La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/07/2022 | FRANCE | N°22NT00292

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 12 juillet 2022, 22NT00292


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, le cas échéant après avoir saisi le juge judiciaire d'une question préjudicielle, la décision du 30 juillet 2021 par laquelle le président de la communauté de communes de ... a refusé de lui proposer un contrat de droit public aux fins de réintégrer la piscine intercommunale dont la gestion a été reprise en régie.

Par une ordonnance n° 2110022 du 3 décembre 2021, la présidente de la 7ème chambre du tribunal administratif

de Nantes a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétence pour e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, le cas échéant après avoir saisi le juge judiciaire d'une question préjudicielle, la décision du 30 juillet 2021 par laquelle le président de la communauté de communes de ... a refusé de lui proposer un contrat de droit public aux fins de réintégrer la piscine intercommunale dont la gestion a été reprise en régie.

Par une ordonnance n° 2110022 du 3 décembre 2021, la présidente de la 7ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétence pour en connaître.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 1er février, 18 mai et 9 juin 2022, M. B..., représenté par Me Chaigneau, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 3 décembre 2021 ;

2°) de reconnaître la compétence des juridictions administratives, le cas échéant après avoir saisi le juge judiciaire d'une question préjudicielle ;

3°) d'annuler la décision du 30 juillet 2021 ;

4°) d'enjoindre, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, à la communauté de communes de l'île de Noirmoutier de lui proposer un contrat de droit public reprenant les clauses substantielles de son contrat de droit privé dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de la communauté de communes le versement de la somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les juridictions administratives sont compétentes, sur le fondement des dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail, pour statuer sur les demandes d'annulation et d'injonction concernant les décisions des personnes publiques refusant de proposer un contrat de droit public aux salariés employés dans une structure de droit privé dont elles reprennent la gestion en régie ;

- la carence de la communauté de communes et le refus qu'elle lui a opposé sont entachés d'illégalité ;

- la circonstance que son licenciement a été prononcé antérieurement au transfert de l'activité à la communauté de communes atteste d'une démarche frauduleuse et est sans incidence sur l'obligation de cette dernière de lui proposer un contrat de droit public.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2022, et un mémoire enregistré le 3 juin 2022, la communauté de communes de ..., représentée par Me Tertrais, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique,

- les observations de Me Chaigneau, représentant M. B...,

- et les observations de Me Capul, substituant Me Tertrais, représentant la communauté de communes de ....

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 22 avril 2021, la communauté de communes de ... a décidé de reprendre en régie à compter du 20 mai 2021 la gestion du centre aquatique situé aux ... sur la commune de .... M. B... y exerçait les fonctions de chef de bassin. Par une décision du 5 février 2021, il a été licencié pour motif économique avec effet au 19 avril 2021. Le 1er juillet 2021, l'intéressé a sollicité auprès de la communauté de communes le bénéfice d'un contrat de travail de droit public en se prévalant des dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail. Par une décision du 30 juillet 2021, la collectivité a rejeté sa demande. Il relève appel de l'ordonnance du 3 décembre 2021 par laquelle le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cette décision au motif qu'elle était portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur la compétence des juridictions judiciaires :

2. Aux termes de l'article L. 311-1 du code de justice administrative : " Les tribunaux administratifs sont, en premier ressort, juges de droit commun du contentieux administratif, sous réserve des compétences que l'objet du litige ou l'intérêt d'une bonne administration de la justice conduisent à attribuer à une autre juridiction administrative ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... conteste la décision prise par la communauté de communes de ... refusant de lui accorder le bénéfice d'un contrat de travail de droit public. Cette décision, prise par une personne publique dans le cadre de la gestion d'un service public administratif, qui ne nécessite l'appréciation d'aucune notion relevant de la compétence du juge judiciaire, revêt le caractère d'un acte administratif. Par suite, le tribunal administratif de Nantes était compétent pour en apprécier sa légalité. Il s'ensuit que le requérant est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée rejetant sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

4. En conséquence, il y a lieu d'annuler l'ordonnance attaquée et de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les conclusions de la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nantes.

5. Aux termes de l'article L. 1224-3 du code du travail : " Lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires. / Sauf disposition légale ou conditions générales de rémunération et d'emploi des agents non titulaires de la personne publique contraires, le contrat qu'elle propose reprend les clauses substantielles du contrat dont les salariés sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération. / Les services accomplis au sein de l'entité économique d'origine sont assimilés à des services accomplis au sein de la personne publique d'accueil. / En cas de refus des salariés d'accepter le contrat proposé, leur contrat prend fin de plein droit. La personne publique applique les dispositions relatives aux agents licenciés prévues par le droit du travail et par leur contrat. ". Lorsque le juge administratif est saisi de recours en annulation dirigés contre un refus de la personne publique d'accueillir les demandes des salariés et qu'il lui est demandé d'enjoindre à la personne publique de leur proposer des contrats de droit public, il ne peut statuer, en cas de différend sur la réunion des conditions du transfert, qu'à l'issue de la décision du juge judiciaire, éventuellement saisi à titre préjudiciel.

6. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, M. B... avait été licencié par la société de droit privé qui l'employait et n'avait pas contesté cette décision devant le juge judiciaire. Par suite, en l'absence de différend constitué sur les conditions du transfert et dès lors qu'il n'était plus titulaire d'un contrat de droit privé à la date de la décision de la communauté de communes, il n'entrait pas dans les prévisions des dispositions précitées de l'article L. 1224-3 du code du travail. Dans ces conditions, à la date du 30 juillet 2021, la communauté de communes de ... était fondée à rejeter sa demande tendant à ce qu'elle lui accorde un contrat de travail de droit public sur le fondement de ces dispositions.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoins de saisir le juge judiciaire d'une question préjudicielle, que la demande présentée par M. B... ne peut qu'être rejetée.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté de communes de ..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. B... le versement à la communauté de communes de ... de la somme qu'elle sollicite sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2110022 du 3 décembre 2021, de la présidente de la 7ème chambre du tribunal administratif de Nantes est annulée.

Article 2 : La requête présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nantes ainsi que ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la communauté de communes de ... tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et à la communauté de communes de ....

Délibéré après l'audience du 24 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 juillet 2022.

La rapporteure,

V. GELARDLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de la transformation et de la fonction publiques en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT00292


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00292
Date de la décision : 12/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : CHAIGNEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-07-12;22nt00292 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award