Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... D... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 30 juillet 2019 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.
Par un jugement n° 1904908 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 août et 8 décembre 2021, Mme B... D... épouse A..., représentée par Me Agahi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 juin 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 30 juillet 2019 par laquelle le préfet d'Ille-et-Vilaine lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
l'arrêté contesté a été pris par une autorité incompétente dès lors que la délégation de signature de son auteur n'est pas établie ;
cet arrêté lui refusant la délivrance d'une carte de séjour portant la mention
" vie privée et familiale " a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
alors même qu'elle pourrait obtenir un titre de séjour par la procédure du regroupement familial, l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de la présence en France de son mari qui gère une entreprise et de ses deux enfants qui sont scolarisés ;
il a également été pris en méconnaissance des stipulations du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu
la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
le rapport de M. L'hirondel,
et les observations de Me Agahi représentant Mme A....
1. Mme B... D... épouse A..., née le 28 août 1985 et de nationalité iranienne, est entrée sur le territoire français en septembre 2015. Elle a présenté, le 8 janvier 2018, une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de celles de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 juillet 2019, le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité. Mme A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Rennes du 22 juin 2021 rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, Mme A... reprend en appel le moyen, déjà invoqué en première instance, tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté. Il y a lieu d'écarter ce moyen, à l'appui duquel elle n'apporte aucune argumentation ni élément nouveaux, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 2 de leur décision.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit :
/ (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".
4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la requérante a épousé le 26 mai 2014, en Turquie M. C... A..., de nationalité turque, résidant en France et titulaire d'une carte de résident. Alors qu'une demande de regroupement familiale en sa faveur était en cours d'instruction, Mme A... a obtenu le 15 septembre 2015 un visa de court séjour de 90 jours délivré par les autorités consulaires françaises à Téhéran et est arrivée en France le
25 du même mois. A l'expiration de son visa, elle a décidé de se maintenir sur le territoire français et se trouve, depuis, en situation de séjour irrégulier. Par ses agissements, elle ne pouvait ignorer - et ce bien avant d'entamer une vie familiale en France - que son séjour était précaire.
5. En outre, la légalité d'une décision s'apprécie à la date à laquelle elle a été rendue.
Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, la famille de Mme A... résidant en France était composée de son mari et de son premier enfant, né à Rennes le 31 juillet 2016. Si M. A... y séjourne régulièrement depuis 2006 et a créé, en janvier 2011, une entreprise de maçonnerie générale et de gros œuvre, il ne ressort pas des pièces du dossier, que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer dans l'un des deux pays du couple, en particulier en Turquie, eu égard, par ailleurs, au jeune âge de l'enfant. Si Mme A... fait valoir avoir obtenu les diplômes de français A2, B1 et B2, elle ne justifie pas d'une intégration particulière en France que ce soit à titre personnel ou à titre professionnel. Enfin, la décision contestée n'aura pas pour effet de la séparer de son mari et de son enfant. Dans ces conditions, compte tenu de la durée et des conditions de séjour de la requérante en France, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme A... au respect de sa vie privée et familiale et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché d'une erreur manifeste son appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de la requérante.
6. En troisième lieu, aux termes du premier paragraphe de l'article 3 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
7. La décision contestée de refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à l'intéressée, qui n'a pas été accompagnée d'une obligation de quitter le territoire français, ne peut être regardée comme ayant méconnu l'intérêt supérieur de son enfant au sens des stipulations de l'article 3 de la convention de New York dès lors qu'elle n'a pas pour effet de le séparer de Mme A....
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... épouse A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président,
- Mme Brisson, présidente assesseure,
- M. L'hirondel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2022.
Le rapporteur,
M. L'HIRONDELLe président,
D. SALVI
La greffière,
A. MARTIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT02408