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05/10/2021 | FRANCE | N°19NT04836

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 05 octobre 2021, 19NT04836


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes, tout d'abord, d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande de protection fonctionnelle adressée le 30 janvier 2017 au président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine, ensuite, d'enjoindre à cette autorité de lui accorder a posteriori la protection fonctionnelle selon les modalités d'exécution précisées dans sa requête, enfin, de mettre à la charge de cette collectivité le versement de la somme de 3 000 euros en application des

dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes, tout d'abord, d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande de protection fonctionnelle adressée le 30 janvier 2017 au président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine, ensuite, d'enjoindre à cette autorité de lui accorder a posteriori la protection fonctionnelle selon les modalités d'exécution précisées dans sa requête, enfin, de mettre à la charge de cette collectivité le versement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1702520 du 17 octobre 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 décembre 2019 et 19 mai 2021, Mme D..., représentée par Me Bineteau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 octobre 2019 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler la décision implicite lui refusant l'octroi de la protection fonctionnelle ;

3°) d'enjoindre au président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle ;

4°) de mettre à la charge du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine une somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier à deux titres ; il est entaché d'une omission à statuer faute qu'il ait été répondu au reproche adressé à son supérieur hiérarchique d'être à l'origine à son encontre d'agissements de harcèlement moral ; il est insuffisamment motivé s'agissant du défaut d'impartialité invoqué à l'encontre du médecin du centre hospitalier Guillaume-Régnier qui a réalisé l'expertise ;

- c'est à tort que les premiers juges ont refusé de reconnaître l'existence de faits constitutifs de harcèlement moral ;

- la décision litigieuse lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle est entachée d'une erreur de fait, le conseil départemental n'ayant pas analysé les éléments qu'elle a soulevés pour apprécier la matérialité du harcèlement moral qu'elle a subi ;

- en l'espèce, il ressort de l'ensemble des éléments qu'elle produit qu'elle a été victime d'agissements répétés, notamment par diffamation, constitutifs de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie et d'agents du service ;

- le service dans lequel elle était affectée connaissait une nette dégradation des conditions de travail résultant d'une pression managériale excessive ;

- la direction des ressources humaines du conseil départemental a mené une enquête administrative qui ne présentait pas les garanties d'impartialité requises pour établir la vérité sur les faits en cause ;

- le médecin de prévention du conseil départemental qui a procédé à son examen a rendu un rapport établi en méconnaissance du principe d'indépendance et de circonspection mentionnés à l'article R. 4127-5 et R. 4127-102 du code de la santé publique, rapport qui a par la suite été transmis à des tiers alors que le secret médical s'y opposait.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 22 janvier et 18 juin 2021, le département d'Ille-et-Vilaine représenté par Me Bonnat et Me Costard, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme D... une somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

- et les observations de Me Przybyszewski, substituant Me Bineteau, représentant Mme D... et de Me Costard, représentant le département d'Ille-et-Vilaine.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., a été recrutée en qualité de travailleur handicapé contractuel au grade de rédacteur territorial en 2008 par le département d'Ille-et-Vilaine pour exercer des missions au centre départemental d'action sociale. La période de stage de Mme D... a été prolongée de six mois sur une nouvelle affectation au service d'action culturelle de la collectivité puis à la direction des ressources humaines. Par une décision du 11 janvier 2010, le président du conseil général a refusé sa titularisation et prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle. Cette décision a été annulée par un jugement n° 1005331 du 15 novembre 2012 du tribunal administratif de Rennes. Mme D... a alors été réintégrée dans les services de la collectivité pour une période probatoire de stage de six mois. Affectée à la direction des moyens généraux du département, elle a alors été titularisée par une décision du 1er août 2013. Par courrier du 30 janvier 2017, Mme D... a sollicité, auprès du président du conseil départemental, la protection fonctionnelle, à raison du harcèlement moral qu'elle estime avoir subi de la part de ses supérieurs hiérarchiques, du directeur des moyens généraux ainsi que de plusieurs collègues et autres agents de cette collectivité.

2. Mme D... a, le 1er juin 2017, saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite de refus, née du silence gardé par le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine sur sa demande d'octroi de la protection fonctionnelle, et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à cette autorité de lui accorder la protection fonctionnelle sollicitée. Elle relève appel du jugement du 17 octobre 2019 par lequel cette juridiction a rejeté ses demandes qu'elle maintient.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. D'une part, les premiers juges, aux points 2 et 3 puis aux points 5 à 25 de leur jugement, ont, et avant de se prononcer au point 26 sur le bénéfice de la protection fonctionnelle de l'agent, respectivement rappelé, tout d'abord, les dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issu de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, relatives à la prohibition des agissements répétés de harcèlement moral sur le fonctionnaire, pour ensuite répondre très précisément aux différents agissements et faits mis en avant dans ses écritures par Mme D... et reprochés en particulier à son supérieur hiérarchique, dont certains, tels que présentés par l'intéressée, pouvaient plutôt être regardés, sous l'invocation générale de harcèlement moral, comme en réalité des faits de harcèlement sexuel. Le tribunal s'est ainsi bien prononcé sur la matérialité puis sur la qualification des agissements dénoncés pour conclure expressément, aux points 7, 11, 17, 20, 21, 24 et 25 du jugement en cause, que " le harcèlement moral, dont s'estimait victime la requérante par le contenu et le déroulement de l'enquête administrative, ne pouvait être considéré comme établi ". Les premiers juges n'ont ainsi entaché leur jugement d'aucune omission de répondre à un moyen s'agissant de l'examen circonstancié des agissements incriminés.

4. D'autre part, le tribunal a répondu, au point 14 du jugement attaqué, de façon suffisamment précise à la critique opposée par Mme D... tenant au manque d'impartialité dont auraient fait preuve le médecin de prévention et le médecin du centre hospitalier Guillaume-Régnier, chargés d'expertiser son état de santé. Si les premiers juges ont accueilli la critique s'agissant du premier cité, ils ont en revanche estimé, sur la base de l'analyse du rapport établi par le second, " qu'il n'était pas établi que ce rapport soit empreint d'un manque d'impartialité dans ses appréciations et conclusions ". Les premiers juges ont ainsi suffisamment motivé leur jugement sur ce point.

5. Il résulte de ce qui vient d'être dit que le jugement attaqué n'est entaché d'aucune des irrégularités alléguées.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la demande de protection fonctionnelle à raison des faits de harcèlement moral :

6. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issu de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. / Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public ". Et aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. / (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. (...) ". Des agissements répétés de harcèlement moral peuvent permettre à l'agent public qui en est l'objet d'obtenir la protection fonctionnelle prévue par ces dispositions.

7. D'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. D'autre part, pour apprécier si des agissements, dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral, revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.

S'agissant des différents faits et agissements reprochés :

8. En premier lieu, Mme D... se plaint de comportements déplacés de la part de son supérieur hiérarchique directeur des moyens généraux, et précise en particulier sur ce point, en indiquant comme en première instance que les événements en cause se sont déroulés sans témoin, qu'il s'agissait de questions sur sa vie intime, de remarques sur son âge et son physique et qu'elle aurait été l'objet de " tentatives de drague " et de contacts physiques - pied sous la table, main dans les cheveux, frôlement de mains - déclenchant chez elle un syndrome d'anxiété. Toutefois, les trois témoignages qu'elle verse aux débats qui relèvent " l'attitude ambiguë de son supérieur et ses velléités déplacées auprès des femmes en général ", qui sont contredits par d'autres témoignages convergents d'agents des services départementaux recueillis lors de l'enquête administrative interne, ne comportent pas d'éléments suffisamment précis susceptibles d'établir la matérialité des agissements allégués de son supérieur. Les premiers juges se sont ainsi prononcés, sans se méprendre sur la teneur des écritures présentées par Mme D..., sur les faits de harcèlement moral à connotation sexuelle dénoncés par l'intéressée.

9. En deuxième lieu, Mme D... estime avoir été victime de propos diffamatoires ou vexatoires qui auraient été tenus par des supérieurs hiérarchiques et d'autres agents, en particulier lors des auditions organisées au cours de l'enquête administrative réalisée au mois de septembre 2016, que l'administration avait jugé utile de mener à la suite de rumeurs parvenues jusque dans les services en charge du personnel. D'une part, si le département admet, qu'indépendamment du fait que ces auditions ont pu confirmer les difficultés relationnelles de la requérante, les termes " bizarre ", " procédurière ", " imprévisible " ou " particulière " et parfois " agressive " ont été utilisés par ses collègues pour qualifier certains de leurs échanges avec cet agent, il ne ressort pas davantage en appel qu'en première instance que ces propos, au demeurant exprimés pour répondre aux questions posées par le directeur des ressources humaines, auraient été diffusés ou tenus plus largement et que les agents considérés auraient eu l'intention de porter atteinte à l'honneur de l'intéressée ou de jeter le discrédit sur elle. D'autre part, il n'est pas contesté que les appréciations de Mme D... sur sa manière de servir au titre des années 2013, 2014, 2015 traduisent la satisfaction de son supérieur hiérarchique comme le souci de ce dernier de valoriser l'intéressée. Si le directeur des moyens généraux a toutefois précisé en 2015 que la requérante devait poursuivre ses efforts pour " mieux gérer les situations de stress et les confrontations de point de vue avec ses collègues, en acceptant les avis divergents et améliorer ses rapports avec ses relations de travail ", ces observations qui pointaient les progrès à réaliser pour l'année 2016, objectifs non contestés par l'intéressée, eu égard aux termes employés ne sauraient non plus être regardés comme vexatoires. Enfin, il ne ressort d'aucun élément matériel, circonstancié et suffisamment probant versé au dossier que, comme l'avance la requérante, son supérieur hiérarchique et l'une de ses collègues, notamment à l'occasion d'une réunion du 14 novembre 2016, ainsi qu'un autre agent de la collectivité auraient propagé, s'agissant des raisons expliquant son absence du service, des informations vexatoires, diffamatoires et de nature à lui nuire.

10. En troisième lieu, Mme D... se plaint de la dégradation générale des conditions de travail dans la direction où elle exerçait ses fonctions et des méthodes de management agressives dont elle aurait été victime en invoquant en particulier, et d'ailleurs de façon non circonstanciée, les conclusions et constatations du rapport d'audit confié au cabinet Alcanéa par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Toutefois, le diagnostic établi lors de la mission d'audit et restitué le 8 juin 2017 attribue, s'agissant de l'organisation et du management de la direction des moyens généraux mis en cause par la requérante, un " score plutôt favorable attribué à la régulation et au soutien du manager " et constate que " les agents se sentent plutôt reconnus dans l'expression de leurs compétences actuelles ". Si les consultants précisent que " le climat de travail ressenti est différent selon les services, par l'expression de certains agents de tensions qui amoindrissent la coopération et la confiance ", il ne résulte pas de cette analyse que les tensions qui pouvaient exister dans cette direction auraient présenté un caractère majeur nécessitant une intervention urgente ni même que les responsables hiérarchiques auraient été principalement, voire exclusivement, mis en cause du fait de leur comportement et de leurs pratiques de gestion des équipes dont ils avaient la responsabilité, et plus particulièrement s'agissant de Mme D.... Il ne ressort ainsi d'aucun élément du dossier que cette dernière aurait, contrairement à ce qui est allégué, été confrontée à une situation gravement conflictuelle au sein de la direction dans laquelle elle était affectée. Par ailleurs, la circonstance que la requérante n'ait pas été auditionnée par le cabinet Alcanéa, alors d'ailleurs qu'elle était en congé de maladie, ne caractérise par un agissement de harcèlement moral.

11. En quatrième lieu, Mme D... se plaint de nouveau en appel des conditions dans lesquelles ont été réalisées les expertises médicales successives en mettant en cause l'impartialité tant du médecin de prévention - docteur A... - que du médecin expert, le docteur B.... Il y a lieu de constater que les premiers juges ont accueilli pour partie l'argumentation de la requérante en estimant, d'une part, que les termes du courrier que le médecin de prévention avait adressé à son confrère du centre hospitalier Guillaume-Régnier chargé de l'expertiser pouvaient faire raisonnablement douter de son impartialité. Le département d'Ille-et-Vilaine ne conteste pas cette appréciation. Toutefois, d'autre part, il ne ressort pas de l'examen des appréciations et des conclusions du médecin expert ni d'aucun autre élément versé au dossier que le rapport du docteur B..., médecin expert, soit empreint d'un manque d'impartialité. Enfin pour les mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges, dont la pertinence n'est remise en cause par aucun élément versé au dossier, les allégations avancées par Mme D... quant à la violation du secret médical par le médecin de prévention et du principe du contradictoire par la collectivité dans le cadre de l'expertise judiciaire doivent être écartées. Dans ces conditions, et pour regrettable que soit le contenu du rapport du médecin de prévention, adressé au docteur B..., les modalités de réalisation des expertises médicales subies par Mme D... ne peuvent caractériser une situation de harcèlement à son encontre.

12. En cinquième et dernier lieu, il ressort des pièces versées au dossier qu'à la suite d'un entretien le 26 août 2016 entre la requérante, la directrice générale adjointe en charge du pôle ressources et le directeur des ressources humaines, il a été décidé par le conseil général d'Ille-et-Vilaine de diligenter une enquête administrative. Cette enquête, qui était destinée à éclairer l'administration sur les gestes équivoques reprochés par Mme D..., sans jamais les démentir, à son supérieur hiérarchique, a donné lieu à l'audition de ce dernier, de la responsable de la plateforme logistique et de ceux de ses collègues qui rapportaient ses propos accusateurs concernant le " comportement inapproprié " dont se serait rendu coupable son directeur. A l'issue de ces échanges, le directeur des ressources humaines a établi un " rapport administratif " sur la situation de Mme D... dans lequel il a conclu à " l'existence d'un comportement pathologique de la requérante à l'origine d'une souffrance pour ses collègues et supérieurs hiérarchiques et à la nécessité de procéder à une expertise médicale de l'intéressée en vue d'être éclairé sur son aptitude à exercer ses missions et sur l'éventualité d'une demande de placement en congé de longue maladie ". Si Mme D... reproche au directeur des ressources humaines d'avoir mené une enquête administrative partiale à charge et d'avoir établi un rapport qui souffre également des mêmes critiques, ces griefs ne sont pas établis matériellement par les éléments du dossier. Et les conditions et modalités du déroulement de l'enquête administrative ne révèlent aucun agissement constitutif de harcèlement moral.

13. Il résulte de l'ensemble de ce qui a été dit aux points 8 à 12 que les faits dénoncés par la requérante ne permettent pas d'estimer qu'elle a été victime d'actes ou d'agissements susceptibles de faire présumer l'existence du harcèlement moral allégué.

S'agissant de la demande de protection fonctionnelle :

14. Pour les mêmes motifs que ceux précédemment détaillés aux points 8 à 12, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la protection prévue par les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 citées au point précédent aurait dû lui être accordée. En conséquence, elle n'est pas davantage fondée à demander l'annulation de la décision lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

15. Le présent arrêt qui rejette l'ensemble des prétentions de la requérante n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance la somme que Mme D... réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la requérante la somme que demande le département en application des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département d'Ille-et-Vilaine sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au département d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2021

Le rapporteur,

O. COIFFETLe président,

O. GASPON

La greffière,

P. CHAVEROUX

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19NT04836 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT04836
Date de la décision : 05/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : SELARL HORUS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-10-05;19nt04836 ?
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