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08/07/2021 | FRANCE | N°20NT03912

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 08 juillet 2021, 20NT03912


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2019 par lequel le préfet de la Mayenne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire à destination du Mali et l'a obligé à se présenter tous les vendredis à 11 heures à la gendarmerie d'Evron.

Par un jugement n° 1914287 du 9 septembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête

et des mémoires, enregistrés les 15 et 18 décembre 2020 et 9 février 2021, M. B..., représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2019 par lequel le préfet de la Mayenne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire à destination du Mali et l'a obligé à se présenter tous les vendredis à 11 heures à la gendarmerie d'Evron.

Par un jugement n° 1914287 du 9 septembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 et 18 décembre 2020 et 9 février 2021, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté;

3°) d'enjoindre au préfet de la Mayenne de mettre fin à toutes mesures de surveillance ;

4°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Mayenne de lui délivrer un titre de séjour mention vie privée et familiale ou, subsidiairement, un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Mayenne de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer, dans un délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt, une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros qui devra être versée à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation ;

- il établit suffisamment son état civil ;

- le refus de délivrance d'un titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle et ont été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté modificatif portant assignation à résidence du 28 septembre 2020 doit être annulé par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2021, et un mémoire enregistré le 19 mars 2021, qui n'a pas été communiqué, le préfet de la Mayenne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les arrêtés portant assignation à résidence n'ont pas été contestés en première instance et que les autres moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les observations de Me D..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien, se disant né le 10 janvier 2001, est entré irrégulièrement en France le 17 avril 2017 et a été placé sous la protection des services de l'aide sociale à l'enfance en qualité de mineur étranger isolé. Il a sollicité du préfet de la Mayenne, le 9 avril 2019, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 17 décembre 2019, le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire à destination du Mali et l'a obligé à se présenter tous les vendredis à 11 heures à la gendarmerie d'Evron. M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cet arrêté. Par un jugement du 9 septembre 2020, le tribunal a rejeté sa demande. M. B... fait appel de ce jugement. La demande de sursis à exécution de ce jugement a été rejetée par une ordonnance du président de la première chambre de la cour du 5 janvier 2021.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si le requérant soutient que le tribunal n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation, ce moyen relève du bien-fondé du jugement attaqué et non de sa régularité.

Sur les moyens propres au refus de titre de séjour :

3. D'une part, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigé. ".

4. D'autre part, l'article L. 111-6 du même code dispose que : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. ". L'article 47 du code civil précise que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis.

5. Pour justifier de son âge et de son identité, M. B... a produit un acte de naissance n° 266-Reg05. La direction de la police aux frontières de la Loire-Atlantique a indiqué, le 31 août 2017, qu'il ne s'agissait pas d'un document authentique en raison de mentions pré-imprimées dégradées sur le recto de l'acte, rendant leur origine indéfinie et de l'absence de numéro de souche en mode sécurisé typographique, avec la présence de légalisations alors qu'elles ne sont pas nécessaires. Le 9 février 2018, cette même direction a indiqué que l'acte de naissance n° 1331 Reg21 2017, présenté par M. B..., ne respectait pas l'article 554 du code de procédure civile malien et faisait notamment référence à un jugement supplétif comportant une faute d'orthographe. Le jugement supplétif du 16 avril 2018 du tribunal de grande instance de la commune V du district de Bamako, produit intégralement en appel, indique que le requérant réside à Bamako alors qu'il est constant qu'à cette date, il résidait en France. Le 27 septembre 2018, la direction de la police aux frontières a considéré que l'acte n° 0428-Reg08 (volet n° 3), établi sur la base de ce jugement supplétif, était une contrefaçon, dès lors notamment qu'il était réalisé sur papier ordinaire dépourvu de toute sécurité, sans alignement des mentions, avec des polices de caractères de tailles différentes et que l'article 554 du code de procédure civile relatif aux délais de recours n'était pas respecté, l'acte ayant été transcrit avant l'expiration du délai d'appel de quinze jours. L'extrait du jugement supplétif ne mentionne pas le nom de famille du père du requérant. Si la copie intégrale du jugement supplétif mentionne que l'acte sera transcrit dans le registre de l'année en cours et dans le registre de l'année 2001, l'extrait du jugement supplétif ne mentionne pas cette transcription dans le registre de l'année 2001. Le volet n° 1 (souche) de l'acte de naissance n° 0428-Reg08 du 26 avril 2018 comporte une surcharge au niveau de l'année de naissance et le " tribunal de grande instance " est mentionné au point 17 " prénom(s) et nom ", ce qui n'est pas adapté, et dans une rubrique non intitulée ; il indique également, dans un point 21 " centre de ", " tribunal de la (sic) 1ère instance de la CV ". La rubrique " numéro d'identification national " (NINA) figurant dans l'acte de naissance n'a pas été remplie dans l'acte de naissance, alors que la carte d'identité consulaire établie au vu de cet acte de naissance mentionne un tel numéro, ainsi que le passeport. A cet égard, le requérant se borne à soutenir, sans le justifier, que " ce numéro n'apparaît jamais sur les actes de naissance consécutifs à un jugement supplétif, en particulier pour des personnes nées avant l'entrée en vigueur en 2016 de la réforme NINA ". Par ailleurs, le passeport délivré à M. B... par les autorités consulaires maliennes, comme la fiche individuelle d'état civil et la carte consulaire émanant de ces mêmes autorités, n'ont pas par eux-mêmes valeur d'actes d'état civil et, dès lors qu'ils ont été établis au vu d'actes d'état civil apocryphes, ils ne peuvent pallier le défaut d'authenticité des actes d'état civil produits à l'appui de la demande de titre de séjour. Le requérant a produit une authentification de l'acte de naissance n° 0428-Reg08 émanant du maire délégué de la commune V du district de Bamako, en date du 2 octobre 2020. Toutefois, il ne justifiant pas la différence de numéros entre les actes de naissance produits devant l'administration et, au vu de l'ensemble de ces circonstances, incohérences et anomalies, le préfet de la Mayenne a pu valablement se fonder sur le seul motif tiré de ce que M. B... a commis une fraude sur son âge et son identité pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur les moyens communs au refus de titre de séjour et à l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle du requérant par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

7. En second lieu, la décision portant refus de titre de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulées, M. B... n'est pas fondé à se prévaloir de cette annulation, par voie de conséquence, à l'encontre de la décision portant assignation à résidence.

8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Mayenne, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles relatives aux frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Mayenne.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- M. Brasnu, premier conseiller,

- Mme A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2021.

La rapporteure,

P. A...Le président,

J-E. Geffray

La greffière,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT03912


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03912
Date de la décision : 08/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : SEMLALI NAWAL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-07-08;20nt03912 ?
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