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28/06/2022 | FRANCE | N°21NT02523

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 28 juin 2022, 21NT02523


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2017 par lequel le président du centre communal d'action sociale (CCAS) de ...l'a suspendue, à titre conservatoire, de ses fonctions ainsi que la décision rejetant ses conclusions indemnitaires tendant à la réparation des préjudices résultant de l'illégalité de cette décision.

Par un jugement n° 1708395 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure de

vant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 8 et 13 septembre 2021 et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2017 par lequel le président du centre communal d'action sociale (CCAS) de ...l'a suspendue, à titre conservatoire, de ses fonctions ainsi que la décision rejetant ses conclusions indemnitaires tendant à la réparation des préjudices résultant de l'illégalité de cette décision.

Par un jugement n° 1708395 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 8 et 13 septembre 2021 et 23 février 2022, Mme C..., représentée par Me Deniau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 13 juillet 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2017 ;

3°) de condamner le CCAS de ... à lui verser la somme de 10 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa réclamation préalable et de leur capitalisation, en réparation du préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence subis du fait de l'illégalité de cette décision ;

4°) de mettre à la charge du CCAS de ... le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- ses conclusions indemnitaires sont recevables ;

- l'arrêté contesté, qui ne mentionne pas l'incompatibilité de son comportement avec les impératifs de service, est entaché d'une erreur de droit ; les faits qui lui sont reprochés ne sont pas d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de son activité professionnelle au sein de la structure ;

- cette décision repose sur des faits inexacts ; elle est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le président du CCAS a entaché sa décision d'un détournement de pouvoir ;

- le CCAS a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en la suspendant de ses fonctions ;

- son préjudice moral et les troubles dans ses conditions d'existence doivent être évalués à 10 000 euros dès lors que cette décision porte atteinte à son image vis-à-vis de ses collègues.

Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 février et 19 avril 2022, le centre communal d'action social de ..., représenté par Me Meunier, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient, à titre principal, que les conclusions indemnitaires de la requête présentée par Mme C... sont irrecevables à défaut d'avoir été précédées d'une réclamation préalable et, à titre subsidiaire, que les moyens soulevés par l'intéressée ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique,

- les observations de Me Jagueux, substituant Me Deniau, représentant Mme C...,

- et les observations de Me Meunier, représentant le CCAS de ....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... a été recrutée à compter du 3 août 2015 par le centre communal d'action sociale (CCAS) de ... en qualité d'attachée contractuelle pour occuper les fonctions de responsable de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ... et du foyer logement .... Son contrat de trois ans a été renouvelé du 1er août 2016 au 31 juillet 2019. Toutefois, par un arrêté du 5 septembre 2017, l'intéressée a été suspendue, à titre conservatoire, de ses fonctions. Mme C... relève appel du jugement du 13 juillet 2021, par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ainsi que ses conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. La mesure de suspension susceptible d'être prise à l'égard d'un agent public, revêt le caractère non d'une sanction disciplinaire, mais d'une mesure conservatoire prise dans l'intérêt du service. Une telle mesure peut être prononcée lorsque les faits imputés à cet agent présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité et que la poursuite des activités de l'intéressé présente des inconvénients suffisamment sérieux pour le service.

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le directeur du CCAS de ... a été informé, au cours des mois de juillet et août 2017, de dysfonctionnements répétés au sein des établissements dont Mme C... avait la responsabilité. Les témoignages émanaient tant du personnel placé sous sa responsabilité, que des professionnels de santé apportant leur concours à ces établissements, qui dénonçaient tous des pratiques managériales particulièrement autoritaires et peu respectueuses des agents. Plusieurs familles des résidents de ces établissements se plaignaient également de la mauvaise gestion de la maison de retraite et des réactions inappropriées de Mme C... à leur encontre lorsqu'ils dénonçaient le mauvais traitement de leurs proches. Compte tenu de l'ensemble des documents produits, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée reposerait sur des faits dont la vraisemblance n'était pas établie. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.

4. En deuxième lieu, les nombreux témoignages mettant en cause les méthodes managériales de Mme C... attestent de leur vraisemblance et de leur gravité au regard de la particulière vulnérabilité du public pris en charge. Ils étaient de nature à justifier la suspension de ses fonctions à titre conservatoire. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée serait entachée d'une erreur d'appréciation.

5. En troisième lieu, si Mme C... se prévaut du fait que l'arrêté contesté ne mentionne pas l'incompatibilité de son comportement avec les impératifs de service, les décisions portant suspension à titre conservatoire ne constituent pas des décisions devant être motivées. En revanche, les faits attestent de la nécessité de faire cesser au plus vite les agissements unanimement dénoncés, tant à l'égard des résidents que du personnel des établissements et des professionnels de santé apportant leur concours. Dans les circonstances de l'espèce, le délai qui s'est écoulé entre la date à laquelle le CCAS a eu connaissance des faits incriminés, vers la fin du mois d'août 2017, et l'édiction de la décision litigieuse n'est pas de nature à établir l'erreur de droit alléguée.

6. En dernier lieu, la circonstance que le directeur du CCAS a demandé à plusieurs reprises aux agents du service des ressources humaines de consigner au dossier de Mme C... certaines pièces attestant de son comportement ne suffit pas à établir le détournement de pouvoir allégué par la requérante. En outre, si l'intéressée fait valoir que, depuis le 1er janvier 2017, la responsabilité de l'Ehpad a été confiée à un agent de la commune de ... mis à disposition du CCAS auquel il fallait trouver une affectation, cette considération largement antérieure à la décision de suspension contestée, est sans incidence sur sa légalité.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le CCAS de ..., que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du CCAS de ..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme C... de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme C... le versement au CCAS de ... d'une somme de 1 000 euros au titre des mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Mme C... versera au CCAS de ... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au centre communal d'action sociale de ....

Délibéré après l'audience du 13 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 juin 2022.

La rapporteure,

V. GELARDLe président,

O. GASPON

La greffière,

I.PETTON

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT02523


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT02523
Date de la décision : 28/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : SELARL CADRAJURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-06-28;21nt02523 ?
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