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16/07/2021 | FRANCE | N°20NT03458

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 16 juillet 2021, 20NT03458


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... et Chantal C... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la délibération du 18 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes Pré-Bocage Intercom a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal du secteur ouest de la communauté de communes.

Par une ordonnance n° 2000366 du 31 août 2020, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requ

te enregistrée le 2 novembre 2020, M. et Mme D... et Chantal C..., représentés par Me B..., de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... et Chantal C... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la délibération du 18 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes Pré-Bocage Intercom a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal du secteur ouest de la communauté de communes.

Par une ordonnance n° 2000366 du 31 août 2020, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 novembre 2020, M. et Mme D... et Chantal C..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Caen du 31 août 2020 ;

2°) d'annuler la délibération du 18 décembre 2019 du conseil communautaire de la communauté de communes Pré-Bocage Intercom ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes Pré-Bocage Intercom la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'ordonnance attaquée est irrégulière pour être entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation dans les réponses apportées aux moyens tirés de l'insuffisance du rapport d'enquête publique et de l'illégalité du classement de la parcelle cadastrée section AH n°166 ;

- pour l'application des dispositions du 4° de l'article R. 151-2 du code de l'urbanisme, le rapport de présentation souffre, au regard de cette parcelle, d'insuffisance dans la délimitation des zones A et UX ;

- le classement de cette parcelle en zone agricole est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...'hirondel,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant M. et Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... sont propriétaires sur le territoire de la commune d'Aunay-sur-Odon, intégrée depuis le 1er janvier 2017 dans la commune nouvelle " Les monts d'Aunay ", de la parcelle cadastrée section AH n°166, anciennement cadastrée section ZH n°s 58, 64 et 65. Cette parcelle a été classée en zone agricole dans le plan local d'urbanisme intercommunal du secteur ouest approuvé par une délibération du 18 décembre 2019 du conseil communautaire de la communauté de communes Pré-Bocage Intercom. M. et Mme C... relèvent appel de l'ordonnance du 31 août 2020 par laquelle le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Caen a rejeté, sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, leur demande tendant à l'annulation de cette délibération.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ".

3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que M. et Mme C... se sont bornés à soutenir que " la réponse apportée [par la commission d'enquête] pour approbation et modification du PLUi ne correspond qu'imparfaitement à notre question, à savoir de maintenir la classification initiale des parcelles lors de l'achat ". Par suite, en écartant ce moyen au motif qu'il est sans incidence sur la légalité de la délibération contestée dès lors que les dispositions de l'article R. 122-1 du code de l'environnement, citées au point 5 de l'ordonnance, n'imposent pas à la commission de répondre à chacune des observations du public, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Caen ne s'est pas mépris sur le sens du moyen développé par les requérants.

4. Par ailleurs, la régularité de l'ordonnance attaquée ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs. Par suite, les requérants ne sauraient utilement alléguer que l'ordonnance attaquée serait irrégulière pour être entachée d'une erreur de droit et avoir fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce en ce qui concerne l'insuffisance du rapport d'enquête publique et le classement de la parcelle cadastrée section AH n°166 en zone agricole.

5. Il suit de là que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le premier juge a entaché son ordonnance d'irrégularité en rejetant leur demande sur le fondement des dispositions précitées du 7° de l'article R. 221-1 du code de justice administrative.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. En premier lieu, aux termes de l'article R. 151-2 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation comporte les justifications de : / (...) 4° La délimitation des zones prévues par l'article L. 151-9 ; (...) ".

7. Si le rapport de présentation doit exposer les motifs de la délimitation des zones, il n'a pas à justifier du classement de chaque terrain. Par suite, M. et Mme C... ne sauraient utilement soutenir que le rapport de présentation méconnaîtrait les dispositions du 4° de l'article R. 151-2 du code de l'urbanisme en l'absence, s'agissant des zones A et UX, de justification de la délimitation par rapport à la parcelle cadastrée section AH n°166. En tout état de cause, le volume 2 du rapport de présentation expose suffisamment, aux pages 54 à 65, les justifications des choix opérés pour la délimitation de chacune des zones. En particulier, s'agissant des zones agricoles, leur délimitation est justifiée pour permettre, autant que possible, l'évaluation et l'adaptation de l'activité agricole locale et pour favoriser le développement de l'activité agricole, par référence aux objectifs définis respectivement à l'axe 3 de l'orientation 3 et à l'axe 2 de l'orientation 1 du projet d'aménagement et de développement durables (PADD). De même, s'agissant des zones UX, le rapport de présentation mentionne qu'il s'agit des zones économiques à renforcer à proximité des axes de déplacements majeurs dont la localisation est justifiée par les objectifs poursuivis par le PADD, en l'occurrence l'axe 2 de l'orientation 1 (s'appuyer sur l'autoroute comme vitrine de la richesse du territoire et de son dynamisme économique), l'axe 3 de l'orientation 2 (organiser un territoire fonctionnel pour des mobilités optimisées) et l'axe 2 de l'orientation 3 (optimiser les déplacements, l'accessibilité et la visibilité des entreprises). Le rapport de présentation précise également que la limite de ces zones U est définie sur la base des limites existantes dans les documents d'urbanisme communaux et réajustée en fonction des usages observés et des retours d'expérience des communes sur l'évolution de ces espaces. Par suite, le moyen tiré du caractère insuffisant du rapport de présentation doit être écarté.

8. En second lieu, en vertu de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme définit notamment " Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques " et " fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain ". En vertu de l'article L. 1519 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 15122 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". L'article R. 151-23 du même code précise : " Peuvent être autorisées, en zone A : / 1° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime ; / 2° - Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceuxci. "

9. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer, en conséquence, le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation, sur ces différents points, ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts. Il résulte, par ailleurs, des dispositions citées au point précédent, qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.

10. Il ressort du projet d'aménagement et de développement durables que les auteurs du plan local d'urbanisme ont souhaité, au titre de l'axe 2 de l'orientation 1, conforter une identité forte et singulière dans le grand paysage normand en renforçant la diversité des usagers du territoire vectrice d'une richesse économique et culturelle. A ce titre, alors que le territoire bénéficie d'une agriculture de qualité portée par des exploitations dynamiques, ils ont voulu valoriser la qualité des productions locales et " favoriser le développement de l'activité agricole en maintenant un potentiel épandable important sur le territoire, en limitant la proximité des tiers autour des exploitations, notamment d'élevages, en traitant les limites d'urbanisation par des espaces tampons permettant une bonne cohabitation entre les pratiques agricoles et résidentielles mais aussi des autres segments de l'économie locale ". Ils ont également souhaité, au titre de l'axe 2 de l'orientation 3, assurer un développement respectueux des spécificités environnementales de l'ouest du pré-bocage par un développement raisonné, préservant les ressources pour les générations futures. Les auteurs du plan ont ainsi manifesté le souhait " de maintenir la vocation agricole de son territoire [qui] se traduit à la fois par un projet favorisant le développement des activités et l'optimisation de sa consommation foncière d'une part, mais aussi par une meilleure localisation de cette consommation d'autre part, au profit d'un renforcement des espaces de centralité et d'un usage plus limité de la voiture notamment ". Dans ces conditions, alors que la consommation foncière, toute destination confondue, hors constructions agricoles, est de 185 ha (dont environ 139 ha en extension), sur la période 2000-2016 (soit 12 ha/an), le projet prévoit une réduction de la consommation foncière globale d'environ 20% (environ moins 30%/an).

11. Il ressort des pièces du dossier, notamment du règlement graphique particulier, que la parcelle cadastrée section AH n°166 est située à l'extrême Nord d'une zone urbanisée, située dans l'ancienne commune d'Aunay-sur-Odon. Dans le plan local d'urbanisme en litige, cette parcelle a été classée, dans sa partie Sud, en zone UX, qui correspond aux zones économiques à renforcer à proximité des axes de déplacements majeurs et, dans sa partie Nord, en zone agricole. La partie Sud, classée en zone UX, qui supporte un immeuble à usage d'habitation et un hangar, jouxte une zone d'activité et permettra ainsi son développement. La partie Nord est vierge de toute construction et se rattache au Nord et à l'Est à un vaste tènement agricole et, à l'Ouest, à un large espace naturel. Par suite, c'est sans erreur manifeste d'appréciation, compte-tenu de la vocation du secteur en bordure duquel la parcelle se situe, dont le caractère agricole n'est pas contesté, et du parti d'urbanisme retenu par les auteurs du plan tendant à préserver les terres agricoles, que la parcelle, en sa partie Nord, a pu être classée en zone agricole alors même qu'elle n'est pas éloignée de deux autres zones UX, de dimension au demeurant modeste. En l'absence d'erreur manifeste d'appréciation dans ce classement, les requérants ne sauraient alors utilement soutenir qu'elle aurait également pu être classée en zone UX.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté de communes Pré-Bocage Intercom qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. et Mme C... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... et Chantal C... et à la communauté de communes Pré-Bocage Intercom.

Copie en sera adressée pour son information au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 6 juillet 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Douet, présidente-assesseure,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2021.

Le rapporteur,

M. E...Le président,

A. PEREZ

La greffière,

A. LEMEE

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT03458


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03458
Date de la décision : 16/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-03-03-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Légalité des plans. Légalité interne. Appréciations soumises à un contrôle d'erreur manifeste. Classement et délimitation des ones.


Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELARL CHRISTOPHE LAUNAY

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-07-16;20nt03458 ?
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