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12/10/2021 | FRANCE | N°20NT04008

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 12 octobre 2021, 20NT04008


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours, formé contre la décision du 28 juin 2019 de l'ambassade de France en Inde refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié.

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Procédure devant la cour :

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours, formé contre la décision du 28 juin 2019 de l'ambassade de France en Inde refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié.

Par un jugement n° 2002353 du 19 octobre 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 20 décembre 2020 et 23 avril 2021 (ce dernier non communiqué), Mme A..., représentée par Me Brame, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision de la commission de recours ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de réexaminer la demande dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A... soutient que :

- la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le lien de filiation est établi par la possession d'état ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Buffet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 19 octobre 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de Mme A... tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 28 juin 2019 de l'ambassade de France en Inde refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié. Mme A... relève appel de ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ". Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A... ait demandé que lui soient communiqués les motifs de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision implicite contestée doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " I.- Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié (...) peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : 1° Par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est antérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile ; (...) 3° Par les enfants non mariés du couple, âgés au plus de dix-neuf ans. (...) L'âge des enfants est apprécié à la date à laquelle la demande de réunification familiale a été introduite. / II.- Les articles L. 411-2 à L. 411-4 et le premier alinéa de l'article L. 411-7 sont applicables. / (...) Les membres de la famille d'un réfugié (...) sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / Pour l'application du troisième alinéa du présent II, ils produisent les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 721-3 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux. ". L'article L. 411-2 de ce code dispose : " Le regroupement familial peut également être sollicité pour les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et ceux de son conjoint dont, au jour de la demande, la filiation n'est établie qu'à l'égard du demandeur ou de son conjoint ou dont l'autre parent est décédé ou déchu de ses droits parentaux. ". L'article L. 411-3 du même code prévoit : " Le regroupement familial peut être demandé pour les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et ceux de son conjoint, qui sont confiés, selon le cas, à l'un ou l'autre, au titre de l'exercice de l'autorité parentale, en vertu d'une décision d'une juridiction étrangère. Une copie de cette décision devra être produite ainsi que l'autorisation de l'autre parent de laisser le mineur venir en France. ".

4. Il ressort du mémoire en défense produit par le ministre en première instance que, pour rejeter la demande de visa présentée pour Mme B... C... A..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur ce que le lien de filiation entre l'intéressée et M. D... A... n'est pas établi et sur l'absence de délégation de l'autorité parentale de sa mère au profit de ce dernier.

5. M. D... A..., ressortissant chinois d'origine tibétaine, est entré en France le 24 juillet 2008 et a obtenu le statut de réfugié le 14 septembre 2009. Mme A..., née le 6 septembre 2000, produit le " livret vert " qui lui a été délivré, le 19 juin 2018 par l'administration tibétaine en exil qui est de nature à établir son identité. Elle produit également une attestation de cette administration (Comité central de secours tibétain de Sa Sainteté le Dalaï Lama) certifiant qu'elle est la fille de M. D... A.... Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. D... A... a, dès sa demande d'asile, déclaré Mme A... comme sa fille auprès de l'OFPRA et qu'il s'est rendu plusieurs fois en Inde pour y retrouver sa famille. En outre, elle produit de nombreuses photographies ainsi que des captures d'écran de leurs communications par le biais d'une application numérique " Wechat ". Le lien de filiation entre Mme A... et M. D... A... doit, dès lors, être regardé comme établi par la possession d'état. Par suite, la commission de recours, en fondant sa décision sur ce que leur lien familial n'était pas établi, a fait une inexacte application des dispositions précitées.

6. Toutefois, en se bornant à produire une lettre dont Mme A... soutient qu'elle a été rédigée par sa mère et l'épouse de M. D... A... dont il serait désormais séparé, aux termes de laquelle celle-ci " décide de confier la garde " de Mme A... à son père " vu qu'il est à l'étranger ", la requérante ne justifie pas de ce que M. D... A... aurait reçu de la part de la mère de l'intéressée une délégation de l'autorité parentale.

7. Eu égard à ce qui précède, et alors en outre qu'il n'est pas contesté que Mme A... vit avec sa mère et sa sœur, les moyens tirés de ce que la décision de la commission de recours a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.

8. Dans ces conditions, la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France en fondant sa décision de refus sur l'absence de délégation de l'autorité parentale de la mère de Mme A... n'a pas fait une exacte application des dispositions précitées.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et celle tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... A... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente assesseure,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2021.

La rapporteure,

C. BUFFETLe président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT04008


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT04008
Date de la décision : 12/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : BRAME

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-10-12;20nt04008 ?
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