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24/06/2022 | FRANCE | N°21NT01730

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 24 juin 2022, 21NT01730


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... et Mme A... F... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en poste en Arménie rejetant la demande de visa de long séjour présentée par Mme B... en qualité d'ascendante à charge d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 2009788 du 12 avril 2

021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... et Mme A... F... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en poste en Arménie rejetant la demande de visa de long séjour présentée par Mme B... en qualité d'ascendante à charge d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 2009788 du 12 avril 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juin 2021 et le 10 janvier 2022, Mme B... et Mme F... épouse C..., représentées par Me Lelouey, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 12 avril 2021 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer la demande de visa, sous la même astreinte.

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elles soutiennent que :

- Mme B..., qui est isolée en Arménie dépend financièrement G... F... épouse C..., laquelle dispose d'un logement permettant d'accueillir sa mère ;

- sa seconde fille, également de nationalité française, présente un état de santé dégradé qui ne lui permet pas de rendre visite à sa mère en Arménie tandis que Mme F... épouse C... est très sollicitée dans l'accompagnement médical de sa sœur ;

- le refus de visa est entaché d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 décembre 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport G... D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante arménienne née le 12 janvier 1947, a demandé un visa de long séjour pour établissement familial en se prévalant de sa qualité d'ascendante d'une ressortissante française, Mme F... épouse C.... Le refus opposé par les autorités consulaires françaises en poste en Arménie a été implicitement confirmé par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France. Mme B... et Mme F... épouse C... relèvent appel du jugement du 12 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, lorsqu'elles sont saisies d'une demande tendant à la délivrance d'un visa de long séjour par un ressortissant étranger faisant état de sa qualité d'ascendant à charge de ressortissant français, les autorités consulaires peuvent légalement fonder leur décision de refus sur la circonstance que le demandeur ne saurait être regardé comme étant à la charge de son descendant, dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son descendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire.

3. Les appelantes soutiennent que depuis l'accident vasculaire cérébral dont a été victime Mme B... en mai 2019, celle-ci ne perçoit plus de revenu de son activité commerciale, laquelle n'a pas été mise en gérance. S'il ressort des pièces du dossier que l'invalidité de l'intéressée a été reconnue par une décision du 5 septembre 2019 et que son état de santé nécessitait alors, notamment, une réadaptation socio-psychologique, la seule production d'un certificat faisant état d'une radiation d'activité en février 2021, soit postérieurement à la décision en litige, ne suffit pas à tenir pour établie la perte de tout revenu issu de ce commerce. Il n'est pas davantage établi que les seules ressources propres G... B... se limiteraient à sa modeste pension de retraite alors que le ministre de l'intérieur a fait valoir sans être contredit qu'elle était propriétaire de deux biens immobiliers. De même, ont été produits devant les premiers juges des relevés bancaires dont il ressort que Mme B... détenait en 2019 des avoirs de 4 977 USD, 6 000 USD, 2 0404 USD et 3 560 euros. Si les requérantes indiquent que ces sommes correspondent à l'épargne que Mme B... a utilisée en intégralité pour payer les dépenses de santé consécutives à son accident vasculaire cérébral, elles n'apportent aucune justification au soutien de cette allégation. Dans ces conditions, en estimant que Mme B... disposait de ressources propres de sorte qu'elle ne pouvait être regardée comme ascendante à charge d'un ressortissant français, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a entaché sa décision ni d'erreur de fait ni d'erreur manifeste d'appréciation.

4. En second lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Mme B... est veuve depuis 1991. Trois de ses quatre enfants, dont deux filles de nationalité française, ainsi que ses petits-enfants résident en France. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que si son fils poursuit des études à Dijon, il y séjourne de manière irrégulière et n'a ainsi pas, en principe, vocation à demeurer sur le territoire français. Par ailleurs, la résidence éloignée de la troisième fille G... B..., à deux heures d'Erevan puis en Russie, n'est pas établie. Il ressort, il est vrai, des pièces du dossier que l'une des filles françaises G... B... a dû subir en 2021 un traitement médical lourd et régulier faisant obstacle à ce qu'elle puisse rendre visite à sa mère en Arménie. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que, à la date de la décision contestée, elle n'était pas en mesure de voyager. En outre, si Mme B... indique que ses demandes de visa de court séjour sont systématiquement rejetées, il lui appartient, si elle s'y croit fondée, d'en demander l'annulation en temps utile, en se prévalant de sa situation familiale.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande en tant qu'elle émane G... F... épouse C..., que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur le surplus des conclusions :

7. Doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par les requérantes ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête G... B... et Mme F... épouse C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B..., à Mme A... F... épouse C... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pérez, président de chambre,

Mme Douet, présidente-assesseure,

Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 juin 2022.

La rapporteure,

K. D...

Le président,

A. PEREZLa greffière,

A. LEMEE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21NT01730002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01730
Date de la décision : 24/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : LELOUEY

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-06-24;21nt01730 ?
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