La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/07/2021 | FRANCE | N°20NT04023

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 09 juillet 2021, 20NT04023


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme K... E..., agissant en qualité de représentante légale de sa fille mineure Mme B... D..., et Mme H... D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite née le 13 février 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre les décisions de l'ambassade de France en Guinée du 16 octobre 2019 rejetant la demande de visa de long séjour présentée pour Mmes H... D... et B... D... en qual

ité de membres de famille de réfugié et d'enjoindre au ministre de l'intérieur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme K... E..., agissant en qualité de représentante légale de sa fille mineure Mme B... D..., et Mme H... D... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite née le 13 février 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre les décisions de l'ambassade de France en Guinée du 16 octobre 2019 rejetant la demande de visa de long séjour présentée pour Mmes H... D... et B... D... en qualité de membres de famille de réfugié et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer aux intéressées les visas sollicités.

Par un jugement n° 2004127 du 23 novembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en tant qu'elle concerne Mme H... D..., a enjoint au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de sa demande de visa dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2020, Mme K... E... et Mme H... D..., représentées par Me J..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 novembre 2020 ;

2°) d'annuler la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au ministre de l'intérieur de délivrer aux intéressées les visas de long séjour qu'elles ont sollicités dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à leur conseil au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elles soutiennent que :

­ leur requête est recevable ;

­ s'agissant de la demande formée par Mme B... D..., la décision contestée a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le lien de filiation est établi ; la circonstance qu'un jugement supplétif et un acte de naissance portant transcription de ce jugement aient été produits alors qu'elle était déjà titulaire d'un acte de naissance ne saurait établir la fraude, l'acte de naissance initial délivré en 2003 ne présentant pas au demeurant un caractère apocryphe. Son nom est, par ailleurs, mentionné dans la décision de la Cour nationale du droit d'asile reconnaissant le statut de réfugié à Mme K... E... et elle fait l'objet, de la part de son père, de menaces d'excision et de mariage forcé ; il ne peut être exigé, dans ces conditions, d'établir la déchéance de l'autorité parentale du père ;

­ s'agissant de la demande formée par Mme H... D..., le lien de filiation est, pour les mêmes motifs, établi ; le tribunal a, dans ces conditions, commis une erreur manifeste d'appréciation en limitant l'injonction au réexamen de la demande alors que les menaces qui pèsent sur elle exigent la délivrance du visa sollicité et que le caractère authentique des actes d'état civil n'est pas contesté ;

­ la décision contestée de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

­ elle viole également les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire, enregistré le 27 avril 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

­ la requête en tant qu'elle est introduite par Mme H... D... est irrecevable dès lors que le jugement lui est favorable ;

­ aucun moyen de la requête n'est fondé et s'en remet pour le surplus à ses écritures de première instance.

Mme K... E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu

­ le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

­ le code civil ;

­ la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

­ le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A...'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Mme K... E..., ressortissante guinéenne née le 3 mai 1986, est entrée le 24 avril 2016 en France où le statut de réfugié lui a été reconnu par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 18 mai 2018. Le 22 mai 2019, Mme E... a sollicité, pour le compte de Mme B... D..., née le 5 février 2003, qu'elle présente comme sa fille, un visa de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié auprès de l'ambassade de France en Guinée. Par une décision du 16 octobre 2019, cette autorité a rejeté la demande. Les requérantes soutiennent, par ailleurs, qu'une demande de même nature a été déposée par Mme H... D..., née le 20 mars 2000, qui se présente également comme la fille de B... D... et que cette demande a fait l'objet d'un refus d'enregistrement de la part des autorités consulaires françaises en Guinée. Par un recours du 12 décembre 2019, enregistré le lendemain, Mme K... E... a saisi la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France contre ces deux décisions consulaires. Une décision implicite de rejet, née du silence gardé à cette demande, est intervenue à compter du 13 février 2020. Par un jugement du 23 novembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France en tant qu'elle concerne Mme H... D..., a enjoint au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de sa demande de visa dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours. Mme K... E... et Mme H... D... relèvent appel de ce jugement.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur :

2. Il ressort des écritures de première instance que les requérantes, après avoir notamment soutenu que Mmes B... et H... D... remplissaient les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et joint à leur demande les documents permettant d'apprécier le lien de filiation allégué, ont sollicité du tribunal administratif qu'il soit enjoint de délivrer à ces dernières le visa qu'elles ont sollicité dans un délai de quinze jour à compter de la notification du jugement à intervenir. Le jugement attaqué, en faisant seulement injonction à l'administration de réexaminer la demande de Mme H... D..., n'a pas fait droit à cette demande. Par suite, les requérantes sont recevables à relever appel en tant que le jugement attaqué n'a pas fait droit à la demande d'injonction de délivrer à l'intéressée le visa sollicité. Il appartient alors au juge d'appel, statuant dans le cadre de l'effet dévolutif, de se prononcer sur les moyens, soulevés devant lui, susceptibles de conduire à faire droit à cette demande. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur et tirée de l'irrecevabilité de la requête en tant qu'elle concerne Mme H... D... ne saurait être accueillie.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " I. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / (...) 3° Par les enfants non mariés du couple, âgés au plus de dix-neuf ans / (...) / II. - Les articles L. 411-2 à L. 411-4 et le premier alinéa de l'article L. 411-7 sont applicables. / (...) Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / Pour l'application du troisième alinéa du présent II, ils produisent les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 721-3 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux. "

4. Pour refuser de délivrer à Mme B... D... le visa de long séjour sollicité, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée, ainsi qu'il résulte des écritures du ministre, sur le motif tiré de ce que le lien de filiation avec Mme K... E... et, par suite, son identité n'étaient pas établis. Il ressort des pièces du dossier que pour établir ce lien de filiation ont été produits l'acte de naissance n°148 dressé le 12 février 2003 sur déclaration du père, M. C... D..., par l'officier de l'état civil de la commune de Matoto, un jugement supplétif d'acte de naissance rendu par le tribunal de première instance de Conakry III - Mafanco le 4 décembre 2017 et l'acte de naissance n°9921 assurant la transcription de ce jugement supplétif dans les registres de l'état civil dressé le 6 décembre 2017 par l'officier de l'état civil de la même commune.

5. Hormis le cas où le document produit aurait un caractère frauduleux, il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil (...) " et aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

6. En premier lieu, un jugement supplétif d'acte de naissance n'ayant d'autre objet que de suppléer l'inexistence de cet acte, la commission ne pouvait utilement retenir, compte tenu de la nécessité de présenter un tel acte à l'appui des demandes de visa, la circonstance que celui contenu dans la demande a été établi tardivement et de manière opportune. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que les documents d'état civil présentés à l'appui de la demande de visa présentaient entre eux des incohérences de nature à leur ôter tout caractère probant. En particulier, la circonstance que le jugement supplétif a été rendu sur la requête de M. C... D... qui, selon les requérantes, ferait peser des menaces graves sur les intéressées n'est pas de nature à établir son caractère frauduleux. De même, le jugement supplétif et l'extrait d'acte de naissance assurant sa transcription ne précisant ni l'âge, ni l'année de naissance du père, le ministre ne saurait, dans ces conditions, utilement faire valoir, pour contester leur authenticité, que l'année de naissance de M. C... D... qui y est portée ne concorderait pas avec les déclarations faites par Mme E... lors de sa demande d'asile. Enfin, si le jugement a été rendu cinq jour après l'enregistrement de la requête et sur déclaration de deux témoins, ces circonstances ne suffisent pas, alors en outre que le ministre n'établit pas que les règles de droit local s'y opposeraient, à établir son caractère frauduleux.

7. Par ailleurs, il ne ressort pas des dispositions du code civil guinéen, et en particulier de son article 193, que le jugement supplétif de naissance, qui indique les prénom et nom de l'enfant, ses date et lieu de naissance et les noms et prénoms de ses père et mère, doive nécessairement comporter l'ensemble des mentions devant figurer sur les actes de naissance en application des articles 175 et 196 du code civil guinéen.

8. En outre, si l'article 601 du code de procédure civile, économique et administrative guinéen prévoit que " le délai de recours par une voie ordinaire est de dix jours en matière contentieuse comme en matière gracieuse. L'inobservation de ce délai emporte déchéance et court du jour du jugement, si celui-ci est contradictoire ou du jour de la notification si le jugement est rendu par défaut ", ce code contient, en sa troisième partie, des dispositions particulières à certaines matières, notamment sur " Les personnes " et plus particulièrement sur les actes de l'état civil, aux articles 889 et suivants. Selon l'article 899 de ce code : " Toute décision dont la transcription ou la mention sur les registres de l'état civil est ordonnée, doit énoncer, dans son dispositif, les noms, prénoms des parties ainsi que, selon le cas, le lieu où la transcription doit être faite ou les lieux et dates des actes en marge desquels la mention doit être portée. Seul le dispositif de la décision est transmis au dépositaire des registres de l'état civil. Les transcription et mention du dispositif sont aussitôt opérées. ". Cet article prévoyant ainsi la transcription immédiate du dispositif des jugements supplétifs d'actes de naissance sur les registres d'état civil, leur transcription avant l'expiration du délai d'appel n'est pas de nature à établir leur caractère frauduleux. Si le ministre soutient que le jugement supplétif ne contient aucune formule exécutoire en méconnaissance des dispositions des articles 551 et suivant du même code, il n'établit pas que les jugements supplétifs tenant lieu d'acte de naissance entrent dans le champ d'application de ces dispositions, ni au surplus qu'ils n'entreraient pas dans le cadre des exceptions prévues à l'article 554 de ce code qui dispense les jugements d'une telle formule exécutoire. En tout état de cause, la circonstance que le jugement supplétif ne contienne pas de formule exécutoire et que l'acte de naissance assurant sa transcription ait été dressé dans le délai d'appel dont est susceptible d'être frappé ce jugement n'est pas de nature à remettre en cause la sincérité des mentions apportées dans ces documents d'état civil présentés à l'appui de la demande de visa. La circonstance que les actes d'état civil comportent des dates qui ne sont pas transcrites en toutes lettres mais en chiffres, contrairement à ce que prévoit l'article 179 du code civil guinéen, ne suffisent pas à leur ôter tout caractère probant.

9. De plus, si le ministre soutient que l'acte de naissance n°148 dressé en 2003 présentait un caractère apocryphe, une telle circonstance n'est, en tout état de cause, pas de nature à établir que le jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance qui a été rendu le 4 décembre 2017 par le tribunal de première instance de Conakry III - Mafanco et l'extrait d'acte de naissance assurant sa transcription, lesquels ont été au surplus légalisés, présenteraient eux-mêmes un caractère frauduleux.

10. Enfin, Mme K... E... a toujours déclaré lors de sa demande d'asile et celle de son autre fille Mariam D..., B... D... comme étant sa fille. En particulier, il résulte de la décision de la CNDA du 18 mai 2018 reconnaissant la qualité de réfugié à la jeune F... D... que les déclarations de Mme K... E..., laquelle indiquait notamment avoir subi des mauvais traitements de la part de son ex-époux pour s'être opposée à l'excision de ses deux filles ainées, dont il ressort des pièces du dossier, notamment du récit de demande d'asile de l'intéressée, qu'il s'agit de Mmes B... et H... D..., ont été jugées par la CNDA, comme " étayé[es] en de propos précis ".

11. Il suit de là que le ministre n'établit pas le caractère frauduleux du jugement supplétif délivré à Mme B... D..., ni le caractère inauthentique de l'extrait d'acte de naissance assurant sa transcription. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, c'est à tort que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a refusé de délivrer à Mme B... D... le visa qu'elle sollicitait au motif tiré de ce que son identité et ses liens familiaux avec la réfugiée n'étaient pas établis.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Pour refuser de délivrer le visa de long séjour que Mme H... D... sollicitait, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée, ainsi qu'il résulte des écritures de première instance du ministre, sur le motif tiré de ce qu'aucune demande de visa n'avait été déposée devant les autorités consulaires françaises en Guinée faute, pour l'intéressée, de justifier du dépôt de la quittance de frais de dossier ou de tout autre élément. Toutefois, le tribunal, après avoir constaté que les requérantes justifiaient avoir saisi les autorités consulaires d'une telles demande par lettre recommandée avec accusé de réception, a annulé la décision implicite de rejet en tant qu'elle concerne Mme H... D... pour avoir fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce. Le bien-fondé de ce motif n'est pas contesté par l'administration.

13. Il ressort des pièces du dossier que pour justifier du lien de filiation avec Mme K... E..., l'intéressée a produit l'acte de naissance dressé le 27 mars 2000 sur déclaration du père, M. C... D..., par l'officier de l'état civil de la commune de Matoto, un jugement supplétif d'acte de naissance rendu par le tribunal de première instance de Conakry III - Mafanco le 4 décembre 2017 et l'acte de naissance n°9920 assurant la transcription de ce jugement supplétif dans les registres de l'état civil dressé le 6 décembre 2017 par l'officier de l'état civil de la même commune. Les requérantes soutiennent, alors que la situation de Mme H... D... est identique à celle de Mme B... D..., que les actes présentés justifient le lien de filiation allégué. A supposer même que l'acte de naissance dressé en 2000 présenterait un caractère apocryphe, le ministre n'établit pas ni même n'allègue que le jugement supplétif du 4 décembre 2017 délivré à Mme H... D... serait frauduleux, ni que l'extrait d'acte de naissance assurant sa transcription serait inauthentique. Par suite, le lien de filiation entre Mme K... E... et Mme H... D... doit être regardé comme établi, de sorte que cette dernière peut prétendre de plein droit à la délivrance d'un visa sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il suit de là que les requérantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a seulement enjoint au ministre de procéder au réexamen de la demande de visa de l'intéressée.

14. Dans ces conditions, sous réserve d'un changement de circonstances de droit ou de fait, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement, eu égard aux motifs sur lesquels il se fonde, que le ministre de l'intérieur délivre un visa de long séjour à Mme B... D... et à Mme H... D.... Il y a lieu d'enjoindre au ministre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

15. Mme K... E... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à Me J... dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

D E C I D E:

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 novembre 2020 et la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme B... D... et à Mme H... D... un visa de long séjour, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le versement de la somme de 1 200 euros à Me J... est mis à la charge de l'Etat dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme K... E..., à Mme H... D... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Douet, présidente de la formation de jugement,

- M. A...'hirondel, premier conseiller,

- Mme G..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2021.

Le rapporteur,

M. I...La présidente,

H. DOUET

La greffière,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

2

N° 20NT04023


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT04023
Date de la décision : 09/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005-01 Étrangers. Entrée en France. Visas.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUET
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : EQUATION AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-07-09;20nt04023 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award