Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil métropolitain de Rennes Métropole a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) de Rennes Métropole en ce qu'elle classe en zone NP le secteur du Manoir de l'Alleu et ne délimite pas un secteur de taille et de capacité d'accueil limitées (STECAL) tourisme-loisirs permettant la construction d'annexes liées à la destination et vocation touristique du site, à titre subsidiaire, en ce que le règlement de la zone NP n'autorise pas les annexes, même limitées, pour les hébergements hôteliers et touristiques.
Par un jugement n° 2001535 du 5 juillet 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 1er septembre 2021 et 18 janvier 2022, M. et Mme A..., représentés par Me Le Derf-Daniel, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil métropolitain de Rennes Métropole a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) de Rennes Métropole, à titre principal, en ce qu'elle classe en zone NP le secteur du Manoir de l'Alleu et ne délimite pas un secteur de taille et de capacité d'accueil limitées (STECAL) tourisme-loisirs permettant la construction d'annexes liées à la destination et vocation touristique du site, à titre subsidiaire, d'annuler cette délibération en ce que le règlement de la zone NP n'autorise pas les annexes, même limitées, pour les hébergements hôteliers et touristiques.
3°) d'enjoindre à Rennes Métropole de délibérer, à titre principal, sur une adaptation du classement des parcelles en cause sur le territoire de la commune de La Chapelle-Chaussée intégrant la délimitation appropriée d'un STECAL, autorisant la construction d'annexes, notamment les piscines, à titre subsidiaire, sur une adaptation du règlement du PLUI de Rennes Métropole autorisant en zone NP la construction d'annexes, dont les piscines, pour les sous-destinations correspondant à l'hébergement hôtelier et touristique ;
4°) de mettre à la charge de Rennes Métropole le versement de la somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement est entaché d'irrégularités ; il est entaché de contradictions internes ; il est insuffisamment motivé aux points 15 à 18 ;
- il n'est pas établi que les deux conférences des maires prévues par la délibération du 9 juillet 2015 relative aux modalités de collaboration avec les communes, avant le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) et avant l'arrêt du PLUI, ont été organisées ; la délibération contestée ne mentionne pas, dans ses visas, la tenue, conformément à son propre agenda prévisionnel, des deux conférences des maires qui auraient dû lui être antérieures, celle antérieure au débat sur les orientations générales du PADD et celle antérieure à l'arrêt du projet de PLUI ;
- de nombreuses modifications ont apportées au projet de plan à la suite de l'enquête publique ; une nouvelle enquête publique devait être diligentée ;
- le classement en zone NP de leurs parcelles n'est pas cohérent avec les orientations du PADD ;
- le classement en zone NP de leurs parcelles n'est pas compatible avec les orientations du schéma de cohérence territoriale (SCOT) ;
- ce classement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- ce classement est entaché d'un détournement de pouvoir.
Par des mémoires en défense enregistrés les 16 décembre 2021 et 2 février 2022 (ce dernier non communiqué), Rennes Métropole, représentée par Mes Mialot et Poulard, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,
- et les observations de Me Le Derf-Daniel, pour M. et Mme A... et C..., pour Rennes Métropole.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 5 juillet 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. et Mme A... tendant à l'annulation de la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil métropolitain de Rennes Métropole a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) de Rennes Métropole, à titre principal, en ce qu'il classe en zone NP le secteur du Manoir de l'Alleu et ne délimite pas un secteur de taille et de capacité d'accueil limitées (STECAL) tourisme-loisirs permettant la construction d'annexes liées à la destination et vocation touristique du site, à titre subsidiaire, en ce que le règlement de la zone NP n'autorise pas les annexes, même limitées, pour les hébergements hôteliers et touristiques. M. et Mme A... relèvent appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Contrairement à ce qui est soutenu, le jugement attaqué répond de manière circonstanciée aux points 13 à 18, aux moyens tirés de ce que le classement par la délibération contestée du secteur du Manoir de l'Alleu est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et de ce que les auteurs du plan auraient dû délimiter à cet endroit un secteur de taille et de capacité d'accueil limitées (STECAL). Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité sur ce point. Si les requérants soutiennent, également, que les premiers juges ont entaché leur jugement d'une contradiction de motifs, ce moyen, qui se rattache au bien-fondé du jugement attaqué, est sans incidence sur sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité externe :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 153-8 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme est élaboré à l'initiative et sous la responsabilité de : 1° L'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme, de document d'urbanisme en tenant lieu et de carte communale, en collaboration avec les communes membres. L'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale arrête les modalités de cette collaboration après avoir réuni une conférence intercommunale rassemblant, à l'initiative de son président, l'ensemble des maires des communes membres (...) ". Il ressort des pièces du dossier que plusieurs conférences des maires ont eu lieu les 2 février 2017, préalablement à l'adoption des orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) et le 13 novembre 2018, préalablement à l'arrêt du projet de plan local d'urbanisme, conformément aux prescriptions de l'article L. 153-8 du code de l'urbanisme. La circonstance que la délibération contestée ne mentionne pas dans ses visas " la tenue, conformément à son propre agenda prévisionnel, des deux Conférences des Maires qui auraient dû lui être antérieures, celle antérieure au débat sur les orientations générales du PADD et celle antérieure à l'arrêt du projet de PLUI " est sans incidence sur sa légalité.
4. En second lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, aux points 4 et 5 du jugement attaqué, le moyen tiré de ce que, compte tenu des nombreuses modifications apportées au projet de plan à l'issue de l'enquête publique, une nouvelle enquête publique aurait dû être diligentée, que les requérants réitèrent en appel sans apporter aucune précision nouvelle.
En ce qui concerne la légalité interne :
S'agissant de l'incohérence de ce classement avec le projet d'aménagement et de développement durables :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-2 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme comprend : / 1° Un rapport de présentation ; / 2° Un projet d'aménagement et de développement durables (...) ". Aux termes de l'article L. 151-5 du même code : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit : / 1° Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques. / 2° Les orientations générales concernant l'habitat, les transports et les déplacements (...) le développement économique et les loisirs, retenues pour l'ensemble de l'établissement public de coopération intercommunale ou de la commune (...). ". Aux termes de l'article L. 151-8 du même code : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". Aux termes de l'article L. 151-9 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ".
6. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.
7. Il ressort des pièces du dossier que, si le projet d'aménagement et développement durables du plan local d'urbanisme intercommunal comporte, notamment, une orientation n° 1 " Une métropole attractive et entrainante au bénéfice de tous ", et une orientation n° 8 " Construire une " métropole du bien-être au service de ses habitants " qui tendent à renforcer les activités de tourisme et de loisirs, ces deux orientations ainsi que l'orientation n°6 " Des villes compactes / intenses pour favoriser la proximité, la mixité et la sobriété " et l'orientation 7 " Valoriser l'armature agro-naturelle pour structurer le territoire " visent aussi à préserver les espaces naturels, les paysages, la trame verte et bleue, les rivières et les zones humides et à protéger les " Milieux Naturels d'Intérêt Ecologique (MNIE) " " les réservoirs de biodiversité " et les continuités écologiques.
8. Il ressort également des pièces du dossier que les parcelles cadastrées à la section B sous les n°s 343 et 1050 dont les requérants sont propriétaires sur le territoire de la commune de La Chapelle-Chaussée, dans le secteur du Manoir de l'Alleu, se situent à proximité immédiate du secteur " Le Champ Mignon " et du secteur " Bois du Hingrais ", tous deux classés " Milieux Naturels d'Intérêt Ecologique " de type zone humide par l'Atlas des Milieux Naturels d'Intérêt Ecologique. Dans ces conditions, le classement de ces parcelles en zone naturelle NP définie par le règlement comme une zone qui doit bénéficier d'une protection renforcée laquelle exclut, notamment, la construction de piscines, ne révèle pas une incohérence entre le projet d'aménagement et de développement durables et le règlement du plan local d'urbanisme.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme (...) sont compatibles avec : / 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 ; (...). ". Aux termes de l'article L. 142-1 du même code : " Sont compatibles avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale : / 1° Les plans locaux d'urbanisme (...) ".
10. Il ressort des pièces du dossier que le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Pays de Rennes classe le secteur dans lequel sont comprises les parcelles en cause parmi les zones dans lesquelles la " perméabilité écologique est à encourager, à la lisière d'un fonds de vallée qui constitue une grande liaison naturelle à conforter ". Par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité du plan local d'urbanisme avec le SCOT doit être écarté.
11. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / (...) 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; / 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues. ". Enfin, aux termes de l'article L. 151-13 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le règlement peut, à titre exceptionnel, délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées dans lesquels peuvent être autorisés : / 1° Des constructions (...) ".
12. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de définir, en conséquence, le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
13. Eu égard au parti d'urbanisme retenu tel qu'il a été exposé précédemment, qui vise à préserver les espaces naturels de l'urbanisation et à la situation des parcelles cadastrées B 343 et B 1050, à proximité de zones identifiées en " Milieux Naturels d'Intérêt Ecologique " de type zone humide, à proximité d'un fonds de vallée constituant une grande liaison naturelle à conforter au sens du document d'orientations et d'objectifs du SCOT, dans un secteur à dominante naturelle, leur classement en zone naturelle NP et l'absence d'intégration de ces parcelles dans un STECAL ne sont pas entachés d'erreur manifeste d'appréciation.
14. En dernier lieu, ainsi qu'il résulte du point précédent, le classement en litige répond à un objectif d'intérêt général de préservation, dans le secteur considéré, des espaces naturels. Par suite, le moyen tiré du détournement de pouvoir dont il serait entaché ne peut qu'être écarté.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
16. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de M. et Mme A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par les intéressés doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Rennes Métropole, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. et Mme A... de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme A... le versement à Rennes Métropole d'une somme de 1 000 euros au titre des mêmes frais.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme A... verseront à Rennes Métropole une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et à Rennes Métropole.
Délibéré après l'audience du 17 juin 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- Mme Buffet, présidente-assesseure,
- M. Frank, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.
La rapporteure,
C. B...Le président,
J. FRANCFORT
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT02468