La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/11/2021 | FRANCE | N°20NT03287

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 05 novembre 2021, 20NT03287


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. Sous le n° 1913117, M. C... D... A..., agissant en B... nom propre et au nom de Mina C... D... et L... C..., et Mme I... G... C..., ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours à l'encontre de la décision du 12 juin 2019 de l'ambassadeur de France en Oman ayant refusé de délivrer à Mme G... C..., à Mme K... C... D... A..., à Mme J... C... D... et à

M. L... C... D... A... des visas de long séjour au titre de la réunification...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. Sous le n° 1913117, M. C... D... A..., agissant en B... nom propre et au nom de Mina C... D... et L... C..., et Mme I... G... C..., ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours à l'encontre de la décision du 12 juin 2019 de l'ambassadeur de France en Oman ayant refusé de délivrer à Mme G... C..., à Mme K... C... D... A..., à Mme J... C... D... et à M. L... C... D... A... des visas de long séjour au titre de la réunification familiale.

II. Sous le n° 2002686, Mme K... C... D... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours présenté par B... père à l'encontre de la décision du 12 juin 2019 de l'ambassadeur de France en Oman ayant refusé de lui délivrer un visa de long séjour au titre de la réunification familiale.

Par un jugement nos 1913117,2002686 du 27 août 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 octobre 2020, M. C... D... A..., Mme I... G... C..., Mme K... C... D... A... et Mme J... C... D..., représentés par Me Seguin, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer à K... C... D... A... le visa sollicité dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros au profit de Me Seguin en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- la décision contestée de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est entachée d'erreur d'appréciation au sujet de la preuve de l'identité et du lien familial des personnes intéressées ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par une décision du 18 novembre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Nantes a accordé à M. D... A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bréchot a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le 16 mai 2014, M. D... A..., ressortissant somalien né le 19 avril 1980, s'est vu reconnaître le bénéfice de la protection subsidiaire en France. Par une décision du 12 juin 2019, l'ambassadeur de France à Oman a refusé de délivrer des visas de long séjour au titre de la réunification familiale à Mme G... C..., ressortissante somalienne née le 5 mai 1981 qu'il présente comme B... épouse, et à Mme K... C... D... A..., Mme J... C... D... et M. L... C... D... A..., qui seraient respectivement nés le 26 juin 2000, le 26 juin 2002 et le 12 janvier 2004, qu'il présente comme leurs enfants. B... recours à l'encontre de la décision consulaire, formé le 2 août 2019, a été implicitement rejeté par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France. M. C... D... A..., Mme I... G... C..., Mme K... C... D... A... et Mme J... C... D... relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande d'annulation de cette décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de B... droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / 1° Par B... conjoint (...) / / 2° Par B... concubin, âgé d'au moins dix-huit ans, avec lequel il avait, avant la date d'introduction de sa demande d'asile, une vie commune suffisamment stable et continue ; / 3° Par les enfants non mariés du couple, âgés au plus de dix-neuf ans. / (...) / II. - (...) / Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / Pour l'application du troisième alinéa du présent II, ils produisent les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 721-3 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. (...) ".

3. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. (...) ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

4. Il ressort du mémoire en défense présenté en première instance par le ministre de l'intérieur que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de M. D... A... au motif que l'identité des demandeurs et leur lien familial avec M. D... A... n'étaient pas établis au moyen des certificats de naissance produits, qui ne constituent pas des actes d'état civil et présentent un caractère apocryphe, ainsi que des passeports présentés.

5. Pour établir leur identité et leur lien familial avec M. D... A..., les demandeurs de visa ont notamment produit aux autorités consulaires des " certificats de confirmation d'identité " et des " certificats de naissance " établis à Mogadiscio, selon le cas, le 23 décembre 2017 ou le 8 janvier 2018. Ces documents indiquent, concernant les trois enfants, que " M... I... N... C... " et M. C... D... A... sont les parents de K... C... D... A..., née le 26 juin 2000, et de L... C... D... A..., né le 12 janvier 2004, tandis que " Mme I... G... C... D... " et M. C... D... A... sont les parents de Mina Adbi D... A..., née le 26 juin 2002. Cependant, d'une part, les requérants n'ont produit aucun document d'état civil relatif au mariage qui aurait été célébré entre M. C... D... A... et Mme G... C.... D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. D... A... a déclaré à l'office français de protection des réfugiés et apatrides, lors du dépôt de sa demande de protection internationale, être le père de Abdel Guani C... D... né le 1er décembre 1999, K... C... D... née le 16 mars 2001, Mina C... D... née le 1er juillet 2002 et Moubarak C... D... A... né le 6 avril 2005, tous issus de sa relation avec Mme H... et alors décédés. Le 3 septembre 2015, il a indiqué dans sa fiche familiale de référence être marié depuis le 10 février 1998 à Mme I... N... C... et être le père de Qani C... Adama né le 1er décembre 1999, Mubarik C... D... né le 16 mars 2003, Miina C... D... née le 1er juillet 2002 et Maniira C... D... née le 6 juillet 2005. Lors d'un entretien avec l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 11 janvier 2018, il a déclaré être le père de K... C... D... A... née le 26 juin 2000, Mina C... D... née le 26 juin 2002 et L... C... D... A... né le 12 janvier 2004, tous issus de B... union avec Mme F... E.... Enfin, le certificat de naissance tenant lieu d'acte d'état civil de M. D... A... établi par le directeur général de l'office français de protection des réfugiés et des apatrides comporte en mentions marginales que l'intéressé est " marié à Mogadiscio (Somalie) le 11 février 1998 avec I... N... C... " et " marié à Mogadiscio (Somalie) le 30 novembre 2004 avec Amal Mahamed Ali ". Dans les circonstances de l'espèce, ces multiples déclarations incohérentes concernant la composition de la famille de M. D... A..., la mère des enfants et les dates de naissance de ces derniers sont de nature à établir le caractère apocryphe des " certificats de confirmation d'identité " et " certificats de naissance " dont se prévalent les requérants. Ainsi, aucun de ces documents, pas plus que les passeports des demandeurs de visas, ne permettent de justifier de l'identité de ces derniers et de leur lien familial avec M. D... A.... Dès lors, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en retenant ce motif pour rejeter le recours dont elle était saisie.

6. En second lieu, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le lien familial entre M. D... A... et les demandeurs de visa n'est pas établi par les pièces versées au dossier. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision contestée porte une atteinte disproportionnée au droit des intéressés à mener une vie familiale normale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation des requérants, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, leurs conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le conseil des requérants demande dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... A... et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... A..., Mme I... G... C..., Mme K... C... D... A... et Mme J... C... D..., et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Douet, présidente-assesseure,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 novembre 2021.

Le rapporteur,

F.-X. BréchotLe président,

A. Pérez

La greffière,

A. Lemée

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

No 20NT03287


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03287
Date de la décision : 05/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. François-Xavier BRECHOT
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SCP SEGUIN ET KONRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-11-05;20nt03287 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award