Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 17 août 2021 par lequel le préfet du Finistère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2106188 du 21 février 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 juillet 2022, M. B... A..., représenté par Me Tremouilles, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 21 février 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Finistère du 17 août 2021 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de réexaminer sa demande et de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préfet a commis une erreur d'appréciation et une erreur de fait en remettant en cause l'authenticité des actes d'état civil qu'il a produits ;
- il a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 août 2022, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mai 2022.
Vu les pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., dont les documents d'état civil et d'identité produits indiquent qu'il est de nationalité malienne né le 31 décembre 1999, déclare être entré en France en août 2016. Sa minorité ayant été remise en cause par le département du Finistère, il a été mis fin à sa prise en charge provisoire par les services de l'aide sociale à l'enfance dès le 19 janvier 2017. Par courrier du 31 janvier 2021, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14, repris à l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A... relève appel du jugement du 21 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 août 2021 du préfet du Finistère portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi.
2. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ".
3. Le préfet du Finistère a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A... sur le fondement des dispositions citées au point précédent en lui opposant, d'une part, ses fausses déclarations quant à son identité et le caractère falsifié des actes produits auprès de l'administration et, d'autre part, le fait que sa situation et son parcours ne révélaient pas de motif exceptionnel ou de considérations humanitaires justifiant son admission exceptionnelle au séjour.
4. D'une part, l'article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. L'article 47 du code civil dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents. Par ailleurs, il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le jugement produit aurait un caractère frauduleux.
5. Il ressort des pièces du dossier que les services experts en fraude documentaire et à l'identité de la direction centrale de la police aux frontières de la zone ouest ont relevé sur l'ensemble des documents d'état civil et d'identité produits par M. A... des anomalies de nature à remettre en cause l'authenticité de ces documents. Alors que l'intéressé n'a pas été en mesure de produire le jugement supplétif d'acte de naissance, dont il s'est borné à transmettre un extrait, l'expert en fraude documentaire a relevé dans un rapport établi le 11 mai 2021 diverses anomalies au regard du code des personnes de la famille malien des actes d'état civil produits, notamment les circonstances que l'extrait d'acte de naissance qui aurait été dressé suivant jugement supplétif comportait des incohérences relatives au centre d'état civil entre le timbre humide et l'en-tête de cet acte, qu'un autre extrait d'acte comportait des traces de grattage au niveau de la date de naissance de son titulaire, de son patronyme et de celui de ses parents et qu'enfin la carte d'identité nationale malienne transmise comportait des traces de falsification. M. A... ne conteste aucune des constatations relevées par l'expert en fraude documentaire et se borne à produire une carte consulaire ainsi qu'une attestation de demande de passeport établie par le consul général du Mali en France le 30 novembre 2021. Au regard de l'ensemble de ces éléments, le préfet du Finistère n'a commis ni erreur de fait ni erreur d'appréciation en remettant en cause l'authenticité des actes produits par le demandeur pour justifier de son identité et en en déduisant une fraude à l'état civil.
6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France au cours de l'année 2016 et qu'il s'y est maintenu sans avoir régularisé sa situation administrative. Eu égard à ce qui a été dit au point précédent, les réels efforts d'insertion qu'il a déployés sur le territoire français, qui lui ont permis d'obtenir un brevet d'études professionnel, un baccalauréat professionnel des métiers de l'électricité, et d'accomplir plusieurs stages dans ce domaine, comme ses perspectives d'insertion professionnelle en tant que technicien ascensoriste, ne permettent pas de considérer que le préfet du Finistère aurait commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant que sa situation ne révélait pas de motif exceptionnel ou de considérations humanitaires justifiant sa régularisation.
7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Si M. A... justifie de près de cinq années de présence en France à la date de l'arrêté attaqué, il résulte de ce qui a été dit qu'il est entré irrégulièrement en France et s'y est maintenu sans régulariser sa situation. Célibataire et sans charge de famille, il n'est pas inséré professionnellement compte tenu de sa situation irrégulière. Il ne justifie ni ne revendique aucune attache familiale sur le territoire français. Dans ces conditions, les attestations produites faisant unanimement état de sa motivation et de ses efforts d'insertion sociale ne suffisent pas à considérer qu'en refusant son admission exceptionnelle au séjour, le préfet du Finistère aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté.
9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que la demande présentée au titre des frais liés à l'instance doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie en sera adressée, pour information, au préfet du Finistère.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président,
- Mme Brisson, présidente-assesseure,
- Mme Lellouch, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 décembre 2022.
La rapporteure,
J. C...
Le président,
D. Salvi
La greffière,
A. Martin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT02185