Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... F... et Mme G... D... épouse F..., agissant en leur nom propre, en qualité d'ayants droit d'Angeline F... et de représentants légaux de leur fils mineur B..., ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner le centre hospitalier de Redon à leur verser les sommes de 157 112,80 euros au titre des préjudices subis par leur fille E..., 226 916 euros au titre de leurs préjudices propres et 30 000 euros au titre des préjudices subis par leur fils B..., sommes assorties des intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 2016 et de leur capitalisation, en réparation des conséquences dommageables de la prise en charge de la naissance d'Angeline F... par cet établissement.
Par un jugement n° 1802780 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a condamné le centre hospitalier de Redon à verser :
- les sommes de 12 641,38 euros à M. et Mme F... en leur qualité d'ayants droit d'Angeline F..., de 1 425,23 euros à M. et Mme F... au titre de leurs préjudices patrimoniaux, de 7 000 euros à Mme F..., de 4 000 euros à M. F... et de 1 700 euros à M. et Mme F... en leur qualité de représentants légaux d'Evan F..., ces sommes étant assorties des intérêts légaux à compter du 19 octobre 2016 et de leur capitalisation ;
- une somme de 15 879,44 euros à la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère ;
- et a rejeté le surplus des conclusions de la demande et des conclusions présentés par la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 29 janvier et 19 juillet 2021, M. C... F... et Mme G... D... épouse F..., agissant en leur nom propre, en qualité d'ayants droit de leur fille E... et de représentants légaux de leur fils mineur B..., représentés par Me Cartron, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 31 décembre 2020 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de leur demande ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Redon à leur verser :
- la somme de 157 112,80 € en réparation des préjudices subis par E... ;
- la somme de 256 916,00 € en réparation des préjudices subis par les proches ;
3°) de majorer ces sommes des intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 2016, date de la réclamation préalable et de la capitalisation des intérêts ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Redon la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la responsabilité du centre hospitalier de Redon est engagée, sur le fondement du 1er alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, pour faute dans l'organisation et le fonctionnement du service, compte tenu des manquements relevés par les experts dans la prise en charge de la jeune E... lors de sa naissance et tenant à l'incapacité d'assurer en urgence la césarienne qui s'imposait dans les délais requis, à l'absence de surveillance du rythme cardiaque fœtal et de l'absence de transfert de Mme F... vers un autre établissement de santé pour assurer une prise en charge optimale ;
- la responsabilité du centre hospitalier est également engagée pour défaut d'information en méconnaissance des dispositions des articles L. 1111-2 et suivants du code de la santé publique en n'informant pas sur les risques de rupture utérine et les conséquences éventuelles pour l'enfant ; ce défaut d'information lui a fait perdre une chance d'éviter l'accouchement par voie basse qui doit être évaluée à au moins 80 % ;
- les préjudices d'Angéline F... sont constitués par un besoin d'assistance par tierce personne estimé à 74 464,80 euros, un déficit fonctionnel temporaire évalué à 100% pendant les périodes d'hospitalisation et à 80% pendant les autres périodes, estimé à 12 648 euros, des souffrances endurées évaluées à 6 sur 7, estimées à 50 000 euros, et un préjudice esthétique temporaire, évalué à 4 sur 7 et estimé à 20 000 euros ;
- leurs préjudices propres sont constitués par des frais d'obsèques d'un montant de 2 370,80 euros, des frais de déplacement s'élevant à 5 633,25 euros, des frais de copie du dossier médical d'un montant de 63,90 euros, des frais administratifs d'un montant de 44,85 euros ;
- chacun des deux parents d'Angeline a subi un déficit fonctionnel temporaire du 9 août 2014 au 29 novembre 2017, date de la consolidation, estimé à 12 %, évalué à 2 901,60 euros, des souffrances endurées estimées à 4 sur 7, évaluées à 20 000 euros, un déficit fonctionnel permanent estimé à 7%, évalué à 14 000 euros, un préjudice moral d'impréparation, évalué à 10 000 euros, un préjudice d'affection, évalué à 30 000 euros, et enfin un préjudice d'accompagnement, évalué à 30 000 euros ;
- l'incidence professionnelle subie par M. F... est évaluée à 5 000 euros ;
- les préjudices de leur fils B... sont constitués par un préjudice d'affection, et un préjudice d'accompagnement, évalués à 15 000 euros chacun.
Par un mémoire en défense, enregistré les 11 juin et 25 novembre 2021, le centre hospitalier de Redon, représenté par Me Boizard, conclut :
1°) au rejet de la requête et des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère ;
2°) à titre subsidiaire, au rejet des demandes indemnitaires présentées par M. et Mme F... au titre de l'assistance par tierce personne, de leurs pertes de revenus, de l'incidence professionnelle, de leurs déficits fonctionnels temporaire et permanent, de leurs souffrances endurées et du préjudice d'impréparation de M. F..., à ce que les autres demandes soient réduites à de plus justes proportions et à ce que les intérêts ne courent qu'à compter de la date d'introduction de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par les requérants et la caisse primaire d'assurance maladie ne sont pas fondés.
Par un mémoire, enregistré le 27 août 2021, la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère, représenté par la SELARL Cornet, Vincent, Segurel, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Rennes du 31 décembre 2020 en ce qu'il a limité à 15 879,44 euros le montant de la condamnation du centre hospitalier de Redon ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Redon à lui verser la somme de 150 858,88 euros, assortie des intérêts au taux légal, au titre des frais exposés pour le compte d'Angéline F..., de M. C... F... et de Mme G... F... ;
3°) de condamner le centre hospitalier de Redon à lui verser une somme de 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la responsabilité du centre hospitalier de Redon est engagée en raison d'un défaut dans l'organisation du service ainsi qu'il résulte du rapport des experts ;
- sa responsabilité est également engagée pour défaut d'information spécifique quant au risque de rupture utérine en présence d'un utérus cicatriciel ; c'est à tort que le tribunal administratif a limité à 10 % le taux de perte de chance ;
- les débours qu'elle a exposés pour le compte d'Angeline F... sont constitués par des frais médicaux pour un total de 122 224,14 euros ;
- au cours des arrêts de travail qui leur ont été octroyés en lien avec l'état de santé de leur enfant puis de son décès, elle a été amenée à verser des indemnités journalières à M. F..., pour un montant total de 12 057,16 euros et à Mme F... pour un montant total de 16 577,58 euros.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique,
- le code de la sécurité sociale,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. L'hirondel,
- les conclusions de M. Pons, rapporteur public,
- et les observations de Me Cahu, représentant les consorts F..., de Me Couetaux du Tertre représentant la Caisse primaire d'assurance maladie du Morbihan et de Me Eustache représentant le centre hospitalier de Redon.
Considérant ce qui suit :
1. Mme F... a donné naissance, le 27 avril 2012, a un premier enfant dénommé B... par la voie de la césarienne, opération qui s'est, ensuite, compliquée par des saignements utérins. Au cours de sa seconde grossesse, elle a été prise en charge par le centre hospitalier de Redon. Le 9 août 2014, alors qu'elle devait accoucher par voie basse, elle a donné naissance à la jeune E... après qu'une césarienne a été pratiquée en urgence pour suspicion de rupture utérine. L'enfant est née avec un score de vitalité très faible, et a immédiatement été prise en charge en réanimation. Elle est restée affectée de graves séquelles neurologiques et est décédée le 18 septembre 2016 d'un arrêt cardiaque dans les suites d'un encombrement bronchique survenu à domicile.
2. M. et Mme F... ont saisi la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI) de Bretagne le 18 mai 2017, qui a ordonné une expertise confiée aux professeurs Kayem et Devictor, spécialisés respectivement en obstétrique et en pédiatrie. Par un avis du 21 mars 2018, la CCI de Bretagne a rejeté la demande d'indemnisation de M. et Mme F.... Leur demande indemnitaire ayant été rejetée par le centre hospitalier de Redon, les requérants ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'établissement hospitalier à leur verser, en leur nom personnel et en leur qualité d'ayants droit de leur fille E... ainsi qu'au nom de leur fils mineur B..., la somme globale de 414 028,80 euros, en réparation des préjudices résultant des conditions de la naissance A... la jeune E.... Par un jugement du 31 décembre 2020, le tribunal administratif a condamné le centre hospitalier de Redon à verser, à M. et Mme F... en leur qualité de représentants légaux de leur fille E..., la somme de 12 641,38 euros, au titre de leurs préjudices patrimoniaux, la somme de 1 425,23 euros, au titre du préjudice personnel de Mme F..., la somme de 7 000 euros, au titre du préjudice personnel de M. F..., la somme de 4 000 euros, et en leur qualité de représentant légal de leur fils B..., la somme de 1 700 euros, ces sommes portant intérêt au taux légal à compter du 19 octobre 2016, avec capitalisation de ces intérêts. Le tribunal administratif a également condamné le centre hospitalier de Redon à verser à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Finistère une somme de 15 879,44 euros en remboursement de ses débours.
M. et Mme F... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il ne leur a pas donné entière satisfaction. La CPAM du Finistère demande, quant à elle, que la somme que le centre hospitalier de Redon a été condamné à lui verser soit portée à 150 858,88 euros.
Sur la responsabilité du centre hospitalier de Redon :
En ce qui concerne l'organisation et le fonctionnement du service :
3. D'une part, aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / (...) ".
4. D'autre part, aux termes de l'article D. 6124-41 du code de la santé publique : " Le secteur de naissance dispose d'au moins une salle d'intervention de chirurgie obstétricale, qui permet, y compris en urgence, la réalisation de toute intervention chirurgicale abdomino-pelvienne liée à la grossesse ou à l'accouchement nécessitant une anesthésie générale ou
loco-régionale. (...) ".
5. En premier lieu, il résulte de l'instruction, notamment du rapport des experts et des recommandations émises en 2012 par le collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) pour la pratique clinique concernant les accouchements en cas d'utérus cicatriciel, ce que présentait Mme F..., que l'accouchement pratiqué en l'espèce en première intention par " tentative de voie basse après césarienne " (TVBAC), s'il présente un risque supérieur à celui d'une " césarienne programmée après césarienne " (CPAC), ce risque reste cependant limité pour être d'environ 0,2 à 0,8%. Selon les recommandations du CNOGF,
la TVBAC est, néanmoins, l'option à privilégier dans la grande majorité des cas (accord professionnel). En l'espèce, les experts ont retenu qu'il n'y avait pas d'indication pour réaliser, avant le travail, une césarienne. Par suite, le centre hospitalier de Redon a pu, sans commettre de faute, décider de procéder à une TVBAC en première intention.
6. En deuxième lieu, il résulte de la même instruction que, alors que le travail avait débuté à 9 h 29, Mme F... s'est plainte de douleurs abdominales violentes à partir de 15 h 30. Après que le diagnostic d'une rupture utérine a été posé à 15 h 40, la parturiente a été prise en charge en urgence pour un accouchement par césarienne, la naissance intervenant à 16 h 15. Selon le rapport d'expertise, un délai de 35 minutes entre le diagnostic de rupture utérine et la césarienne est anormalement long étant donné l'urgence de la situation, la prise en charge devant se faire, en règle générale, dans un délai qui ne saurait excéder vingt minutes.
7. Toutefois, il résulte du rapport d'expertise que lorsque la rupture utérine s'est produite, l'unique salle opératoire de la maternité dont disposait le centre hospitalier était déjà occupée par une parturiente qui devait également subir une césarienne en urgence, ce qui a nécessité pour l'équipe médicale de faire un choix prioritaire entre les patientes au bénéfice de Mme F... puis d'assurer leur transfert respectif. Selon le compte-rendu opératoire contenu dans le dossier médical de l'intéressée, Mme F... est arrivée en salle d'intervention à
16 heures, soit vingt minutes seulement après la pose du diagnostic et l'incision a été réalisée à 16 heures 10. Dans ces conditions, eu égard aux préparatifs préalables indispensables pour assurer la prise en charge de la requérante en salle d'opération, il ne résulte pas de l'instruction que le délai mis pour que Mme F... puisse effectivement occuper cette salle a été anormalement long. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que, compte tenu de ce délai de vingt minutes, le transfert de Mme F... vers une autre maternité aurait permis d'assurer sa prise en charge dans de meilleurs délais. Les requérants ne sauraient faire grief à l'établissement hospitalier de ne disposer que d'une salle d'intervention de chirurgie obstétricale dès lors que la structure mise en place au centre hospitalier de Redon est conforme aux dispositions précitées de l'article D. 6124-41 du code de la santé publique. Par suite, et dans les conditions particulières de l'espèce, le retard évoqué par les experts ne saurait être regardé comme constituant une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier de Redon, les experts reconnaissant au demeurant que ce retard est dû au fait que l'établissement hospitalier était confronté à un concours de circonstances exceptionnelles par la survenue simultanée de deux césariennes à réaliser en même temps.
8. En troisième lieu, M. et Mme F... ne sauraient utilement soutenir qu'il n'est pas établi que les recommandations du CNOGF auraient été respectées s'agissant de la présence d'un obstétricien maîtrisant les techniques de chirurgie d'hémostase, de l'information de l'obstétricien de garde en début de travail et du suivi du travail par la même personne dès lors que ces circonstances sont sans lien avec le dommage qui est advenu. Au surplus, il résulte de l'instruction, notamment du dossier médical de l'intéressée et du rapport des experts, que l'obstétricien qui a réalisé la césarienne est qualifié en chirurgie gynécologique et était assisté par un chirurgien général et que c'est ce même obstétricien qui a consulté, le jour de l'accouchement, à 7 h30, Mme F..., lui expliquant notamment les risques et les avantages d'un accouchement par voie basse. De même, est sans lien avec le dommage la circonstance que Mme F... a été laissée vingt minutes dans le couloir sans surveillance du rythme cardiaque fœtal alors que le centre hospitalier ne disposait pas de monitoring mobile, dès lors que cette absence de surveillance est intervenue après la survenance de la rupture utérine et pendant la prise en charge en urgence de la parturiente pour la transférer en salle d'opération. Au demeurant, si les experts regrettent l'absence du monitoring, ils notent toutefois que les moyens techniques étaient conformes et que la cause principale du dommage résulte dans le délai trop long entre le diagnostic et la césarienne. Enfin, si la table de réanimation n'était pas fonctionnelle, cette circonstance n'a, selon les experts, " en rien interféré avec le pronostic, et n'a pas aggravé l'hypoxie-ischémie ".
9. Enfin, si les requérants allèguent que les dispositions de l'article D. 6124-44 du code de la santé publique auraient été méconnues en tant qu'elles prévoient la présence continue soit d'un gynécologue-obstétricien ayant la qualification chirurgicale, soit, si cet obstétricien n'a pas la qualification chirurgicale requise, sa présence ainsi que celle d'un praticien de chirurgie générale ou viscérale de l'établissement, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le jour de l'accouchement de Mme F... était présent un obstétricien qualifié en chirurgie gynécologique. De plus, selon le rapport d'expertise, le personnel présent, au niveau de l'établissement, était en nombre suffisant.
En ce qui concerne le défaut d'information :
10. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. (...) En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen ".
11. La circonstance que l'accouchement par voie basse constitue un évènement naturel et non un acte médical ne dispense pas les médecins de l'obligation de porter, le cas échéant, à la connaissance de la femme enceinte les risques qu'il est susceptible de présenter eu égard notamment à son état de santé, à celui du fœtus ou à ses antécédents médicaux, et les moyens de les prévenir. En particulier, en présence d'une pathologie de la mère ou de l'enfant à naître ou d'antécédents médicaux entraînant un risque connu en cas d'accouchement par voie basse, l'intéressé doit être informée de ce risque ainsi que de la possibilité de procéder à une césarienne et des risques inhérents à une telle intervention.
12. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport des experts et du dossier médical de Mme F..., que pendant le suivi de sa grossesse, l'intéressée a fait part de ses craintes eu égard à ses antécédents, en l'occurrence, un accouchement par césarienne suivie de saignements utérins engendrant un utérus cicatriciel. En particulier, lors de la consultation du 9 mai 2014, elle a fait part de son anxiété et de son stress en cas d'une nouvelle césarienne et de ses suites, précisant qu'elle aimerait un accouchement par voie basse. Il lui avait alors été conseillé de consulter une psychologue dont les coordonnées lui avaient été données. Lors de la consultation du 7 juillet 2014, elle a de nouveau réitéré son souhait de ne pas avoir de césarienne et a donné son accord pour un accouchement par voie basse. Enfin, lors de la consultation du 8 août 2014, elle a évoqué en pleurs ses antécédents en indiquant qu'elle était partagée entre son souhait d'accoucher par voie basse et ses peurs liées aux antécédents. Une discussion s'est alors engagée. Si l'un des obstétriciens a précisé au cours des opérations d'expertise, ne pas être entré dans le détail s'agissant des risques présentés par un accouchement par voie basse, les craintes ainsi exprimées par l'intéressée sur les modalités de l'accouchement ont nécessairement conduit l'équipe médicale qui a suivi Mme F... au cours de sa grossesse à lui exposer les avantages et les risques de chacune de ces modalités.
13. Au surplus, il est constant, ainsi qu'il a été dit, que l'accouchement par voie basse, qui ne présente qu'un risque d'environ 0,2 à 0,8%, est conforme aux bonnes pratiques médicales et constitue même l'option à privilégier dans la grande majorité des cas. Par ailleurs, Mme F... a régulièrement exprimé de fortes craintes en cas d'accouchement par césarienne ce qui va conduire l'équipe médicale à lui proposer de consulter une psychologue. Dans ces conditions, à supposer même que l'information s'agissant des risques présentés par une rupture utérine en cas d'accouchement par voie basse aurait été insuffisante, il ne résulte pas de l'instruction que cette insuffisance aurait fait perdre une chance à Mme F... de refuser un accouchement par voie basse et par suite d'éviter le dommage qui est advenu.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F... ne sont pas fondés à demander la réformation du jugement du tribunal administratif de Rennes. Il en va de même des conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère tendant à la condamnation du centre hospitalier de Redon à lui rembourser les débours exposés pour ses assurés, ainsi qu'au versement de l'indemnité forfaitaire de gestion.
Sur les frais liés au litige :
15. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Redon, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, les sommes que M. et Mme F... et le caisse primaire d'assurance maladie du Finistère demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme F... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... F..., à Mme G... F..., au centre hospitalier de Redon, à la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère et à la mutuelle des pays de Vilaine.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président,
- Mme Brisson, présidente-assesseure,
- M. L'hirondel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2022.
Le rapporteur,
M. L'HIRONDELLe président,
D. SALVI
La greffière,
A. MARTIN
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT00243