérêts échus à compter du 4 avril 2017, à compter de laquelle était due une année d'intérêts, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.

Sur les frais liés à l'instance :

15. En application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 2 880 euros par l'ordonnance visée ci-dessus sont, mis à la charge définitive de l'EPSM de F....

16. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'EPSM de F..., en faveur de Me Dubourg, avocate de M. B..., la somme de 1 500 euros dans les conditions fixées par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 5 septembre 2019 est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions indemnitaires de M. B... fondées sur la violation du secret médical.

Article 2 : Les conclusions indemnitaires de M. B... fondées sur la violation du secret médical sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de l'EPSM de F... est rejeté.

Article 4 : L'établissement public de santé mentale de F... versera à M. B... une somme de 35 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 avril 2006. Les intérêts échus le 4 avril 2017 seront capitalisés à cette date puis à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 5 : Les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 2 880 euros sont mis à la charge définitive de l'établissement public de santé mentale de F....

Article 6 : L'établissement public de santé mentale de F... versera à Me Dubourg, avocate de M. B... une somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi de 1991 de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à l'établissement public de santé mentale de F... et à M. D... B....

Une copie en sera adressée, pour information, à l'expert.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- Mme Lellouch, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 décembre 2022.

La rapporteure,

J. E...

Le président,

D. Salvi

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT04325


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT04325
Date de la décision : 16/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - RESPONSABILITÉ - RESPONSABILITÉ EXTRA-CONTRACTUELLE - COMPÉTENCE JUDICIAIRE - COURRIERS ADRESSÉS À L'AUTORITÉ JUDICIAIRE PAR DES MÉDECINS DE L'ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ MENTALE - DANS LEQUEL EST HOSPITALISÉ D'OFFICE L'AUTEUR D'UN MEURTRE DÉCLARÉ PÉNALEMENT IRRESPONSABLE - AFIN DE REMETTRE EN CAUSE LE TROUBLE PSYCHIATRIQUE RETENU COMME CAUSE DE L'IRRESPONSABILITÉ PÉNALE - JURIDICTIONS JUDICIAIRES COMPÉTENTES POUR CONNAÎTRE DE L'ACTION INDEMNITAIRE TENDANT À LA RÉPARATION DES DOMMAGES RÉSULTANT DE LA VIOLATION ALLÉGUÉE DU SECRET MÉDICAL - MATÉRIALISÉE PAR LA TRANSMISSION DE CES COURRIERS - EXISTENCE - DÈS LORS QUE CES COURRIERS QUI ONT DONNÉ LIEU À LA RÉOUVERTURE DE L'INFORMATION JUDICIAIRE NE SONT PAS DÉTACHABLES DE LA PROCÉDURE JUDICIAIRE AYANT ABOUTI À LA CONDAMNATION DE L'INTÉRESSÉ.

17-03-02-05-01-02 Sauf dispositions législatives contraires, la responsabilité qui peut incomber à l'Etat ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative.......En revanche, celle-ci ne saurait connaître de demandes tendant à la réparation d'éventuelles conséquences dommageables d'un courrier adressé au procureur de la République ayant donné lieu à la réouverture de l'information judiciaire pour charges nouvelles ayant abouti à la condamnation de l'intéressé. ......En l'espèce, courriers adressés au parquet par des médecins de l'établissement de santé mentale dans lequel est hospitalisé d'office l'auteur d'un meurtre ayant initialement bénéficié d'un non-lieu au motif qu'il était pénalement irresponsable, afin de signaler à l'autorité judiciaire que le trouble psychiatrique retenu comme cause de l'irresponsabilité pénale n'était pas justifié. Ces courriers, qui ont donné lieu à la réouverture de l'information judiciaire pour charges nouvelles, ne sauraient être regardés comme détachables de la procédure judiciaire ayant finalement abouti à la condamnation de l'intéressé à une peine de réclusion criminelle. Il s'ensuit que l'autorité judiciaire est seule compétente pour statuer sur les conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables de la violation du secret médical alléguée, matérialisée par la transmission au procureur de ces courriers.

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - PROBLÈMES PARTICULIERS POSÉS PAR CERTAINES CATÉGORIES DE SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC JUDICIAIRE - FONCTIONNEMENT - COURRIERS ADRESSÉS À L'AUTORITÉ JUDICIAIRE PAR DES MÉDECINS DE L'ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ MENTALE - DANS LEQUEL EST HOSPITALISÉ D'OFFICE L'AUTEUR D'UN MEURTRE DÉCLARÉ PÉNALEMENT IRRESPONSABLE - AFIN DE REMETTRE EN CAUSE LE TROUBLE PSYCHIATRIQUE RETENU COMME CAUSE DE L'IRRESPONSABILITÉ PÉNALE - JURIDICTIONS JUDICIAIRES COMPÉTENTES POUR CONNAÎTRE DE L'ACTION INDEMNITAIRE TENDANT À LA RÉPARATION DES DOMMAGES RÉSULTANT DE LA VIOLATION ALLÉGUÉE DU SECRET MÉDICAL - MATÉRIALISÉE PAR LA TRANSMISSION DE CES COURRIERS - EXISTENCE - DÈS LORS QUE CES COURRIERS QUI ONT DONNÉ LIEU À LA RÉOUVERTURE DE L'INFORMATION JUDICIAIRE NE SONT PAS DÉTACHABLES DE LA PROCÉDURE JUDICIAIRE AYANT ABOUTI À LA CONDAMNATION DE L'INTÉRESSÉ.

17-03-02-07-05-02 Sauf dispositions législatives contraires, la responsabilité qui peut incomber à l'Etat ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative.......En revanche, celle-ci ne saurait connaître de demandes tendant à la réparation d'éventuelles conséquences dommageables d'un courrier adressé au procureur de la République ayant donné lieu à la réouverture de l'information judiciaire pour charges nouvelles ayant abouti à la condamnation de l'intéressé. ......En l'espèce, courriers adressés au parquet par des médecins de l'établissement de santé mentale dans lequel est hospitalisé d'office l'auteur d'un meurtre ayant initialement bénéficié d'un non-lieu au motif qu'il était pénalement irresponsable, afin de signaler à l'autorité judiciaire que le trouble psychiatrique retenu comme cause de l'irresponsabilité pénale n'était pas justifié. Ces courriers, qui ont donné lieu à la réouverture de l'information judiciaire pour charges nouvelles, ne sauraient être regardés comme détachables de la procédure judiciaire ayant finalement abouti à la condamnation de l'intéressé à une peine de réclusion criminelle. Il s'ensuit que l'autorité judiciaire est seule compétente pour statuer sur les conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables de la violation du secret médical alléguée, matérialisée par la transmission au procureur de ces courriers.......Rappr. s'agissant d'une action tendant à la réparation des dommages résultant d'un avis donné au parquet en application de l'article 40 du code de procédure pénale, TC, 8 décembre 2014, M. Bedoian c/ Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, n° 3974, p. 475 ; s'agissant d'un signalement du président du conseil général au juge des tutelles, TC, 6 juin 2011, Brugia c/ Département de l'Essonne, n° 3795, p. 688 ; s'agissant du litige relatif à l'indemnisation du préjudice né de l'établissement ou de la transmission à l'autorité judiciaire du procès-verbal d'infraction dressé en application de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme, TC, 11 octobre 2021, M. Kruplewicz c/ l'État, n° 4220, à mentionner aux Tables.


Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Eric BERTHON
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : SARL LE PRADO GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-12-16;19nt04325 ?
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