La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/11/2021 | FRANCE | N°20NT04063

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 19 novembre 2021, 20NT04063


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... et M. A... C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a mis en demeure les propriétaires et les occupants des résidences mobiles stationnées illicitement sur le parking du centre culturel Jean Carmet à Mûrs-Erigné de quitter les lieux au plus tard le lundi 30 novembre 2020 à 18 heures.

Par un jugement n° 2012191 du 2 décembre 2020, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nantes a a

nnulé l'arrêté du 27 novembre 2020 du préfet de Maine-et-Loire.

Procédure devant l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... et M. A... C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a mis en demeure les propriétaires et les occupants des résidences mobiles stationnées illicitement sur le parking du centre culturel Jean Carmet à Mûrs-Erigné de quitter les lieux au plus tard le lundi 30 novembre 2020 à 18 heures.

Par un jugement n° 2012191 du 2 décembre 2020, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 27 novembre 2020 du préfet de Maine-et-Loire.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 décembre 2020, le préfet de Maine-et-Loire demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2012191 du 2 décembre 2020 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D... B... et M. A... C... devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

- son arrêté ne méconnaît pas les prescriptions de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 et ne repose pas sur une appréciation erronée des faits, dès lors que les éléments apportés par le maire de la commune de Mûrs-Erigné et la gendarmerie attestent de ce que le stationnement d'un groupe de gens du voyage sur le parking du centre culturel est de nature à créer des risques liés à des atteintes à la salubrité, la sécurité et la tranquillité publiques ;

- sa décision est également fondée sur un autre motif tenant à une atteinte à la sécurité publique justifiant la mise en demeure d'évacuer les lieux, compte tenu du non-respect des conditions de sécurité par les occupants irréguliers du site, qui se sont irrégulièrement branchés sur une armoire électrique fournissant l'éclairage public, provoquant ainsi des risques d'incendie et d'électrocution non négligeables ; d'autre part, des problèmes de tranquillité publique signalés par les riverains ont été suivis de tentatives de conciliation qui se sont avérées infructueuses ; enfin, l'occupation irrégulière en cause s'oppose durablement depuis le 10 novembre 2020 à l'utilisation du parking du centre culturel dont l'accès n'est plus possible pour la préparation et l'organisation de manifestations ; il sollicite ainsi à ce titre une éventuelle substitution de motifs.

La requête a été communiquée à M. B... et à M. C... qui n'ont pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 modifiée ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ;

- le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 novembre 2021 :

- le rapport de M. Guéguen, premier conseiller,

- les conclusions de M. Pons, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 27 novembre 2020 pris en application de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, le préfet de Maine-et-Loire, à la demande du maire de la commune de Mûrs-Erigné, a mis en demeure un groupe de gens du voyage occupant sans autorisation le parking du centre culturel Jean Carmet à Mûrs-Erigné avec vingt-deux véhicules et treize caravanes et remorques, de quitter les lieux au plus tard le lundi 30 novembre 2020 à 18 heures. Le préfet de Maine-et-Loire relève appel du jugement du 2 décembre 2020 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a, à la demande de MM. B... et C..., représentants de cette communauté, annulé cet arrêté.

2. L'article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage dispose en son paragraphe I que le maire d'une commune membre d'un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de création, d'aménagement, d'entretien et de gestion des aires d'accueil des gens du voyage, comme l'est la communauté urbaine Angers Loire Métropole à laquelle appartient la commune de Mûrs-Erigné, " peut, par arrêté, interdire en dehors de ces aires et terrains le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles (...) " de ces gens du voyage. Par ailleurs, aux termes du II du même article : " En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I, le maire (...) peut demander au préfet de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux. / La mise en demeure ne peut intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques. / La mise en demeure est assortie d'un délai d'exécution qui ne peut être inférieur à vingt-quatre heures. / (...) ".

3. Le 10 novembre 2020, un groupe de personnes avec vingt-deux véhicules et treize caravanes ou remorques appartenant à la communauté des gens du voyage a pénétré par effraction sur le parking du centre culturel Jean Carmet de la commune de Mûrs-Erigné et occupé sans autorisation l'espace situé autour dudit centre culturel. Pour annuler l'arrêté du préfet du 27 novembre 2020 mettant en demeure les gens du voyage de quitter les lieux au plus tard le lundi 30 novembre 2020 à 18 heures en raison de risques d'atteinte à la salubrité publique, le premier juge, après avoir relevé que de tels risques étaient contestés par les demandeurs, a estimé que le préfet n'apportait aucun élément précis permettant d'établir la réalité du risque allégué pour la salubrité publique.

4. Il ressort néanmoins des pièces du dossier, notamment des procès-verbaux et rapports de gendarmerie et des photographies produites devant la cour, que le parking du centre culturel, investi le 10 novembre 2020, est situé à proximité d'un espace naturel sensible et est dépourvu d'installations sanitaires et de raccordement au réseau d'assainissement permettant l'évacuation des eaux usées. Il ressort également des pièces du dossier que les personnes stationnant irrégulièrement ont effectué des branchements illicites sur les bornes d'incendie pour l'eau, utilisée notamment pour le nettoyage des caravanes, et sur une armoire électrique de l'éclairage public, endommagée afin d'être ouverte, pour l'électricité. Enfin, le caractère sommaire et potentiellement dangereux de ces branchements peut être déduit du fait que les tuyaux et les fils courent sur le parking entre les véhicules utilitaires et les caravanes. Dans ces conditions, le stationnement prolongé pendant plusieurs jours d'un groupe d'au moins cinquante personnes sur ce terrain était de nature à porter atteinte à la salubrité publique et à justifier pour ce seul motif la mise en demeure contestée. Le préfet de Maine-et-Loire est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que la magistrate désignée du tribunal administratif s'est fondée sur le motif tiré d'une erreur d'appréciation de l'atteinte à la salubrité publique, au regard des dispositions précitées de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000, pour annuler son arrêté du 27 novembre 2020 portant mise en demeure de quitter les lieux.

5. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... et M. C... devant le tribunal administratif.

6. Il résulte des dispositions de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 citées au point 2 que, dans le cas où le maire décide, sur le fondement du I de cet article, de solliciter du représentant de l'Etat, en cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté portant interdiction de stationner en dehors des aires et terrains d'accueil aménagés, qu'il mette en œuvre les pouvoirs de mise en demeure d'évacuation des lieux que ce dernier tient du II du même article, la combinaison de ces dispositions impose que l'arrêté interdisant le stationnement soit exécutoire à la date à laquelle le maire sollicite du préfet la mise en demeure.

7. Or, il est constant qu'à la date de la lettre du 20 novembre 2020 par laquelle il a saisi le préfet de Maine-et-Loire d'une demande de mise en œuvre de la procédure d'évacuation forcée des occupants irréguliers du parking du centre culturel communal, le maire de Mûrs-Erigné n'avait pris aucun arrêté interdisant dans sa commune le stationnement des gens du voyage en dehors des aires et terrains d'accueil, puisque, comme l'invoquent les demandeurs devant le tribunal administratif, il n'a pris un tel arrêté d'interdiction que le 27 novembre 2020, jour même de l'intervention de l'arrêté préfectoral de mise en demeure. La condition, ressortant des dispositions citées au point 2, du constat préalable d'une violation d'un arrêté municipal d'interdiction de stationnement revêtant un caractère exécutoire n'était donc pas remplie, en l'absence d'existence d'un tel arrêté, lorsque le maire a saisi le préfet.

8. Il résulte de ce qui précède que le préfet de Maine-et-Loire n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 27 novembre 2020.

D E C I D E

Article 1er : La requête du préfet de Maine-et-Loire est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 2 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- M. Guéguen, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 novembre 2021.

Le rapporteur,

J.-Y. GUEGUEN Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

S. LEVANT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°20NT04063 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT04063
Date de la décision : 19/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Jean-Yves GUEGUEN
Rapporteur public ?: M. PONS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-11-19;20nt04063 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award