Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2020 du préfet du Morbihan lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.
Par un jugement n° 2100500 du 9 juillet 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 septembre et 16 décembre 2021, M. A..., représenté par Me Mascrier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 9 juillet 2021 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 2 décembre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan, à titre principal, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en application des dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et une carte de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cet arrêté a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire enregistré le 15 novembre 2021, le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 décembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Brisson a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien né le 25 juin 1987, est entré en France le 16 mai 2015, selon ses déclarations. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 15 octobre 2019. Par un arrêté du 2 décembre 2020, le préfet du Morbihan a rejeté sa demande. M. A... relève appel du jugement du 9 juillet 2021 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui déclare résider en France depuis 2015, a épousé le 5 octobre 2019 une ressortissante malgache titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2023 et mère de trois enfants français nés entre 2008 et 2013. Le père des deux premiers enfants bénéficie d'un droit de visite et d'hébergement et le 3ème enfant, est orphelin de père. Si le mariage des intéressés est relativement récent, la naissance d'un enfant issu de leur relation, le 31 mars 2019, survenue après l'échec d'une première grossesse en février 2018, atteste de la stabilité de cette relation. Le requérant justifie également de son implication auprès des trois premiers enfants de son épouse, titulaire d'un emploi d'adjoint technique contractuel auprès de la ville de Vannes. Dans les circonstances particulières de l'espèce, en refusant, par l'arrêté contesté, de délivrer un titre de séjour à M. A..., le préfet du Morbihan doit être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
5. Pour l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, l'annulation prononcée par le présent arrêt, eu égard au motif qui la fonde, implique que le préfet du Morbihan délivre à M. A... un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu d'adresser au préfet du Morbihan une injonction en ce sens et de fixer à deux mois le délai imparti pour son exécution. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros à verser à M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2100500 du 9 juillet 2021 du tribunal administratif de Rennes et l'arrêté du 2 décembre 2020 du préfet du Morbihan sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Morbihan de délivrer à M. A... un certificat de résidence d'algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la date de publication du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 200 euros à M. A... au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Morbihan.
Délibéré après l'audience du 6 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président,
- Mme Brisson, présidente-assesseure,
- M. Catroux, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition du greffe le 21 janvier 2022.
La rapporteure,
C. Brisson
Le président,
D. Salvi
Le greffier,
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21NT025242