La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/04/2022 | FRANCE | N°21NT02242

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 29 avril 2022, 21NT02242


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 30 décembre 2019 par laquelle le préfet du Calvados a rejeté sa demande d'autorisation d'exploiter la concession d'élevage cadastrée n° 66-61, située sur la commune de Ver-sur-mer.

Par un jugement n°2000481 du 4 juin 2021, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 30 décembre 2019 et enjoint au préfet du Calvados de réexaminer la demande de

M. B..., en procédant à un nouvel appel à can

didature, dans un délai de six mois à compter de la notification du présent jugement.

Procé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 30 décembre 2019 par laquelle le préfet du Calvados a rejeté sa demande d'autorisation d'exploiter la concession d'élevage cadastrée n° 66-61, située sur la commune de Ver-sur-mer.

Par un jugement n°2000481 du 4 juin 2021, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 30 décembre 2019 et enjoint au préfet du Calvados de réexaminer la demande de

M. B..., en procédant à un nouvel appel à candidature, dans un délai de six mois à compter de la notification du présent jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2021, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande à la cour d'annuler ce jugement du 4 juin 2021 du tribunal administratif de Caen et de rejeter la demande présentée par M. B... devant ce tribunal administratif de Caen.

Il soutient que :

- c'est tort que le tribunal a jugé que la décision contestée était entachée d'illégalité au regard notamment des dispositions du schéma des structures des exploitations de cultures marines du Calvados ;

- à la date de la décision contestée, l'autorisation accordée au titulaire de l'autorisation d'exploiter la concession d'élevage en litige était définitive et ne pouvait plus être légalement retirée.

La requête a été communiquée le 31 août 2021 à M. A... B... qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté du préfet du Calvados en date du 12 décembre 2016, portant schéma des structures des exploitations de cultures marines ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Catroux,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui exploite dans la baie des Veys plusieurs concessions marines d'une surface totale de 1,31 hectare, a sollicité du préfet du Calvados l'autorisation d'exploiter à

Ver-sur-Mer la parcelle cadastrée n° 66-61. Cette autorisation lui a été refusée par une décision du 31 mai 2018, au motif du caractère prioritaire d'une demande concurrente, au regard du schéma des structures des exploitations de cultures marines du département du Calvados. Le tribunal administratif de Caen a, par un jugement du 5 août 2019, devenu définitif, annulé la décision du 31 mai 2018, ainsi que la décision de rejet du recours gracieux formé contre cette décision et a enjoint au préfet du Calvados de réexaminer la situation de l'intéressé dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement. Par une décision du 30 décembre 2019, le préfet du Calvados a, à nouveau, rejeté la demande d'autorisation présentée par l'intéressé pour la concession de culture marine en litige. Par un jugement du 4 juin 2021, dont le ministre de l'agriculture et de l'alimentation relève appel, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 30 décembre 2019 et enjoint au préfet du Calvados de réexaminer la demande de M. B..., en procédant à un nouvel " appel à candidature ", dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. Aux termes de l'article R. 923-40 du code rural et de la pêche maritime, d'une part : " Les concessions accordées en application du présent chapitre peuvent être modifiées, suspendues temporairement ou retirées à tout moment par décision motivée du préfet après avis de la commission des cultures marines, sans indemnité à la charge de l'Etat : 1° Pour défaut de paiement soit de la redevance, soit des cotisations professionnelles obligatoires prévues par l'article L. 912-16 ; 2° En cas d'infraction à la réglementation générale des cultures marines ou aux clauses du cahier des charges annexé à l'acte de concession, au schéma des structures ou en cas de non-respect des normes sanitaires de commercialisation des produits d'aquaculture ; 3° En cas d'atteinte portée à la gestion ou la conservation d'une aire marine protégée définie à l'article L. 334-1 du code de l'environnement ; 4° Dans le cas où une entreprise n'exploite pas au moins un tiers des surfaces qui lui sont concédées ou si l'emplacement concerné est resté inexploité ou insuffisamment exploité pendant une période de trois ans ; 5° Si l'emplacement concédé cesse de répondre aux conditions de salubrité des eaux fixées à l'article R. 231-37 du présent code ; 6° Si le titulaire n'a pas obtenu l'attestation de réussite au stage de formation en cultures marines, dans les deux ans à compter de la date de la décision d'octroi de la concession, en application des dispositions du sixième alinéa de l'article R. 923-15 ". Aux termes de l'article R. 923-41 du même code : " Les concessions accordées en application du présent chapitre peuvent être retirées ou modifiées à tout moment par décision motivée du préfet pour motif d'utilité publique, et notamment en cas de mise en œuvre d'un plan de réaménagement ou d'un plan d'utilisation de l'espace entraînant modification du secteur concerné. Lorsque la procédure est conduite par application du code de l'expropriation, le concessionnaire évincé a droit aux indemnisations prévues par ce code. La notification de cette décision est assortie d'un délai de mise en œuvre ".

3. Aux termes de l'article 15 du schéma des structures des exploitations de cultures marines du Calvados, établi sur le fondement de l'article D. 923-6 du code rural et de la pêche maritime, d'autre part : " En cas de compétition entre plusieurs demandeurs sur une concession, les priorités sont établies dans l'ordre suivant : (...) / 3. Assurer le maintien d'entreprises économiquement viables en évitant leur démembrement et en favorisant leur reprise (...) / 6. Favoriser l'agrandissement des exploitations n'atteignant pas la dimension minimale de référence (DIMIR) en privilégiant celles dont la surface est la plus proche de la DIMIR (...) ".

4. Le préfet du Calvados a, par la décision contestée du 30 décembre 2019, rejeté la demande d'autorisation d'exploiter la parcelle en litige, formée par M. B..., après avoir procédé à son réexamen, en se fondant sur le caractère définitif de l'autorisation d'exploiter cette parcelle, emportant concession d'occupation du domaine public maritime, qui avait été accordée, le 31 mai 2018, à l'un des concurrents de ce dernier.

5. Lorsque le préfet, en exécution d'une décision d'annulation par le juge administratif du rejet de la demande d'autorisation d'exploiter une concession maritime, statue à nouveau sur cette demande, il doit le faire en se plaçant à la date de sa nouvelle décision. Si, à cette date, l'autorisation délivrée à un autre pétitionnaire est devenue définitive et ne peut plus être légalement retirée, il est tenu de respecter l'autorisation ainsi délivrée qui est créatrice de droit pour son bénéficiaire et n'a donc pas à procéder à une nouvelle procédure de mise en concurrence pour la concession en cause.

6. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, la décision du

31 mai 2018 portant autorisation d'exploiter une concession de cultures marines délivrée à Mme C... avait été notifiée à l'intéressée et publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du Calvados n° 45 du 15 juin 2018. Elle revêtait donc bien un caractère définitif, contrairement à ce que soutenait M. B... devant le tribunal. Par suite, les circonstances relevées par le tribunal que le préfet du Calvados n'ait pas procédé à un nouvel " appel à candidature " avant de prendre la décision en litige et ait méconnu les dispositions précitées du schéma des structures des exploitations de cultures marines sont sans incidence sur la légalité de cette décision. Par suite, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen a annulé cette décision en se fondant sur ces circonstances.

7. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. B... devant le tribunal.

Sur les autres moyens invoqués par M. B... :

8. En premier lieu, si le tribunal a relevé, au point 5 de son jugement du 5 août 2019, que ce jugement impliquait qu'il soit enjoint au préfet du Calvados de réexaminer la demande de M. B..., après un " appel à candidatures ", il n'a toutefois pas prononcé, dans le dispositif de sa décision, une injonction tendant à ce qu'il soit procédé à cet appel. En outre, le tribunal a, par ce jugement, annulé la décision de refus d'autorisation opposée à M. B... au motif qu'elle méconnaissait les dispositions de l'article 15 du schéma des structures des exploitations de cultures marines du Calvados. Dès lors, il ne résulte pas des motifs de ce jugement qui sont le support nécessaire à son dispositif qu'à la date de sa nouvelle décision, le préfet était tenu de procéder à un nouvel " appel à candidature ". Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée par le jugement du 5 août 2019 doit être écarté.

9. En deuxième lieu, la circonstance que l'autorisation d'exploiter délivrée le 31 mai 2018 à la concurrente de M. B... ait méconnu les dispositions précitées du schéma des structures des exploitations de cultures marines ne constitue pas un motif d'utilité publique justifiant le retrait de cette autorisation au sens et pour l'application des dispositions de l'article R. 923-41 du code rural et de la pêche maritime, citées au point 3. Le moyen ainsi soulevé ne peut donc qu'être écarté.

10. En dernier lieu, le préfet du Calvados ne pouvait plus abroger ou retirer légalement sa décision du 31 mai 2018 qui était définitive et créatrice de droit pour sa bénéficiaire. Par suite, le fait qu'il ne justifie pas d'un motif d'intérêt général pour ne pas remettre en cause cette décision est sans incidence sur la légalité de la décision contestée du 30 décembre 2019.

11. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen a, par le jugement attaqué, annulé la décision du 30 décembre 2019.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 4 juin 2021 du tribunal administratif de Caen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Caen est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- M. Catroux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2022.

Le rapporteur

X. CATROUXLe président

D. SALVI

Le greffier

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT02242


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT02242
Date de la décision : 29/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. Xavier CATROUX
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : LABRUSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-04-29;21nt02242 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award