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09/12/2022 | FRANCE | N°21NT02980

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 09 décembre 2022, 21NT02980


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2020 du préfet de la Sarthe portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination.

Par un jugement n° 2007907 du 22 septembre 2021 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 octobre 2021 M. A... B..., représentée par Me Ifr

ah, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 juillet 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2020 du préfet de la Sarthe portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination.

Par un jugement n° 2007907 du 22 septembre 2021 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 octobre 2021 M. A... B..., représentée par Me Ifrah, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2020 du préfet de la Sarthe ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision de refus de séjour ;

- le jugement n'a pas répondu à plusieurs de ses moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant refus de titre de séjour a été signée par une autorité incompétente ; elle n'est pas suffisamment motivée ; elle méconnaît son droit d'être entendu, garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; elle est entachée d'erreur de fait et de droit au regard des articles L. 313-7 et L. 313-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été signée par une autorité incompétente ; elle n'est pas suffisamment motivée ; elle méconnaît son droit d'être entendu, garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre ; elle est entachée d'erreur de fait et de droit au regard des articles L. 313-7 et L. 313-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est entachée des mêmes vices de légalité que ceux soulevés à l'encontre des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; elle n'est pas suffisamment motivée ; elle n'a pas été précédée d'un examen de sa situation ; elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2022 le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... B... ne sont pas fondés.

Par une décision du 14 mars 2022, la présidente du bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A... B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Penhoat, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., né le 7 juin 1994, de nationalité marocaine, est entré régulièrement en France muni d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant " valable du 20 août 2017 au 20 août 2018 et a bénéficié d'une carte de séjour en cette qualité jusqu'au 20 août 2019. Il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 21 juillet 2020, le préfet de la Sarthe a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le Maroc comme pays de destination. M. A... B... relève appel du jugement du 22 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, le jugement attaqué répond de manière suffisante au moyen invoqué devant les premiers juges par M. A... B... tiré du défaut de motivation de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement sur ce point doit être écarté.

3. En second lieu, il ressort des énonciations du jugement attaqué que les premiers juges n'ont pas répondu aux moyens également dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, et qui n'étaient pas inopérants, tirés de ce que cette décision a été signée par une autorité incompétente, n'est pas suffisamment motivée, a méconnu son droit d'être entendu, garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, est entachée d'une erreur de fait et de droit au regard des dispositions des articles L. 313-7 et L. 313-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, M. A... B... est fondé à soutenir que le jugement attaqué, entaché d'une omission de réponse à des moyens en tant qu'il porte sur la décision portant obligation de quitter le territoire français, est, pour ce motif, irrégulier et doit, dans cette mesure, être annulé.

4. Il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions de M. A... B... dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français et par la voie de l'effet dévolutif en ce qui concerne les autres décisions contenues dans l'arrêté du 21 juillet 2020 du préfet de la Sarthe.

Sur le moyen commun :

5. L'arrêté contesté a été signé par M. D... Baron, secrétaire général de la préfecture de la Sarthe, qui disposait d'une délégation consentie par un arrêté du préfet de ce département du 4 mai 2020 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Sarthe, à l'effet notamment de signer " tous arrêtés, décisions, saisines juridictionnelles, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Sarthe ", à l'exception de certains actes limitativement énumérés au nombre desquels ne figurent pas les décisions de refus de titre de séjour, d'obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait.

Sur la légalité de la décision refusant le renouvellement d'un titre de séjour :

6. Il convient d'écarter, par adoption des motifs retenus par le premier juge, les moyens tirés de ce que cette décision n'est pas suffisamment motivée, a méconnu son droit d'être entendu garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, est entachée d'une erreur de fait et de droit au regard des dispositions des articles L. 313-7 et L. 313-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, moyens que M. A... B... réitère en appel sans apporter d'élément nouveau.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour n'étant pas annulée, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.

8. En deuxième lieu, en application des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et d'asile, dans sa rédaction applicable, la décision portant obligation de quitter le territoire français, prise sur le fondement des dispositions du 3° du I de cet article L. 511-1, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision de refus d'un titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance motivation de cette décision doit être écarté.

9. En troisième lieu, le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. A l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour.

10. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... B... aurait demandé un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il aurait été empêché de s'exprimer avant que ne soit pris l'arrêté contesté. L'intéressé n'allègue pas qu'il aurait tenté en vain de porter à la connaissance de l'administration des éléments pertinents relatifs à sa situation, antérieurement à la mesure d'éloignement. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que M. A... B... a été privé du droit d'être entendu, résultant du principe général du droit de l'Union européenne tel qu'il est notamment exprimé au 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté.

11. En quatrième lieu, le requérant ne peut utilement, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, se prévaloir directement de la méconnaissance des articles L. 313-7 et L. 313-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

12. En cinquième lieu, M. A... B..., célibataire et sans enfant, n'établit pas l'existence de liens personnels ou familiaux en France d'une ancienneté et d'une stabilité telles que le refus de séjour litigieux porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Par suite, les moyens tirés de ce que l'arrêté litigieux méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle doivent être écartés.

13. En sixième et dernier lieu, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre au tribunal d'en apprécier le bien-fondé et doit en tout état de cause être écarté.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

14. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence.

15. En deuxième lieu, si M. A... B... soutient que la décision fixant le pays de destination est entachée des " mêmes vices ", que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, ces moyens, qui ne sont pas assortis des précisions suffisantes permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé ou la portée, doivent être écartés.

16. En troisième lieu, la décision en litige mentionne avec une précision suffisante les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré d'un défaut de motivation doit être écarté.

17. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée serait entachée d'un défaut d'examen de la situation particulière du requérant.

18. En cinquième lieu, pour les motifs évoqués au point 12, M. A... B... n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision fixant les pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

19. Il résulte de ce qui précède que M. A... B... n'est fondé ni à demander l'annulation de l'arrêté du 21 juillet 2020 du préfet de la Sarthe en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions refusant le renouvellement d'un titre de séjour et fixant le pays de destination contenues dans le même arrêté. Par voie de conséquence, les conclusions de l'intéressé à fin d'injonction sous astreinte doivent également être rejetées, et il n'y a pas lieu en l'espèce de faire droit aux conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2007907 du 22 septembre 2021 du tribunal administratif de Nantes est annulé en ce qu'il statue sur les conclusions de la demande de M. A... B... tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté du 21 juillet 2020 du préfet de la Sarthe.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Nantes par M. A... B..., en tant qu'elle tend à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté du 21 juillet 2020 du préfet de la Sarthe, et le surplus des conclusions de la requête de celui-ci sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 décembre 2022.

Le rapporteur

A. PenhoatLa présidente

I. Perrot

La greffière

S. Pierodé

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21NT029802

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NT02980
Date de la décision : 09/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : SCP GALLOT LAVALLEE IFRAH BEGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-12-09;21nt02980 ?
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