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07/10/2021 | FRANCE | N°20NT03144

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 07 octobre 2021, 20NT03144


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Vendée a refusé de lui délivrer un titre de séjour et d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2018 par lequel le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination vers lequel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré.

Par un jugement n° 1906685 du 4 juin 2020, le tribunal

administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une req...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Vendée a refusé de lui délivrer un titre de séjour et d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2018 par lequel le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination vers lequel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré.

Par un jugement n° 1906685 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 octobre 2020, M. B..., représenté par Me Papineau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision de refus de titre de séjour et l'arrêté préfectoral du

12 juillet 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vendée, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et dans cette attente de lui délivrer dans un délai de huit jours une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros qui devra être versée à son avocate en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

sur le refus de titre de séjour :

- il n'y a pas eu de décision implicite de refus de titre de séjour le 7 juin 2017 et il n'est pas établi qu'une décision serait née postérieurement, ce qui prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;

- la décision de refus de titre de séjour du 12 juillet 2018 n'est pas suffisamment motivée ;

- la décision de refus de titre de séjour du 12 juillet 2018 est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- la décision de refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision de refus de titre de séjour du 12 juillet 2018 est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

sur l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision n'est pas suffisamment motivée ;

- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

sur la décision fixant le pays de destination :

- la décision n'est pas suffisamment motivée, ce qui révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 mai 2021, le préfet de la Vendée conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens dirigés contre l'arrêté du 12 juillet 2018 en tant qu'il porterait refus de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont inopérants et que les autres moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés et doivent être écartés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Picquet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant arménien né le 9 mai 1968, déclare être entré en France le 14 avril 2009. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 29 juin 2010 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du

2 novembre 2011 de la Cour nationale du droit d'asile. Il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour que le préfet de la Vendée lui a refusée par un arrêté en date du 11 janvier 2013. L'intéressé a bénéficié d'une autorisation provisoire au séjour en qualité de conjoint d'un étranger malade de novembre 2013 au 28 avril 2014. Le requérant a de nouveau sollicité son admission exceptionnelle au séjour par le travail qui a été refusée le

17 avril 2015. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par un courrier enregistré en préfecture le 6 février 2017. Si le préfet a, par courrier du 13 juin 2017, convoqué M. B... à un entretien fixé le 26 juin suivant, il n'a pas explicitement donné suite à la demande de titre de séjour, qui a donc été implicitement rejetée en application de l'article R. 311-12 alors en vigueur du même code. Par un arrêté du 12 juillet 2018, le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination vers lequel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré et lui a fait obligation, durant ce délai, de se présenter chaque semaine, après prise de rendez-vous préalable, à la gendarmerie de La Châtaigneraie afin d'indiquer ses diligences dans la préparation de son départ. M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cet arrêté et de la décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour. Par un jugement du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande. M. B... fait appel de ce jugement.

Sur les refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 311-12 alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le silence gardé par l'administration sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet. ". Aux termes de l'article R. 311-12-1 alors en vigueur du même code : " La décision implicite mentionnée à l'article R.311-12 naît au terme d'un délai de quatre mois. ". Il est constant que M. B... a présenté le 6 février 2017 une demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a été convoqué, le 13 juin 2017, dans le cadre de cette demande, par les services de la préfecture de Vendée, à un entretien le 26 juin 2017 qui ne lui a pas donné satisfaction. Dès lors, la décision implicite de rejet née après un délai de quatre mois à la suite de sa demande, comme prévu par les dispositions précitées, doit être regardée comme ayant retiré la décision implicite de rejet née le 7 juin 2017. Si l'arrêté contesté mentionne uniquement la décision implicite de rejet née le 7 juin 2017, cette erreur, certes regrettable, est sans incidence sur sa légalité. Contrairement à ce que soutient le requérant, au vu de ses termes, l'arrêté du 12 juillet 2018 ne peut être regardé comme emportant refus de la demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, les moyens tirés de ce qu'il n'y a pas eu de décision implicite de refus de titre de séjour le 7 juin 2017, qu'il n'est pas établi qu'une décision serait née postérieurement, ce qui prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français et que la décision de refus de titre de séjour du 12 juillet 2018 est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation s'agissant de sa demande présentée sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

3. En deuxième lieu, la décision de refus de titre de séjour du 12 juillet 2018 prise sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est suffisamment motivée en fait.

4. En troisième lieu, M. B... est entré en France le 14 avril 2009, soit neuf ans avant l'arrêté du 12 juillet 2018, pour solliciter l'asile, qui lui a été définitivement refusé en 2011. Son épouse fait également l'objet d'un refus de titre de séjour. Si, par un jugement n° 1906683 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination prises à l'encontre de Mme B..., cette décision implique seulement que le préfet de la Vendée la munisse d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait à nouveau été statué sur son cas et n'implique pas que Mme B... obtienne un titre de séjour et ait vocation à rester durablement sur le territoire français, le préfet pouvant notamment établir, par des pièces ou en saisissant le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que l'intéressée pouvait effectivement avoir accès à un traitement médical en Arménie. Par ailleurs, si un des enfants des époux B... vit en France, avec leur belle-fille et leurs petits-enfants de nationalité française, leurs quatre enfants sont majeurs et trois d'entre eux ne vivent pas en France. Les attestations produites ne font pas état de liens amicaux intenses en France. Dans ces conditions, et alors même que M. B... a travaillé dans le cadre de missions intérimaires en 2011, 2012 et 2014 et qu'il maîtrise la langue française, la décision implicite de rejet n'a pas été prise en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle du requérant.

5. En quatrième et dernier lieu, pour les motifs indiqués au point 4, les moyens tirés de ce que la décision de refus de titre de séjour du 12 juillet 2018 est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle du requérant et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges le moyen tiré de ce que la décision n'est pas suffisamment motivée.

7. En deuxième lieu, il résulte des points 2 à 5 que le moyen tiré de ce que la décision doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté.

8. En troisième lieu, au vu de la motivation de la décision contestée et pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 4, le moyen tiré de ce que cette décision est entachée d'un défaut d'examen particulier de la situation du requérant doit être écarté.

9. En quatrième et dernier lieu, la seule circonstance que M. B... soit séparé de son épouse durant le réexamen de la situation de celle-ci, en exécution du jugement n° 1906683 du 4 juin 2020 du tribunal administratif de Nantes, ne porte pas, eu égard aux effets d'une obligation de quitter le territoire français, une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale et, pour les motifs indiqués au point 4, les moyens tirés de ce que la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle du requérant et de ce qu'elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

Sur la décision fixant le pays de destination :

10. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de cette décision fixant le pays de destination et de l'absence d'examen particulier de la situation personnelle du requérant.

11. En second lieu, il résulte des points 2 à 9 que le moyen tiré de ce que la décision doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Vendée.

Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président,

- M. Geffray, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 octobre 2021.

La rapporteure,

P. Picquet

Le président,

F. Bataille

La greffière,

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT03144


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03144
Date de la décision : 07/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : SELARL R et P AVOCATS OLIVIER RENARD ET CINDIE PAPINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-10-07;20nt03144 ?
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