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01/03/2022 | FRANCE | N°20NT02399

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 01 mars 2022, 20NT02399


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat Force Ouvrière (FO) des personnels des services du département du Morbihan a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 16 août 2017 par laquelle le président du conseil départemental du Morbihan a refusé d'attribuer aux agents du département l'indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants (ITDIIS) au titre de l'année 2016.

Par un jugement n° 1704819 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Pro

cédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2020, le syndicat Force ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat Force Ouvrière (FO) des personnels des services du département du Morbihan a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 16 août 2017 par laquelle le président du conseil départemental du Morbihan a refusé d'attribuer aux agents du département l'indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants (ITDIIS) au titre de l'année 2016.

Par un jugement n° 1704819 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2020, le syndicat Force Ouvrière des personnels des services du département du Morbihan, représenté par Me Grimaldi, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 4 juin 2020 ;

2°) d'annuler la décision du 16 août 2017 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, au département du Morbihan de verser aux agents bénéficiaires, l'ITDIIS au titre de l'année 2016, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du département du Morbihan le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- il a intérêt à agir dès lors que l'article 4 de ses statuts prévoient qu'il a pour objet la défense des intérêts moraux et matériels des travailleurs et que la décision contestée lèse un nombre important d'agents du département ;

- les agents concernés n'ont pas perçu l'ITDIIS au titre de l'année 2016.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2020, le département du Morbihan, représenté par Me Caradeux, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge du syndicat Force Ouvrière des personnels des services du département du Morbihan au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le syndicat FO des personnels des services du département du Morbihan n'a pas intérêt à agir et que ses moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son article 6 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- la loi n°2016-483 du 20 avril 2016

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique,

- et les observations de Me Barthélémy, représentant le département du Morbihan.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du bureau du conseil général du Morbihan du 17 mars 1983 une indemnité pour travaux dangereux, insalubres, incommodes ou salissants (ITDIIS) a été instituée au profit de certains agents de cette collectivité. Par une délibération du 15 décembre 2016, le département a décidé de modifier le régime indemnitaire de son personnel en mettant en place, à compter du 1er janvier 2017, un " régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel " (RIFSEEP). Dans un effort de simplification, ce régime destiné à remplacer les nombreuses primes et indemnités versées aux agents de l'Etat a été rendu applicable aux collectivités locales, qui le souhaitaient, par l'article 84 de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, venant modifier l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Selon le syndicat Force Ouvrière (FO) des personnels des services du département du Morbihan, les 492 agents qui bénéficiaient de l'ITDIIS jusqu'à cette réforme, n'ont pas perçu cette prime au titre de l'année 2016. Le 4 avril 2017, il a saisi le président du conseil départemental en vue d'obtenir le paiement de cette indemnité. Sa demande a été rejetée le 12 mai 2017. Le 23 juin 2017, le syndicat a présenté un nouveau recours gracieux tendant aux mêmes fins, rejeté par une décision du 16 août 2017. Le syndicat FO des personnels des services du département du Morbihan relève appel du jugement du 4 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

En ce qui concerne la régularité en la forme du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le tribunal administratif a indiqué que, dans son courrier du 23 juin 2017, le syndicat FO n'avait ni saisi le président du conseil départemental d'une demande d'abrogation d'un acte de portée générale relatif à l'attribution des ITDIIS, ni d'une demande d'annulation de décisions relatives à un ou plusieurs agents déterminés mais avait seulement demandé l'attribution de l'ITDIIS au titre de l'année 2016 aux agents qui en bénéficiaient jusqu'alors. Le tribunal en a déduit que le syndicat avait suscité une décision de refus qui ne lésait que les intérêts individuels des agents concernés et non les intérêts collectifs qu'il défendait, tout en précisant que le syndicat était seulement recevable à intervenir à l'appui de contestations individuelles présentées par les agents concernés. Les premiers juges ont fait droit à la fin de non-recevoir opposée par le département et rejeté la requête pour défaut d'intérêt à agir du syndicat. Contrairement à ce que soutient le syndicat FO des personnels des services du département du Morbihan ce jugement est suffisamment motivé. S'il invoque une méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen ne peut être utilement invoqué dès lors que le litige ne porte ni sur la contestation de droits et obligations de caractère civil, ni sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale au sens de ces dispositions. Enfin, le syndicat requérant n'est pas fondé à soutenir que le tribunal ne se serait pas prononcé sur l'ensemble de ses moyens dès lors qu'il a jugé sa requête irrecevable. Le moyen tiré de l'irrégularité en la forme du jugement attaqué doit être écarté.

En ce qui concerne l'intérêt à agir du syndicat FO des personnels des services du département du Morbihan :

3. Aux termes de l'article 8 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose : " Le droit syndical est garanti aux fonctionnaires. Les intéressés peuvent librement créer des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats. Ces organisations peuvent ester en justice. Elles peuvent se pourvoir devant les juridictions compétentes contre les actes réglementaires concernant le statut du personnel et contre les décisions individuelles portant atteinte aux intérêts collectifs des fonctionnaires. ".

4. Un syndicat de fonctionnaires, s'il est recevable à intervenir, le cas échéant, à l'appui d'une demande d'annulation d'une décision individuelle " négative " concernant un fonctionnaire présentée devant le juge administratif par le fonctionnaire intéressé, n'a pas qualité pour en solliciter lui-même l'annulation, alors même que le fonctionnaire serait membre de ce syndicat.

5. Pour justifier de son intérêt à agir, le syndicat FO des personnels des services du département du Morbihan se prévaut des dispositions de l'article 4 de ses statuts en vertu desquelles il a vocation à assurer " la défense des intérêts moraux et matériels des travailleurs ". Dans ses courriers des 4 avril et 23 juin 2017, il s'est cependant borné à solliciter le versement de l'ITDIIS au titre de l'année 2016 pour les agents qui percevaient cette indemnité avant la réforme mise en place à compter du 1er janvier 2017. Dans sa décision du 16 août 2017, le département lui a opposé un refus en faisant notamment valoir que cette indemnité ne pouvait être cumulée avec le nouveau régime indemnitaire instauré par la délibération du 15 décembre 2016. Bien qu'elle concerne plusieurs agents, la décision du 16 août 2017 présente le caractère d'une décision individuelle " négative ". Si le syndicat FO des personnels des services du département du Morbihan peut intervenir au soutien d'une requête présentée par un agent concerné contre une telle décision, il n'a en revanche pas qualité pour en solliciter lui-même l'annulation, en dépit de la rédaction très générale de ses statuts et de la circonstance qu'il entendrait ainsi défendre un nombre important de ses adhérents.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le syndicat Force Ouvrière des personnels des services du département du Morbihan n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Il s'ensuit que les moyens de fond invoqués par le syndicat requérant, qui ne peuvent être utilement invoqués, doivent être écartés pour ce motif.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du département du Morbihan, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au syndicat FO des personnels des services du département du Morbihan de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du syndicat le versement au département du Morbihan de la somme qu'il sollicite sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du syndicat Force Ouvrière des personnels des services du département du Morbihan est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du département du Morbihan tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat Force Ouvrière des personnels des services du département du Morbihan et au département du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 4 février 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er mars 2022.

La rapporteure,

V. GELARDLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT02399


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02399
Date de la décision : 01/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : SELARL GRIMALDI MOLINA ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-03-01;20nt02399 ?
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