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25/11/2022 | FRANCE | N°20NT01216

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 25 novembre 2022, 20NT01216


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt no 20NT01216 du 27 avril 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sursis à statuer, jusqu'à l'expiration d'un délai de six ou de dix mois à compter de la notification de l'arrêt, selon qu'il aura été fait usage de la procédure de consultation publique ou qu'il aura été organisé une enquête publique complémentaire, sur la demande de M. et Mme I... et autres tendant à l'annulation du jugement du 16 février 2017 du tribunal administratif de Nantes et à l'annu

lation de l'arrêté du 22 avril 2014 par lequel le préfet de la Mayenne ...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt no 20NT01216 du 27 avril 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sursis à statuer, jusqu'à l'expiration d'un délai de six ou de dix mois à compter de la notification de l'arrêt, selon qu'il aura été fait usage de la procédure de consultation publique ou qu'il aura été organisé une enquête publique complémentaire, sur la demande de M. et Mme I... et autres tendant à l'annulation du jugement du 16 février 2017 du tribunal administratif de Nantes et à l'annulation de l'arrêté du 22 avril 2014 par lequel le préfet de la Mayenne a autorisé la société Erelia Mayenne, devenue la société Futures Energies Mayenne Ouest, à exploiter onze aérogénérateurs sur le territoire des communes d'Azé, de Gennes-sur-Glaize, de Saint-Denis d'Anjou et de Bouère, jusqu'à ce que le préfet de la Mayenne ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation de cet arrêté.

Par un courrier, enregistré le 26 octobre 2021, le préfet de la Mayenne demande à la cour de lui accorder un délai supplémentaire afin de lui permettre de régulariser son arrêté du 22 avril 2014.

Par un courrier, enregistré le 29 octobre 2021, la société Futures Energies Mayenne Ouest demande à la cour de lui accorder un délai supplémentaire afin de permettre la régularisation de l'arrêté du 22 avril 2014 du préfet de la Mayenne.

Le 24 mars 2022, le préfet de la Mayenne a communiqué à la cour son arrêté du 24 mars 2022 régularisant et modifiant l'arrêté du 22 avril 2014.

Par des mémoires, enregistrés les 1er avril, 24 mai et 30 juin 2022, M. et Mme I... et autres concluent aux mêmes fins que leurs précédentes écritures et demandent, en outre, à la cour, dans le dernier état de leurs écritures, d'annuler l'arrêté du préfet de la Mayenne du 24 mars 2022.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté de régularisation du 24 mars 2022 a été pris à la suite d'une procédure irrégulière dès lors que, eu égard aux changements significatifs des circonstances de fait, la société pétitionnaire aurait dû mettre à jour son étude d'impact initiale ;

- il a été pris à la suite d'une procédure irrégulière, en méconnaissance des articles L. 1122-1 et R. 122-7 du code de l'environnement, dès lors que l'étude d'impact initiale n'a pas été transmise pour avis à la mission régionale d'autorité environnementale ;

- il est illégal faute pour la société pétitionnaire d'avoir recueilli l'avis du GFA des Oliviers quant aux conditions de démantèlement et de remise en état du site à l'issue de l'exploitation ;

- l'arrêté de régularisation du 24 mars 2022 n'a pas procédé à la régularisation des vices constatés par la cour dans son arrêt avant dire droit du 27 avril 2021.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 juin et 13 juillet 2022, la société Futures Energies Mayenne Ouest conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures et demande, en outre, à la cour de :

1°) prendre acte de ce que les vices constatés par la cour dans son arrêt avant dire droit du 27 avril 2021 ont été régularisés par l'arrêté du préfet de la Mayenne du 24 mars 2022 ;

2°) à défaut, surseoir à statuer sur la requête de M. et Mme I... et autres en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement afin de permettre une nouvelle régularisation de l'autorisation contestée.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par M. et Mme I... et autres ne sont pas fondés ;

- les vices que la cour est susceptible de relever pourraient être régularisés.

Par un courrier du 20 octobre 2022, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, de surseoir à statuer pour permettre la régularisation des vices entachant l'arrêté du 22 avril 2014 du préfet de la Mayenne tirés de ce que les dispositions du 7° de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige, ont été méconnues s'agissant de la consultation du propriétaire (GFA des Oliviers) de la parcelle E3-319 et de ce que l'autorisation contestée n'a pas été précédée d'un avis régulièrement émis par l'autorité environnementale.

Des observations en réponse à ce courrier ont été présentées, le 28 octobre 2022, par la société Futures Energies Mayenne Ouest.

Des observations en réponse à ce courrier ont été présentées, le 4 novembre 2022, par le ministre de la transition écologique et la cohésion des territoires.

Une note en délibéré présentée pour M. et Mme I... et autres a été enregistrée le 10 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. F...,

- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique,

- les observations de Me Monamy, représentant M. et Mme I... et autres, et les observations de Me Boudrot, substituant Me Gelas, représentant la société Futures Energies Mayenne Ouest.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 22 avril 2014, le préfet de la Mayenne a autorisé la société Erelia Mayenne, devenue la société Futures Energies Mayenne Ouest, à exploiter onze aérogénérateurs, répartis en deux secteurs est et ouest, sur le territoire des communes d'Azé, de Gennes-Glaize, de Saint-Denis d'Anjou et de Bouère. Par un jugement du 16 février 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. et Mme I... et autres tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un arrêt du 4 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. et Mme I... et autres contre ce jugement. Par une décision du 25 mars 2020, le Conseil d'État statuant au contentieux a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour.

2. Par un arrêt avant dire droit du 27 avril 2021, la cour a jugé que l'autorisation délivrée par l'arrêté contesté du 22 avril 2014 du préfet de la Mayenne était entachée d'illégalité, en ce que, premièrement, les avis du GFA des Oliviers et de Mme K... M... n'avaient pas été recueillis, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, deuxièmement, elle n'avait pas été précédée d'un avis régulièrement émis par l'autorité environnementale, troisièmement, le public n'avait pas été suffisamment informé quant aux capacités financières de la société pétitionnaire, et, quatrièmement, le montant initial des garanties financières, fixé à 581 758 euros, était insuffisant au regard des prescriptions de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 22 juin 2020. En conséquence, la cour a, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sursis à statuer, jusqu'à l'expiration d'un délai de six ou de dix mois à compter de la notification de l'arrêt, selon qu'il serait fait usage de la procédure de consultation publique ou que serait organisée une enquête publique complémentaire, sur la demande de M. et Mme I... et autres jusqu'à ce que le préfet de la Mayenne ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation de cet arrêté. Le 24 mars 2022, le préfet de la Mayenne a communiqué à la cour son arrêté du 24 mars 2022 régularisant et modifiant l'arrêté préfectoral du 22 avril 2014. M. et Mme N... et autres demandent à la cour d'annuler cet arrêté du préfet de la Mayenne du 24 mars 2022 et soutiennent que celui-ci n'a pas régularisé l'arrêté préfectoral du 22 avril 2014.

3. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / (...) "

4. À compter de la décision par laquelle le juge recourt à l'article L. 181-18 du code de l'environnement, seuls des moyens dirigés contre la mesure de régularisation notifiée, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. À ce titre, les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices qui lui sont propres et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant dire droit. Les parties ne peuvent en revanche soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse de moyens déjà écartés par la décision avant dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

Sur la régularisation de l'arrêté du 22 avril 2014 par l'arrêté du 22 mars 2022 :

En ce qui concerne le vice relatif au montant initial des garanties financières :

5. L'article 3 de l'arrêté du 24 mars 2022 du préfet de la Mayenne a modifié les dispositions de l'article 5 de son arrêté du 22 avril 2014 afin de porter à 632 500 euros le montant des garanties financières de la société Futures Energies Mayenne Ouest pour l'exploitation du parc projeté. Il ne résulte pas de l'instruction que ce montant n'aurait pas été fixé dans le respect des dispositions de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans leur rédaction issue de l'arrêté du 10 décembre 2021. Par suite, le vice relevé au point 50 de l'arrêt avant dire droit du 27 avril 2021, qui entachait l'arrêté contesté du 22 avril 2014, a été régularisé par l'arrêté du 24 mars 2022 du préfet de la Mayenne.

En ce qui concerne le vice affectant l'information du public quant aux capacités financières de la société Futures Energies Mayenne Ouest :

6. Il résulte de l'instruction que des informations complémentaires sur les capacités financières de la société Futures Energies Mayenne Ouest ont été transmises au préfet de la Mayenne et que ce dernier les a soumises à l'information du public du 18 janvier au 20 février 2022. Par suite, le vice relevé au point 35 de l'arrêt avant dire droit du 27 avril 2021, qui entachait l'arrêté contesté du 22 avril 2014, a été régularisé par l'arrêté du 24 mars 2022 du préfet de la Mayenne.

En ce qui concerne le vice affectant l'avis de l'autorité environnementale :

7. Au point 58 de l'arrêt avant dire droit du 27 avril 2021, la cour a jugé que " l'irrégularité de l'avis émis le 25 avril 2013 par l'autorité environnementale peut être régularisée par la consultation d'une autorité environnementale présentant les garanties d'impartialité requises. Pour que cette régularisation puisse être effectuée, ce nouvel avis devra être rendu dans les conditions définies aux articles R. 122-6 à R. 122-8 et R. 122-24 du code de l'environnement, applicables à la date de l'émission de cet avis ou de la constatation de l'expiration du délai requis pour qu'il soit rendu, par la mission régionale de l'autorité environnementale du conseil général de l'environnement et du développement durable compétente pour la région des Pays de la Loire. "

8. Au point 60 du même arrêt, la cour a jugé que " Dans l'hypothèse où ce nouvel avis indiquerait, après avoir tenu compte d'éventuels changements significatifs des circonstances de fait, que, tout comme l'avis irrégulier émis le 25 avril 2013, le dossier de création du parc éolien envisagé par la société pétitionnaire est assorti d'une étude d'impact de bonne qualité permettant la prise en compte des enjeux environnementaux et paysagers du projet, le préfet de la Mayenne pourra décider de procéder à l'édiction d'un arrêté modificatif régularisant le vice initial lié à l'irrégularité de l'avis du 25 avril 2013. Le préfet pourra procéder de manière identique en cas d'absence d'observations de l'autorité environnementale émises dans le délai requis par les dispositions du code de l'environnement mentionnées ci-dessus. "

9. Aux termes du V de l'article L. 122-1 du code de l'environnement : " Lorsqu'un projet est soumis à évaluation environnementale, le dossier présentant le projet comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation déposée est transmis pour avis à l'autorité environnementale ainsi qu'aux collectivités territoriales et à leurs groupements intéressés par le projet. / (...) ". Aux termes de l'article R. 122-7 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - L'autorité compétente pour prendre la décision d'autorisation du projet transmet pour avis le dossier comprenant l'étude d'impact et le dossier de demande d'autorisation aux autorités mentionnées au V de l'article L. 122-1. (...) / Lorsque l'autorité environnementale est la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, la demande d'avis est adressée au service régional chargé de l'environnement (appui à la mission régionale d'autorité environnementale), qui prépare et met en forme, dans les conditions prévues à l'article R. 122-24, toutes les informations nécessaires pour que la mission régionale puisse rendre son avis. / II. - L'autorité environnementale se prononce dans les deux mois suivant la date de réception du dossier mentionné au premier alinéa du I. L'avis de l'autorité environnementale, dès son adoption, ou l'information relative à l'absence d'observations émises dans le délai, est mis en ligne sur internet. / (...) ".

10. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant le dossier d'autorisation d'une installation classée pour la protection de l'environnement ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

11. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la société Futures Energies Mayenne Ouest a fait réaliser par un bureau d'études spécialisées, en octobre 2021, une " mise à jour de l'étude d'impacts et mesures ", qui a été communiquée le 27 octobre 2021 au préfet de la Mayenne dans le cadre d'une procédure de " porter à connaissance ". Ce " porter à connaissance ", qui procède à un réexamen de l'état initial du site et des impacts du projet, conclut qu'il n'existe pas de changements significatifs des circonstances de faits qui remettraient en cause l'étude d'impact environnementale initiale, réalisée en 2011 et mise à jour en novembre 2012. Si les requérants soutiennent que la mise à jour de l'étude d'impact, s'agissant de l'avifaune et des chiroptères, nécessitait de réaliser de nouvelles prospections de terrain afin d'actualiser les prospections initiales réalisées dix ans auparavant, ils n'apportent aucun élément de nature à établir ou même laisser penser que la fréquentation du site par ces espèces animales aurait évolué depuis lors. Par ailleurs, s'agissant du patrimoine, en se bornant à soutenir que le château d'Erbrée à Fromentières est mentionné sur une " carte des sites et monuments inscrits et classés en 2011 et octobre 2021 " alors qu'il ne l'était pas dans l'étude d'impact initiale bien qu'il était déjà inscrit au titre des monuments historiques depuis le 8 juillet 2010, de même que le château de Vernée à Chenillé-Champteussé et l'église Saint-Jacques à Morannes-sur-Sartue-Daumeray, respectivement inscrits au titre des monuments historiques depuis le 13 octobre 2011 et à l'inventaire supplémentaire depuis juin 2021, les requérants n'apportent pas suffisamment d'éléments de nature à démontrer qu'une actualisation de l'étude d'impact aurait été nécessaire pour prendre en compte l'impact du projet sur ces monuments, situés, respectivement, à environ 4 kilomètres au nord-ouest, 20 kilomètres au sud-ouest et 8 kilomètres au sud-est des éoliennes les plus proches, alors que l'étude d'impact initiale indiquait notamment, s'agissant des monuments situés dans le périmètre de 10 kilomètres autour du secteur ouest du projet que " le relief associé aux masques arborés très fréquents [limitait] fortement la visibilité vers le site éolien ". Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que des changements significatifs des circonstances de fait sont intervenus depuis l'étude d'impact initiale de 2011 et que l'absence d'actualisation suffisante des volets avifaunistique et chiroptérologique ainsi que patrimonial de cette étude a été de nature à fausser l'appréciation de l'autorité environnementale.

12. En second lieu, et en revanche, il résulte de l'instruction que, par un courrier du 5 novembre 2021, reçu le 9 novembre suivant, le préfet de la Mayenne a saisi la mission régionale d'autorité environnementale des Pays de la Loire afin qu'elle émette un avis sur la " mise à jour de l'étude d'impact " du projet de parc éolien de la société Futures Energies Mayenne Ouest. Il ressort des termes de ce courrier de saisine et de la liste des pièces-jointes annexées à ce courrier que le préfet de la Mayenne n'a pas adressé à la mission régionale d'autorité environnementale l'étude d'impact initiale du projet, réalisée 2011 et mise à jour une première fois en novembre 2012, mais seulement l'avis de l'autorité environnementale irrégulièrement émis le 25 avril 2013 et le " porter à connaissance pour la régularisation de l'avis de l'Autorité environnementale " accompagné de ses deux annexes, à savoir l'annexe 1 sur la " mise à jour du volet milieux naturels de l'étude d'impact et des mesures associées " et l'annexe 2 sur la " prise en compte du contexte éolien, photomontage et analyse ". Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la société Futures Energies Mayenne Ouest, il ne résulte pas de l'instruction que les documents d'actualisation transmis à la mission régionale d'autorité environnementale, qui se bornaient sur de nombreux points à renvoyer à l'étude d'impact initiale, reprenaient " les informations essentielles contenues dans l'étude d'impact initiale ". Dès lors, la mission régionale d'autorité environnementale des Pays de la Loire a été saisie dans des conditions irrégulières. Il résulte de l'instruction que, alors même que cette mission régionale d'autorité environnementale n'a émis aucune observation dans le délai qui lui avait été imparti pour le faire, ce vice de procédure a eu pour effet de nuire à l'information complète de la population et a été de nature à exercer une influence sur la décision du préfet de la Mayenne.

13. Dès lors, le vice relevé au point 17 de l'arrêt avant dire droit du 27 avril 2021, qui entachait l'arrêté contesté du 22 avril 2014, n'a pas été régularisé par l'arrêté du 24 mars 2022 du préfet de la Mayenne.

En ce qui concerne le vice affectant la consultation des propriétaires prévue par l'article R. 512-6 du code de l'environnement :

14. En vertu de l'article R. 512-30 du code de l'environnement, alors en vigueur, dont les dispositions sont reprises à l'article R. 181-43 de ce code, l'arrêté d'autorisation comporte les conditions de remise en état du site de l'installation après la cessation d'activité. Aux termes de l'article R. 512-6 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : / (...) / 7° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ; / (...) "

15. Il résulte de l'instruction que la société Futures Energies Mayenne Ouest a sollicité, par un courrier reçu le 2 août 2021, l'avis de Mme K... M..., propriétaire de la parcelle D1-9 sur laquelle doit être implantée l'éolienne E 13, et dont l'avis est réputé émis dès lors qu'elle ne s'est pas prononcée dans le délai de quarante-cinq jours imparti par les dispositions citées au point précédent. En revanche, si la société pétitionnaire soutient avoir sollicité l'avis du GFA des Oliviers, propriétaire de la parcelle E3 319 sur laquelle doit être implantée l'éolienne E 10 à Gennes-sur-Glaize, par un courrier envoyé le 30 juillet 2021, elle ne justifie ni de la distribution de ce courrier, ni même de sa présentation au GFA des Oliviers, alors au demeurant que les requérants apportent des éléments de nature à établir que ce courrier a été envoyé à une adresse à Jarzé qui ne correspondait pas à l'adresse du siège social, situé à Montélimar, du groupement foncier agricole en cause.

16. Dès lors, le vice relevé au point 11 de l'arrêt avant dire droit du 27 avril 2021, qui entachait l'arrêté contesté du 22 avril 2014, n'a pas été régularisé par l'arrêté du 24 mars 2022 du préfet de la Mayenne, sans que le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et la société Futures Energies Mayenne Ouest puissent utilement, eu égard aux règles rappelées au point 4, faire valoir que ce vice n'est pas susceptible d'avoir entaché l'arrêté contesté d'une irrégularité, faute d'avoir privé les intéressés d'une garantie, ce moyen de défense ayant déjà été écarté par l'arrêt avant dire droit et ne constituant pas un moyen fondé sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

Sur l'application des dispositions du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :

17. Aux termes du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. "

18. Lorsqu'un vice de procédure entache un avis qui a été soumis au public, notamment dans le cadre d'une enquête publique, préalablement à l'adoption de la décision attaquée, la régularisation implique non seulement que la procédure de consultation soit reprise, mais aussi que le nouvel avis soit porté à la connaissance du public. Il revient au juge, lorsqu'il sursoit à statuer en vue de la régularisation, de rappeler ces règles et de fournir toute précision utile sur les modalités selon lesquelles le public devra être informé et, le cas échéant, mis à même de présenter des observations et des propositions, une fois le nouvel avis émis et en fonction de son contenu.

19. Ainsi qu'il a été dit aux points 13 et 16 ci-dessus, l'autorisation délivrée par l'arrêté du 22 avril 2014 du préfet de la Mayenne contesté demeure entachée d'illégalité, en ce que l'avis du GFA des Oliviers n'a pas été recueilli, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, et en ce qu'elle n'a pas été précédée d'un avis régulièrement émis par l'autorité environnementale. De tels vices peuvent être régularisés par une décision modificative.

20. En premier lieu, le vice affectant l'avis de l'autorité environnementale peut-être régularisé selon les modalités mentionnées aux points 58 à 61 de l'arrêt avant dire droit du 27 avril 2021, qui impliquent également que la mission régionale de l'autorité environnementale du conseil général de l'environnement et du développement durable compétente pour la région des Pays de la Loire soit saisie, conformément aux dispositions du V de l'article L. 122-1 du code de l'environnement et du I de l'article R. 122-7 du même code, dans leur rédaction applicable au litige, d'un dossier comprenant notamment l'intégralité de l'étude d'impact, à savoir en l'espèce l'étude d'impact initiale et sa ou ses mises à jour.

21. En second lieu, le vice affectant la consultation du GFA des Oliviers peut être régularisé selon les modalités mentionnées aux points 63 à 65 de l'arrêt avant dire droit du 27 avril 2021.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête présentée par M. et Mme I... et autres jusqu'à ce que le préfet de la Mayenne ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation édicté conformément aux modalités définies aux points 19 à 21 du présent arrêt jusqu'à l'expiration, soit d'un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt lorsqu'il n'aura été fait usage que de la simple procédure de consultation publique, soit d'un délai de dix mois lorsque l'organisation d'une enquête publique complémentaire sera nécessaire.

Article 2 : Le préfet de la Mayenne fournira à la cour, au fur et à mesure de leur accomplissement, les actes entrepris en vue de la régularisation prévue à l'article précédent.

Article 3 : Tous droits et conclusions des parties, sur lesquels il n'a pas été statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... I..., à M. et Mme J... G..., à M. et Mme B... L..., à M. H... de Chivré, à Mme C... de Chivré, à Mme E... O..., à M. et Mme A... N..., représentants uniques pour les parties représentées par Me Monamy, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à la société Futures Energies Mayenne Ouest et au préfet de la Mayenne.

Délibéré après l'audience du 8 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 novembre 2022.

Le rapporteur,

F.-X. F...La présidente,

C. Buffet

La greffière,

K. Bouron

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 20NT01216


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01216
Date de la décision : 25/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : SELAS DE BODINAT ECHEZAR AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-11-25;20nt01216 ?
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