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20/07/2021 | FRANCE | N°20NT03295

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 20 juillet 2021, 20NT03295


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 16 novembre 2017 par laquelle la présidente du syndicat intercommunal à vocation scolaire (SIVS) de Bacilly-Vains a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ainsi que la décision rejetant son recours gracieux présenté le 13 janvier 2018. Elle a en outre demandé au tribunal de condamner le SIVS à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de son licenciement.<

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Par un jugement n° 1801169 du 18 août 2020, le tribunal administratif de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 16 novembre 2017 par laquelle la présidente du syndicat intercommunal à vocation scolaire (SIVS) de Bacilly-Vains a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ainsi que la décision rejetant son recours gracieux présenté le 13 janvier 2018. Elle a en outre demandé au tribunal de condamner le SIVS à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de son licenciement.

Par un jugement n° 1801169 du 18 août 2020, le tribunal administratif de Caen a annulé ces deux décisions mais a rejeté le surplus des conclusions de la requête de Mme D....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 octobre 2020 et 3 février 2021, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 18 août 2020 en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner le syndicat intercommunal à vocation scolaire de Bacilly-Vains à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis en raison de son licenciement ;

3°) de mettre à la charge de ce syndicat intercommunal le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son licenciement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis et n'ont pas été précédés de courriers l'informant des négligences qui mettraient en difficulté le bon fonctionnement du service ;

- l'illégalité de cette décision, tant sur la forme que sur le fond, lui ouvre droit à réparation ;

- elle sollicite la réparation de son préjudice matériel comprenant le salaire qu'elle aurait perçu si son contrat avait été poursuivi jusqu'à son terme ainsi que de son préjudice moral en raison de l'atteinte portée à sa réputation et des troubles dans ses conditions d'existence.

Par des mémoires, enregistrés les 17 novembre 2020 et 22 février 2021, le syndicat intercommunal à vocation scolaire de Bacilly-Vains, représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête, à la réformation du jugement du tribunal administratif de Caen du 18 août 2020 en tant qu'il a annulé la décision du 16 novembre 2017 pour défaut de motivation et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction a été fixée au 12 mars 2021 à 16 heures en vertu d'une ordonnance du 23 février 2021.

Le mémoire produit le 12 mars 2021 à 22 heures 42 pour Mme D... n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... a été engagée en qualité d'agent contractuel pour exercer les fonctions de secrétaire administrative du Syndicat Intercommunal à Vocation Scolaire (SIVS) de Bacilly-Vains du 16 au 26 mai 2017 puis, pour une durée de douze mois, à compter du 1er juin 2017. Par un courrier du 16 novembre 2017, la présidente de ce syndicat intercommunal a procédé à son licenciement pour insuffisance professionnelle. Mme D... a saisi le tribunal administratif de Caen d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de cette décision du 16 novembre 2017 et de la décision rejetant son recours gracieux présenté le 13 janvier 2018 et, d'autre part, à la condamnation du syndicat intercommunal à Vocation Scolaire de Bacilly-Vains à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de son licenciement. Par un jugement du 18 août 2020, le tribunal administratif de Caen a fait partiellement droit à la demande de l'intéressée en annulant les décisions contestées mais a rejeté ses conclusions indemnitaires. Mme D... relève appel, dans cette mesure, de ce jugement et le SIVS présente des conclusions d'appel incident en contestant l'annulation par les premiers juges de la décision du 16 novembre 2017 pour défaut de motivation.

Sur les conclusions d'appel principal de Mme D... :

2. Aux termes de l'article 39-2 du décret susvisé du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale : " L'agent contractuel peut être licencié pour un motif d'insuffisance professionnelle. / L'agent doit préalablement être mis à même de demander la communication de l'intégralité de toute pièce figurant dans son dossier individuel, dans un délai suffisant permettant à l'intéressé d'en prendre connaissance. Le droit à communication concerne également toute pièce sur laquelle l'autorité territoriale entend fonder sa décision, même si elle ne figure pas au dossier individuel. ". Le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public ne peut être fondé que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l'exercice de ces fonctions. Toutefois, une telle mesure ne saurait être subordonnée à ce que l'insuffisance professionnelle ait été constatée à plusieurs reprises au cours de la carrière de l'agent ni qu'elle ait persisté après qu'il ait été invité à remédier aux insuffisances constatées.

3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du courrier du 7 novembre 2017 portant convocation de Mme D... à l'entretien préalable à son licenciement pour insuffisance professionnelle, que le SIVS de Bacilly-Vains avait de nombreux griefs à formuler à l'encontre de l'intéressée, pourtant récemment recrutée depuis le 16 mai 2017. Le syndicat intercommunal lui reproche tout d'abord, l'absence de réalisation du planning des agents qu'il employait. Si Mme D... soutient que cette tâche ne relevait pas de ses fonctions, alors qu'elle était en charge du secrétariat et de la comptabilité de cet établissement, l'attestation fournie par l'agent dont elle a assuré le remplacement confirme que la gestion des plannings relevait de ses attributions et qu'elle en avait été informée. Pour sa part, la requérante n'établit ni que cette mission incombait à un autre agent du syndicat, ni avoir sollicité les informations qui lui auraient fait défaut pour établir les plannings alors que le SIVS soutient sans être contredit que l'accord sur les temps d'activités périscolaires avait été finalisé au mois d'août 2017, et que si Mme D... avait rencontré tous les agents au cours du même mois, à la date de son entretien préalable, les plannings n'étaient toujours pas établis. Les attestations produites de plusieurs agents confirment ces dires.

4. Par ailleurs, le SIVS reproche à Mme D... de nombreuses erreurs de facturation. Ainsi, des prestations de cantine ou de garderie facturées à tort au cours des mois de mai, juin ou juillet 2017, alors notamment que l'école était fermée depuis le 30 juin, n'ont été régularisées qu'en septembre 2017. Si Mme D... soutient n'avoir reçu aucune formation, ne pas disposer des codes pour établir les factures et ne pas être responsable des erreurs des agents de la cantine chargés de pointer la présence des enfants, l'agent qui occupait auparavant ses fonctions atteste avoir accompagné l'intéressée lors de sa prise de poste, y compris sur son temps personnel au-delà de la rentrée scolaire 2017, et lui avoir remis les codes d'accès de l'ensemble des logiciels nécessaires au fonctionnement du syndicat. En outre, la présidente du syndicat confirme par un courriel du 23 octobre 2017 avoir elle-même procédé aux régularisations requises. Le successeur de Mme D... ajoute qu'à la mi-novembre les parents n'avaient toujours pas reçu le règlement de la cantine-garderie, qui n'était pas établi. Le comptable public atteste également avoir refusé le paiement de plusieurs factures pour " double paiement ", pour domiciliation bancaire absente ou erronée, ou pour insuffisance de pièces justificatives. Le SIVS produit également les courriers de relance de plusieurs entreprises qui attendaient depuis plusieurs mois le paiement de factures datant des mois d'avril, mai, juin ou octobre 2017, qui n'étaient toujours pas acquittées en septembre, octobre ou décembre 2017. Le non-paiement d'une facture de téléphone a ainsi entraîné une coupure de la ligne téléphonique de l'école au mois de septembre 2017 alors que d'autres factures étaient payées deux fois. Il ressort enfin des pièces du dossier que les erreurs commises par Mme D... avaient des répercussions sur le fonctionnement du syndicat intercommunal dont les agents risquaient de ne pas être payés ou de ne pas être couverts par le contrat d'assurance complémentaire contracté par cet établissement, en l'absence de mise à jour des données communiquées à la compagnie d'assurance. Ainsi figurent au dossier, les courriels de Pôle Emploi, de l'Agence de services de Paiement dans le cadre du site Sylaé pour les contrats aidés, de la direction générale des finances publiques et du centre de gestion de la fonction publique territoriale, procédant à la relance d'actions non menées par Mme D..., en qualité de secrétaire du syndicat intercommunal.

5. Il ressort enfin des pièces du dossier que le courrier du 7 novembre 2017 comportait en annexe le détail très précis des faits qui étaient reprochés à Mme D.... Ce courrier lui précisait qu'elle avait droit, à compter de cette date et lors de l'entretien préalable à son licenciement, à la communication de son dossier individuel dans son intégralité et à l'assistance d'une personne de son choix. La requérante n'est par suite pas fondée à soutenir qu'elle n'aurait pas pu prendre connaissance des factures dans le traitement desquelles elle aurait commis des erreurs. En outre, si l'intéressée soutient qu'elle n'aurait pas été informée de ses négligences et de leur répercussion sur le bon fonctionnement du syndicat intercommunal, aucun texte ne prévoit que son employeur, surtout sur une période aussi courte, devait lui adresser au fur et à mesure de l'exécution de son contrat, chacun des griefs qui justifient son licenciement.

6. Compte tenu de l'ensemble des erreurs constatées sur une période relativement brève, Mme D..., qui avait été recrutée sur la base de la rémunération d'un adjoint administratif principal de 2ème classe, n'est pas fondée à soutenir que la décision prononçant son licenciement pour insuffisance professionnelle procède d'une erreur d'appréciation de sa valeur professionnelle.

7. Il résulte de tout ce ce qui vient d'être dit que la décision contestée étant justifiée au fond, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Caen a rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions d'appel incident du SIVS :

8. Aux termes de l'article 42-1 du décret susvisé du 15 février 1988 : " Lorsque (...) l'autorité territoriale décide de licencier un agent, elle lui notifie sa décision par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement (...) ".

9. La décision contestée rappelle qu'en dépit des explications fournies par Mme D... lors de l'entretien préalable du 15 novembre 2017, le syndicat intercommunal est contraint de procéder à son licenciement pour insuffisance professionnelle. Il est indiqué que l'intéressée fait preuve dans l'exercice de ses fonctions de secrétariat administratif et de comptabilité, de nombreuses négligences et que cette incapacité à assumer correctement ses fonctions met en cause le bon fonctionnement du syndicat sans espoir d'un quelconque changement. Cette décision, à la différence du courrier du 7 novembre 2017 qui se réfère expressément aux articles 39-2 et 42 du décret du 15 février 1988 modifié, ne vise aucun texte ni ne développe de motif de droit. Par suite, le SIVS n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges ont estimé à tort que la décision litigieuse était insuffisamment motivée et l'ont annulée pour ce motif.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du syndicat intercommunal à vocation scolaire de Bacilly-Vains, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme D... de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme D... le versement à ce syndicat intercommunal de la somme qu'il sollicite sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du syndicat intercommunal à vocation scolaire de Bacilly-Vains présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au syndicat intercommunal à vocation scolaire de Bacilly-Vains.

Délibéré après l'audience du 9 juillet 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme B..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 juillet 2021.

Le rapporteur,

V. GELARDLe président,

O. GASPON

La greffière,

P. CHAVEROUX

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT03295


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03295
Date de la décision : 20/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : BOUTHORS-NEVEU

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-07-20;20nt03295 ?
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