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22/03/2022 | FRANCE | N°21NT00770

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 22 mars 2022, 21NT00770


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours, formé contre la décision du 20 mai 2019 de l'autorité consulaire française à Port-au-Prince (Haiti) refusant de délivrer à l'enfant Bradley B... et à Mme A... B... des visas de long séjour demandés en qualité de membres de famille de réfugié.

Par un jugement n° 1912

419 du 5 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implici...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours, formé contre la décision du 20 mai 2019 de l'autorité consulaire française à Port-au-Prince (Haiti) refusant de délivrer à l'enfant Bradley B... et à Mme A... B... des visas de long séjour demandés en qualité de membres de famille de réfugié.

Par un jugement n° 1912419 du 5 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours en tant qu'elle refusait la délivrance du visa demandé à Mme A... B... (article 1er), a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme A... B... le visa de long séjour demandé (article 2) et a enfin rejeté la demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission de recours en tant qu'elle refusait la délivrance du visa de long séjour à l'enfant Bradley B... (article 3).

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 mars et 13 décembre 2021, M. D... B... et M. C... B..., représentés par Me Berahya-Lazarus, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 février 2021 en tant qu'il a rejeté la demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France refusant la délivrance du visa de long séjour demandé pour l'enfant Bradley B... ;

2°) d'annuler la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en tant qu'elle concerne l'enfant Bradley B... ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Berahya-Lazarus, son avocat, de la somme de 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France attaquée est fondée sur un fait matériellement erroné ; l'enfant Bradley était confié à son père par un jugement qu'il produit devant la cour ;

- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 juillet 2021 du bureau d'aide juridictionnelle (section administrative) du tribunal judiciaire de Nantes.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ody a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 5 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en tant qu'elle a refusé la délivrance du visa demandé à Mme A... B... (article 1er), a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme A... B... le visa de long séjour demandé (article 2) et a rejeté la demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la commission de recours en tant qu'elle refuse la délivrance du visa de long séjour demandé pour l'enfant Bradley B... (article 3). M. D... B... et M. C... B... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il concerne ce dernier.

Sur la légalité de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France :

2. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " I. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié (...) peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / 3° Par les enfants non mariés du couple, âgés au plus de dix-neuf ans. / (...) II. - Les articles L. 411-2 à L. 411-4 (...) sont applicables. / (...) / Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / (...) ". Aux termes de l'article L. 411-3 du même code, alors en vigueur : " Le regroupement familial peut être demandé pour les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et ceux de son conjoint, qui sont confiés, selon le cas, à l'un ou l'autre, au titre de l'exercice de l'autorité parentale, en vertu d'une décision d'une juridiction étrangère. Une copie de cette décision devra être produite ainsi que l'autorisation de l'autre parent de laisser le mineur venir en France. ".

3. Par ailleurs il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère, hormis le cas où le jugement produit aurait un caractère frauduleux.

4. Il ressort des pièces du dossier produites devant les premiers juges que, par un jugement du 23 février 2018, le juge des référés du tribunal de première instance de Port-au-Prince a délégué l'autorité parentale sur l'enfant Sophia B... à son père, M. D... B..., et a recueilli le consentement de la mère au départ de l'enfant en France. M. C... B... soutient avoir omis de produire devant les premiers juges le jugement du même jour accordant sa garde à son père dans les mêmes conditions et le produit devant la cour. En se bornant à soutenir que la valeur probante de ce jugement n'a pas pu être vérifiée par le poste consulaire dans la mesure où le document n'a été produit qu'en instance d'appel et qu'il ne comporte pas de numéro, le ministre de l'intérieur n'établit pas le caractère frauduleux de ce jugement. Par suite, la commission de recours n'a pu légalement retenir que l'autorité de délégation parentale n'était pas confiée à M. B... et que la mère de l'enfant n'avait pas donné son accord pour le déplacement en France de son fils.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D... B... et M. C... B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

6. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 500 euros à Me Berahya-Lazarus dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : L'article 3 du jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 février 2021 est annulé.

Article 2 : La décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est annulée en tant qu'elle a refusé de délivrer à M. C... B... un visa de long séjour demandé en qualité de membre de famille de réfugié.

Article 3 : L'Etat versera à Me Berahya-Lazarus une somme de 500 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente assesseure,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 mars 2022.

La rapporteure,

C. ODY

Le président,

J. FRANCFORT Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT00770


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00770
Date de la décision : 22/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : CABINET BERAHYA-LAZARUS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-03-22;21nt00770 ?
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