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01/07/2022 | FRANCE | N°21NT00492

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 01 juillet 2022, 21NT00492


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... F..., Mme B... F... et l'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) F... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du

4 septembre 2017 de la commission départementale d'aménagement foncier (CDAF) du Morbihan en tant qu'elle a rejeté leur réclamation relative au projet d'aménagement foncier sur la commune de Moréac et a approuvé le procès-verbal d'aménagement foncier et le nouveau parcellaire, ainsi que l'arrêté du président du conseil départemen

tal du Morbihan du 21 novembre 2017 ordonnant le dépôt en mairie du plan définitif d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... F..., Mme B... F... et l'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) F... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du

4 septembre 2017 de la commission départementale d'aménagement foncier (CDAF) du Morbihan en tant qu'elle a rejeté leur réclamation relative au projet d'aménagement foncier sur la commune de Moréac et a approuvé le procès-verbal d'aménagement foncier et le nouveau parcellaire, ainsi que l'arrêté du président du conseil départemental du Morbihan du 21 novembre 2017 ordonnant le dépôt en mairie du plan définitif d'aménagement.

Par un jugement n°1705803 du 22 décembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 18 février 2021, 8 février 2022 et 16 mars 2022 (non communiqué), M. et Mme F... et l'EARL F..., représentés par Me Lahalle, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 décembre 2020 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler la décision de la CDAF du Morbihan du 4 septembre 2017 en tant qu'elle a rejeté leur réclamation relative au projet d'aménagement foncier sur la commune de Moréac et a approuvé le procès-verbal d'aménagement foncier et le nouveau parcellaire ;

3°) d'annuler l'arrêté du président du conseil départemental du Morbihan du 21 novembre 2017 ordonnant le dépôt en mairie du plan définitif d'aménagement ;

4°) d'enjoindre à la commission départementale d'aménagement foncier de réexaminer leur réclamation ;

5°) de mettre à la charge du département du Morbihan la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision de la CDAF est entachée d'un premier vice de procédure, dès lors que les observations orales de M. et Mme F... durant la séance de la commission n'ont pas été reprises dans le procès-verbal de cette séance, contrairement à ce que prévoient les dispositions de l'article R. 121-11 du code rural et de la pêche maritime ;

- la décision de la CDAF est entachée d'un deuxième vice de procédure, dès lors que la CDAF n'a pas siégé dans une composition conforme aux dispositions de l'article L. 121-8 du code rural et de la pêche maritime et qu'en particulier, les preneurs et propriétaires exploitants membres de cette commission n'ont pas été convoqués et n'étaient pas présents ;

- la décision de la CDAF est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 121-17 du code rural et de la pêche maritime en ce qu'elle s'est considérée incompétente pour statuer sur leur réclamation tendant à la modification du chemin de Galvrout, dès lors que cette modification relevait aussi de sa compétence et que la délibération du conseil municipal du 7 avril 2017 approuvant ce tracé a été annulée par le tribunal administratif de Rennes ;

- c'est à tort que le tribunal a jugé que les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 123-3 et L. 123-4 du code rural et de la pêche maritime et de l'erreur manifeste d'appréciation entachant le tracé de la déviation du Galvrout étaient irrecevables, dès lors qu'ils ont soulevé devant la CDAF la question de l'équilibre des comptes et ont contesté devant cette instance l'emplacement de la déviation du Galvrout et l'emprise sur leurs bâtiments ;

- l'annulation de la délibération du conseil municipal du 7 avril 2017 approuvant le tracé de la déviation du Galvrout entraîne nécessairement par voie de conséquence celle de la décision de la CDAF contestée en ce qu'elle rejette la réclamation à cet égard ;

- la décision de la CDAF contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle rejette sa réclamation relative à la déviation du Galvrout, qui ne poursuit aucun objectif d'intérêt général, pose un problème d'accès à un hangar situé sur la parcelle n° 11, aggrave leurs conditions d'exploitation et crée un enclavement de leurs parcelles ;

- la décision de la CDAF méconnaît les dispositions de l'article L. 123-2 du code rural et de la pêche maritime, dès lors que trois bâtiments devaient leur être réattribués en application de ces dispositions ;

- elle est illégale en ce qu'elle valide la création d'un nouveau chemin rural au même endroit que celui qu'ils ont créé pour leur exploitation, dès lors que cette création ne poursuit aucun intérêt public et que ce chemin aurait dû leur être réattribué ; elle est entachée d'un défaut de base légale, dès lors que la délibération du conseil municipal d'Elvellys du 7 avril 2017 approuvant la création de ce chemin rural a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Rennes du 25 février 2021 et que le conseil municipal de Moréac, sur le territoire de laquelle le chemin est également situé, n'a pas approuvé cette création ;

- la décision de la CDAF méconnaît les dispositions des articles L. 123-4 et suivants du code rural et de la pêche maritime, dès lors que les parcelles qui leur ont été attribuées n'ont pas la même valeur que celles qu'ils ont apportées.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 décembre 2021 et 11 mars 2022, le département du Morbihan, représenté par Me Labetoule, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 123-2 et

L. 123-4 du code rural et de la pêche maritime sont irrecevables, faute d'avoir été présentés au préalable devant la CDAF, et au surplus, infondés ;

- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés ;

- l'annulation de la décision de la CDAF n'aurait pas pour conséquence celle de l'arrêté du président du conseil départemental du Morbihan du 21 novembre 2017 ordonnant le dépôt en mairie du plan définitif d'aménagement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 décembre 2021, Mme et M. C... E..., représentés par Me Maupetit, concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- les moyens relatifs à la contestation de l'équilibre des comptes et du tracé du hameau de Galvrout sont irrecevables, dès lors qu'ils n'ont pas été présentés par écrit devant la CDAF, et au surplus, infondés ;

- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,

- et les observations de Me Vautier, représentant M. et Mme F... et l'EARL F..., de Me Le Cadet, représentant le département du Morbihan, et de Me Dupont, représentant M. et Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. Le président du conseil départemental du Morbihan a, par un arrêté du 14 mai 2012, ordonné l'aménagement foncier agricole et forestier d'une partie des communes de Bignan, Moréac, Naizin et Remungol en vue de la réalisation des projets de déviation de la route départementale n° 767, pour éviter la commune de Locminé, et d'aménagement de la section de cette route comprise entre cette commune et le lieu-dit Siviac. M. et Mme F... sont propriétaires de parcelles sur les communes de Remungol, devenue Evellys après fusion des communes de Remungol-Moustoir et de Moréac, dans le département du Morbihan, qui sont exploitées par l'EARL F..., dont certaines sont comprises dans le périmètre de l'aménagement foncier. Le 11 mai 2017, la commission intercommunale d'aménagement foncier compétente a, après une enquête publique conduite du 13 mars au 14 avril 2017, notamment maintenu le projet soumis à enquête en ce qui concerne les attributions de Mme et M. F... et soumis aux conseils municipaux de Moréac et Evellys leur demande de suppression de chemin au Galvrout. Mme et M. F... ont formé une réclamation auprès de la commission départementale d'aménagement foncier (CDAF) du Morbihan contre la décision de la commission intercommunale. Le 4 septembre 2017, la CDAF a modifié la forme de la parcelle XY 27 située à Moréac et a maintenu les plans soumis à enquête en ce qui concerne le reste de la propriété de Mme et M. F... ainsi que la déviation de la voie communale traversant la zone bâtie du Galvrout à Evellys. Par un jugement du 22 décembre 2020, dont M. et

Mme F... et l'EARL F... relèvent appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 4 septembre 2017 en tant qu'elle a rejeté leur réclamation et de l'arrêté du président du conseil départemental du Morbihan du

21 novembre 2017 ordonnant le dépôt en mairie du plan définitif d'aménagement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-10 du code rural et de la pêche maritime : " La commission départementale d'aménagement foncier a qualité pour modifier les opérations décidées par la commission communale ou intercommunale d'aménagement foncier. ". Aux termes de l'article R. 121-11 du code rural et de la pêche maritime : " Les intéressés présentent par écrit à la commission départementale d'aménagement foncier leurs observations et réclamations. Sur leur demande adressée par écrit au président de cette commission, ils sont entendus par celle-ci. / La commission départementale peut, en outre, convoquer devant elle ceux des intéressés qu'elle juge devoir être entendus / Les observations et réclamations adressées par écrit à la commission sont inscrites sur un registre d'ordre ; il en est donné récépissé. Il est tenu procès-verbal des dires des intéressés. ".

3. Si M. et Mme F... et l'EARL F... soutiennent que les observations faites par les premiers lors de la séance du 4 septembre 2017 de la CDAF du Morbihan n'ont pas été retranscrites dans le procès-verbal de cette séance, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces observations auraient eu un autre objet que de reprendre ou de développer les éléments que comportait leur réclamation écrite, à laquelle la commission a répondu, s'agissant, en particulier, de l'absence de réception d'un courriel leur transmettant le plan des parcelles en litige. Par suite, les requérants n'ayant pas été privés d'une garantie, le moyen tiré de l'illégalité de la décision de la commission au regard des dispositions précitées de l'article R. 121-11 du code rural et de la pêche maritime en l'absence d'un procès-verbal des dires des intéressés doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-8 du code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction applicable : " La commission départementale d'aménagement foncier est ainsi composée : / 1° Un commissaire enquêteur désigné par le président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel la commission a son siège, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, président ; / 2° Quatre conseillers départementaux et deux maires de communes rurales ; / 3° Six personnes qualifiées désignées par le président du conseil départemental ; / 4° Le président de la chambre d'agriculture ou son représentant désigné parmi les membres de la chambre d'agriculture ; / 5° Les présidents ou leurs représentants de la fédération ou de l'union départementale des syndicats d'exploitants agricoles et de l'organisation syndicale départementale des jeunes exploitants agricoles les plus représentatives au niveau national ; / 6° Les représentants des organisations syndicales d'exploitants agricoles représentatives au niveau départemental ; / 7° Le président de la chambre départementale des notaires ou son représentant ; / 8° Deux propriétaires bailleurs, deux propriétaires exploitants, deux exploitants preneurs, désignés par le président du conseil départemental, sur trois listes comprenant chacune six noms, établies par la chambre d'agriculture ; / 9° Deux représentants d'associations agréées en matière de faune, de flore et de protection de la nature et des paysages désignés par le président du conseil départemental. Le président du conseil départemental choisit, en outre, sur ces listes, six suppléants, à raison d'un par membre titulaire, appelés à siéger, soit en cas d'absence du titulaire, soit lorsque la commission départementale est appelée à délibérer sur des réclamations concernant une opération dans le périmètre de laquelle l'un des membres titulaires est propriétaire. (...). ".

5. Il ressort du procès-verbal de la réunion de la CDAF du Morbihan du 4 septembre 2017 qu'y ont siégé dix-huit des membres de cette commission, dont sa présidente, sur les

vingt-huit membres qui la composaient et qui avaient été désignés par un arrêté du 23 octobre 2015 du président du conseil départemental conformément aux dispositions précitées de l'article L. 121-8 du code rural et de la pêche maritime. La CDAF a ainsi siégé dans une composition lui permettant de délibérer valablement, en vertu des dispositions de l'article R. 121-4 du code rural et de la pêche maritime, dès lors que la moitié au moins de ses membres, dont sa présidente, étaient présents. En outre, il ressort des lettres adressées aux membres de cette commission, datées du 31 juillet 2017, que ceux-ci ont bien été convoqués alors que les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir une absence de convocation. Par suite, et alors même que des preneurs et propriétaires exploitants membres de cette commission n'étaient pas présents lors de la réunion de la CDAF du Morbihan du 4 septembre 2017, le moyen tiré de l'irrégularité de sa composition doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 121-17 du code rural et de la pêche maritime : " La commission communale, au cours des opérations de délimitation des ouvrages faisant partie du domaine communal, propose à l'approbation du conseil municipal l'état : (...) / 2° Des modifications de tracé et d'emprise qu'il convient d'apporter au réseau des chemins ruraux et des voies communales. (...) / Le conseil municipal, lorsqu'il est saisi par la commission communale d'aménagement foncier de propositions tendant à la suppression de chemins ruraux ou à la modification de leur tracé ou de leur emprise, est tenu de se prononcer dans le délai de deux mois à compter de la notification qui en sera faite au maire et qui devra reproduire le texte du présent article. Ce délai expiré, le conseil municipal est réputé avoir approuvé les suppressions ou modifications demandées. / (...) La création de chemins ruraux, la création et les modifications de tracé ou d'emprise des voies communales ne peuvent intervenir que sur décision expresse du conseil municipal. ". Il résulte de ces dispositions que le conseil municipal est seul compétent, sur proposition des commissions d'aménagement foncier ou de sa propre initiative pour décider la création, la suppression ou la modification du tracé ou de l'emprise des chemins ruraux, les décisions du conseil municipal s'imposant aux commissions dans tous les cas. En se regardant comme incompétente pour statuer sur la réclamation des requérants relative au tracé du chemin du Galvrout, la CDAF n'a, dès lors, pas entaché sa décision d'une irrégularité ou d'une erreur de droit au regard de ces dispositions. La délibération du conseil municipal du

7 avril 2017 approuvant ce tracé ne constituant pas la base légale de la décision contestée, le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité de cette délibération ne peut dès lors qu'être écarté comme inopérant. La circonstance que cette délibération a été annulée par le tribunal administratif de Rennes, par un jugement du 15 février 2021, est également sans incidence sur la légalité de la décision contestée de la CDAF.

7. En quatrième lieu, à l'exception des moyens d'ordre public ou de ceux relatifs à la régularité de la procédure, les moyens qui n'ont pas été invoqués devant la commission départementale d'aménagement foncier ne peuvent, à peine d'irrecevabilité, être présentés pour la première fois devant le juge administratif à l'appui d'une demande d'annulation de la décision de cette commission. Or, il ressort de la réclamation adressée par les requérants à la CDAF du Morbihan que ceux-ci n'ont pas invoqué devant cette commission de moyens tirés la méconnaissance des dispositions de l'article L. 123-2 du code rural et de la pêche maritime relatives à la réattribution de certains bâtiments et terrains ou de l'enclavement de certaines des parcelles d'attributions. De plus, si cette réclamation précise que les requérants renoncent à leur demande relative la déviation du hameau de Galvrout, ils ne peuvent être regardés comme ayant invoqué, par-là, un moyen contestant le tracé de cette déviation et à l'aggravation de leurs conditions d'exploitation. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 123-2 du code rural et de la pêche maritime, de l'enclavement de certaines de leurs parcelles, de l'erreur manifeste d'appréciation entachant le tracé de la déviation en cause et de l'aggravation des conditions d'exploitation, présentés pour la première fois devant le juge administratif, doivent, par suite, être écartés comme irrecevables, ainsi que le font valoir le département du Morbihan et M. et Mme E....

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 123-4 du code rural et de la pêche maritime : " Chaque propriétaire doit recevoir, par la nouvelle distribution, une superficie globale équivalente, en valeur de productivité réelle, à celle des terrains qu'il a apportés, déduction faite de la surface nécessaire aux ouvrages collectifs mentionnés à l'article L. 123-8 et compte tenu des servitudes maintenues ou créées. (...) ". Ces dispositions ne garantissent aux propriétaires ni une égalité absolue entre la surface qui leur est attribuée et celle de leurs apports, ni une équivalence parcelle par parcelle ou classe par classe entre ces terres. Les commissions d'aménagement foncier sont seulement tenues d'attribuer des lots équivalents en valeur de productivité réelle aux apports de chaque propriétaire après déduction de la surface nécessaire aux ouvrages collectifs. La règle de l'équivalence entre les apports et les attributions s'apprécie non parcelle par parcelle mais pour l'ensemble d'un compte de propriété.

9. En faisant valoir dans leur réclamation devant la commission départementale qu'ils n'avaient pas reçu le courriel leur transmettant le plan des parcelles en litige, les requérants ne peuvent être regardés comme ayant soulevé le moyen tiré de la méconnaissance de la règle d'équivalence par l'opération d'aménagement foncier en litige. Le moyen tiré de la méconnaissance de cette règle est, dès lors, irrecevable, comme l'ont fait valoir le département du Morbihan et M. et Mme E.... Au demeurant, si les requérants soutiennent que le classement de leur parcelles d'attribution appliqué par la commission départementale est erroné, le rapport d'expertise, du 8 juin 2018, qui a été rendu à leur initiative par un expert agricole et foncier, et a conclu à un déséquilibre entre la valeur de leurs apports et celle de leurs attributions, qui n'a pas été élaboré de façon contradictoire, ne suffit toutefois pas à l'établir. S'ils soutiennent également que les parcelles bâties qui leur ont été attribuées ont été classées comme " terres 2 " alors que les autres parcelles situées à proximité au Faouëdo ont été classées moins favorablement comme " terres 3 ", cela ne ressort pas des pièces du dossier. De même, s'ils font valoir la présence d'anciennes porcheries, ayant vocation à être démantelées, sur la parcelle

n° XY 1, cette circonstance ne permet pas de démontrer que le classement de cette parcelle comme " terre 2 " serait erroné et que celle-ci conserverait une productivité médiocre et devrait être classée, beaucoup moins favorablement comme " terre 6 ". En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le classement comme " terre 2 " de la parcelle n° XY 27, qui est incluse dans une surface ayant ce même classement, serait erroné, alors même qu'elle comporterait de la végétation dissimulant des constructions. De plus, contrairement à ce que soutiennent les requérants, leur ancienne parcelle n° ZL 77 a bien été prise en compte dans leurs apports. Si ces derniers reprochent encore à la CDAF de ne pas leur avoir réattribués certaines parcelles, dont la parcelle n° XY 15, l'équilibre d'un compte de propriété ne s'apprécie pas ainsi qu'il a été dit parcelle par parcelle, mais dans son ensemble. Or, l'aménagement foncier agricole en litige a entraîné pour le compte de propriété n° 456 de Mme et M. F..., un gain en surface de 1,22 % et un gain de 1,89 % en valeur de productivité et, pour le compte de propriété n° 457, une perte de 1,73 % en surface et une perte de 0,06 % en valeur de productivité. Dans ces conditions, la règle d'équivalence entre les apports et les attributions a été respectée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 123-4 du code rural et de la pêche maritime doit être écarté.

10. En cinquième lieu, si les requérants soutiennent qu'ils ont créé sur leur parcelle un chemin d'exploitation, situé à la limite des territoires des communes d'Evellys et de Moréac, et que le nouveau chemin rural prévu par l'aménagement foncier en litige se trouve au même endroit, cela ne ressort pas des photographies et des cartes qu'ils versent au débat. Il ressort au contraire des plans et photographies produits par le département du Morbihan que ce chemin rural existait antérieurement. En outre, la décision de la CDAF, en tant qu'elle rejette leur réclamation concernant le tracé de ce chemin, au motif, qui n'est pas erroné comme il a été dit au point 6

ci-dessus, que cette commission était incompétente pour le modifier, n'a pas pour base légale la délibération des conseils municipaux d'Evellys et de Moréac approuvant les propositions de la commission intercommunale d'aménagement foncier approuvant le tracé de ce chemin. Le moyen tiré du défaut de base légale de cette décision ne peut donc qu'être écarté comme inopérant.

11. En dernier lieu, l'illégalité de la décision contestée de la CDAF n'étant pas établie, les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du président du conseil départemental du Morbihan du 21 novembre 2017 ordonnant le dépôt en mairie du plan définitif d'aménagement ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.

12. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme F... et l'EARL F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté, par le jugement attaqué, leur demande tendant à l'annulation de la décision du 4 septembre 2017 et, par voie de conséquence, de l'arrêté du président du conseil départemental du Morbihan du

21 novembre 2017 ordonnant le dépôt en mairie du plan définitif d'aménagement.

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge du département, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et

Mme F... et l'EARL F... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge des requérants, les sommes que le département du Morbihan et M. et Mme E... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme F... et de l'EARL F... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du département du Morbihan et de M. et Mme E... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M A... F..., à Mme B... F..., à l'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) F..., à M. C... E... et Mme E... et au département du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- M. Catroux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe 1er juillet 2022.

Le rapporteur

X. D...Le président

D. SALVI

Le greffier

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21NT00492


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00492
Date de la décision : 01/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. Xavier CATROUX
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : CHROME AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-07-01;21nt00492 ?
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