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10/06/2022 | FRANCE | N°21NT01244

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 10 juin 2022, 21NT01244


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Bien vivre dans le calme, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, l'association des amis du domaine médiéval de Moullins, Mme W... et M. E... K..., Mme AN... et M. B... L..., Mme H... et M. O... AA..., Mme AC... et M. AE... G..., Mme AK... et M. Q... A..., Mme W... et M. C... Z..., Mme AH... et M. AM... R..., M. U... et Mme D... AD..., M. Y... M..., Mme N... et M. S... X..., Mme I... et M. B... Bayle de Jessé, Mme AL... J..., Mme T... J..., Mme AJ... et M. AB.

.. AF..., Mme AH... et M. AI... V..., et M. E... AG..., ont demandé ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Bien vivre dans le calme, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, l'association des amis du domaine médiéval de Moullins, Mme W... et M. E... K..., Mme AN... et M. B... L..., Mme H... et M. O... AA..., Mme AC... et M. AE... G..., Mme AK... et M. Q... A..., Mme W... et M. C... Z..., Mme AH... et M. AM... R..., M. U... et Mme D... AD..., M. Y... M..., Mme N... et M. S... X..., Mme I... et M. B... Bayle de Jessé, Mme AL... J..., Mme T... J..., Mme AJ... et M. AB... AF..., Mme AH... et M. AI... V..., et M. E... AG..., ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2017 par lequel le préfet de la Sarthe a accordé à la société Centrale éolienne de la voie verte une autorisation unique pour l'exploitation d'une installation terrestre de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent constituée de six aérogénérateurs et d'un poste de livraison, dans les communes de Saint-Longis et Vezot.

Par un jugement no 1802845 du 25 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 5 mai, 6 mai, 29 octobre, 16 novembre, 29 novembre et 23 décembre 2021, un mémoire récapitulatif produit le 28 janvier 2022 en application de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, et des mémoires enregistrés les 25 février et 11 mars 2022, l'association Bien vivre dans le calme, la société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, l'association des amis du domaine médiéval de Moullins, Mme W... et M. E... K..., Mme AN... et M. B... L..., Mme H... et M. O... AA..., Mme AC... et M. AE... G..., Mme AK... et M. Q... A..., Mme W... et M. C... Z..., Mme AH... et M. AM... R..., M. U... et Mme D... AD..., M. Y... M..., Mme N... et M. S... X..., Mme I... et M. B... Bayle de Jessé, Mme AL... J..., Mme T... J..., Mme AJ... et M. AB... AF..., Mme AH... et M. AI... V..., représentés par Me Echezar, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2017 du préfet de la Sarthe ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est entaché de plusieurs irrégularités ;

- l'avis émis par l'autorité environnementale n'émane pas d'une autorité indépendante ;

- l'avis du parc naturel régional Normandie-Maine n'a pas été sollicité ;

- l'étude d'impact est entachée d'insuffisances multiples ;

- l'étude d'incidence Natura 2000 est insuffisante ;

- le projet porte atteinte à la commodité du voisinage ;

- le projet porte atteinte à l'environnement ;

- le projet porte atteinte aux paysages et monuments ;

- le bénéficiaire de l'autorisation ne dispose de capacités financières suffisantes ;

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 7 septembre, 12 novembre et 10 décembre 2021, 18 janvier 2022, un mémoire récapitulatif produit le 14 février 2022 en application de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, et un mémoire enregistré le 3 mars 2022, la société Centrale éolienne de la voie verte, représentée par Me Duval, conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à ce que l'article 6 de l'arrêté contesté du 20 novembre 2017 soit modifié en ce qui concerne le montant des garanties financières à constituer, et au rejet du surplus des conclusions de la requête ;

3°) à titre infiniment subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer sur les conclusions de la requête afin de lui permettre de notifier à la cour une autorisation modificative régularisant les vices susceptibles d'être retenus par la cour ;

4°) à ce qu'il soit mis à la charge de chacun des requérants une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est irrecevable en tant qu'elle émane de plusieurs personnes physiques et morales ;

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 novembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par un courrier du 6 mai 2022, la cour a informé les parties, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, qu'elle était susceptible de surseoir à statuer sur la requête de l'association Bien vivre dans le calme et autres jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an afin de permettre la régularisation de trois vices susceptibles d'être retenus affectant la légalité de l'autorisation unique.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- le code de l'environnement ;

- l'ordonnance no 2014-355 du 20 mars 2014 ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;

- le décret no 2014-450 du 2 mai 2014 ;

- l'arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- l'arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bréchot,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- les observations de Me Echezar, représentant l'association Bien vivre dans le calme et autres, et les observations de Me Lenormand, substituant Me Duval, représentant la société centrale de la voie verte.

Considérant ce qui suit :

1. Le 7 janvier 2016, la société Centrale éolienne de la voie verte a sollicité la délivrance d'une autorisation d'exploiter un parc éolien, composé de six aérogénérateurs et un poste de livraison, sur le territoire des communes de Saint-Longis et Vezot. Le dossier a été complété le 27 septembre 2016, sur demande du service instructeur. À la suite de l'enquête publique qui s'est déroulée du 9 janvier au 7 février 2017, le commissaire enquêteur a rendu un avis favorable le 3 mars 2017. Par un arrêté du 20 novembre 2017, le préfet de la Sarthe a délivré l'autorisation unique sollicitée. L'association Bien vivre dans le calme et autres relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, le tribunal administratif de Nantes a, au point 6 du jugement attaqué, répondu aux moyens des requérants tirés de l'absence de consultation pour avis du parc naturel régional Normandie-Maine.

3. En deuxième lieu, en jugeant, au point 18 du jugement attaqué, que les requérants invoquaient " l'absence de réalisation d'une étude géotechnique sans en démontrer la nécessité pour l'évaluation du risque pour la ressource en eau ", le tribunal administratif de Nantes doit être regardé comme ayant répondu au moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact en sa branche relative à l'absence d'étude géotechnique.

4. En troisième lieu, le tribunal administratif de Nantes a répondu, au point 19 du jugement attaqué, au moyen des requérants relatif aux atteintes portées par le projet aux différents intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement, notamment en sa branche qui concernait les chiroptères.

5. Il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué n'est entaché d'aucune irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'environnement : " Toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci. / Toute association de protection de l'environnement agréée au titre de l'article L. 141-1 (...) justifient d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec leur objet et leurs activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elles bénéficient de l'agrément dès lors que cette décision est intervenue après la date de leur agrément. "

7. L'association " Société pour la Protection des Paysages et de l'Esthétique de France ", agréée au niveau national au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement, a pour objet, notamment, la préservation des sites. Elle justifie ainsi d'un intérêt à agir contre l'autorisation de construire un parc éolien composé de six aérogénérateurs d'une hauteur en bout de pale de 150 mètres.

8. En deuxième lieu, l'association " Bien vivre dans le calme " a pour objet, en vertu de l'article 2 de ses statuts, " de protéger les paysages, les espaces naturels et le patrimoine bâti du territoire de la communauté de communes du Saosnois et du pays Marollais contre les nuisances dues aux installations industrielles et, pour cette raison, notamment contre toute implantation d'éoliennes dans ledit secteur ". Elle justifie ainsi d'un intérêt à agir contre l'autorisation de construire un parc éolien composé de six aérogénérateurs d'une hauteur en bout de pale de 150 mètres sur le territoire de deux communes relevant de la communauté de communes du Saosnois et du pays Marollais.

9. La demande présentée par l'association SPPEF et l'association " Bien vivre dans le calme " devant le tribunal administratif de Nantes est, par suite, recevable, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la société Centrale éolienne de la Voie verte et tirées de l'absence d'intérêt leur donnant qualité pour agir de certains requérants personnes physiques et de l'association des Amis du domaine médiéval de Moullins.

En ce qui concerne les dispositions juridiques applicables au litige :

10. Aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance no 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance no 2014-619 du 12 juin 2014, avant le 1er mars 2017, ainsi que les permis de construire en cours de validité à cette même date autorisant les projets d'installation d'éoliennes terrestres sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont (...) contestées (...) ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance no 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance no 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable ; / (...). "

11. En application de ces dispositions, l'autorisation contestée du 20 novembre 2017 du préfet de la Sarthe est considérée comme une autorisation environnementale.

12. En vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale et applicable depuis le 1er mars 2017, l'autorisation environnementale est soumise, comme l'autorisation unique l'était avant elle ainsi que les autres autorisations mentionnées au 1° de l'article 15 de cette même ordonnance, à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient, dès lors, au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

13. Cependant, il résulte des dispositions citées au point 10 que les demandes d'autorisation au titre du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, régulièrement déposées avant le 1er mars 2017, sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017, c'est-à-dire au 1er mars 2017.

14. En l'espèce, l'arrêté contesté du 20 novembre 2017 a été pris sur la demande déposée le 7 janvier 2016 par la société Centrale éolienne de la Voie verte, complétée le 27 septembre 2016. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'inspection des installations classées qui a estimé que le dossier de demande d'autorisation était complet, que la demande de la société Centrale éolienne de la Voie verte était régulièrement déposée avant le 1er mars 2017. Dès lors, en application des dispositions précitées du 2° de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017, les règles de procédure régissant la demande d'autorisation sont les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, le 1er mars 2017, dont celles de l'ordonnance du 20 mars 2014 et du décret du 2 mai 2014 relatifs à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement.

En ce qui concerne l'avis de l'autorité environnementale :

15. L'article 6 de la directive 2011/92 du 13 décembre 2011 a pour objet de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Eu égard à l'interprétation de l'article 6 de la directive 2001/42 du 27 juin 2001 donnée par la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l'affaire C-474/10, il résulte clairement des dispositions de l'article 6 de la directive 2011/92 du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce que l'entité administrative concernée dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée en donnant un avis objectif sur le projet concerné.

16. Lorsque le projet est autorisé par un préfet de département autre que le préfet de région, l'avis rendu sur le projet par le préfet de région en tant qu'autorité environnementale doit, en principe, être regardé comme ayant été émis par une autorité disposant d'une autonomie réelle répondant aux exigences de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, sauf dans le cas où c'est le même service qui a, à la fois, instruit la demande d'autorisation et préparé l'avis de l'autorité environnementale. En particulier, les exigences de la directive, tenant à ce que l'entité administrative appelée à rendre l'avis environnemental sur le projet dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, ne peuvent être regardées comme satisfaites lorsque le projet a été instruit pour le compte du préfet de département par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et que l'avis environnemental émis par le préfet de région a été préparé par la même direction, à moins que l'avis n'ait été préparé, au sein de cette direction, par le service mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales.

17. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'inspection des installations classées pour la protection de l'environnement, que le projet litigieux a été instruit, pour le compte du préfet de la Sarthe, par l'unité départementale de la Sarthe de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement des Pays de la Loire. L'avis environnemental émis par le préfet de région des Pays de la Loire a été préparé par la même direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement des Pays de la Loire, et d'ailleurs signé au nom du préfet de région par le directeur adjoint de celle-ci. Si la société Centrale éolienne de la Voie verte soutient que cet avis aurait été préparé par la " division Évaluation environnementale " du " service de connaissance des territoires et évaluation " de cette direction régionale, elle n'en justifie pas en se bornant à produire un organigramme de cette direction en septembre 2016, un extrait du projet de création de celle-ci daté du 16 décembre 2008 et l'arrêté du 26 juin 2013 portant réorganisation de la direction. En tout état de cause, il n'est pas davantage justifié que ce service serait effectivement celui mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement, qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales. Par suite, l'avis de l'autorité environnementale a été émis dans des conditions qui ne répondent pas aux exigences de la directive du 13 décembre 2011. Il résulte de l'instruction que ce vice, qui a été de nature à priver le public de la garantie tendant à ce qu'un avis objectif soit émis sur les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement par une autorité disposant d'une autonomie réelle, a nui à la bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération et a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision litigieuse.

En ce qui concerne l'avis du parc naturel régional Normandie-Maine :

18. D'une part, il résulte des dispositions de l'article L. 333-1 du code de l'environnement et du III de l'article R. 333-3 du même code, dans leur rédaction applicable au litige, que la charte d'un parc naturel régional est un acte destiné à orienter l'action des pouvoirs publics dans un souci de protection de l'environnement, d'aménagement du territoire, de développement économique et social et d'éducation et de formation du public sur le territoire du parc et à assurer la cohérence de cette action avec les objectifs qui y sont définis. Il appartient, dès lors, à l'État et aux différentes collectivités territoriales concernées de prendre les mesures et de mener les actions propres à assurer la réalisation des objectifs de la charte et de mettre en œuvre les compétences qu'ils tiennent des différentes législations, dès lors qu'elles leur confèrent un pouvoir d'appréciation, de façon cohérente avec les objectifs ainsi définis. Toutefois la charte d'un parc naturel régional ne peut légalement imposer par elle-même des obligations aux tiers, indépendamment de décisions administratives prises par les autorités publiques à leur égard. Elle ne peut davantage subordonner légalement les demandes d'autorisations d'installations classées pour la protection de l'environnement, ou d'autorisation unique, à des obligations de procédure autres que celles prévues par les différentes législations en vigueur.

19. Il résulte du point précédent que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir du point 23.4 de la charte du parc naturel régional Normandie-Maine pour soutenir que le parc aurait dû être saisi pour avis préalablement à l'arrêté contesté. Au demeurant, les dispositions de cette charte se bornent à prévoir une information du parc par les collectivités membres de celui-ci, et non une consultation pour avis.

20. D'autre part, en vertu du III de l'article R. 333-14 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige, le syndicat mixte d'aménagement et de gestion du parc naturel régional " est saisi de l'étude d'impact lorsque des aménagements, ouvrages ou travaux soumis à cette procédure en vertu des articles L. 122-1 à L. 122-3 et R. 122-1 à R. 122-16 sont envisagés sur le territoire du parc. " A supposer même que ces dispositions puissent être interprétées comme imposant la consultation pour avis du parc naturel régional préalablement à la délivrance de l'autorisation unique en litige, il ressort des pièces du dossier que, par deux courriers du préfet de la Sarthe des 14 mars et 27 septembre 2016, préalablement à l'organisation de l'enquête publique, le parc naturel régional Normandie-Maine a été saisi pour avis de la demande d'autorisation unique déposée par la société Centrale éolienne de la voie verte, incluant son étude d'impact. Ce parc n'ayant émis aucun avis sur le projet et n'ayant donc pas pris position sur celui-ci, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les participants à l'enquête publique et le commissaire-enquêteur n'ont " pas eu connaissance de sa position ". En tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que le vice allégué ait pu nuire à l'information du public ni exercer une influence sur le sens de l'arrêté contesté.

En ce qui concerne l'étude d'impact :

21. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

S'agissant des solutions de substitution raisonnables et des mesures compensatoires :

22. En premier lieu, l'étude d'impact du projet litigieux comporte, en pages 326 à 331, des développements suffisants, au regard des dispositions du 5° de l'article R. 122-5 dans sa rédaction applicable au litige, relatifs aux raisons, tenant notamment aux effets sur l'environnement et la santé humaine, pour lesquels le projet présenté a été retenu, tant s'agissant du choix du site d'implantation du projet que des variantes envisagées.

23. En second lieu, l'étude d'impact du projet comporte, en pages 343 et 348 à 350, des précisions suffisantes relatives aux mesures destinées à compenser les impacts paysagers du projet. En particulier, les secteurs concernés par ces mesures y sont identifiés et peuvent être localisés sur une carte.

S'agissant de l'étude chiroptérologique :

24. En ce qui concerne l'étude chiroptérologique, il résulte de l'instruction qu'elle a donné lieu, outre la consultation des données bibliographiques disponibles, à sept sorties nocturnes de prospection organisées en avril, juin, juillet et septembre 2014, ayant permis la réalisation d'enregistrements sur des points d'écoute fixes et mobiles, et à deux sorties diurnes de recherche de gîte en février et juillet 2014. Cette étude a permis de recenser la présence de quatorze espèces de chiroptères dans l'aire d'étude rapprochée (rayon de 500 mètres) et de deux autres espèces dans l'aire d'étude locale (rayon de 2 kilomètres). Elle conclut que " l'aire d'étude apparaît déconnectée des zones à enjeux que sont les carrières du proche site Natura 2000 ", à savoir la zone spéciale de conservation " Vallée du Rutin, côteau de Chaumiton, étang de Saosnes et forêt de Perseigne ", le projet étant situé à environ 1,5 kilomètre du " noyau " de la vallée du Rutin et à 3 kilomètres du " noyau " de la forêt de Perseigne. L'étude ajoute que la " fréquentation de l'aire d'étude par les espèces qui gîtent dans les cavités Natura 2000 est anecdotique, voire occasionnelle ", dès lors que ces cavités sont " très mal connectées avec la zone d'implantation, en l'absence de continuités arborées ou de zones de chasse favorables ". Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne résulte pas de l'instruction que les sites Natura 2000 et les différentes cavités qui abritent localement un grand nombre d'espèces et d'individus de chiroptères auraient été insuffisamment pris en compte par l'étude d'impact. Par ailleurs, s'il est vrai que l'étude d'impact ne comporte ni les données brutes des prospections nocturnes, ni les durées, horaires et localisation des différents points d'écoute pour chacune des sorties de prospection, elle précise que celles-ci ont été réalisées du coucher du soleil jusqu'en milieu de nuit et dans des conditions météorologiques satisfaisantes, détaillées en page 72. Le tableau figurant en pages 210 à 212 de " l'étude d'impact écologique " recense en outre le " nombre de contacts sur la nuit entière (cas des enregistrements SM2 et Anabat) " présenté par date pour chaque espèce, avec une indication du type de milieu, tandis que la carte no 9 relative au " suivi chiroptérologique - points d'écoutes et niveaux d'activité " recense le niveau d'activité, la période et le matériel d'inventaire pour chaque point d'écoute. Dans les circonstances de l'espèce, ces indications apparaissent suffisantes pour apprécier la pertinence de la méthodologie suivie et de la pression d'inventaire réalisée. Si les requérants soutiennent encore que la méthodologie mise en œuvre pour l'élaboration de l'étude chiroptérologique ne serait pas conforme aux préconisations des guides élaborés notamment par la société française pour l'étude et la protection des mammifères ou Eurobats, cette circonstance ne permet pas de conclure à une insuffisance de l'étude d'impact dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction, au regard de la configuration du site et des éléments avancés par les requérants, qu'une étude plus poussée de l'état initial, incluant notamment des écoutes en hauteur, aurait été de nature à remettre en cause les conclusions de cette étude. Enfin, à supposer même que le pétitionnaire aurait eu recours à un " indice de vulnérabilité " minoré s'agissant du risque de collision de certaines espèces de chiroptères avec les pales des éoliennes, il ne résulte pas de l'instruction que cette insuffisance alléguée ait, en l'espèce, pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ni ait été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

S'agissant de l'étude paysagère :

25. En premier lieu, l'étude paysagère, qui comporte une présentation des impacts visuels et paysagers des éoliennes depuis des points rapprochés du projet, n'avait pas à évaluer ces impacts par la réalisation de photomontages depuis l'ensemble des lieux de vie les plus proches de celui-ci. À cet égard, l'étude d'impact comporte en page 228 une carte relative à la " potentialité de perceptions dans l'air d'étude rapprochée ", mettant en évidence les perceptions " marquantes " ou " moyennement marquante " depuis les hameaux les plus proches du projet, ainsi que des développements en pages 230 et 231 sur les perceptions du parc projeté depuis les hameaux de la Grande franchetière, des Grisières, du Haut-Bray et de la Bedonnière. Le photomontage établi par les requérants au sujet du hameau d'Egusson, qui montre que les éoliennes seront largement masquées par des arbres de haute fûtée densément implantés, ne permet pas de conclure que les conclusions de l'étude d'impact au sujet de l'environnement proche seraient erronées.

26. En second lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne résulte pas de l'instruction que l'étude d'impact procède à une présentation trompeuse de l'impact du projet sur les monuments historiques et les lieux d'intérêt. En particulier, il ne ressort pas de la comparaison des différents photomontages produits à l'instance que la visibilité du parc depuis l'église Saint Jean-Baptiste et le château de la Cour à Vezot aurait été minorée par l'étude d'impact, laquelle ne nie pas l'existence de covisibilités entre le parc et ces monuments historiques mais relève, en page 214 de l'étude, que ces covisibilités seront très peu nombreuses en raison d'un environnement " très fermé visuellement ". En revanche, s'il est vrai qu'au regard du photomontage produit par les requérants, l'étude d'impact est erronée en tant qu'elle indique, en page 301, qu'il n'existera pas de covisibilité entre le parc et le bourg de Vezot, il ne résulte pas de l'instruction que le photomontage produit par le pétitionnaire serait révélateur d'une " tromperie " ni, compte tenu du fait que la perception du village demeure lointaine, partielle et limitée par la végétation, que cette insuffisance ait, en l'espèce, pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. Par ailleurs, si l'étude paysagère indique en page 218, que le projet sera " perceptible de façon non prégnante et ponctuellement depuis l'extrémité de la frange Ouest de l'agglomération de Mamers ", alors qu'il résulte du photomontage réalisé par les requérants depuis la rue du Fort que le rotor d'une éolienne et l'extrémité des pales d'une seconde seront également visibles depuis une partie de son versant est, il ne résulte pas de l'instruction que cette insuffisance de l'étude d'impact, compte-tenu du caractère limité et éloigné de cette visibilité du parc, ait pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou ait été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

S'agissant des effets cumulés :

27. En premier lieu, l'étude consacre plusieurs développements aux effets cumulés du parc autorisé, notamment avec le parc de Saint-Longis, situé à environ 2 kilomètres, et fait état de leur proximité et de l'impact visuel en résultant pour les lieux de vie les plus proches. Si les requérants soutiennent qu'aucun photomontage n'a été réalisé depuis les lieux de vie situés entre les deux parcs, il ne résulte pas de l'instruction qu'il existerait depuis ces lieux une situation de covisibilité des deux parcs, situés respectivement à l'ouest et à l'est de ces hameaux, qu'un photomontage aurait pu faire apparaître. Si les requérants soutiennent par ailleurs que le parc litigieux et celui en projet à Saint-Longis seront visibles successivement depuis certains lieux de vie situés entre les deux parcs projetés, les éléments qu'ils versent au dossier sont insuffisants pour caractériser un risque de perception d'un " effet d'encerclement " depuis ces lieux de vie, et donc une insuffisance de l'étude d'impact sur ce point.

28. En second lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'exploitation du parc litigieux et celle du parc de Saint-Longis sont susceptibles d'avoir des effets cumulés sur les chiroptères.

S'agissant de l'absence d'étude géotechnique :

29. L'étude d'impact comporte une étude hydrogéologique, dont le contenu permet d'apprécier le risque de pollution de la nappe souterraine lié à la réalisation des fondations des éoliennes projetées. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne résulte pas de l'instruction que la réalisation d'une étude géotechnique était nécessaire dans le cadre de l'évaluation des impacts du projet préalablement à la délivrance de l'autorisation contestée.

30. Il résulte de ce qui a été dit aux points 22 à 29 que le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit être écarté.

En ce qui concerne l'évaluation des incidences Natura 2000 :

31. En se bornant à soutenir que " dans la mesure où l'étude d'incidences Natura 2000 est un renvoi à l'étude chiroptérologique, il est indéniable que cette étude Natura 2000 laisse subsister un doute raisonnable concernant l'absence d'effets préjudiciables pour l'intégrité du site concerné, ce qui n'est pas suffisant pour l'étude Natura 2000 telle que la CJUE l'apprécie ", les requérants n'assortissent pas leur moyen de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé. En tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que cette évaluation, qui figure en pages 194 à 201 de l'étude d'impact, serait insuffisante, ni qu'il subsisterait un doute raisonnable quant à l'absence d'effets préjudiciables du projet pour l'intégrité du site Natura 2000 concerné.

En ce qui concerne la présentation des capacités financières :

32. En vertu du 5° de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017, la demande d'autorisation mentionne " les capacités techniques et financières de l'exploitant ". Il résulte de ces dispositions que le pétitionnaire est tenu de fournir, à l'appui de sa demande, des indications précises et étayées sur ses capacités techniques et financières. Si cette règle a été ultérieurement modifiée par le décret du 26 janvier 2017 relatif à l'autorisation environnementale, qui a créé l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement en vertu duquel le dossier comprend une description des capacités techniques et financières dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour en justifier, l'exploitant devant, dans ce dernier cas, adresser au préfet les éléments justifiant de ses capacités techniques et financières au plus tard à la mise en service de l'installation, cette évolution de la règle de droit ne dispense pas le pétitionnaire de l'obligation de régulariser une irrégularité dans la composition du dossier au vu des règles applicables à la date de délivrance de l'autorisation dès lors que l'irrégularité en cause a eu pour effet de nuire à l'information complète du public.

33. Le dossier de demande d'autorisation d'exploiter, déposé en septembre 2016, fait apparaître que la société Centrale éolienne de la Voie verte, au capital social de 2 500 euros, est détenue à 100 % par la société Neoen SAS. Il précise que la société Centrale éolienne de la Voie verte " devra financer la construction du parc éolien, mais aussi les frais liés à l'exploitation et la maintenance de la centrale ". Il indique que l'investissement pour ce projet, évalué à 29,7 millions d'euros et incluant les frais de remise en état du site, sera " probablement " financé à hauteur de 80 % par un emprunt bancaire et de 20 % par la société Neoen. Le dossier comporte également un plan d'affaire prévisionnel, ainsi que des informations sur les capacités financières de la société Neoen, notamment son capital social et des indications sur les financements qu'elle a obtenus pour d'autres projets. Figurent encore au dossier un engagement du 25 novembre 2015 de la société Neoen à " mettre à disposition de la Centrale Eolienne de de la Voie Verte (...) l'ensemble de ses capacités financières afin qu'elle puisse honorer les engagements pris dans le cadre de la présente demande d'autorisation d'exploiter ", et une " lettre d'intention " d'un établissement de crédit indiquant le " vif intérêt " de celui-ci à " considérer l'octroi d'un prêt bancaire couvrant environ 80 % des coûts de développement et de construction du projet ". Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'engagement du 25 novembre 2015 de la société Neoen, dès lors qu'il couvre " les engagements pris dans le cadre de la (...) demande d'autorisation d'exploiter ", doit être interprété comme incluant les engagements pris par la société Centrale éolienne de la Voie verte au titre de ses obligations de démantèlement des installations et de remise en état du site. Ainsi, le dossier de demande d'autorisation pouvait être regardé comme suffisamment précis et étayé quant aux capacités financières dont la société pétitionnaire serait effectivement en mesure de disposer. S'il est vrai que le dossier de demande d'autorisation d'exploiter est erroné en tant qu'il précise que la société Centrale éolienne de la Voie verte est une société détenue à 100 % par la société Neoen SAS, alors qu'elle est en réalité détenue à 100 % par la société par actions simplifiée à associé unique Neoen Eolienne, elle-même présidée et détenue à 100 % par la société Neoen, il ne résulte pas de l'instruction que cette information erronée ait, en l'espèce, eu pour effet de nuire à l'information complète du public ou d'exercer une influence sur le sens de la décision litigieuse, compte-tenu des liens capitalistiques de ces trois sociétés et de l'absence d'incidence de cet erreur sur la portée de l'engagement précité du 25 novembre 2015 de la société Neoen.

En ce qui concerne l'appréciation des conditions de fond relatives aux capacités financières de la société pétitionnaire :

34. Les articles L. 181-27 et D. 181-15-2 du code de l'environnement modifient les règles de fond relatives aux capacités techniques et financières de l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement antérieurement définies à l'article L. 512-1 de ce code. Il en résulte qu'une autorisation d'exploiter une installation classée ne peut légalement être délivrée, sous le contrôle du juge du plein contentieux des installations classées, si les conditions qu'ils posent ne sont pas remplies. Lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code.

35. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'il convient de faire application des dispositions de l'article L. 181-27 du code de l'environnement issues de l'ordonnance du 26 janvier 2017 pour apprécier les conditions de fond relatives aux capacités financières de l'exploitant.

36. Aux termes de l'article L. 181-27 du code de l'environnement : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité. ". Selon l'article D. 181-15-2 du même code : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I. - Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : / (...) / 3° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 181-27 dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour les établir. Dans ce dernier cas, l'exploitant adresse au préfet les éléments justifiant la constitution effective des capacités techniques et financières au plus tard à la mise en service de l'installation (...) ".

37. Ainsi qu'il a été dit au point 33, le dossier de demande d'autorisation comporte l'indication que l'investissement pour le projet litigieux, évalué à 29,7 millions d'euros et incluant les frais de remise en état du site, sera " probablement " financé à hauteur de 80 % par un emprunt bancaire et de 20 % par la société Neoen. Le dossier comporte également un plan d'affaire prévisionnel. Si les requérants soutiennent que celui-ci serait erroné et " trompeur ", ils ne l'établissent pas par les pièces versées au dossier, à savoir une analyse non étayée réalisée par l'un des requérants faisant état de sa qualité d'ancien comptable public et commissaire aux comptes. Le dossier inclut, outre une " lettre d'intention " d'un établissement de crédit, un engagement du 25 novembre 2015 de la société Neoen à " mettre à disposition de la Centrale Eolienne de la Voie Verte (...) l'ensemble de ses capacités financières afin qu'elle puisse honorer les engagements pris dans le cadre de la présente demande d'autorisation d'exploiter ". Cet engagement a été confirmé par un courrier du président de la société Neoen du 25 avril 2017, adressé au préfet de la Sarthe. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, cet engagement, dès lors qu'il couvre " les engagements pris dans le cadre de la (...) demande d'autorisation d'exploiter ", doit être interprété comme incluant les engagements pris par la société Centrale éolienne de la Voie verte au titre de ses obligations de démantèlement des installations et de remise en état du site, qui sont d'ailleurs intégrés, selon la demande d'autorisation, dans le montant 29,7 millions d'investissement prévisionnel. Enfin, il est prévu de réaliser des provisions annuelles en vue du démantèlement des éoliennes. Dans ces conditions, le moyen tiré du non-respect des dispositions des articles L. 181-27 et D. 181-15-2 du code de l'environnement doit être écarté.

En ce qui concerne le montant des garanties de démantèlement et de remise en état du site :

38. Aux termes de l'article R. 515-101 du code de l'environnement : " I. - La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre du 2° de l'article L. 181-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation ". Les articles 30 à 32 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans leur rédaction issue de l'arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, précisent ces dispositions. En vertu du II de l'annexe I à cet arrêté, auquel renvoie l'article 30, le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur est égal au nombre d'éoliennes multiplié par le coût unitaire d'un aérogénérateur qui varie selon la puissance de l'éolienne. Celui-ci s'établit à 50 000 euros lorsque la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur est inférieure ou égale à 2 MW. Lorsque la puissance unitaire de l'aérogénérateur est supérieure à 2 MW, ce coût unitaire est calculé selon la formule définie par le b) du I de cette annexe selon laquelle : " Cu = 50 000 + 10 000 * (P-2) où : Cu est le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur ; -P est la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur, en mégawatt (MW). ".

39. Il résulte de l'instruction que le montant initial des garanties financières fixé à 300 000 euros par l'article 6 de l'arrêté contesté a été calculé conformément aux dispositions de l'article 2 de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, en vigueur à la date de l'arrêté préfectoral, sur la base d'un coût forfaitaire de 50 000 euros, par éolienne, quelle que soit sa puissance. Ces dispositions ont, toutefois, été abrogées par l'arrêté du 22 juin 2020 précité et remplacées, s'agissant des éoliennes d'une puissance supérieure à 2 MW, comme en l'espèce, par un coût variable selon leur puissance, calculé ainsi qu'il a été dit au point 38. Par suite, le montant initial des garanties financières de 300 000 euros fixé à l'article 6 de l'arrêté contesté est insuffisant au regard des dispositions désormais applicables. En revanche, les requérants n'établissent pas que le montant des garanties financières exigé par les nouvelles dispositions ne serait pas suffisant pour assurer le démantèlement des installations et la remise en état de leur site d'implantation.

En ce qui concerne les atteintes portées aux intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

40. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas ". L'article L. 511-1 du même code dispose que : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ". Selon l'article L. 512-1 de ce code : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. / L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral. / La délivrance de l'autorisation, pour ces installations, peut être subordonnée notamment à leur éloignement des habitations, immeubles habituellement occupés par des tiers, établissements recevant du public, cours d'eau, voies de communication, captages d'eau, ou des zones destinées à l'habitation par des documents d'urbanisme opposables aux tiers. Elle prend en compte les capacités techniques et financières dont dispose le demandeur, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts visés à l'article L. 511-1 ".

41. En premier lieu, en ce qui concerne les impacts du projet pour l'avifaune, les requérants, en se bornant à rappeler l'état de conservation du Bruand proyer et de la Cigogne noire, ainsi que la présence de certains individus de Bruand proyer observés le long de la Voie romaine, dans l'aire d'étude du projet, et d'un couple nicheur de Cigogne noire en forêt de Perseigne sans qu'il soit établi qu'il serait susceptible de fréquenter le site d'implantation des éoliennes, n'apportent aucun élément de nature à remettre en cause l'impact faible à très faible du projet pour ces espèces au regard du risque de collision. Il en va de même pour le Faucon hobereau, pour lequel un risque d'impact moyen a été retenu. S'agissant du Pluvier guignard, l'étude d'impact mentionne qu'il s'agit d'une espèce non nicheuse, susceptible de fréquenter l'aire du projet en halte migratoire, la plaine à l'ouest de Mamers étant " un des tout premiers sites sarthois pour l'espèce ". Elle relève cependant que sa présence annuelle, sur des périodes réduites entre fin-avril et mi-mai et mi-août à mi-septembre, est " assez anecdotique (maximum de 9 individus ensemble) ", et que l'espèce est très peu sensible au risque de collision avec les éoliennes. En se bornant à invoquer un avis du département de la Sarthe indiquant que cette espèce est " très sensible à l'éolien ", les requérants ne fournissent pas d'éléments suffisants pour remettre en cause les conclusions de l'étude d'impact.

42. En deuxième lieu, en ce qui concerne les impacts du projet sur les chiroptères, il ressort de l'étude d'impact du projet, dont il a été dit aux points 24 qu'elle n'était pas entachée d'insuffisance, que " l'aire d'étude apparaît déconnectée des zones à enjeux que sont les carrières du proche site Natura 2000 ", à savoir la zone spéciale de conservation " Vallée du Rutin, côteau de Chaumiton, étang de Saosnes et forêt de Perseigne ", le projet étant situé à environ 1,5 kilomètre du " noyau " de la vallée du Rutin et à 3 kilomètres du " noyau " de la forêt de Perseigne. L'étude ajoute que la " fréquentation de l'aire d'étude par les espèces qui gîtent dans les cavités Natura 2000 est anecdotique, voire occasionnelle ", dès lors que ces cavités sont " très mal connectées avec la zone d'implantation, en l'absence de continuités arborées ou de zones de chasse favorables ". En se bornant à soutenir que le projet litigieux s'implantera à une relative proximité de la zone de protection spéciale précitée et de plusieurs zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de type I et II, et en faisant valoir que les espèces de chiroptères recensées dans ces zones ont un rayon d'action incluant le terrain d'assiette du projet, les requérants n'apportent pas suffisamment d'éléments pour remettre en cause les conclusions de l'étude d'impact sur ce point.

43. En troisième lieu, en ce qui concerne les impacts du projet sur les paysages et les sites et monuments, il résulte de l'instruction que le parc litigieux, situé dans le parc naturel régional Normandie-Maine et à proximité du parc national régional du Perche, s'implantera dans un paysage agricole assez vallonné, traversé dans sa partie sud par quelques haies et fossés. Ce plateau ondulé est encadré par trois lignes de crête au nord, à l'est et au sud, ainsi que par de nombreux vallons et vallées, notamment les vallées du Rutin, de la Saosnette et du Moire. Dans l'aire d'étude éloignée se trouvent, au sud, un paysage de plaine ondulée, et, au nord, la forêt domaniale de Perseigne, située sur une grande ligne de crête principale dont le point haut (342 m) est le point culminant du département de la Sarthe. La partie nord du site d'implantation offre de vastes panoramas en belvédère depuis des sites présentant des paysages de qualité, dont le village de la Perrière, site inscrit et classé au sein d'une zone de protection du patrimoine architectural urbain et paysager (ZPPAUP), situé à 10 kilomètres du projet. Quarante-huit monuments historiques ou classés sont recensés dans l'aire d'étude éloignée, dont quatre situés à proximité du projet, à savoir l'église Saint-Jean-Baptiste et le château de la Cour à Vezot, le presbytère de Pizieux et l'église de Saosnes. Cependant, d'une part, il ne résulte pas de l'instruction que l'impact visuel des éoliennes projetées dans l'aire d'étude rapprochée, au sein d'un paysage agricole dénué d'intérêt particulier, alors que les vallons, la topographie et la végétation limiteront les perceptions des machines, portera atteinte aux paysages. D'autre part, l'impact du projet sur le paysage éloigné s'avèrera limité, y compris depuis le site de la Perrière, compte-tenu du fait que les éoliennes ne seront visibles qu'en perception lointaine. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que le projet portera significativement atteinte aux monuments historiques ou classés des environs du projet. En particulier, si le sommet ou les pales de deux éoliennes du parc litigieux seront en covisibilité avec l'église Saint-Jean-Baptiste de Vezot, cette perception ponctuelle en arrière-plan, à la même hauteur qu'une croix et que la végétation environnante et à une hauteur nettement inférieure à l'église, ne porte pas atteinte à ce monument. De même, si le parc et le bourg de Vezot, dont ses deux monuments historiques classés, seront ponctuellement visibles simultanément depuis certaines routes d'accès à ce bourg, la perception du village demeurera lointaine, partielle et limitée par une végétation dense. L'impact sur le village de Mamers et son église sera également très limité dès lors que, depuis de rares points de vue, seule l'extrémité d'une éolienne et les pales d'une seconde émergeront du sommet d'une colline, de façon lointaine et sans effet d'écrasement.

44. En quatrième lieu, si les éoliennes seront au moins partiellement visibles depuis les hameaux situés à proximité immédiate du projet, ainsi que depuis la partie ouest du bourg de Mamers, situé à environ 4 kilomètres du projet, il ne résulte pas de l'instruction, contrairement à ce que soutiennent les requérants, que cette visibilité engendrera un effet de surplomb, d'écrasement ou de domination de nature à constituer une atteinte à la commodité du voisinage.

45. Dès lors, il ne résulte pas de l'instruction que les atteintes que le projet litigieux est susceptible de porter à la protection de la nature et de l'environnement présentent le caractère de graves dangers ou inconvénients pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, pour la conservation des sites et des monuments, ainsi que pour la commodité du voisinage.

En ce qui concerne la méconnaissance des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement :

46. D'une part, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : / 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle (...) d'animaux de ces espèces (...). " Aux termes de l'article L. 411-2 du même code : " I. - Un décret en Conseil d'État détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : / (...) / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : / a) Dans l'intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels ; / b) Pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l'élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d'autres formes de propriété ; / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; / d) À des fins de recherche et d'éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour des opérations de reproduction nécessaires à ces fins, y compris la propagation artificielle des plantes ; / e) Pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées, d'une manière sélective et dans une mesure limitée, la prise ou la détention d'un nombre limité et spécifié de certains spécimens. / (...) ".

47. D'autre part, aux termes de l'article L. 181-1 du code de l'environnement, créé par l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " L'autorisation environnementale, dont le régime est organisé par les dispositions du présent livre ainsi que par les autres dispositions législatives dans les conditions fixées par le présent titre, est applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu'ils ne présentent pas un caractère temporaire : / (...) / 2° Installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées à l'article L. 512-1. / (...). " En vertu du I de l'article L. 181-2 du même code, créé par la même ordonnance, " l'autorisation environnementale tient lieu, y compris pour l'application des autres législations, des autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments suivants, lorsque le projet d'activités, installations, ouvrages et travaux relevant de l'article L. 181-1 y est soumis ou les nécessite : / (...) / 5° Dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats en application du 4° de l'article L. 411-2 ; / (...) ". Selon l'article L. 181-3 du même code : " (...) / II. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent également : / (...) 4° Le respect des conditions, fixées au 4° de l'article L. 411-2, de délivrance de la dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, lorsque l'autorisation environnementale tient lieu de cette dérogation ; / (...) ".

48. Enfin, en vertu des dispositions, citées au point X, du 1° de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale, les autorisations uniques sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités. Les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contestées

49. Dès lors que l'autorisation environnementale créée par cette ordonnance du 26 janvier 2017 tient lieu des diverses autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés au I de l'article L. 181- 2 du code de l'environnement, dont la dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces animales non domestiques et de leurs habitats prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement, l'autorisation environnementale, issue de l'autorisation unique contestée, peut être utilement contestée au motif qu'elle n'incorpore pas, à la date à laquelle la cour statue, la dérogation dont il est soutenu qu'elle est requise pour le projet en cause.

50. D'une part, aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection : " Pour les espèces de mammifères dont la liste est fixée ci-après : / I. - Sont interdits sur tout le territoire métropolitain et en tout temps la destruction, la mutilation, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle des animaux dans le milieu naturel. / (...) ". La liste d'espèces de mammifère de cet article vise notamment la Noctule commune, la Noctule de Leisler, la Pipistrelle commune, la Pipistrelle de Kuhl, la Pipistrelle de Nathusius et la Sérotine commune.

51. Il résulte de l'instruction, notamment de l'étude d'impact du projet, que les six espèces de chiroptères citées au point précédent sont sensibles au risque de collision, celui-ci étant fort à très fort selon les espèces. Les risques d'impact liés au risque de collision avec les éoliennes du projet sont jugés " moyens " pour la Noctule de Leisler et la Pipistrelle de Nathusius, qui fréquentent régulièrement le site d'implantation du projet bien qu'en effectif faible. Si la société Centrale éolienne de la Voie verte fait valoir que des mesures d'évitement et de réduction sont prévues, notamment le respect d'une distance de plus de 200 m des lisières arborées et des haies, ainsi que la non végétalisation des abords des plateformes pour ne pas les rendre attractifs pour les chiroptères et les oiseaux, il ressort de l'étude d'impact que la Noctule de Leisler et la Pipistrelle de Nathusius sont réputées s'affranchir des linéaires arborés lors de leur migration active et de certains vols de transit. Si l'étude conclut qu'il est " peu probable que les éventuels cas de collision affectent les populations de chauves-souris de manière significative ", ce dont on pourrait déduire que le projet litigieux ne serait pas susceptible de nuire au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle, une telle appréciation serait seulement de nature à permettre la délivrance de la dérogation prévue par les dispositions du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, sous réserve que les autres conditions fixées par ce texte soient remplies, sans exempter le pétitionnaire de l'obligation de solliciter une telle dérogation.

52. D'autre part, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection : " Pour les espèces d'oiseaux dont la liste est fixée ci-après : / I. ' Sont interdits sur tout le territoire métropolitain et en tout temps : / ' la destruction intentionnelle ou l'enlèvement des œufs et des nids ; / ' la destruction, la mutilation intentionnelles, la capture ou l'enlèvement des oiseaux dans le milieu naturel ; / ' la perturbation intentionnelle des oiseaux, notamment pendant la période de reproduction et de dépendance, pour autant que la perturbation remette en cause le bon accomplissement des cycles biologiques de l'espèce considérée. / II. ' Sont interdites sur les parties du territoire métropolitain où l'espèce est présente ainsi que dans l'aire de déplacement naturel des noyaux de populations existants la destruction, l'altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos des animaux. Ces interdictions s'appliquent aux éléments physiques ou biologiques réputés nécessaires à la reproduction ou au repos de l'espèce considérée, aussi longtemps qu'ils sont effectivement utilisés ou utilisables au cours des cycles successifs de reproduction ou de repos de cette espèce et pour autant que la destruction, l'altération ou la dégradation remette en cause le bon accomplissement de ces cycles biologiques. / (...) ". La liste d'espèces d'oiseaux de cet article vise notamment le Balbuzard pêcheur, le Busard cendré, le Busard des roseaux, le Busard Saint Martin, la Buse variable, la Cigogne blanche, la Cigogne noire, le Circaète Jean-le-Blanc, le Faucon crécerelle, le Faucon pèlerin, le Milan noir, l'Oedicnème criard et le Pluvier guignard.

53. Il résulte de l'instruction que le risque d'impact du projet en raison d'une collision des oiseaux avec les éoliennes est évalué par l'étude d'impact à un niveau " moyen " pour le Faucon hobereau, en raison de sa présence très régulière, générant un risque de collision élevé, et de la faiblesse de la population locale, à savoir un couple nichant dans l'aire d'étude en lisière du bois de la Groie à quelques centaines de mètres des machines projetées, tandis qu'un autre niche dans un rayon de 5 kilomètres. L'étude ajoute qu'un impact sur ce rapace est " prévisible " eu égard à sa technique de chasse par poursuite aérienne et accélérations, dans les espaces ouverts et en se concentrant sur sa proie, ainsi qu'eu égard au fait que les jeunes effectuent leurs premiers vols au-dessus des cultures environnantes à diverses hauteurs de vol. Contrairement à ce que soutient la société Centrale éolienne de la Voie verte, il ne résulte pas de l'instruction que les mesures d'évitement et de réduction prévues à l'égard de l'avifaune seraient de nature à réduire ce niveau d'impact pour le Faucon hobereau. L'étude d'impact du projet évalue par ailleurs à " faible " le risque d'impact du projet par collision avec les machines projetées pour treize autres espèces d'oiseaux nicheuses ou migratrices fréquentant le site d'implantation du projet, à savoir le Balbuzard pêcheur, le Busard cendré, le Busard des roseaux, le Busard Saint Martin, la Buse variable, la Cigogne blanche, la Cigogne noire, le Circaète Jean-le-Blanc, le Faucon crécerelle, le Faucon pèlerin, le Milan noir, l'Oedicnème criard et le Pluvier guignard.

54. Ainsi, en l'état de l'instruction, il existe, même en tenant compte des mesures d'évitement et de réduction envisagées, un risque que l'exploitation du parc litigieux entraîne la destruction intentionnelle, interdite par les dispositions de l'article L. 411-1 du code de l'environnement, de spécimens appartenant à des espèces animales protégées, susceptible d'affecter la conservation de ces espèces. Par conséquent, le pétitionnaire est tenu de solliciter une dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces animales non domestiques et de leurs habitats, prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Les requérants sont, dès lors, fondés à soutenir que l'arrêté attaqué est entaché d'illégalité en tant qu'il n'incorpore pas la dérogation prévue par ces dispositions.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :

55. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / II. - En cas d'annulation ou de sursis à statuer affectant une partie seulement de l'autorisation environnementale, le juge détermine s'il y a lieu de suspendre l'exécution des parties de l'autorisation non viciées. "

56. La faculté ouverte par les dispositions précitées du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, relève de l'exercice d'un pouvoir propre du juge, qui n'est pas subordonné à la présentation de conclusions en ce sens. Lorsqu'il n'est pas saisi de telles conclusions, le juge du fond peut toujours mettre en œuvre cette faculté, mais il n'y est pas tenu, son choix relevant d'une appréciation qui échappe au contrôle du juge de cassation. En revanche, lorsqu'il est saisi de conclusions en ce sens, le juge est tenu de mettre en œuvre les pouvoirs qu'il tient du 2° du I de l'article L. 181-18-du code de l'environnement si les vices qu'il retient apparaissent, au vu de l'instruction, régularisables. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l'intervention d'une décision corrigeant le vice dont est entachée la décision attaquée. Un vice de procédure, dont l'existence et la consistance sont appréciées au regard des règles applicables à la date de la décision attaquée, doit en principe être réparé selon les modalités prévues à cette même date. Si ces modalités ne sont pas légalement applicables, notamment du fait de l'illégalité des dispositions qui les définissent, il appartient au juge de rechercher si la régularisation peut être effectuée selon d'autres modalités qu'il lui revient de définir en prenant en compte les finalités poursuivies par les règles qui les ont instituées et en se référant, le cas échéant, aux dispositions en vigueur à la date à laquelle il statue.

57. En l'espèce, les vices relevés aux points 17, 39 et 54, relatifs à l'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale, à l'insuffisance du montant des garanties de démantèlement et de remise en état du site ainsi qu'à l'absence de dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces animales non domestiques et de leurs habitats prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement, sont susceptibles d'être régularisés par une autorisation modificative, prise au vu d'un dossier actualisé qui sera soumis à une nouvelle enquête publique, conformément aux modalités qui suivent.

En ce qui concerne la dérogation prévue par les dispositions du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement :

58. Le vice résultant de l'absence de la demande de dérogation en application du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative comportant une telle dérogation prise après la consultation prévue à l'article R. 181-28 du code de l'environnement. L'avis recueilli à l'issue de cette consultation ainsi que la demande de dérogation de la société pétitionnaire seront versés au dossier soumis à l'enquête publique afin de soumettre ces nouveaux éléments à la connaissance du public.

En ce qui concerne l'avis de l'autorité environnementale :

59. L'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale peut être régularisée par la consultation d'une autorité environnementale présentant les garanties d'impartialité requises. Pour que cette régularisation puisse être effectuée, ce nouvel avis devra être rendu dans les conditions définies aux articles R. 122-6 à R. 122-8 et R. 122-24 du code de l'environnement, applicables à la date de l'émission de cet avis ou de la constatation de l'expiration du délai requis pour qu'il soit rendu, par la mission régionale de l'autorité environnementale du conseil général de l'environnement et du développement durable compétente pour la région Pays de la Loire.

60. Lorsque ce nouvel avis aura été rendu, ou lorsqu'il sera constaté que la mission régionale de l'autorité environnementale du conseil général de l'environnement et du développement durable compétente pour la région Pays de la Loire n'a pas émis d'observations dans le délai qui lui est imparti par les dispositions du code de l'environnement mentionnées au point précédent, ce nouvel avis ou l'information relative à l'absence d'observations émises par la mission régionale sera porté à la connaissance du public dans le cadre de l'enquête publique mentionnée au point 57 du présent arrêt.

En ce qui concerne le montant des garanties financières prévues à l'article R. 515-101 du code de l'environnement :

61. L'illégalité entachant l'autorisation en litige et résultant du montant insuffisant des garanties financières exigées de la pétitionnaire est susceptible d'être régularisée par l'intervention d'une autorisation modificative fixant un montant propre à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues par l'article R. 515-106 du code de l'environnement et au moins équivalent à la somme du coût unitaire forfaitaire des quatre aérogénérateurs déterminé selon les modalités prévues à l'annexe de l'arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans sa version applicable à la date de cette autorisation modificative.

62. Eu égard aux modalités de régularisation fixées aux points précédents, l'éventuelle autorisation modificative et l'éventuelle mesure de régularisation devront être communiquées à la cour dans un délai de huit mois à compter du présent arrêt.

63. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur la requête de l'association Bien vivre dans le calme et autres jusqu'à l'expiration du délai mentionné au point précédent afin de permettre cette régularisation.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur les conclusions de la requête de l'association Bien vivre dans le calme et autres jusqu'à l'expiration d'un délai de 8 mois, courant à compter de la notification du présent arrêt, imparti à l'État et à la société Centrale éolienne de la Voie verte pour produire devant la cour une autorisation environnementale modificative conforme aux modalités définies aux points 57 à 62 du présent arrêt.

Article 2 : Tous droits et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme E... K..., désignés représentants uniques des requérants, à la ministre de la transition écologique et à la société Centrale éolienne de la voie verte.

Copie du présent arrêt sera transmise au préfet de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Douet, présidente-assesseure,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 juin 2022.

Le rapporteur,

F.-X. BréchotLe président,

A. Pérez

La greffière,

K. Bouron

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et la cohésion des territoires en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 21NT01244


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01244
Date de la décision : 10/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. François-Xavier BRECHOT
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELAS DE BODINAT ECHEZAR AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-06-10;21nt01244 ?
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