Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012.
Par un jugement n° 1703840 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes a conclu au non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements intervenus en cours d'instance, a prononcé la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre l'année 2012 et a rejeté le surplus de leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 septembre 2020 M. et Mme B..., représentés par Me Richard, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée au titre des années 2010 et 2011 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le tribunal administratif a méconnu les règles de dévolution de la charge de la preuve ; il appartenait au service de reconstituer, à partir des justificatifs produits par eux, les déplacements de M. B... ; c'est donc à tort que les montants de 9 009 euros, 13 426 euros et 6 648 euros établis par eux pour chacune des années selon une reconstitution précise des déplacements de M. B... n'ont pas été retenus ;
- il est désormais justifié également de l'identité des clients rencontrés ainsi que des dates et lieux de ces rencontres.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 mars 2021 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation de l'article 2 du jugement attaqué et à ce que soit remises à la charge de M. et Mme B..., en droits et pénalités, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles les époux B... ont été assujettis au titre de l'année 2012 à raison de l'imposition de la somme de 5 294 euros entre les mains de M. B... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
Il fait valoir que :
- les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés ;
- si le service n'a pas démontré que les sommes correspondant aux indemnités kilométriques dont M. B... a demandé le remboursement au titre de l'année 2012 ont bien été mises à sa disposition au sens du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, en revanche il est fondé à solliciter une substitution de base légale, afin d'imposer la somme de 5 294 euros, correspondant à des indemnités kilométriques versées au titre de l'année 2012 dont le montant n'est pas justifié et le caractère professionnel non établi, sur le fondement de l'article 111-c du code général des impôts, entre les mains de M. et M. B... en tant qu'avantage occulte.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Brasnu,
- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL JLB, dont M. et Mme D... B... sont les associés à hauteur respectivement de 85,71 % et 14,29 % des parts, exerce une activité d'agent commercial dans le secteur de l'agroalimentaire. Cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 2010 au 31 décembre 2012 à l'issue de laquelle l'administration a notamment réintégré à son résultat imposable des exercices clos en 2010, 2011 et 2012 une part des indemnités kilométriques versées à M. B..., son gérant de droit et associé majoritaire. L'administration a regardé ces sommes comme des distributions appréhendées par M. B..., considéré comme seul maître de l'affaire, et imposables à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers entre les mains de M. et Mme B.... Les requérants ont ainsi été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties de pénalités. Après mise en recouvrement et rejet partiel de leur réclamation, M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions. Ils relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Nantes du 10 juillet 2020 en tant qu'après leur avoir accordé une décharge partielle il a rejeté le surplus de leur demande. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel, par la voie de l'appel incident, de ce jugement en tant qu'il a prononcé la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 2012.
Sur l'appel principal :
2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ".
3. Pour justifier de l'application du 2° de l'article 109 du code général des impôts, l'administration fiscale s'est fondée sur le fait que la SARL JLB avait versé à M. B..., sans en justifier, des indemnités kilométriques pour l'utilisation de son véhicule personnel à des fins professionnelles. D'une part, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme B..., il n'appartenait pas au service de reconstituer, à partir des justificatifs produits par eux, les déplacements de M. B.... D'autre part, M. et Mme B... font valoir que les déplacements en cause présentaient bien un caractère professionnel et produisent, pour la première fois en cause d'appel, un tableau récapitulatif des déplacements effectués. Ils estiment désormais que les déplacements professionnels parcourus s'élèvent à 61 325 kilomètres, après avoir prétendu initialement qu'ils s'élevaient à 165 000 kilomètres. Cependant, il n'est pas contesté que la société JLB, en plus du versement des indemnités kilométriques, avait pris en charge une partie des frais de carburant et d'entretien du véhicule personnel de M. B.... Dans ces conditions, à supposer même que certains déplacements aient eu un caractère professionnel, la société ne pouvait verser à M. B... des indemnités kilométriques alors qu'elle prenait déjà en charge les frais de carburant et d'entretien. En outre, sur le tableau versé au débat, le motif de déplacement n'est pas systématiquement indiqué. De plus, sur l'ensemble des déplacements listés, seuls seize sont justifiés par la production d'une facture client. Enfin, sur les seize déplacements en question, le ministre fait valoir sans être contredit que ces déplacements, qui correspondent à des animations culinaires dans des supermarchés, ont été réalisés avec les véhicules de la société. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le service a estimé que les indemnités kilométriques ainsi versées ne constituaient pas une charge déductible, et devaient être réintégrées au résultat de la société. Enfin, il est constant que ces indemnités kilométriques ont été versées à M. B.... Par suite, c'est à bon droit que le service a imposé ces sommes entre les mains de M. B... sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.
Sur l'appel incident :
4. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c) Les rémunérations et avantages occultes (...) ".
5. Il est constant que le service n'a pas démontré que les sommes correspondant aux indemnités kilométriques dont M. B... a demandé le remboursement au titre de l'exercice déficitaire correspondant à l'année 2012 avaient été effectivement mises à sa disposition au sens du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Le ministre sollicite cependant une substitution de base légale, afin de maintenir l'imposition supplémentaire d'un montant de 5 294 euros correspondant aux indemnités kilométriques relatives à l'année 2012, sur le fondement cette fois du c) de l'article 111 du code général des impôts, en tant qu'avantage occulte entre les mains de M. et M. B.... Toutefois, si M. B... est présumé, en sa qualité de maître de l'affaire, avoir appréhendé cet avantage occulte, M. et Mme B... font valoir sans être contredits qu'en raison du caractère déficitaire de l'exercice 2012, M. B... n'a pas perçu les indemnités kilométriques en litige et a même dû effectuer des apports en compte courant d'associé pour permettre à la société de régler certaines charges. Dans ces conditions, la substitution de base légale sollicitée doit être écartée, et la décharge prononcée par les premiers juges, maintenue.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à demander, par la voie de l'appel principal, l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté le surplus de leurs conclusions, et que le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à demander, par la voie de l'appel incident, l'annulation de ce jugement en tant qu'il a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle les requérants avaient été assujettis au titre de l'année 2012. Par conséquent, la requête de M. et Mme B..., y compris en ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le ministre de l'économie, des finances et de la relance par la voie de l'appel incident sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, présidente de chambre,
- M. Giraud, premier conseiller,
- M. Brasnu, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 juin 2022.
Le rapporteur
H. Brasnu
La présidente
I. PerrotLa greffière
A. Marchais
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No 20NT028822