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29/04/2022 | FRANCE | N°21NT01338

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 29 avril 2022, 21NT01338


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 3 septembre 2018 du préfet du Finistère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.

Par un jugement n° 1805255 du 29 mars 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 mai 2021, Mme A... B..., représentée par Me Buors, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du

29 mars 2021 ;

2°) d'annuler cette décision du 3 septembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Fini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 3 septembre 2018 du préfet du Finistère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.

Par un jugement n° 1805255 du 29 mars 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 mai 2021, Mme A... B..., représentée par Me Buors, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 mars 2021 ;

2°) d'annuler cette décision du 3 septembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé et, par suite, irrégulier ;

- la décision contestée est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire enregistré le 4 février 2022, le préfet du Finistère conclut au non-lieu à statuer sur la requête.

Il fait valoir qu'il a décidé le 15 décembre 2021 de délivrer à l'intéressée une carte de séjour temporaire valable un an, qui lui a été remise le 26 janvier 2022.

Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Brisson a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., ressortissante comorienne née le 26 mars 1979, est entrée en France le 13 juin 2010 sous couvert d'un visa Schengen valable pour un séjour d'une durée de dix jours. Elle a fait l'objet de deux mesures d'éloignement en janvier 2012 et mai 2013. Elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 22 mai 2018. Par une décision du 3 septembre 2018, le préfet du Finistère a rejeté sa demande. Mme A... B... relève appel du jugement du 29 mars 2021 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur l'exception de non-lieu à statuer :

2. Postérieurement à l'enregistrement de la requête au greffe de la cour, le préfet du Finistère a décidé, le 15 décembre 2021, de délivrer à Mme A... B..., sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " valable jusqu'au 15 décembre 2022. Cette circonstance n'ayant pas eu pour effet de procéder au retrait de la décision portant refus de titre de séjour, elle ne prive pas d'objet les conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour lequel a produit des effets juridiques.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... B..., ressortissante comorienne, qui réside en France depuis 2010, justifie vivre en couple depuis au moins mars 2012 avec un compatriote et que trois enfants sont nés en France de leur union en 2011, 2014 et 2017, les deux aînés étant scolarisés à la date de la décision contestée. La requérante établit en outre devant le juge d'appel que son compagnon, qui justifie d'une insertion professionnelle et avec lequel elle a souscrit un pacte civil de solidarité postérieurement à cette décision, est titulaire d'une carte de résident valable du 5 mars 2012 au 4 mars 2022. Dans les circonstances particulières de l'espèce, en refusant, par l'arrêté contesté, de délivrer un titre de séjour à Mme A... B..., le préfet du Finistère doit être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin ni de statuer sur la régularité du jugement ni d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A... B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

6. Ainsi qu'il a été dit au point 3, Mme A... B... s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " le 15 décembre 2021. Par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Finistère de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation sont devenues sans objet.

Sur les frais liés au litige :

7. Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à

Me Buors dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E:

Article 1er : Le jugement n° 1805255 du 29 mars 2021 du tribunal administratif de Rennes et la décision du 3 septembre 2018 du préfet du Finistère sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Me Buors la somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- M. Catroux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 29 avril 2022.

La rapporteure,

C. Brisson

Le président,

D. Salvi

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21NT013382


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01338
Date de la décision : 29/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : FRANCK BUORS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-04-29;21nt01338 ?
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