Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux arrêtés du 21 janvier 2021 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, a décidé son transfert aux autorités italiennes, d'autre part, l'a assigné à résidence.
Par un jugement n° 2100960 du 5 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 février 2021, M. F... B... D..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 février 2021 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 21 janvier 2021 du préfet de Maine-et-Loire décidant son transfert aux autorités italiennes et son assignation à résidence ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de lui délivrer un récépissé de demande d'asile dans le délai de 15 jours suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai, et, subsidiairement, de statuer à nouveau sur sa situation dans les mêmes conditions ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
en ce qui concerne l'arrêté de transfert :
- il n'est pas suffisamment motivé ;
- il est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière en méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le préfet a méconnu les articles 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne eu égard aux défaillances du système d'accueil des demandeurs d'asile en Italie ;
- l'arrêté est entaché d'une application manifestement erronée de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 qui permet de déroger aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile ;
en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant réadmission en Italie ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 avril 2021, la préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... D... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. F... B... D..., se présentant comme un ressortissant soudanais né le 2 janvier 1998, déclare être entré irrégulièrement en France le 20 octobre 2020. Il s'est présenté à la préfecture de la Loire-Atlantique le 10 novembre suivant pour solliciter une protection internationale. Les recherches conduites par la préfecture sur le fichier Eurodac ont fait apparaître que les empreintes digitales de l'intéressé avaient été enregistrées dans ce fichier en Italie le 9 octobre 2020 et qu'il avait franchi irrégulièrement la frontière italienne dans la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande d'asile. Les autorités italiennes ont été saisies le 12 novembre 2020 d'une demande de transfert de l'intéressé sur le fondement du 1 de l'article 13 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013. Ces autorités ayant implicitement donné leur accord pour le transfert de M. B... D..., le préfet de Maine-et-Loire a décidé le 21 janvier 2021 de ce transfert aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence. M. B... D... relève appel du jugement du 5 févier 2021 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de ces deux arrêtés.
Sur l'aide juridictionnelle :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence [...], l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président ". Aux termes de l'article 61 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et relatif à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat dans les procédures non juridictionnelles : " (...) / L'admission provisoire est accordée par le président du bureau ou de la section ou le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle ou d'aide à l'intervention de l'avocat sur laquelle il n'a pas encore été statué. ".
3. M. B... D..., représenté par un avocat, a déposé une demande d'aide juridictionnelle sur laquelle il n'a pas encore été statué. Dans ces conditions, il y a lieu d'admettre provisoirement M. B... D... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur la décision de transfert :
4. En premier lieu, le requérant reprend en appel les moyens invoqués en première instance tirés de l'insuffisance de la motivation de l'arrêté de transfert et de la méconnaissance de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Il y a lieu d'écarter ces moyens par les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit par le premier juge aux points 2 à 5 du jugement attaqué.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2. (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable (...) ". Par ailleurs, l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dispose que : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
6. M. B... D... fait état de l'existence de défaillances affectant les conditions d'accueil et de prise en charge des demandeurs d'asile en Italie et de l'absence de soins au moment de son arrivée dans ce pays, mais les documents qu'il produit à l'appui de ces affirmations ne permettent pas de tenir pour établi que sa demande d'asile serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que l'Italie est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, il n'est pas établi que la décision de transfert méconnaîtrait l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ou les dispositions de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...)".
8. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. B... D.... La seule circonstance selon laquelle celui-ci est éprouvé en conséquence de ses conditions de vie lors son parcours migratoire ne suffit pas à démontrer qu'il se trouve dans une situation d'exceptionnelle vulnérabilité imposant d'instruire sa demande d'asile en France. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché sa décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
Sur l'arrêté portant assignation à résidence :
9. En premier lieu, le requérant reprend en appel les moyens invoqués en première instance tirés de l'insuffisance de la motivation de l'arrêté d'assignation à résidence, du défaut d'examen de sa situation particulière et de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 562-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ces moyens par les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit par le premier juge aux points 13, 14 et 16 du jugement attaqué.
10. En second lieu, il résulte des points 2 à 6 du présent arrêt que M. B... D... n'est pas fondé à se prévaloir, à l'encontre de la décision prononçant son assignation à résidence, de l'illégalité de la décision ordonnant son transfert aux autorités italiennes.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 21 janvier 2021 du préfet de Maine-et-Loire. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : M. B... D... est admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : La requête de M. B... D... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. F... B... D..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 29 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. A..., président assesseur,
- Mme E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2021.
Le rapporteur,
C. A...
Le président,
L. Lainé
La greffière,
S. Levant
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT00382