Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 28 novembre 2017 par laquelle le président de la région Normandie l'a licenciée ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux dirigé contre cette décision. Elle a également demandé au tribunal de condamner la région Normandie à lui verser la somme globale de 20 034,77 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de ces décisions.
Par un jugement n° 1801410 du 25 juin 2020, le tribunal administratif de Caen a annulé ces deux décisions mais a rejeté les conclusions indemnitaires de l'intéressée.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 août 2020, Mme B..., représentée par Me Callon, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 25 juin 2020 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;
2°) d'annuler la décision du 22 novembre 2017 portant convocation à un entretien préalable ;
3°) de condamner la région Normandie à lui verser une somme globale de 20 034,77 euros en réparation de ses préjudices ;
4°) de mettre à la charge de la région Normandie le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- son licenciement a été prononcé par une autorité incompétente ;
- elle n'a pas disposé d'un délai suffisant pour se faire assister lors de l'entretien préalable et solliciter la communication de son dossier ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les preuves d'une " insuffisante adaptation " ne sont pas rapportées ;
- la rupture brutale de son contrat, dans des conditions humiliantes et vexatoires, est de nature à engager la responsabilité de la collectivité ;
- elle a subi une perte de revenus de 7 034,77 euros et a été dans l'impossibilité de procéder à une recherche d'emploi ;
- elle justifie d'un préjudice moral compte tenu des conditions de ce licenciement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er février 2021, la région Normandie, représentée par Me Cuzzi, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Par courrier en date du 11 août 2021, les parties ont été informées en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la requête dirigées contre "la décision prise le 22/11/2017 par la région Normandie et valant convocation à un entretien préalable à licenciement".
Une note en délibéré a été produite le 20 novembre 2021 pour Mme B..., représentée par Me Callon, et n'a pas été communiquée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public ;
- et les observations de Me Roussel, substituant Me Cuzzi, représentant la région Normandie.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... a été recrutée par la région Normandie dans le cadre d'un contrat à durée déterminée de trois ans prenant effet à compter du 1er septembre 2017 pour y exercer, en qualité d'attachée, les fonctions de juriste au sein de la " direction juridique, assemblées et moyens généraux ". Son contrat prévoyait une période d'essai de trois mois. Par une lettre du 22 novembre 2017, qui lui a été remise le 27 novembre, l'intéressée a été convoquée à un entretien préalable à son licenciement fixé au lendemain. Par une décision du 28 novembre 2017, Mme B... a été licenciée. Elle a saisi le tribunal administratif de Caen d'une demande tendant à l'annulation de cette décision et de celle rejetant implicitement son recours gracieux dirigé contre cette décision et a présenté des conclusions indemnitaires. Elle relève appel du jugement du 25 juin 2020 par lequel le tribunal administratif a annulé les deux décisions contestées mais a rejeté le surplus de ses conclusions.
Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre la lettre du 22 novembre 2017 :
2. Les conclusions dirigées contre le courrier du 22 novembre 2017 convoquant Mme B... à un entretien préalable à son licenciement, qui ne présente d'ailleurs pas un caractère décisoire, sont nouvelles en appel. Par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à l'annulation de ce courrier sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées.
Sur la responsabilité de la région :
3. Le tribunal administratif de Caen a annulé les décisions litigieuses au motif que Mme B... n'avait pas disposé d'un délai suffisant entre la remise, le 27 novembre 2017, de la lettre du 22 novembre 2017 la convoquant à un entretien préalable à son licenciement au terme de sa période d'essai de trois mois, et cet entretien qui s'est tenu le 28 novembre. Si la région Normandie conteste ce motif, il est cependant constant qu'elle n'a pas fait appel de ce jugement dans les délais impartis. Par ailleurs, Mme B... n'est pas davantage fondée à contester ce motif dès lors que le jugement lui donne satisfaction sur ce point.
4. Si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'autorité administrative, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise. Il incombe dès lors à la cour d'apprécier la légalité interne de la décision du 28 novembre 2017 prononçant le licenciement de Mme B....
5. Aux termes de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les agents contractuels qui peuvent se prévaloir des dispositions des articles 126 à 135 ne peuvent être licenciés que pour insuffisance professionnelle ou pour motif disciplinaire jusqu'à l'expiration des délais d'option qui leur sont ouverts par les décrets prévus à l'article 128 (...) ". Aux termes de l'article 4 du décret pris pour l'application de l'article 136 précité : " Le contrat peut comporter une période d'essai qui permet à la collectivité territoriale ou à l'établissement public d'évaluer les compétences de l'agent et à ce dernier d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent (...). La durée initiale de la période d'essai peut être modulée à raison d'un jour ouvré par semaine de durée de contrat, dans la limite : de trois mois lorsque la durée initialement prévue au contrat est égale ou supérieure à deux ans (...) Le licenciement en cours ou au terme de la période d'essai ne peut intervenir qu'à l'issue d'un entretien préalable au cours duquel l'agent peut être assisté par la personne de son choix conformément au troisième alinéa de l'article 42. La décision de licenciement est notifiée à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Aucune durée de préavis n'est requise lorsque la décision de mettre fin au contrat intervient au cours ou à l'expiration d'une période d'essai. Le licenciement au cours d'une période d'essai doit être motivé. Le licenciement au cours ou à l'expiration d'une période d'essai ne donne pas lieu au versement de l'indemnité de licenciement prévue au titre X. ".
6. Il résulte de l'instruction et notamment des très nombreux courriels produits par la région en première instance, que Mme B... a rencontré des difficultés d'intégration et a commis plusieurs erreurs d'interprétation des textes dans les travaux qui lui ont été confiés. Il est reproché à l'intéressée, alors qu'elle avait été recrutée en qualité de juriste expérimentée, des citations de texte inexactes et de proposer des réponses juridiquement erronées, impliquant une vérification par sa responsable hiérarchique. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que son licenciement à la fin de sa période d'essai de trois mois aurait pu légalement être prononcé au terme d'une procédure régulière. Il s'ensuit que la requérante n'est pas fondée à solliciter la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subi à raison de l'illégalité externe de la décision du 28 novembre 2017 retenu par le tribunal administratif.
7. Si Mme B... invoque également les conditions brutales de son licenciement, il est constant que son contrat prévoyait une période d'essai de trois mois et qu'elle n'avait aucun droit à la poursuite de son contrat durant les trois années initialement prévues. Par ailleurs, l'intéressée ne justifie pas du caractère humiliant et vexatoire des propos qui auraient été tenus à son encontre dans le cadre de cette procédure. Par suite, elle n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la collectivité à raison de ces faits.
8. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté ses conclusions indemnitaires.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la région Normandie, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme B... A... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et à la région Normandie.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Gélard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 décembre 2021.
La rapporteure,
V. GELARD
Le président,
O. GASPON
La greffière,
P. CHAVEROUX
La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
5
N° 20NT02615