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29/11/2022 | FRANCE | N°22NT02129

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 29 novembre 2022, 22NT02129


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer

des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rappor...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant afghan né le 24 avril 1998, est entré en France le 29 mars 2022. Sa demande d'asile a été enregistrée le 5 avril 2022 par les services de la préfecture de police de Paris. La consultation du système Eurodac a révélé que ses empreintes digitales avaient été relevées par les autorités bulgares et autrichiennes respectivement les 8 novembre 2021 et 24 mars 2022 lors de son entrée dans ces pays. Consécutivement à leur saisine le 29 avril 2022 sur le fondement du paragraphe 1 de l'article 13 du règlement (UE) n° 604/2013, les autorités autrichiennes ont refusé sa prise en charge le 5 mai 2022. Les autorités bulgares ont, quant à elles, expressément accepté de reprendre en charge l'intéressé. Par deux arrêtés du 30 mai 2022, le préfet de Maine-et-Loire a ordonné le transfert de M. C... aux autorités bulgares et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. C... a sollicité auprès du tribunal administratif de Nantes l'annulation de ces deux arrêtés. Par un jugement du 9 juin 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa requête. M. C... demande à la cour d'annuler ce jugement en tant seulement qu'il a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 30 mai 2022 du préfet de Maine-et-Loire décidant son transfert aux autorités bulgares.

En ce qui concerne l'arrêté de transfert :

2. En premier lieu, aux termes du 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

3. Par ailleurs, eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations.

4. M. C... fait état de l'existence de défaillances qui affecteraient les conditions d'accueil et de prise en charge des demandeurs d'asile en Bulgarie, en invoquant le risque que sa demande d'asile ne soit pas traitée dans ce pays et en soutenant que lors de son passage dans ce pays, il aurait été frappé et piétiné par les forces de police, dans le camp où il aurait été affecté puis à la frontière bulgare.

5. Aucun élément produit au débat ne permet de tenir pour établi que sa demande d'asile serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités bulgares dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que la Bulgarie est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. D'une part, M. C... n'établit pas, en citant des extraits de documents émanant d'organisations non gouvernementales, qu'il existerait à la date de l'arrêté litigieux des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs en Bulgarie. D'autre part, les photographies qu'il produit, où il présente des contusions au visage et une blessure au pied ne sont pas datées et l'unique certificat médical établi le 13 mai 2022 par un médecin du centre hospitalier de Cholet, ne permet pas davantage de dater ni de préciser les circonstances à l'origine de la blessure. Les pièces ainsi produites ne sont, dès lors, pas propres à corroborer les dires de M. C... sur les violences policières prétendument subies en Bulgarie, alors au demeurant qu'il a déclaré avoir traversé successivement le Pakistan, l'Iran, la Turquie, la Bulgarie, la Serbie, la Hongrie, l'Autriche et la Suisse. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il existait à la date de l'arrêté contesté des motifs sérieux et avérés de croire qu'en cas de transfert aux autorités bulgares, M. C... risquerait de subir des traitements contraires à l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Eu égard à ce qui vient d'être dit, le requérant ne démontre pas non plus qu'il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en Bulgarie. Faute d'établir ainsi qu'il serait exposé au risque de subir en Italie des traitements contraires aux dispositions des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ainsi que de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...)". La faculté laissée aux autorités françaises, par les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement précité, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

7. En se bornant à faire valoir qu'il est originaire de la région du Logar, particulièrement dangereuse en Afghanistan, qu'il a subi des atrocités lors de l'arrivée au pouvoir des talibans parce qu'il était policier et qu'il souffre d'avoir dû laisser femme et enfants dans son pays d'origine, M. C... ne démontre pas qu'il se trouverait dans une situation de vulnérabilité imposant d'instruire sa demande d'asile en France. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté de transfert contesté du 30 mai 2022 serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

8. Pour le surplus, M. C... se borne à reprendre devant le juge d'appel le même moyen que celui invoqué en première instance sans plus de précisions ou de justifications et sans l'assortir d'éléments nouveaux. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le premier juge et tirés de ce que l'arrêté du 30 mai 2022 décidant son transfert aux autorités bulgares ne méconnait pas les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mai 2022 décidant son transfert aux autorités bulgares. Par voie de conséquence doivent être rejetées les conclusions du requérant aux fins d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera adressée pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 novembre 2022.

Le rapporteur,

O. A...Le président,

O. GASPON

La greffière,

S.PIERODÉ

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°22NT02129002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02129
Date de la décision : 29/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : BEARNAIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-11-29;22nt02129 ?
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