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21/06/2022 | FRANCE | N°21NT01874

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 21 juin 2022, 21NT01874


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... et M. E... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 par lequel le maire de Rennes a délivré à l'association Lazare un permis de construire, valant permis de démolir, pour un centre d'hébergement pour personnes en réinsertion et personnes actives 5 rue Marceau à Rennes.

Par un jugement n°2001540 du 11 mai 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un m

émoire, enregistrés les 5 juillet et 25 novembre 2021 (ce dernier non communiqué), Mme C... D....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... et M. E... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 par lequel le maire de Rennes a délivré à l'association Lazare un permis de construire, valant permis de démolir, pour un centre d'hébergement pour personnes en réinsertion et personnes actives 5 rue Marceau à Rennes.

Par un jugement n°2001540 du 11 mai 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 juillet et 25 novembre 2021 (ce dernier non communiqué), Mme C... D... et M. E... B..., représentés par Me Bourges-Bonnat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 du maire de Rennes ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Rennes la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision contestée méconnaît les articles 2 et 2.1 du règlement du plan local d'urbanisme, applicable à toutes les zones ; le projet méconnaît les règles d'implantation et ne participe pas a` la mise en valeur des édifices identifiés au titre du patrimoine ;

- la décision contestée méconnaît les règles relatives à la hauteur des constructions du plan local d'urbanisme ; le règlement graphique prévoit une hauteur de R+1+A/C/P ; le dernier niveau de la construction projetée est un étage droit, correspondant à un R+2 ; le premier étage fait moins de 3 mètres alors que l'étage supérieur fait 1,6 mètres au niveau du dératèlement, soit plus de la moitié de la hauteur des étages inférieurs ;

- le projet contesté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et du règlement du plan local d'urbanisme applicable à la zone d'implantation du projet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 août 2021, la commune de Rennes, représentée par Me Donias, conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à l'application des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme D... et M. B... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2021, l'association Lazare, représentée par Me Apcher, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande était irrecevable ; Mme D... et M. B... n'ont pas intérêt à agir à l'encontre du permis litigieux ;

- les moyens soulevés par Mme D... et M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me Bourges-Bonnat, représentant Mme D... et M. B..., Me Lucas, représentant la commune de Rennes, et Me Benedi substituant Me Apcher, représentant l'association Lazare.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... D... et M. E... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 par lequel le maire de Rennes a autorisé l'association Lazare à construire un centre d'hébergement pour personnes en réinsertion et personnes actives, 5 rue Marceau à Rennes, valant autorisation de démolir l'immeuble existant. Par un jugement du 11 mai 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. Mme D... et M. B... relèvent appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 2 du règlement littéral applicable à toutes les zones du plan local d'urbanisme de la commune de Rennes alors en vigueur : " Les règles d'implantation s'appliquent dans toutes les zones. Des dispositions spécifiques à chaque zone viennent compléter les règles générales et alternatives par des normes ou des règles qualitatives. / L'implantation des constructions doit tenir compte à la fois des règles spécifiques à chaque zone et du contexte géographique et patrimonial dans lequel elles s'insèrent. Ainsi, une attention particulière doit être portée au rythme architectural et urbain (parcellaire, percements, ...) au raccordement aux constructions voisines, à la gestion des vis-à-vis, à l'ensoleillement par référence aux règles de prospects, à la mise en valeur du patrimoine bâti ou végétal. / L'implantation des nouvelles constructions à proximité d'un bâtiment identifié au patrimoine bâti d'intérêt local doit participer à la mise en valeur des édifices identifiés au titre du patrimoine. (...) / 2.1. Implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques. / Voies ouvertes à la circulation automobiles ou cycles ou piétons. / Règles générales. / L'implantation des constructions est différente selon la nature des voies ou des emprises publiques concernées : / - voie privée : la délimitation est définie par la limite de l'emprise de la voie ; / - voie publique : l'alignement est défini par un plan d'alignement, un emplacement réservé, une servitude de localisation ou, à défaut, par la limite entre le domaine public et la propriété privée. / Lorsque les constructions doivent s'implanter majoritairement à l'alignement, il s'agit de la projection au sol du linéaire de construction quel que soit le niveau (rez-de-chaussée, étages courants ou dernier niveau. (...) ". Aux termes de l'article 1.1 du règlement littéral de la zone UE1 du même plan local d'urbanisme, au sein de laquelle est située l'immeuble projeté : " Implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques. / Règles générales / UE1a : les constructions s'implantent majoritairement à l'alignement par rapport aux voies. Si une partie de la construction est en retrait, cet espace doit être végétalisé en partie. (...). / Annexes : elles s'implantent librement par rapport à l'alignement (...) ".

3. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan de masse et des plans de façade figurant au sein du dossier de demande de permis de construire, que la projection au sol du linéaire du rez-de-chaussée de l'immeuble projeté est majoritairement implanté à l'alignement de la voie publique. La circonstance que l'étage de l'immeuble serait situé en retrait de la voie est sans incidence sur la conformité du projet au regard de la règle d'implantation prévue par les dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Rennes.

4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux est situé au sein d'une zone pavillonnaire comportant des maisons d'habitation individuelles, dont certaines présentent une qualité architecturale notable, et quelques immeubles dont une église destinée au culte orthodoxe. Si le site peut être regardé comme présentant une certaine unité architecturale, il comporte néanmoins des constructions récentes, au nombre desquelles figure l'immeuble à démolir et remplacer, en très mauvais état et situé en retrait de la voie. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne ressort pas de la notice architecturale du dossier de demande du permis de construire litigieux, et notamment des plans et représentations photographiques du projet, que l'implantation en retrait de la voie des étages du bâtiment, ainsi que les caractéristiques architecturales du projet, ne participeraient pas à la mise en valeur des édifices identifiés au titre du patrimoine bâti d'intérêt local implantés à proximité, et notamment à celle de l'église déjà mentionnée.

5. Il résulte des développements qui précèdent que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le projet en litige méconnaîtrait les articles 2 et 2.1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune.

6. En deuxième lieu, et d'une part, le règlement graphique du plan local d'urbanisme de la commune de Rennes alors en vigueur prévoit que la hauteur maximale des constructions autorisées dans la zone d'implantation du projet est d'un rez-de-chaussée plus un étage et un sommet constitué d'un attique, d'un comble ou d'un étage partiel. D'autre part, aux termes des définitions du règlement littéral du même plan local d'urbanisme : " Un comble est un ensemble constitué soit par la couverture et la charpente, soit par un dératèlement dans la limite de la moitié de la hauteur d'un étage droit du bâtiment. Le comble ne constitue pas un étage droit. ". Enfin, aux termes de l'article 3 du règlement littéral applicable à toutes les zones du même plan local d'urbanisme : " (...) Pour les étages courants a` usage principal d'habitation, leur hauteur est de 3,20 m maximum (...) ".

7. En l'espèce, et contrairement à ce que soutiennent Mme D... et M. B..., il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment du plan de coupe de terrain, que la hauteur entre le sol du dernier niveau de la construction et la gouttière recueillant les eaux pluviales du toit serait supérieure à la moitié de la hauteur d'un étage courant, fixée à 3,20 mètres maximum par les dispositions précitées de l'article 3 du règlement littéral du plan local d'urbanisme applicable à toutes les zones. Si les requérants font valoir qu'il ressort du plan de la façade Nord Est que le premier étage fait moins de 3 mètres alors que l'étage supérieur fait 1,60 mètres au niveau du dératèlement, ces mesures ne sont corroborées ni par le plan invoqué, qui ne comporte que des cotes d'éléments de la façade et non de l'intérieur de l'immeuble, ni par le plan de coupe de terrain. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le projet contesté méconnaît les règles relatives à la hauteur des constructions du plan local d'urbanisme de la commune de Rennes doit être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Aux termes du règlement littéral de la zone UE1 du plan local d'urbanisme, au sein de laquelle se trouve le lieu d'implantation du projet contesté : " La zone UE1 couvre les secteurs de maisons de ville. Elles forment un bâti homogène, le plus souvent en bordure de rue. Les jardins sont essentiellement situés en fond de terrain. / Elle comprend 2 secteurs distincts par la manière de se raccorder aux constructions voisines : / UE1a : les constructions sont majoritairement implantées en bordure de rue et seules les annexes sont autorisées à l'arrière. Des bandes de constructibilité précisent les implantations et auteur à l'intérieur du terrain. (...). / Dans ces deux secteurs, les nouvelles constructions s'insèrent dans le respect de l'environnement déjà bâti et de la trame paysagère existante. / La volumétrie des constructions se définit à partir des règles d'implantation du coefficient de végétalisation et du respect d'un fond de terrain inconstructible et d'une hauteur maximale en fonction du contexte urbain et paysager des voies dans lequel elles s'insèrent. / Des percées visuelles sur les éléments patrimoniaux bâtis ou végétal dans la profondeur du terrain sont recherchées. ". Ces dernières dispositions ont le même objet que celles de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres. Dès lors, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que le juge doit apprécier, au terme d'un contrôle normal, la légalité de la décision contestée.

9. En l'espèce, et ainsi qu'il a été dit au point 4, si le projet se situe dans une zone pavillonnaire présentant une certaine unité, et est voisin de quelques maisons d'habitation et d'une église du culte orthodoxe qui présentent un intérêt architectural notable, il s'insère également dans un environnement composé de maisons d'habitation récentes et d'immeubles de logements collectifs ne présentant pas d'intérêt significatif. Le projet contesté consiste en l'édification d'un bâtiment d'une hauteur comparable à certaines constructions voisines, et présente un volume permettant de rompre la linéarité des façades. Les façades de l'immeuble projeté comportent des murs respectivement parés de pierres et de briques en soubassement, ainsi que des bardages et une couverture en zinc gris-clair favorisant l'insertion de la construction dans son environnement. Si le projet contesté jouxte une église, dont la partie mitoyenne ne présente pas d'intérêt notable, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne s'intégrerait pas à l'environnement bâti, notamment au regard de son architecture, de ses dimensions et du retrait des étages par rapport à la voie publique. Le projet a par ailleurs reçu un avis favorable de l'architecte des bâtiments de France, sous réserves de prescriptions tenant au revêtement de la toiture et aux matériaux des façades, dont la teneur a été reprise dans les prescriptions assortissant le permis de construire. Dans ces conditions et alors que le règlement de la zone autorise les opérations architecturales contemporaines, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est par une inexacte application des dispositions du règlement littéral du plan local d'urbanisme que le maire de Rennes a délivré le permis de construire litigieux.

10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par l'association pétitionnaire, que les requérants, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Rennes et de l'association Lazare, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement à Mme D... et à M. B... d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

12. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D... et de M. B... le versement à la commune de Rennes d'une somme globale de 750 euros, et à l'association Lazare de la somme globale de 750 euros, au titre des mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... et de M. B... est rejetée.

Article 2 : Mme D... et M. B... verseront la somme globale de 750 euros à la commune de Rennes et la somme globale de 750 euros à l'association Lazare au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D..., à M. E... B..., à la commune de Rennes et à l'association Lazare.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente-assesseure,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juin 2022.

Le rapporteur,

A. A...Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT01874


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : SELARL BOURGES-BONNAT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 21/06/2022
Date de l'import : 28/06/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21NT01874
Numéro NOR : CETATEXT000045959557 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-06-21;21nt01874 ?
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