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24/06/2022 | FRANCE | N°21NT00978

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 24 juin 2022, 21NT00978


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Nadiphia Atlantic a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2017 par lequel le maire de Sainte-Luce-sur-Loire a sursis à statuer sur la déclaration préalable de travaux déposée le 15 juin 2017.

Par un jugement no 1708024 du 2 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er avril 2021 et le 30 novembre 2021, la société Nadiphia Atla

ntic, représentée par Me Seychal, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Nadiphia Atlantic a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2017 par lequel le maire de Sainte-Luce-sur-Loire a sursis à statuer sur la déclaration préalable de travaux déposée le 15 juin 2017.

Par un jugement no 1708024 du 2 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er avril 2021 et le 30 novembre 2021, la société Nadiphia Atlantic, représentée par Me Seychal, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2017 par lequel le maire de Sainte-Luce-sur-Loire a sursis à statuer sur la déclaration préalable de travaux déposée le 15 juin 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Sainte-Luce-sur-Loire une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas justifié de la compétence du signataire de la décision contestée ;

- la décision est insuffisamment motivée, en méconnaissance de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme et de l'article L. 311-2 du même code ;

- elle porte une atteinte disproportionnée au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre, en méconnaissance de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que des articles 4 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 août 2021 et 12 janvier 2022, la commune de Sainte-Luce-sur-Loire, représentée par la SELARL BRG, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Nadiphia Atlantic une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société Nadiphia Atlantic ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- et les observations de Me Vendé, représentant la commune de Sainte-Luce-sur-Loire.

Considérant ce qui suit :

1. La société Nadiphia Atlantic est propriétaire des parcelles cadastrées section AY nos 59 et 60, cette dernière étant devenue section AY no 60p, situées à l'intersection des rues Jean Mermoz et Maryse Bastié, à Sainte-Luce-sur-Loire, au sein de la zone d'aménagement concerté (ZAC) " Maison Neuve 2 ". Cette société a, le 15 juin 2017, déposé en mairie de Sainte-Luce-sur-Loire un dossier de déclaration préalable de travaux pour la réalisation sur la parcelle cadastrée section AY no 60 de travaux d'affouillements ou d'exhaussements du sol et d'une plateforme de 3 382 mètres carrés et 846 mètres carrés d'espaces verts à destination de la société SLG Conduite, en vue de l'exercice d'une activité de formation de conduite de motocycles. Le maire de Sainte-Luce-sur-Loire a, par un arrêté du 11 juillet 2017, sursis à statuer sur cette déclaration préalable pour une durée de deux ans. La société Nadiphia Atlantic relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, la société Nadiphia Atlantic reprend en appel les moyens qu'elle avait invoqués en première instance et tirés de ce que l'arrêté contesté a été pris par une autorité incompétente et est insuffisamment motivé. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Nantes aux points 2 à 4 de son jugement.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige, antérieure à sa modification par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " L'autorité compétente se prononce par arrêté sur la demande de permis ou, en cas d'opposition ou de prescriptions, sur la déclaration préalable. / Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus aux articles L. 102-13, L. 153-11 et L. 311-2 du présent code et par l'article L. 331-6 du code de l'environnement. / Il peut également être sursis à statuer : / (...) / 3° Lorsque des travaux, constructions ou installations sont susceptibles de compromettre ou de rendre plus onéreuse la réalisation d'une opération d'aménagement, dès lors que le projet d'aménagement a été pris en considération par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent et que les terrains affectés par ce projet ont été délimités. / Le sursis à statuer ne peut être prononcé que si la décision de prise en considération prévue aux 2° et 3° du présent article et à l'article L. 102-13 a été publiée avant le dépôt de la demande d'autorisation. La décision de prise en considération cesse de produire effet si, dans un délai de dix ans à compter de son entrée en vigueur, l'exécution des travaux publics ou la réalisation de l'opération d'aménagement n'a pas été engagée. / Le sursis à statuer doit être motivé et ne peut excéder deux ans. (...) ". Aux termes de l'article L. 311-2 du même code, dans sa version alors applicable : " À compter de la publication de l'acte créant une zone d'aménagement concerté, les propriétaires des terrains compris dans cette zone peuvent mettre en demeure la collectivité publique ou l'établissement public qui a pris l'initiative de la création de la zone, de procéder à l'acquisition de leur terrain, dans les conditions et délais prévus à l'article L. 230-1 ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions, dans leur rédaction antérieure à la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, que l'autorité compétente peut opposer un sursis à statuer à une déclaration préalable de travaux portant sur un terrain inclus dans le périmètre d'une zone d'aménagement concerté à compter de la publication de l'acte de création de cette zone, sans que cette possibilité ne soit légalement subordonnée aux conditions prévues au 3° de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme.

5. Par une délibération du 23 juin 2006, affichée le 30 juin suivant, le conseil communautaire de Nantes Métropole a approuvé la création de la zone d'aménagement concerté " Maison Neuve 2 ". Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section AY no 60p, objet de la déclaration préalable déposée par la société Nadiphia Atlantic, est comprise dans le périmètre de cette zone d'aménagement concerté. Dès lors, le maire de Sainte-Luce-sur-Loire a pu légalement, en application des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article L. 424-1 et de l'article L. 311-2 du code de l'urbanisme, surseoir à statuer sur la déclaration préalable de travaux présentée par la société Nadiphia Atlantic, sans que cette dernière puisse utilement se prévaloir des circonstances alléguées que le projet objet de cette déclaration préalable ne serait pas susceptible de compromettre ou rendre plus onéreuse la réalisation de la zone d'aménagement concerté, que l'opération d'aménagement n'aurait pas été engagée dans le délai de dix ans à compter de la délibération décidant la création de la zone d'aménagement concerté, que le programme prévisionnel de celle-ci ne serait pas d'actualité et que le sursis à statuer ne se fonderait que sur des considérations environnementales et non sur la réalisation d'une opération d'aménagement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 311-2 et de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme doit être écarté.

6. Il résulte de l'instruction que le maire de Sainte-Luce-sur-Loire aurait pris la même décision s'il s'était fondé uniquement sur le motif tiré de ce que la parcelle objet de la déclaration préalable déposée par la société Nadiphia Atlantic est comprise dans le périmètre de la zone d'aménagement concerté " Maison Neuve 2 ".

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. "

8. Si, par l'arrêté contesté, la commune de Sainte-Luce-sur-Loire a opposé un sursis à statuer sur la déclaration préalable déposée par la société requérante, cette servitude n'a ni pour objet ni pour effet de priver la société Nadiphia Atlantic du droit attaché à la propriété de ses biens mais seulement de réglementer leur usage afin de permettre l'aménagement de la zone d'aménagement concerté " Maison Neuve 2 ". Compte tenu de la nature et de l'ampleur du projet, l'arrêté contesté est justifié par un objectif d'intérêt général. Si la société requérante soutient que cet arrêté a rompu le juste équilibre qui doit être maintenu entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs de sauvegarde du droit au respect de ses biens, au motif qu'il est intervenu plus de dix ans après la délibération créant la zone d'aménagement concertée et que le programme de celle-ci aurait été modifié, une telle limitation n'a pas, dans les circonstances de l'espèce et en tout état de cause, porté au droit de la société d'user de ses biens une atteinte disproportionnée au regard du but légitime poursuivi, dès lors que les mesures prises en application de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme sont limitées dans le temps et dans leur étendue, tandis que la zone d'aménagement concerté était déjà en grande partie réalisée à la date de l'arrêté contesté. Par suite, la société Nadiphia Atlantic n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté contesté aurait porté atteinte au droit au respect de ses biens garanti par ces stipulations.

9. En quatrième lieu, il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier la conformité de l'arrêté contesté, pris sur le fondement des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article L. 424-1 et de l'article L. 311-2 du code de l'urbanisme, aux articles 4 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen auxquels renvoie le préambule de la Constitution, dès lors que ces dispositions législatives définissent précisément la durée et les conditions dans lesquelles un sursis à statuer peut être opposé. En tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté contesté porterait une atteinte disproportionnée au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre de la société Nadiphia Atlantic.

10. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté contesté aurait été adopté dans un but étranger à la législation de l'urbanisme et serait ainsi entaché d'un détournement de pouvoir. Il n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Nadiphia Atlantic n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Sainte-Luce-sur-Loire, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Nadiphia Atlantic demande au titre des frais exposés par elle à l'occasion du litige soumis au juge.

13. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Sainte-Luce-sur-Loire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Nadiphia Atlantic est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Sainte-Luce-sur-Loire présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Nadiphia Atlantic et à la commune de Sainte-Luce-sur-Loire.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Douet, présidente-assesseure,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 juin 2022.

Le rapporteur,

F.-X. A...Le président,

A. Pérez

La greffière,

A. Lemée

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 21NT00978


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00978
Date de la décision : 24/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. François-Xavier BRECHOT
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELARL DIZIER ET ASSOCIES;SELARL CORNET VINCENT SEGUREL;SELARL DIZIER ET ASSOCIES;SELARL DIZIER ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-06-24;21nt00978 ?
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