La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/10/2022 | FRANCE | N°20NT00207

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 07 octobre 2022, 20NT00207


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... et B... C... et la société civile immobilière (E...) C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 24 août 2018 par lequel le maire de Saint-Brévin-les-Pins a délivré à la société Terimmo Atlantique un permis de construire un immeuble d'habitat collectif de onze logements sur un terrain situé 13 rue Gernioux sur le territoire de cette commune ainsi que les décisions du 26 octobre 2018 par lesquelles cette même autorité a rejeté leurs recours gracieux res

pectifs formés contre l'arrêté du 24 août 2018.

Par un premier jugement n° 181...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... et B... C... et la société civile immobilière (E...) C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 24 août 2018 par lequel le maire de Saint-Brévin-les-Pins a délivré à la société Terimmo Atlantique un permis de construire un immeuble d'habitat collectif de onze logements sur un terrain situé 13 rue Gernioux sur le territoire de cette commune ainsi que les décisions du 26 octobre 2018 par lesquelles cette même autorité a rejeté leurs recours gracieux respectifs formés contre l'arrêté du 24 août 2018.

Par un premier jugement n° 1812214 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Nantes a, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur leur demande, a imparti à la société Terimmo Atlantique et à la commune de Saint-Brévin-les-Pins un délai de six mois afin de produire une mesure de régularisation permettant d'assurer, d'une part, le respect des dispositions du n de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme et, d'autre part, la conformité du projet aux dispositions de l'article Ua 13.3 du règlement du plan local d'urbanisme.

Le maire de Saint-Brévin-les-Pins a, par arrêté du 24 avril 2020 et à la demande de la société Terimmo, pris une mesure de régularisation.

Par un second jugement n° 1812214 du 2 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. et Mme C... et de la E... C....

Procédure devant la cour :

I° - Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2020 sous le n° 20NT00207 et des mémoires, enregistrés le 29 juin 2020 et le 5 août 2020, M. et Mme C... et de la E... C..., représentés par Me Halgand, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 novembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 août 2018 ainsi que les décisions du 26 octobre 2018 portant rejet de leurs recours ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Brévin-les-Pins une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le permis de construire délivré à la société Terimmo Atlantique présente, en raison de la pollution du sol et des aléas de submersion marine, des risques pour la sécurité et la salubrité publiques et méconnaît par suite les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- le projet n'est pas conforme aux dispositions de l'article Ua 7 du règlement du plan local d'urbanisme communal ;

- le projet n'est pas conforme aux dispositions de l'article Ua 10 du règlement du plan local d'urbanisme communal ;

- le projet n'est pas conforme aux dispositions de l'article Ua 11 du règlement du plan local d'urbanisme communal ;

- le projet n'est pas conforme aux dispositions du 2 de l'article Ua 13 du règlement du plan local d'urbanisme communal ;

- les dispositions des articles R. 431-8, R. 431-9 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ont été méconnues ;

- ainsi que l'a reconnu le tribunal, le dossier joint à la demande de permis ne comportait pas l'attestation prévue par les dispositions du n de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme et le projet n'est pas conforme aux dispositions du 3 de l'article Ua 13 du règlement du plan local d'urbanisme communal.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 avril 2020 et le 9 juillet 2020, la commune de Saint-Brévin-les-Pins, représentée par Me Caradeux, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le projet n'est pas contraire aux dispositions du 3 de l'article Ua 13 du règlement du plan local d'urbanisme ; à supposer même ce vice constitué, il est régularisable ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article Ua 7 du règlement du plan local d'urbanisme est irrecevable et non fondé ;

- les autres moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 21 juillet 2020, la société Terimmo Atlantique, représentée par Me Tertrais, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le tribunal administratif de Nantes n'ayant pas statué au fond, M. et Mme C... sont dépourvus d'intérêt à agir contre le jugement avant-dire droit du 19 novembre 2019 ;

- dès lors que le tribunal administratif de Nantes n'a pas statué au fond, la cour n'est pas en mesure d'apprécier la légalité des décisions contestées de sorte que les conclusions tendant à l'annulation de ces décisions et les moyens soulevés à l'appui de ces conclusions sont irrecevables dans le cadre de la présente instance ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article Ua 7 du règlement du plan local d'urbanisme est irrecevable en application des dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme et est infondé ;

- le vice tenant à la méconnaissance des dispositions du n de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme a été régularisé ;

- le projet tel qu'il a été initialement conçu est conforme aux dispositions du 3 de l'article Ua 13 du règlement du plan local d'urbanisme ; à supposer qu'il fût entaché d'illégalité au regard de ces dispositions, le permis a été régularisé par le permis modificatif délivré le 24 avril 2020.

II° - Par une requête, enregistrée le 30 mars 2021 sous le n° 21NT00927 et un mémoire complémentaire, enregistré le 20 juillet 2021, M. et Mme C... et de la E... C..., représentés par Me Halgand, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 février 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 août 2018 ainsi que les décisions du 26 octobre 2018 portant rejet de leurs recours ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Brévin-les-Pins une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal a omis à répondre au moyen tiré du caractère tardif et non probant de la pièce produite par la commune de Saint-Brévin-les-Pins le 8 octobre 2020 et correspondant à la première page du diagnostic de pollution des sols sur laquelle est apposée le tampon de la commune ;

- le permis délivré le 24 avril 2020 n'avait pas pour objet et n'a donc pas eu pour effet de régulariser le vice tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ;

- le diagnostic de pollution des sols, qui ne constitue pas le document exigé par ces dispositions, n'est, en outre, pas probant et n'a pas été produit pour les besoins de l'instruction de la mesure de régularisation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2021, la commune de Saint-Brévin-les-Pins, représentée par Me Caradeux, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pérez, président-rapporteur,

- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique,

- et les observations de Me Halgand, représentant la E... C... et M. et Mme C... et D..., substituant Me Caradeux, représentant la commune de Saint-Brévin-les-Pins.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 24 août 2018, le maire de la commune de Saint-Brévin-les-Pins (Loire-Atlantique) a autorisé la société Terimmo à construire, sur un terrain situé rue A... Gernioux, un immeuble d'habitat collectif de onze logements. Le 26 octobre 2018, il a rejeté les recours gracieux formés contre cette autorisation par, d'une part, la société civile immobilière (E...) C... et, d'autre part, M. et Mme C.... Par un premier jugement, rendu le 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Nantes, saisi par la E... C... et les époux C... d'une demande d'annulation du permis de construire du 24 août 2018 et des décisions portant rejet de leurs recours gracieux, a, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur cette demande afin de permettre la régularisation de deux vices entachant le permis de construire. Le maire de Saint-Brévin-les-Pins a, le 24 avril 2020, édicté une mesure de régularisation. Par un second jugement, rendu le 2 février 2021, le tribunal a rejeté la demande d'annulation. Par deux requêtes, enregistrées sous le n° 20NT00207 et sous le n° 21NT00927, M. et Mme C... et la E... C... relèvent appel, respectivement, du jugement du 19 novembre 2019 et du jugement du 2 février 2021.

2. Les requêtes n° 20NT00207 et 21NT00927 sont dirigées contre des décisions relatives au même projet. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé du jugement avant-dire droit du 19 novembre 2019 :

3. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative. ".

4. La cristallisation des moyens qui résulte de l'application des dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme est limitée à l'instance au cours de laquelle elle intervient. Il s'ensuit que la cristallisation intervenue en première instance est sans incidence sur la recevabilité des moyens d'appel. Les requérants sont ainsi recevables à soulever en appel tous moyens nouveaux relevant des mêmes causes juridiques que ceux soulevés en première instance pourvu qu'ils soient présentés avant l'expiration du délai de deux mois suivant la communication aux parties du premier mémoire en défense enregistré dans l'instance d'appel.

5. Il suit de là que, en l'espèce, est recevable le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article Ua 7 du règlement du plan local d'urbanisme, soulevé, pour la première fois en cause d'appel, dans le premier mémoire en réplique de M. et Mme C... et de la E... C..., lequel a été enregistré au greffe de la cour le 29 juin 2020 soit dans le délai de deux mois qui a suivi la notification, intervenue le 30 avril 2020, du premier mémoire en défense.

6. Aux termes des dispositions du 1 de l'article Ua 7 du règlement du plan local d'urbanisme relatives aux constructions autres que celles nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif : " Les constructions sont édifiées d'une limite séparative latérale à l'autre. / Des implantations autres que celles prévues ci-dessus peuvent être imposées dans les cas suivants, pour favoriser l'insertion et garantir l'unité architecturale de la rue ou de la place : / (...) / lorsque la largeur de la façade sur voie est supérieure ou égale à 15 mètres ; / (...) / Lorsque les constructions ne jouxtent pas la limite séparative, la distance horizontale de tout point du bâtiment à édifier au point le plus proche de la limite séparative doit être au moins égale à la hauteur du bâtiment, mesurée à l'égout du toit, sans toutefois être inférieure à 3 m. ".

7. D'une part, les appelants soutiennent que le projet n'est pas, à l'ouest, implanté sur la limite séparative du terrain, cette dernière se situant soit dans " l'axe du mur " dans le cas où celui-ci serait mitoyen, soit " à la limite extérieure ouest dudit mur " dans le cas où il appartiendrait exclusivement à la E... C.... Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le projet est adossé au mur considéré et ne peut, en conséquence, être regardé comme implanté en retrait de la limite séparative.

8. D'autre part, les appelants soutiennent que la largeur de la façade du projet sur voie de 27,44 mètres est supérieure à celle des façades sur voie des constructions environnantes et que ces dernières sont toutes implantées en retrait par rapport aux limites séparatives. Toutefois, alors qu'aucune démonstration des effets de l'implantation du projet litigieux sur son insertion paysagère ou l'éventuelle unité architecturale de la rue n'est apportée, ces circonstances ne démontrent pas, par elles-mêmes, qu'en s'abstenant d'imposer au porteur de ce projet une implantation en retrait, le maire de Saint-Brévin-les-Pins aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.

9. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article Ua 10 du règlement du plan local d'urbanisme : " Le nombre de niveaux et la hauteur maximale des constructions autorisées sont définies dans les conditions suivantes : / 6 m à l'égout et 2 niveaux, soit le rez-de-chaussée et un étage + combles aménageables pour l'habitat au-dessus du dernier étage autorisé (R+1+C) ".

10. Il ressort des pièces du dossier que la construction projetée comporte au-dessus du rez-de chaussée, un étage droit puis, au-dessus de l'égout du toit, deux niveaux dont l'un est aménagé en logements. Le versant sud de la toiture comporte deux grandes lucarnes avec balcons tandis que le versant nord accueille, dans sa partie centrale, une structure charpentée en saillie.

11. D'une part, les deux niveaux situés au-dessus de l'égout du toit, dans le volume compris sous la charpente, se situent, contrairement à ce que soutiennent les requérants, en retrait des façades. Ils doivent être regardés comme des combles pour l'application des dispositions précitées.

12. D'autre part, la configuration décrite au point 13, bien que présentant quatre niveaux, ne méconnaît pas le gabarit " R+1+C ", les dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme n'interdisant pas que les combles soient aménagés en plusieurs niveaux. Pour la même raison, la circonstance que le dernier niveau de combles que la société pétitionnaire désigne comme " combles perdus " serait, eu égard à sa surface de plancher et sa hauteur sous plafond, aménageables pour l'habitat, ne traduit pas une méconnaissance des dispositions précitées de l'article Ua 10 du règlement du plan local d'urbanisme.

13. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article Ua 10 du règlement du plan local d'urbanisme doit, dès lors, être écarté.

14. En troisième lieu, aux termes des dispositions du 2 de l'article Ua 13 du règlement du plan local d'urbanisme, relatif aux espaces libres et plantations : " La trame végétale identifiée sur les documents graphiques au titre de l'article L. 123-1-5-7 du Code de l'Urbanisme doit être conservée. / Toute construction ou installation à proximité des arbres de haut jet constitutifs de cette trame végétale doit respecter une distance raisonnable ne mettant pas en péril le système racinaire ou le développement du houppier du ou des sujets concernés. ".

15. Le projet contesté prévoit de conserver le pin implanté au nord du terrain d'assiette du projet et identifié par le plan local d'urbanisme comme élément à protéger. S'il ressort des plans joints à la demande de permis qu'une faible distance sépare cet arbre du bâtiment projeté, il n'est versé aux débats aucune justification ni même aucune précision de nature à démontrer que cette distance, d'ailleurs non précisée, serait insuffisante pour préserver le système racinaire ou le développement du houppier. L'affirmation selon laquelle la réalisation des travaux de construction mettrait " manifestement en péril " l'arbre considéré n'est pas davantage étayée. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 2 de l'article Ua 10 du règlement du plan local d'urbanisme ne peut qu'être écarté.

16. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

17. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'un dépôt d'hydrocarbures, comprenant notamment trois cuves à fuel, a été exploité sur le terrain d'assiette du projet sans que les services compétents en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement n'aient été en mesure de s'assurer de la correcte remise en état du site au moment de la cessation d'activité. Toutefois, il ressort notamment des annexes à la promesse de vente consentie le 6 février 2018 par la propriétaire du terrain qu'une entreprise d'assainissement a procédé, le 11 octobre 2017, au nettoyage et au dégazage des cuves, lesquelles ont depuis lors été enlevées. De plus, le diagnostic de pollution des sols, émis le 6 février 2020 par la société Dekra Industrial après la réalisation de sondages et d'analyses en laboratoire portant sur les principaux polluants traceurs des activités de station-service, à savoir les hydrocarbures totaux, conclut à " l'absence d'impact notable " de l'ancienne activité et relève qu'aucune recommandation n'est, par suite, nécessaire.

18. Pour contester la fiabilité de ce diagnostic, les requérants font valoir que sur les seize sondages réalisés, seuls dix ont été analysés et que les valeurs de référence au regard desquelles les résultats ont été interprétés ne sont pas pertinentes. La première de ces critiques est dépourvue de tout caractère sérieux, le diagnostic expliquant que si " l'implantation des sondages " a été répartie sur dix points, au niveau de trois d'entre eux les sondages ont dû être réitérés en raison de " refus ". Ensuite, le diagnostic indique qu'en l'absence de valeurs réglementaires de référence permettant de déterminer si un sol est pollué ou non, les résultats ont été interprétés à la lumière, notamment, des valeurs définies par l'arrêté du 12 décembre 2014 relatif aux installations de stockage de déchets inertes et ce, à titre indicatif. En se bornant à soutenir que cet arrêté n'est pas applicable aux installations classées pour la protection de l'environnement relevant de la rubrique n° 1435, c'est-à-dire aux stations-service, M. et Mme C... et la E... C..., qui ne proposent d'ailleurs aucun autre référentiel, ne contestent pas sérieusement l'utilité de cette référence, associée aux seuils de quantification du laboratoire et aux retours d'expérience de la société Dekra, ni, par suite, le bien-fondé de la méthode suivie.

19. Enfin, s'il est exact que l'analyse des échantillons a permis de détecter des concentrations d'hydrocarbures totaux supérieures à 100 mg/kg, l'une d'entre elles atteignant même 432mg/kg, il n'est pas démontré que de telles valeurs permettraient d'infirmer les conclusions du diagnostic selon lesquelles l'impact sur les sols du dépôt d'hydrocarbures anciennement exploité sur le terrain n'est pas significatif et ne nécessite pas de mesure particulière.

20. D'autre part, M. et Mme C... et la E... C... soutiennent qu'alors que le terrain d'assiette du projet est exposé à un aléa de submersion marine, ainsi qu'en atteste son classement en zone v100 dans le plan de prévention des risques littoraux Côte de Jade adopté postérieurement à la délivrance du permis en litige, les caractéristiques du projet ne permettent pas de prévenir le risque pour la sécurité qui en résulte. Ils font valoir, en particulier, que ce projet ne prévoit pas de situer tous ses niveaux fonctionnels au-dessus de la cote de Xynthia, ni ne limite son emprise au sol. Il ressort, il est vrai, des pièces du dossier qu'une partie de la parcelle n° 633, sur laquelle est prévue le projet, a été regardée par les auteurs du plan de prévention des risques littoraux comme concernée par un aléa faible ou modéré à échéance 100 ans (Xynthia + 60 cm). Toutefois, le permis contesté prescrit, à son article 3, différentes mesures constructives telles que la surélévation de l'installation électrique et des équipements sensibles ou polluants ainsi que l'installation de clapets anti-retour et de dispositifs d'ouverture manuelle sur les ouvrants permettant l'évacuation en cas de submersion. La circonstance que des logements sont prévus au rez-de-chaussée alors que le règlement du plan de prévention mentionné ci-dessus impose de situer les niveaux fonctionnels au-dessus de la cote Xynthia + 60 ne suffit pas, à elle seule, à démontrer que les prescriptions dont le maire a assorti le permis en litige seraient insuffisantes pour prévenir l'atteinte à la sécurité des biens et des personnes. Enfin, s'agissant de l'emprise au sol de la construction, les appelants n'apportent aucune précision permettant à la cour d'apprécier ses incidences en termes de sécurité publique.

21. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.

22. En dernier lieu, les requérants réitèrent en appel les moyens soulevés en première instance et tirés de la méconnaissance des dispositions des articles R. 431-8, R. 431-9 et R. 431-10 du code de l'urbanisme et de la méconnaissance des dispositions de l'article Ua 11 du règlement du plan local d'urbanisme. Il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

23. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la société Terimmo à la requête 20NT00207, que M. et Mme C... et la E... C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement avant-dire droit du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Nantes n'a pas annulé l'arrêté du maire de Saint-Brévin-les-Pins du 24 août 2018 ainsi que les décisions portant rejet des recours gracieux.

Sur la régularité du jugement mettant fin à l'instance du 2 février 2021 :

24. Il ressort du dossier de procédure que M. et Mme C... et la E... C... ont soutenu devant les premiers juges que la mesure de régularisation intervenue le 24 avril 2020 n'avait pas régularisé le vice entachant le permis de construire du 24 août 2018 et tenant à la méconnaissance des dispositions du n de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme. A l'appui de ce moyen, ils faisaient notamment valoir que le diagnostic de pollution des sols produit par la commune ne l'avait pas été dans le délai imparti par le tribunal pour justifier de la régularisation des vices relevés dans son jugement avant-dire droit et ne figurait pas parmi les pièces jointes à la demande de permis de régularisation. Ils arguaient également que le diagnostic versé aux débats et revêtu d'un tampon de la commune était dépourvu de valeur probante. Ils soutenaient, enfin, que le document en cause n'était pas celui exigé par les dispositions du n de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme.

25. Pour écarter ce moyen tiré du défaut de régularisation du vice tenant à la méconnaissance des dispositions du code de l'urbanisme mentionnées ci-dessus, le tribunal s'est fondé sur le diagnostic de pollution des sols produit par la commune et a expressément relevé que celui-ci avait été annexé à la mesure de régularisation du 24 avril 2020. Il a également énoncé les raisons pour lesquelles il a écarté les affirmations des demandeurs selon lesquelles ce document aurait été dépourvu de fiabilité et ne satisferait pas, faute de comporter des recommandations en matière de gestion de la pollution des sols, aux exigences découlant des dispositions du n de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme. Ce faisant, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments développés par M. et Mme C... et la E... C... à l'appui de leur moyen tiré de ce que le vice considéré n'avait pas été régularisé, n'a ni omis de répondre à un moyen ni entaché son jugement d'insuffisance de motivation.

Sur le bien-fondé du jugement mettant fin à l'instance du 2 février 2021 :

26. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

27. Les deux vices au vu desquels le tribunal administratif de Nantes a, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer en vue de permettre leur régularisation tiennent, d'une part, à l'absence, dans le dossier de la demande de permis de construire, d'un document émanant d'un bureau d'études certifié dans le domaine des sites pollués et attestant que le projet a été conçu en tenant compte des mesures de gestion de la pollution, conformément aux dispositions du n de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme et, d'autre part, à la méconnaissance des dispositions du 3 de l'article Ua 13 du règlement du plan local d'urbanisme exigeant la plantation d'arbres au sein des aires de stationnement aériennes. Le 7 février 2020, la société Terimmo a sollicité une mesure de régularisation qui lui a été délivrée le 24 avril 2020.

28. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : / (...) / n) Dans le cas prévu par l'article L. 556-1 du code de l'environnement, un document établi par un bureau d'études certifié dans le domaine des sites et sols pollués, ou équivalent, attestant que les mesures de gestion de la pollution au regard du nouvel usage du terrain projeté ont été prises en compte dans la conception du projet ; / (...). ". Aux termes de l'article L. 556-1 du code de l'environnement : " (...) sur les terrains ayant accueilli une installation classée mise à l'arrêt définitif et régulièrement réhabilitée pour permettre l'usage (...), lorsqu'un usage différent est ultérieurement envisagé, le maître d'ouvrage à l'initiative du changement d'usage doit définir des mesures de gestion de la pollution des sols et les mettre en œuvre afin d'assurer la compatibilité entre l'état des sols et la protection de la sécurité, de la santé ou de la salubrité publiques, l'agriculture et l'environnement au regard du nouvel usage projeté. / (...) Le maître d'ouvrage à l'initiative du changement d'usage fait attester de cette prise en compte par un bureau d'études certifié dans le domaine des sites et sols pollués, conformément à une norme définie par arrêté du ministre chargé de l'environnement, ou équivalent. Le cas échéant, cette attestation est jointe au dossier de demande de permis de construire ou d'aménager. ".

29. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

30. D'abord, les circonstances que, d'une part, ni le formulaire de la demande de permis de régularisation ni l'arrêté délivrant cette mesure n'indiquent expressément porter sur la régularisation du vice mentionné ci-dessus et que, d'autre part, le diagnostic de pollution des sols, établi le 6 février 2020, ne figure pas sur le bordereau des pièces jointes à la demande, ne permettent pas, dans les circonstances de l'espèce, de considérer que le maire de Saint-Brévin-les-Pins ne disposait pas, lors de l'instruction de la demande du permis de régularisation, de ce diagnostic, qu'il a d'ailleurs annexé à son arrêté du 24 avril 2020.

31. Ensuite, il résulte de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme que, d'une part, si, à l'issue du délai qu'il a fixé dans sa décision avant dire droit pour que lui soit adressées la ou les mesures de régularisation du permis de construire attaqué, le juge peut à tout moment statuer sur la demande d'annulation de ce permis et, le cas échéant, y faire droit si aucune mesure de régularisation ne lui a été notifiée, il ne saurait se fonder sur la circonstance que ces mesures lui ont été adressées alors que le délai qu'il avait fixé dans sa décision avant dire droit était échu pour ne pas en tenir compte dans son appréciation de la légalité du permis attaqué. Il suit de là que les requérants ne sauraient utilement faire valoir que la pièce produite par la commune pour justifier de sa connaissance du diagnostic de pollution des sols dans le cadre de l'instruction de la demande du permis de régularisation aurait été enregistrée au greffe du tribunal postérieurement au délai de six mois imparti par le jugement avant-dire droit.

32. Enfin, les requérants font valoir que le diagnostic de pollution des sols n'est pas l'attestation visée par les dispositions du n de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme et qu'il n'est pas de nature à démontrer que la pétitionnaire aurait conçu son projet en tenant compte des mesures de gestion de la pollution des sols nécessaires. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 20, le diagnostic du 6 février 2020, qu'aucune pièce du dossier ne permet de mettre en cause, conclut à l'absence de mesures nécessaires à l'usage d'habitation à laquelle la société Terimmo destine le site. Dans ces conditions, l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire a été mise à même de porter une appréciation sur la conformité du projet à la réglementation applicable et notamment au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Par suite, le vice tiré de la méconnaissance des dispositions précitées a été régularisé.

33. En second lieu, aux termes des dispositions du 3 de l'article Ua 13 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les aires de stationnement aériennes doivent être plantées à raison d'un arbre par 50 m² de terrain. ".

34. Le projet tel qu'il résulte de la mesure de régularisation prévoit la plantation de deux cyprès sur l'aire de stationnement dont la superficie s'élève à 84,82 m. Le vice tiré de la méconnaissance de ces dispositions a ainsi été régularisé.

35. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement mettant fin à l'instance du 2 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

36. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter, tant dans l'instance n° 20NT00207 que dans l'instance n° 21NT00927, les conclusions présentées par chacune des parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E:

Article 1er : La requête n° 20NT00207 et la requête n° 21NT00927 présentées par M. et Mme C... et la E... C... sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Brévin-les-Pins sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dans l'instance n° 20NT00207 et dans l'instance n° 21NT00927, sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées, dans l'instance n° 20NT00207, par la société Terimmo sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et B... C... et la société civile immobilière C..., à la commune de Saint-Brévin-les-Pins et à la société Terimmo.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pérez, président de chambre,

Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

M. Bréchot, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 octobre 2022.

Le président-rapporteur,

A. PEREZ

La présidente-assesseure,

I.MONTES-DEROUET

La greffière,

A. LEMEE

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT00207, 21NT00927


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00207
Date de la décision : 07/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Alain PEREZ
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : ATLANTIC JURIS;SELARL CARADEUX CONSULTANTS;ATLANTIC JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-10-07;20nt00207 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award