Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 8 août 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 31 décembre 2018 des autorités consulaires françaises à Tananarive refusant de délivrer des visas d'entrée et de long séjour à M. A... B... et à Mme D... B... au titre d'un regroupement familial.
Par un jugement n° 1911534 du 1er juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 9 septembre 2020 et 29 avril 2021, Mme C... B... et M. A... B..., représentés par Me Mace-Ritt, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler la décision de la commission de recours ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer les visas sollicités dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) subsidiairement, d'ordonner une expertise afin d'établir le lien de filiation ;
5°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la décision de la Commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France (CRRV) est insuffisamment motivée ;
- le lien de filiation est établi par les actes d'état civil produits qui sont authentiques et par la possession d'état ;
- les deux enfants n'ont été reconnus que par leur mère ; il ne peut lui être demandé de justifier que le père a été déchu de l'autorité parentale sur ces enfants ;
- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er avril 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... B... et M. A... B... ne sont pas fondés, s'en remettant à son mémoire en défense de première instance.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Buffet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 1er juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de Mme C... B... et de M. A... B... tendant à l'annulation de la décision du 8 août 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 31 décembre 2018 des autorités consulaires françaises à Tananarive refusant de délivrer des visas d'entrée et de long séjour à Ibrahim B... et à D... B... au titre du regroupement familial. Mme C... B... et M. A... B... relèvent appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ;(...) ". Aux termes de l'article L. 411-1 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans. " Aux termes de l'article L. 411-2 du même code, alors en vigueur : " Le regroupement familial peut également être sollicité pour les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et ceux de son conjoint dont, au jour de la demande, la filiation n'est établie qu'à l'égard du demandeur ou de son conjoint ou dont l'autre parent est décédé ou déchu de ses droits parentaux. Aux termes de l'article L 411-3 de ce code: " Le regroupement familial peut être demandé pour les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et ceux de son conjoint, qui sont confiés, selon le cas, à l'un ou l'autre, au titre de l'exercice de l'autorité parentale, en vertu d'une décision d'une juridiction étrangère. Une copie de cette décision devra être produite ainsi que l'autorisation de l'autre parent de laisser le mineur venir en France ".
3. En premier lieu, la décision du 8 août 2019 de la commission de recours vise les dispositions des articles L. 211-1 et L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise qu'après vérification auprès des autorités locales compétentes par les services de l'ambassade de France à Madagascar, il apparaît que les actes de naissance des enfants produits à l'appui des demandes de visas sont apocryphes, relevant d'une intention frauduleuse et ne permettant pas d'établir l'identité des demandeurs et, partant, leur lien familial avec Mme B.... Elle précise également qu'il n'est pas établi que le père des enfants aurait été déchu par jugement de l'autorité parentale. Par suite, et contrairement à ce qui est soutenu, la décision contestée qui comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 111-6 du même code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. (...) ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ".
5. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.
6. Pour justifier du lien de filiation, Mme C... B... a produit les actes de naissance d'Ibrahim B... et de D... B.... Il ressort, toutefois, de la levée d'acte opérée, le 9 octobre 2018, par les autorités consulaires, qui se fonde sur plusieurs anomalies entachant les feuillets des registres d'état civil correspondant aux actes de naissance de chacun des enfants, que ces actes ont été insérés frauduleusement dans les registres d'état civil. Dans ces conditions les actes produits au soutien des demandes de visa ne présentent pas de caractère probant. Par suite, et alors que les requérants ne produisent pas d'éléments de possession d'état, le moyen tiré de ce qu'en estimant que le lien de filiation n'était pas établi, la commission de recours a fait une inexacte application des dispositions précitées doit être écarté.
7. La commission de recours s'est également fondée sur ce qu'il n'était pas justifié de ce que le père des enfants aurait été déchu de l'autorité parentale. S'il est soutenu par les requérants que les enfants n'ont été reconnus que par leur mère, ces allégations ne sont pas établies par les pièces du dossier. Il suit de là que les conditions prévues par l'article L. 411-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas réunies pour qu'il soit fait droit à la demande de visa de long séjour sollicitée.
8. Eu égard à ce qui précède et alors que Mme C... B... et M. A... B... n'apportent pas de précisions sur la situation et les conditions de vie des intéressés dans leur pays, les moyens tirés de ce que cette décision porterait une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnaitrait la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.
9. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance ni d'ordonner le recours à une expertise génétique, que Mme C... B... et M. A... B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Leurs conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... B... et M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- Mme Buffet, présidente assesseure,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2022.
La rapporteure,
C. BUFFETLe président,
J. FRANCFORT
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT02841