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10/06/2022 | FRANCE | N°20NT01695

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 10 juin 2022, 20NT01695


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Groupe Atlas a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre l'année 2013.

Par un jugement n° 1801106 du 18 mars 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 19 juin 2020, 18 mars 2021 et 25 jan

vier 2022 la SARL Groupe Atlas, représentée par Me Héry, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Groupe Atlas a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre l'année 2013.

Par un jugement n° 1801106 du 18 mars 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 19 juin 2020, 18 mars 2021 et 25 janvier 2022 la SARL Groupe Atlas, représentée par Me Héry, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la SA Groupe Atlas exerçait une activité de nature industrielle et commerciale ; du fait de la transmission universelle de patrimoine, la société civile (SC) François a récupéré cette activité et est ainsi entrée de plein droit dans le champ d'application de l'impôt sur les sociétés en application du 2 de l'article 206 du code général des impôts ; en conséquence, c'est à tort que le service a remis en cause l'application du dispositif d'exonération prévu à l'article 210 A du code général des impôts ;

- la SC François avait, en tout état de cause, bien opté pour son assujettissement à l'impôt sur les sociétés ; dès lors, c'est à tort que le service a remis en cause l'application du dispositif prévu à l'article 210 A du code général des impôts ;

- c'est à tort que, pour déterminer le résultat intercalaire de la SA Groupe Atlas entre le 31 juillet 2012 et le 2 juin 2013, le service a pris en compte les dividendes versés par sa filiale SRCC pour un montant de 275 210 euros ;

- c'est à tort que le service a fait application du II bis de l'article 209 du code général des impôts, ces dispositions n'ayant pas vocation à s'appliquer à une société civile qui n'est pas assujettie à l'impôt sur les sociétés ;

- le calcul de la plus-value d'annulation des titres de la SC François est erroné puisqu'il ne tient pas compte de la dette fiscale à la charge de la SC François à raison de la première transmission universelle de patrimoine ;

- c'est à tort que le service a appliqué le régime des plus-values à court terme sur les 81 400 titres de la société roumaine SRCC reçus par la SA Groupe Atlas à la suite d'une augmentation de capital intervenue le 7 novembre 2011.

Par des mémoires enregistrés les 8 décembre 2020, 3 novembre 2021 et 10 février 2022 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la SARL Groupe Atlas ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique,

- et les observations de Me Héry, pour la SARL Groupe Atlas.

Considérant ce qui suit :

1. Le groupe Atlas est spécialisé dans la conception et la fabrication de pièces et d'ensembles mécano-soudés. Cette activité est exercée par les sociétés françaises MECATLAS, SBTS et E2CA et par la société roumaine SRCC. Au 1er janvier 2013, ces sociétés étaient détenues en totalité par la société anonyme (SA) Groupe Atlas. Cette société était elle-même détenue à 100% par la société civile (SC) François, qui était elle-même détenue à 100% par la SARL Groupe Atlas. Le 2 avril 2013, la dissolution de la SA Groupe Atlas a entraîné la transmission universelle de son patrimoine (TUP) au bénéfice de la société civile François, avec effet au 2 juin 2013 (TUP n°1). Le 4 avril 2013, la dissolution de la société civile François a entraîné la transmission universelle de son patrimoine au bénéfice de la SARL Groupe Atlas, avec effet au 2 juin 2013 (TUP n°2). Ces deux opérations ont été placées sous le régime d'exonération de l'impôt sur les sociétés prévue à l'article 210 A du code général des impôts, applicable en vertu des dispositions de l'article 210-0A du même code aux opérations de dissolution sans liquidation donnant lieu à transfert universel de patrimoine au bénéfice d'une société absorbante.

2. La SARL Groupe Atlas a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration l'a informée, dans une proposition de rectification du 13 juillet 2016, de son intention de remettre en cause l'application de l'article 210 A du code général des impôts au motif que la société civile François n'était pas soumise à l'impôt sur les sociétés. Après mise en recouvrement et rejet partiel de sa réclamation, la SARL Groupe Atlas a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre l'année 2013, pour un montant de 325 480 euros en droits et 32 548 euros de pénalités. La société relève appel du jugement du 18 mars 2020 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la remise en cause de l'application des dispositions de l'article 210 A du code général des impôts :

3. Aux termes de l'article 210 A du code général des impôts : " 1. Les plus-values nettes et les profits dégagés sur l'ensemble des éléments d'actif apportés du fait d'une fusion ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés (...) ". Aux termes de l'article 210-0A du même code : " I. - Les dispositions relatives aux fusions et aux scissions, prévues (...) aux articles (...) 210 A à 210 C (...) sont applicables : / 1° S'agissant des fusions, aux opérations par lesquelles : / a. Une ou plusieurs sociétés absorbées transmettent, par suite et au moment de leur dissolution sans liquidation, l'ensemble de leur patrimoine à une autre société préexistante absorbante, moyennant l'attribution à leurs associés de titres de la société absorbante (...) ". Aux termes de l'article 210 C du même code : " 1. Les dispositions des articles 210 A et 210 B s'appliquent aux opérations auxquelles participent exclusivement des personnes morales ou organismes passibles de l'impôt sur les sociétés (...). ".

4. En premier lieu, aux termes de l'article 239 du code général des impôts : " 1. Les sociétés et groupements mentionnés au 3 de l'article 206 peuvent opter, dans des conditions qui sont fixées par arrêté ministériel, pour le régime applicable aux sociétés de capitaux. (...) L'option doit être notifiée avant la fin du troisième mois de l'exercice au titre duquel l'entreprise souhaite être soumise pour la première fois à l'impôt sur les sociétés. Toutefois, en cas de transformation d'une société de capitaux en une des formes de société mentionnées au 3 de l'article 206 ou en cas de réunion de toutes les parts d'une société à responsabilité limitée entre les mains d'une personne physique, l'option peut être notifiée avant la fin du troisième mois qui suit cette transformation ou cette réunion pour prendre effet à la même date que celle-ci. Dans tous les cas, l'option exercée est irrévocable. ". Aux termes de l'article 22 de l'annexe IV au code général des impôts, alors applicable : " La notification de l'option prévue à l'article 239 du code général des impôts est adressée au service des impôts du lieu du principal établissement de la société ou du groupement qui souhaite exercer cette option. / La notification indique la désignation de la société ou du groupement et l'adresse du siège social, les nom, prénoms et adresse de chacun des associés, membres ou participants, ainsi que la répartition du capital social ou des droits entre ces derniers. Elle est signée dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, par tous les associés, membres ou participants. Il en est délivré récépissé. / L'option ainsi exercée est irrévocable. ".

5. La SARL Groupe Atlas soutient que la société civile François avait opté, antérieurement aux deux transmissions universelles de patrimoine, pour le régime de l'impôt sur les sociétés. Elle produit à cet égard un courrier du 10 août 2012 qui a été présenté à l'administration postérieurement aux opérations de contrôle, mais pas l'accusé de réception justifiant de l'envoi de ce courrier. Si elle fait valoir qu'elle n'est pas en mesure de produire la preuve d'envoi en raison d'un déplacement des archives du cabinet comptable, les éléments produits au dossier ne permettent pas de pallier l'absence de production d'un accusé de réception postal. Au demeurant, le courrier versé au dossier ne respecte pas le formalisme prévu à l'article 22 de l'annexe IV au code général des impôts, puisque ce courrier ne mentionne ni le nom de l'associé unique, ni la répartition du capital social, et ne permet pas d'identifier le signataire, puisqu'est seulement indiqué : " la gérance ". Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la SC François avait valablement opté pour le régime de l'impôt sur les sociétés antérieurement aux TUP concernées et qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions de l'article 210 A du code général des impôts rappelés au point 3 et de l'exonération qu'elles prévoient.

6. En second lieu, il résulte des dispositions combinées du 2 de l'articles 206 et de l'article 34 du code général des impôts que les sociétés civiles qui exercent une activité de nature industrielle ou commerciale sont passibles de l'impôt sur les sociétés. La SARL Groupe Atlas fait ainsi valoir que la SA Groupe Atlas exerçait une activité de nature industrielle et commerciale et que, du fait de la transmission universelle de patrimoine n°1, la SC François a également exercé une activité de cette nature et est ainsi entrée de plein droit dans le champ de l'impôt sur les sociétés en application du 2 de l'article 206 du code général des impôts. Toutefois, l'argumentation ainsi développée par la société appelante, qui repose sur un changement de nature de l'activité de la SC François après la 1ère dissolution intervenue le 2 avril 2013 et n'est par suite susceptible de concerner que la remise en cause de l'exonération prévue à l'article 210 A du code général des impôts appliquée à la TUP n°2, ne saurait prospérer dès lors, d'une part, qu'au 1er jour de l'exercice 2013 la SC François n'était pas assujettie à l'impôt sur les sociétés et, d'autre part, que l'exercice éventuel d'une activité pendant une durée de deux jours seulement ne saurait avoir eu pour effet de modifier la nature de l'activité exercée par la SC François et de générer une activité de nature industrielle et commercial exercée de manière habituelle. Par suite, la SC François ne peut être regardée comme ayant été passible de l'impôt sur les sociétés pour aucune des opérations de fusion-absorption. Il suit de là que c'est à bon droit que le service a estimé qu'en application de l'article 210 C du code général des impôts, l'exonération prévue à l'article 210 A du code général des impôts n'était pas applicable aux transmissions universelles de patrimoine litigieuses.

Sur le montant des droits :

En ce qui concerne la détermination du résultat intercalaire de la SA Groupe Atlas :

7. La société appelante fait valoir que c'est à tort que le service, pour déterminer le résultat intercalaire de la SA Groupe Atlas entre le 31 juillet 2012 et le 2 juin 2013, a tenu compte de dividendes qui aurait été versés à la SA Groupe Atlas par la société roumaine SRCC, pour un montant de 275 210 euros. Toutefois, il ressort de la proposition de rectification que le vérificateur a constaté que le résultat intercalaire de la SA Groupe Atlas avait été comptabilisé par la SARL Groupe Atlas et a en conséquence neutralisé ce résultat. Le résultat intercalaire de la SA Groupe Atlas n'a donc pas été pris en compte pour déterminer le montant des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés en litige. Dès lors, le moyen tiré du caractère erroné du montant du résultat intercalaire de la SA Groupe Atlas est sans incidence sur le montant des impositions en litige et ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne l'application du II bis de l'article 209 du code général des impôts :

8. Aux termes de l'article 209 du code général des impôts : " II bis. - En cas de reprise d'un passif excédant la valeur réelle de l'actif qui est transféré à l'occasion d'une opération mentionnée au 3° du I de l'article 210-0 A, la charge correspondant à cet excédent ne peut être déduite. ".

9. Il ressort de la proposition de rectification que le vérificateur a, dans un premier temps, déterminé le résultat fiscal de la SC François à soumettre entre les mains de la SARL Groupe Atlas, associé unique de la SC François. Pour ce faire, le vérificateur a considéré qu'en application du II bis de l'article 209 du code général des impôts, la charge comptable de 256 349 euros correspondant au vrai mali dégagé lors de la TUP n°1 n'était pas déductible du résultat fiscal propre de la SC François. La société appelante soutient que c'est à tort que le service vérificateur a appliqué les dispositions du II bis de l'article 209 du code général des impôts pour déterminer le résultat de la SC François, cet article n'étant pas applicable aux sociétés qui ne sont pas assujetties à l'impôt sur les sociétés. Toutefois, en application de l'article 238 bis K du code général des impôts, lorsqu'une société de personnes est détenue par une société assujettie à l'impôt sur les sociétés, la part des bénéfices correspondant aux droits que cette dernière détient sur la société de personnes est déterminée selon les règles applicables au bénéfice réalisé par la personne qui détient ses droits. Par conséquent, la détermination du bénéfice de la SARL Atlas résultant de sa détention de la SC François doit être déterminé selon les règles applicables en matière d'impôt sur les sociétés. En tout état de cause, il ressort de la proposition de rectification que le vérificateur a constaté que le résultat de la SC François avait été comptabilisé par la SARL Groupe Atlas à travers le jeu des écritures de fusion enregistrées comptablement en opérations diverses. Il a en conséquence neutralisé, pour le calcul de la base de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés dont la SARL Groupe Atlas était redevable, le résultat fiscal de la SC François. Dans ces conditions, à supposer même que le vérificateur ait à tort fait application du II bis de l'article 209 du code général des impôts pour déterminer le résultat fiscal de la SC François, cette erreur serait sans incidence sur le montant des droits en litige. Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la plus-value d'annulation des titres de la SC François :

10. La société appelante fait valoir que la plus-value d'annulation des titres de la SC François aurait dû être déterminée en tenant compte, dans l'actif net transmis, de la dette fiscale générée par la TUP n°1. Toutefois, le redevable de l'imposition résultant de la TUP n°1 n'était pas la SC François, mais la SARL Groupe Atlas, en raison de la transparence fiscale de la SC François. La SC François n'étant pas redevable de cette imposition, celle-ci n'avait, en tout état de cause, pas à être prise en compte dans le calcul de la plus-value d'annulation des titres de la SC François.

En ce qui concerne le régime d'imposition des plus-values de cession des titres de la société roumaine SRCC :

11. La SARL Groupe Atlas reprend en appel le moyen, qu'elle avait invoqué en première instance et tiré de ce que c'est à tort que le service a appliqué le régime des plus-values à court terme sur les 81 400 titres de la société roumaine SRCC reçus par la SA Groupe Atlas à la suite d'une augmentation de capital intervenue le 7 novembre 2011. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif retenu à bon droit par le tribunal administratif de Rennes.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Groupe Atlas n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Groupe Atlas est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Groupe Atlas et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Brasnu, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juin 2022.

Le rapporteur

H. A...La présidente

I. Perrot

La greffière

S. Pierodé

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 20NT016952


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01695
Date de la décision : 10/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Harold BRASNU
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : CABINET ORATIO

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-06-10;20nt01695 ?
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