Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2018 par lequel le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé son pays d'origine comme pays de destination vers lequel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré.
Par un jugement n° 1913895 du 21 janvier 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de la Sarthe de délivrer à M. A... D... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée vie familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement, en le munissant dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 février 2021, le préfet de la Sarthe demande à la cour d'annuler ce jugement.
Il soutient qu'il n'a pas méconnu le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire, enregistré le 2 avril 2021, M. A... D..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros qui devra être versée à son avocate en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que le moyen soulevé par le préfet n'est pas fondé.
M. A... D... a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 mai 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D..., ressortissant angolais né le 7 août 1980, déclare être entré en France le 25 juin 2013. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 14 avril 2015 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 21 décembre 2015 de la Cour nationale du droit d'asile. Il a, le 20 août 2015, sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 3 mai 2016, le préfet de la Sarthe a pris à son encontre un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire. Cette décision a été annulée par le tribunal administratif de Nantes le 15 novembre 2016 et M. A... D... a obtenu un titre de séjour valable jusqu'au 14 novembre 2017. Par l'arrêté contesté du 28 novembre 2018, le préfet de la Sarthe a pris à son encontre un refus de renouvellement de ce titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré. M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 21 janvier 2021, le tribunal a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de la Sarthe de délivrer à M. A... D... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement, en le munissant dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour. Le préfet de la Sarthe fait appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".
3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un certificat de résidence. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'accès effectif ou non à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un certificat de résidence dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
4. Dans son avis du 7 septembre 2018, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de M. A... D... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et par ailleurs qu'il peut voyager sans risque vers ce pays.
5. Le préfet reconnaît que M. A... D..., atteint de schizophrénie, a produit des ordonnances faisant état, à la date de la décision contestée, d'une prise en charge psychiatrique et de prescriptions à base notamment de mirtazapine (antidépresseur), venlafaxine (antidépresseur), olanzapine (antipsychotique), cyamémazine (antipsychotique neuroleptique), lormétazepam (anxiolytique) et zopiclone (sédatif hypnotique). Ont été produites la liste des médicaments disponibles en Angola et deux fiches du " Medical country of origin information " (MEDCOI) des 10 avril et 25 avril 2017. Si au vu de ces éléments, la mirtazapine, la venlafaxine et l'olanzapine sont disponibles en Angola, la cyamémazine n'y est pas mentionnée comme étant disponible. Si la liste des médicaments essentiels mentionne des antipsychotiques, il n'est ni établi ni même allégué par le préfet que les molécules disponibles seraient équivalentes. Il en est de même s'agissant du lormétazepam, alors que si la liste des médicaments essentiels mentionne le lorazepam, il n'est ni établi ni même allégué par le préfet qu'il s'agit de la même molécule ou d'une molécule équivalente. Enfin, concernant le zopiclone, la fiche Medcoi du 10 avril 2017 indique qu'il est indisponible en Angola. Si la fiche Medcoi du 25 avril 2017 indique que le zolpidem, qui est également un sédatif, y est disponible, il n'est ni établi ni même allégué qu'il s'agirait de molécules équivalentes. Dès lors, le préfet de la Sarthe a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer à M. A... D... un titre de séjour sur ce fondement.
6. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Sarthe n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 28 novembre 2018 par lequel il a refusé de délivrer à M. A... D... un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
DECIDE :
Article 1er : La requête du préfet de la Sarthe est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. E... A... D....
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 24 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme C..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2021.
La rapporteure,
P. C...
Le président,
F. Bataille
La greffière,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT00445