Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 19 août 2021 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités suisses, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.
Par un jugement n° 2109518 du 31 août 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 novembre 2021, M. B..., représenté par Me Moreau Talbot, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 31 août 2021 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 19 août 2021 ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet de Maine-et-Loire de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les stipulations de l'article 7 du règlement du 26 juin 2013 ont été méconnues dès lors que la décision contestée ne permet pas de savoir sur la base de quel critère elle a été prise ;
- les stipulations de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 ont été méconnues dans la mesure où il n'est pas établi qu'il aurait reçu l'intégralité des brochures prévues par ces dispositions dans une langue qu'il comprend avant l'entretien ;
- les stipulations de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 ont été méconnues ;
- ni l'Italie, ni la Suisse ne peuvent être regardé comme l'Etat responsable de sa demande d'asile au regard des stipulations de l'article 13 du règlement du 26 juin 2013 ;
- les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ont été méconnues ; il n'est établi que la Suisse, qui a rejeté sa demande d'asile, ne le renverra pas en Erythrée où sa vie est en danger ;
- la décision contestée est par suite entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 et révèle un défaut d'examen de sa situation ;
- l'illégalité de la décision de transfert entache d'illégalité la décision d'assignation à résidence.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 février 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il indique que M. B... doit être regardé comme étant en fuite et soutient que les moyens soulevés par l'intéressé ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 octobre 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant érythréen, relève appel du jugement du 31 août 2021 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 août 2021 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités suisses, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que de l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par le premier juge, les moyens invoqués par le requérant, tirés de ce que la décision contestée serait contraire aux articles 4, 5, 7 et 13 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen de sa situation particulière, que l'intéressé réitère en appel, sans apporter de précisions nouvelles.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux (...). La demande est examinée par un seul Etat membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable (...) 2. Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Par ailleurs, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
4. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. Par ailleurs, eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations.
6. M. B... a indiqué lors de son entretien individuel, qui s'est tenu à la préfecture de la Loire-Atlantique le 16 juillet 2021, avoir été hébergé dans un appartement en Suisse avec d'autres demandeurs d'asile et y avoir été soigné. Il se borne par ailleurs à soutenir que sa demande d'asile déposée en Suisse a été rejetée et qu'il risque d'être renvoyé dans son pays d'origine où sa vie serait en danger. Il ne produit cependant aucune décision d'éloignement qui aurait été prise à son encontre par les autorités suisses et qui l'exposerait effectivement à un risque d'éloignement vers l'Erythrée. Par suite, et compte tenu de ce qui a été dit aux points 4 et 5, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne peut qu'être écarté.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'Etat membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'Etat membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". La faculté laissée aux autorités françaises, par les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement précité, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. Lors de son entretien individuel, M. B... a déclaré avoir contracté la tuberculose mais avoir été soigné en Suisse, tout en ajoutant qu'il était désormais en bonne santé. Il a indiqué en outre que sa femme et son enfant résidait en Ethiopie. Par suite, en se bornant à rappeler que sa demande d'asile a été rejetée en Suisse, M. B... n'établit pas qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et en prononçant son transfert aux autorités suisses, le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Par suite ce moyen ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
9. La décision de transfert aux autorités suisses n'étant affectée d'aucune des illégalités invoquées par M. B..., le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision d'assignation à résidence, ne peut qu'être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur le surplus des conclusions :
11. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. B... et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions principales.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 26 août 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- Mme Gélard, première conseillère,
- M. Giraud, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 septembre 2022.
La rapporteure,
V. GELARDLe président,
O. GASPON
La greffière,
I. PETTON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT03160