Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SELARL du docteur A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 26 juin 2017 par lequel la directrice générale de l'agence régionale de santé (ARS) a rejeté sa demande d'autorisation d'installer un appareil d'imagerie par résonance magnétique nucléaire sur le site de la maison des consultations Asclépios au 555, av Jacqueline Auriol à Saran (Loiret).
Par un jugement n° 1703023 du 6 juin 2019 le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 4 août 2019, 6 juillet 2020, 8 avril 2021, 5 et 22 juillet 2021 (non communiqués pour les deux derniers), la SELARL du docteur A..., représentée par Me Fau, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 6 juin 2019 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 26 juin 2017 ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
* les locaux de la clinique concurrente ne sont pas adaptés ;
* des infractions pénales ont été commises par les dirigeants de la clinique Reine Blanche, lors de l'instruction de la demande déposée en juin 2016 ;
* le principe du contradictoire a été méconnu en ce que le courrier du 28 septembre 2016 de la clinique Reine Blanche aurait dû lui être communiqué ; si la requérante a adressé le
3 octobre 2016 un courrier à l'ARS postérieurement à la réunion de la commission du
29 septembre 2016, elle ne connaissait pas le contenu du courrier du 28 septembre 2016 ;
M. B... exploitant de la clinique Reine Blanche a eu connaissance de la teneur de son dossier ;
* le secret professionnel et les règles de concurrence ont été méconnues lors de l'instruction de la demande présentée en juin 2016 ;
* la présence de M. D..., qui a été directeur de la clinique Reine Blanche pendant 15 ans et jusqu'en mars 2013, lors de la séance de la CSOS du 30 mars 2017 vicie la procédure ; une erreur dans les décomptes de voix doit être observée ;
* les membres de la CSOS n'ont pas été destinataires de toutes les informations utiles ; ils n'étaient pas informés de la teneur du courrier adressé à l'ARS le 28 novembre 2016 ;
* une prise illégale d'intérêt doit être constatée dans le fait pour M. C... d'être présent à la CSOS ;
* M. B... s'est présenté en qualité de directeur de la clinique Reine Blanche alors qu'il était administrateur ;
* l'article R. 6122-34 du code de la santé publique a été méconnu en ce qu'il ne prévoit pas une obligation de collaboration pour l'exploitation de l'appareil entre les établissements sanitaires publics ou privés ;
* un conflit d'intérêt doit être constaté dès lors que M. C... est membre de la commission spéciale d'organisation des soins ; les praticiens de la SELARL " Diagnostic et maladies des seins " installée à Tours ne pouvaient créer un cabinet secondaire à Orléans.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 avril 2020, le ministre des solidarités et de la famille conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Brisson,
- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,
- et les observations de Me Fau, représentant la SELARL du docteur A....
Une note en délibéré a été produite par la SELARL du Docteur A... le 7 octobre 2021.
Considérant ce qui suit :
1. La SELARL du docteur A... a déposé, le 26 janvier 2017, auprès de l'agence régionale de santé (ARS) Centre-Val de Loire, un dossier de demande d'autorisation d'installer un appareil d'imagerie par résonance magnétique sur le site de la maison des consultations Asclépios au 555, avenue Jacqueline Auriol à Saran (Loiret). La SA Clinique de la Reine Blanche a également déposé, le 22 décembre 2016, auprès de cette même agence, un dossier de demande d'autorisation d'installer un appareil d'imagerie par résonance magnétique dans ses locaux situés au 559, avenue Jacqueline Auriol à Saran (Loiret). Par un arrêté n° 2017-OS-0026 du 26 juin 2017, la directrice générale de l'ARS a accordé à la SA Clinique de la Reine Blanche l'autorisation qu'elle sollicitait et, par un arrêté n° 2017-OS-0027 du 26 juin 2017, a rejeté la demande présentée par la SELARL du docteur A.... Par un jugement n° 1703023 du 6 juin 2019 dont la SELARL du Docteur A... relève appel, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de cette dernière dirigée contre l'arrêté la concernant.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, la requérante se prévaut de ce que le courrier daté du 28 septembre 2016 adressé à la commission spéciale de l'organisation des soins par la SA clinique Reine Blanche, société concurrente ayant également déposé une demande de même nature, ne lui a pas été communiqué de sorte que le principe du contradictoire a été méconnu.
3. Toutefois, ce courrier se rattache à l'instruction de la demande déposée par la société le 29 juin 2016 préalablement à la décision du 25 novembre 2016 par laquelle l'ARS a refusé de faire droit tant à sa demande d'autorisation d'exploitation d'un appareil à imagerie par résonance magnétique qu'à la demande concurrente présentée par la SA clinique Reine Blanche. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure ayant conduit l'ARS à prendre l'arrêté du 25 novembre 2016 ne peut qu'être écarté comme inopérant au soutien des conclusions dirigées contre l'arrêté du 26 juin 2017 portant refus d'autorisation à la suite d'une nouvelle instruction ouverte sur la seconde demande présentée par la SELARL le 30 décembre 2016, cet arrêté n'ayant pas été pris en application ou pour l'application de l'arrêté du 25 novembre 2016.
4. En deuxième lieu, contrairement à ce que la requérante allègue, il ne ressort pas des pièces du dossier que les membres de la commission spécialisée d'organisation des soins (CSOS) ou de l'ARS auraient, à l'occasion de l'instruction de la demande d'autorisation déposée par la SELARL, méconnu le secret professionnel en divulguant à des tiers des informations couvertes par ce secret ou les règles de concurrence, lesquelles au demeurant ont vocation à concerner l'activité des sociétés pétitionnaires.
5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal de la CSOS réunie le 30 mars 2017 que M. D..., ancien directeur pendant 15 ans et jusqu'en 2013, de la SA clinique Reine Blanche, société ayant déposé une demande concurrente à celle présentée par la SELARL du docteur A..., et qui siégeait à cette commission en qualité de membre du Medef, s'est retiré de cette commission avant que celle-ci ne procède au vote sur la demande de la clinique, auquel ont participé 29 personnes (dossier 16-45-151). Alors que la délibération suivante (dossier 16-45-161), prise sur la demande de la SELARL du docteur A..., a également été prise après le vote de 29 personnes, cette circonstance ne saurait, à elle seule, révéler, comme l'allègue la requérante, que M. D... y aurait participé et que le décompte des voix recueillies sur le projet de la SELARL serait erroné, quelles que soient par ailleurs les modalités du vote sur le dossier 16-45-157, lequel n'est pas en litige dans le cadre la présente instance. Par suite, le moyen tiré de ce que l'avis de la CSOS aurait été rendu dans des conditions irrégulières doit être écarté.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 1434-2 du code de la santé publique, en sa rédaction alors applicable : " Le projet régional de santé est constitué : / (...) / 2° D'un schéma régional de santé, établi pour cinq ans sur la base d'une évaluation des besoins sanitaires, sociaux et médico-sociaux et qui détermine, pour l'ensemble de l'offre de soins et de services de santé, y compris en matière de prévention, de promotion de la santé et d'accompagnement médico-social, des prévisions d'évolution et des objectifs opérationnels. / Ces objectifs portent notamment sur (...) le renforcement de la coordination, de la qualité, de la sécurité, de la continuité et de la pertinence des prises en charge sanitaires et médico-sociales (...) ". Aux termes de l'article L. 1434-3 du même code, en sa rédaction alors applicable : " I. - Le schéma régional de santé : / (...) / 2° Fixe, pour chaque zone définie au a du 2° de l'article L. 1434-9 : / a) Les objectifs quantitatifs et qualitatifs de l'offre de soins, précisés par activité de soins et par équipement matériel lourd, selon des modalités définies par décret ; / b) Les créations et suppressions d'activités de soins et d'équipements matériels lourds ; (...) / II. - Les autorisations accordées par le directeur général de l'agence régionale de santé sont compatibles avec les objectifs fixés en application des 2° et 3° du I du présent article. (...) ". Aux termes de l'article R. 6122-34 du code de la santé publique, en sa rédaction alors applicable : " Une décision de refus d'autorisation (...) ne peut être prise que pour l'un ou plusieurs des motifs suivants : / (...) / 3° Lorsque le projet n'est pas compatible avec les objectifs du schéma d'organisation des soins ; / (...) ". Le schéma régional d'organisation des soins pour 2012-2016 de la région Centre prévoit en particulier que " (...) les appareils sont installés préférentiellement sur le site des établissements sanitaires publics et privés et travaillent en étroite collaboration avec ceux-ci et l'ensemble du territoire de santé. L'utilisation partagée des équipements entre les titulaires d'autorisation est privilégiée. ".
7. Pour refuser de délivrer à la SELARL du docteur A... l'autorisation d'exploiter un appareil d'IRM sur le site de la maison des consultation de Saran, l'ARS s'est fondée sur le motif tiré de ce que, s'il existe un besoin identifié d'un tel appareil dans le schéma régional d'organisation des soins du projet régional de santé de la région Centre Val de Loire, ce projet nécessite de mettre en place des modalités pérennes de collaboration entre la SELARL du docteur A... et la SA Clinique Reine Blanche et que, eu égard aux contentieux existants entre elles, les conditions d'une telle collaboration ne sont pas réunies.
8. Contrairement à ce qu'allègue la requérante, l'ARS pouvait, pour prendre sa décision, se fonder, sans ajouter de condition non prévue par les dispositions rappelées ci-dessus et sans commettre d'erreur de droit, sur les modalités selon lesquelles une coopération entre les établissements sanitaires du secteur pouvait être mise en place.
9. Il ressort des pièces du dossier, sans être contesté par la requérante, que la SELARL du docteur A... refuse d'accueillir à la maison des consultations des patients extérieurs pour des examens de radiologie et d'échographie. En outre, l'instruction des demandes d'autorisation d'exploiter un appareil d'IRM présentées tant par la SELARL en juin 2016 que par la clinique Reine Blanche a été particulièrement conflictuelle ainsi que le rappelle la requérante dans ses écritures et a conduit, notamment, au dépôt par cette dernière d'une plainte avec constitution de partie civile. Il est également constant que les deux établissements privés en concurrence pour la délivrance de cette autorisation refusent catégoriquement de conclure entre eux une convention d'harmonisation et que lors de sa réunion du 30 mars 2017, la CSOS a demandé que les praticiens concernés, entament une procédure de conciliation, laquelle n'a pas abouti.
10. Enfin, et alors qu'une 3ème demande d'autorisation a été déposée en juin 2018, le contrat d'exercice de téléradiologie qui liait la SELARL du docteur A... à la clinique la Reine Blanche a été résilié en décembre 2018. Cette circonstance, postérieure à la décision en litige, est sans incidence sur sa légalité qui doit s'apprécier au jour où elle a été prise. De même la circonstance que certains des faits évoqués par l'intéressée seraient susceptibles de donner lieu à des poursuites pénales est, compte tenu de l'indépendance des législations, sans incidence sur la légalité de la décision en litige. Enfin, à supposer même que, comme le soutient la requérante, les locaux de la clinique Reine Blanche ne seraient pas adaptés à l'activité induite par la mise en service d'un nouvel appareil d'imagerie, cette circonstance est sans influence sur la légalité de l'arrêté litigieux pris sur sa propre demande.
11. Il résulte de ce qui précède que la SELARL du docteur A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée par la SELARL du docteur A... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SELARL du docteur A... est rejetée.
Article 2: Le présent arrêt sera notifié à la SELARL du docteur A... et au ministre des solidarités et de la santé.
Délibéré après l'audience du 30 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi président de chambre,
- Mme Brisson, présidente-assesseure,
- M. Catroux premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 octobre 2021.
La rapporteure,
C. BRISSON
Le président,
D. SALVI
Le greffier,
R. MAGEAU
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT03206