Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière " Le 258 " a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 31 janvier 2019 par laquelle le conseil de Rennes Métropole a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Jacques-de-la-Lande, à titre subsidiaire, d'annuler cette délibération en tant que le règlement du plan prévoit que la partie nord des parcelles AB 297 et 298 constitue un espace inconstructible et en tant qu'il identifie la maison édifiée sur la parcelle AB 297 comme un élément du patrimoine bâti d'intérêt local.
Par un jugement n° 1901591 du 12 juillet 2021, le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du 31 janvier 2019 du conseil de Rennes Métropole approuvant le plan local d'urbanisme de Saint-Jacques-de-la-Lande en tant que le règlement du plan prévoit que la partie Nord de la parcelle AB 298 constitue un espace inconstructible et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 10 septembre 2021 et 15 avril 2022, Rennes Métropole, représentée par Me Mialot, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il annule la délibération du 31 janvier 2019 du conseil de Rennes Métropole approuvant le plan local d'urbanisme de Saint-Jacques-de-la-Lande en ce que le règlement du plan prévoit que la partie nord de la parcelle AB 298 constitue un espace inconstructible ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société civile immobilière " Le 258 " devant le tribunal administratif de Rennes en tant qu'elle est dirigée contre cette disposition du règlement du plan ;
3°) de mettre à la charge de la société civile immobilière " Le 258 " le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le classement de la parcelle AB 298 en espace inconstructible n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; la légalité de la servitude d'inconstructibilité s'apprécie au regard du parti d'urbanisme retenu ; les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables et le rapport de présentation visent à protéger le patrimoine bâti d'intérêt local, à limiter au maximum la consommation d'espaces naturels en ville et à travailler la différenciation des séquences architecturales ; s'agissant de la rue de Nantes, les prescriptions du plan ont pour objet d'éviter " l'effet canyon " qui pourrait résulter de la densification de ses abords ;
- rendre constructible cette partie de la parcelle ne ferait que conforter le front urbain continu en parfaite contradiction avec le parti d'urbanisme des auteurs du plan local d'urbanisme sur ce secteur consistant à éviter les effets de canyon urbain ;
- la servitude d'inconstructibilité en litige permet de préserver les perspectives au carrefour des rues Brossolette et de Nantes et les vis-à-vis, particulièrement sur la parcelle AB 297, classée patrimoine bâti d'intérêt local.
Par un mémoire en défense et un mémoire en duplique enregistrés le 28 février et 2 mai 2022 (ce dernier non communiqué), la société " Le 258 ", représentée par Me Le Dantec, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Rennes Métropole au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Rennes Métropole ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,
- et les observations de Me Margelidon, pour Rennes Métropole et de Me Le Dantec, pour la société " Le 258 ".
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 12 juillet 2021, le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de la société " Le 258 ", la délibération du 31 janvier 2019 du conseil de Rennes Métropole approuvant le plan local d'urbanisme de Saint-Jacques-de-la-Lande en tant que le règlement du plan prévoit que la partie nord de la parcelle AB 298 constitue un espace inconstructible et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Rennes Métropole relève appel de ce jugement en tant que le règlement du plan local d'urbanisme prévoit que la partie nord de la parcelle AB 298 constitue un espace inconstructible.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 151-9 du code d'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ". Aux termes de l'article L. 151-19 du même code : " Le règlement peut identifier et localiser les éléments de paysage et identifier, localiser et délimiter les quartiers, îlots, immeubles bâtis ou non bâtis, espaces publics, monuments, sites et secteurs à protéger, à conserver, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique ou architectural et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation leur conservation ou leur restauration. (...). ".
3. La SCI Le 258 est propriétaire d'une parcelle cadastrée AB 298, d'une surface de 243 m2, sur le territoire de la commune de Saint-Jacques-de-la-Lande, sur laquelle est édifiée, dans sa partie sud, un immeuble d'habitation comportant également, au rez-de-chaussée une pharmacie, la partie nord de cette parcelle étant à usage de jardin d'agrément. Par la délibération du 31 janvier 2019 contestée, le règlement littéral du plan classe cette parcelle en zone urbaine UB2b.
4. Il ressort des pièces du dossier que cette parcelle fait partie d'un ensemble défini par le règlement littéral du plan comme comprenant " des zones urbaines résidentielles affectées à l'urbanisation diversifiée tant résidentielles que d'activité compatibles avec cette vocation ", la zone UB2 correspondant, en outre, aux " voies de faubourg des centres ville vers les entrées de ville (...) qui se caractérisent par un bâti hétérogène majoritairement en bordure de voie mêlant différentes formes urbaines et époques de construction. ". Le règlement du plan prévoit, toutefois, que la partie nord de la parcelle AB 298, correspondant au jardin, constitue un " espace inconstructible " repéré sur le règlement graphique du plan, visant, selon le II " Règles relatives à l'ordonnancement et à la constructibilité ", des " Dispositions applicables à toutes les zones " de ce même règlement, " à préserver des perspectives ou des axes de vue pour lesquelles une inconstructibilité est requise. Il s'agit de préserver certains ordonnancements créés par un espace vide structurant. ". Ces dernières dispositions, prises en application des dispositions de L. 151-9 du code d'urbanisme, précisent que, dans ces espaces, aucune construction n'est autorisée à l'exception de " la réalisation des locaux techniques et industriels des administrations publiques et assimilées liés aux différents réseaux (...) ". Par ailleurs, les dispositions du III " Dispositions relatives aux espaces verts, au patrimoine et à l'environnement " définissent, en application de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme, notamment, des immeubles " à protéger, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique et architectural ", dotés d'une étoile pour les édifices " intéressants témoins de l'histoire locale ", " correspondant à des constructions très dénaturées ", au nombre desquelles figure la maison édifiée sur la parcelle voisine cadastrée AB 297.
5. Il ressort des pièces du dossier, notamment du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme, que la commune de Saint-Jacques-de-la-Lande est située au cœur de la métropole rennaise dont elle est l'une des portes d'entrée. Il en ressort également que le territoire de cette commune est structuré autour de trois pôles, notamment celui du quartier du Pigeon Blanc, lequel est " irrigué " par l'un des deux principaux axes de circulation, la rue de Nantes, laquelle " bénéficie d'une centralité commerciale qui offre aux habitants un service de proximité que le projet urbain veut renforcer ". Le rapport de présentation du plan précise que, pour les auteurs du plan, " les enjeux pour Saint-Jacques-de-la-Lande à l'horizon 2030 sont de transformer les ruptures du territoire en continuité, de valoriser les espaces naturels de qualité qui constituent le patrimoine de la commune et d'améliorer les mobilités ". S'agissant plus particulièrement de la rue de Nantes, les auteurs du plan ont souhaité favoriser " des ouvertures vers les autres quartiers situés plus à l'ouest, créer des surprises et éviter l'effet canyon urbain, qui pourrait résulter de la densification de ses abords ".
6. Il est constant que la parcelle cadastrée AB 298 est située le long de la rue de Nantes. Toutefois, il n'est pas contesté que l'interdiction de construire litigieuse ne s'applique, le long de cette voie de plus de deux kilomètres qui représente l'un des axes de circulation structurant de la commune, qu'à un espace d'une dimension très réduite, constitué du jardin de la propriété de la société " Le 258 " et de celui de la propriété voisine, d'une longueur totale d'une vingtaine de mètres sur 4 mètres de large en moyenne. Dès lors, si Rennes Métropole soutient que " l'urbanisation de cet espace ne ferait que conforter le front urbain continu en parfaite contradiction avec le parti d'urbanisme des auteurs du PLU sur ce secteur consistant à éviter les effets de canyon urbain " lequel favoriserait, en outre, la constitution d'un " îlot de chaleur urbain ", il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il résulterait de l'édification d'une construction dans le jardin en cause, sur la parcelle AB 298, une densification de l'urbanisation aux abords de cette voie, au demeurant non caractérisée en tout point par un front bâti continu, telle qu'elle serait contraire au parti d'urbanisme retenu par des auteurs du plan, énoncé au point précédent, visant notamment à éviter un " effet de canyon urbain ". Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'il existerait, à cet endroit, des " perspectives ou des axes de vue " devant être préservés qui imposeraient la mesure d'interdiction de construire en litige, ni que celle-ci serait rendue nécessaire par l'identification par le plan local d'urbanisme, au titre du patrimoine bâti d'intérêt local sur la parcelle voisine AB 297, d'une maison dotée d'une étoile, alors que la vue depuis les deux voies qui la jouxtent, compte tenu de la configuration des lieux, ne serait, le cas échéant, que très partiellement cachée par une construction, et alors, en tout état de cause, qu'il appartiendra à l'autorité chargée de délivrer l'autorisation de construire requise, de s'assurer de son insertion dans le bâti environnant. Dans ces conditions, et compte tenu de ce que les prescriptions portant interdiction de construire dans une zone U s'apprécient au regard du parti d'urbanisme retenu, les auteurs du plan ne pouvaient, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, édicter, sur le fondement de l'article L. 151-9 du code d'urbanisme, une interdiction de construire sur la partie nord de la parcelle AB 298.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Rennes Métropole n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du 31 janvier 2019 du conseil approuvant le plan local d'urbanisme de Saint-Jacques-de-la-Lande en tant que le règlement du plan prévoit que la partie nord de la parcelle AB 298 constitue un espace inconstructible.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société " Le 258 ", qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Rennes Métropole de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Rennes Métropole le versement à la société " Le 258 " d'une somme de 1 500 euros au titre des mêmes frais.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Rennes Métropole est rejetée.
Article 2 : Rennes Métropole versera à la société " Le 258 " une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Rennes Métropole et à la SCI " Le 258 ".
Copie en sera adressée, pour information, à la commune de Saint-Jacques-de-la-Lande.
Délibéré après l'audience du 20 mai 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- Mme Buffet, présidente-assesseure,
- M. Frank, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juin 2022.
La rapporteure,
C. A...Le président,
J. FRANCFORT
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT02560