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06/07/2021 | FRANCE | N°20NT02654

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 06 juillet 2021, 20NT02654


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé le 5 juillet 2019 contre la décision du 15 mai 2019 des autorités consulaires françaises à Casablanca refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de travailleur saisonnier, ainsi que cette décision consulaire.

Par un jugement n°1913166 du 16 juin 2020, le tribunal ad

ministratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une req...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé le 5 juillet 2019 contre la décision du 15 mai 2019 des autorités consulaires françaises à Casablanca refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de travailleur saisonnier, ainsi que cette décision consulaire.

Par un jugement n°1913166 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 août 2020, M. D... B..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 16 juin 2020 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé le 5 juillet 2019 contre la décision du 15 mai 2019 des autorités consulaires françaises à Casablanca refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de travailleur saisonnier, ainsi que cette décision consulaire ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 080 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'autorité consulaire et la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ont entaché leur décision d'une erreur de fait, et ont porté une inexacte appréciation sur l'adéquation de sa qualification et de son expérience professionnelle ; l'autorisation de travail a été visée par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) ;

- il n'existe aucun risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires ;

- la décision est entachée d'une erreur de droit et méconnaît le principe d'égalité dès lors qu'il se trouve dans une situation administrative identique à celle de son frère M. C... B..., qui a obtenu un visa ;

- la base légale de la décision contestée de la commission est erronée.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 janvier 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

Un mémoire, enregistré après la clôture de l'instruction le 3 mars 2021, a été présenté pour M. B... et n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. D... B... tendant à l'annulation de la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé le 5 juillet 2019 à l'encontre de la décision du 15 mai 2019 des autorités consulaires françaises à Casablanca refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de travailleur salarié saisonnier, ainsi que cette décision consulaire. M. B... relève appel de ce jugement.

2. En premier lieu, en vertu des dispositions de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, prise sur recours préalable obligatoire, s'est substituée à la décision du 15 mai 2019 des autorités consulaires françaises à Casablanca. Il suit de là que les conclusions à fin d'annulation de M. B... doivent être regardées comme dirigées contre la seule décision de la commission de recours et que les moyens dirigés contre la décision consulaire doivent être écartés comme inopérants.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / (...) 3° Des documents nécessaires à l'exercice d'une activité professionnelle s'il se propose d'en exercer une ". Aux termes de l'article L. 211-2-1 du même code : " (...) Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour (...) ". Et aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". La circonstance qu'un travailleur étranger dispose d'un contrat de travail visé par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) ou d'une autorisation de travail, ne fait pas obstacle à ce que l'autorité compétente refuse de lui délivrer un visa d'entrée en France en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur tout motif d'intérêt général. Constitue un tel motif l'inadéquation entre l'expérience professionnelle et l'emploi sollicité et, par suite, le détournement de l'objet du visa à des fins migratoires.

4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes du courrier de communication des motifs de la décision contestée du 2 octobre 2019, que pour refuser de délivrer le visa de long séjour sollicité, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur l'inadéquation entre le profil professionnel de M. B... et le poste pour lequel il a été embauché, dont il se déduit un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires.

5. M. B..., qui souhaite travailler en France pour l'EARL " des arènes " en qualité d'ouvrier agricole qualifié, soutient qu'il a exercé cette profession pendant plus de quatorze années au Maroc, et qu'il a produit en ce sens un certificat de travail de son ancien employeur. Toutefois, en l'absence de fiches de paie ou d'une attestation de revenus, ce dernier document, qui n'attesten au demeurant que de cinq mois de travail en qualité d'ouvrier agricole durant l'année 2019, est insuffisant pour établir que M. B... a effectivement travaillé en cette qualité depuis qu'il a terminé sa formation en 2011. Au demeurant, M. B..., qui serait recruté par l'EARL " des arènes " en même temps qu'un autre ouvrier agricole marocain, ne justifie pas de la nécessité pour cette entreprise de recruter deux salariés supplémentaires à l'étranger. En tout état de cause, M. B... ne produit aucun contrat de travail signé avec son futur employeur. Par ailleurs, le requérant, âgé de 33 ans, et dont il est constant qu'il est célibataire, ne se prévaut d'aucune attache familiale dans son pays d'origine. Si M. B... justifie être locataire d'une terre agricole au Maroc à des fins d'exploitation, il ressort des pièces du dossier que le bail dont il est titulaire devait arriver à son terme le 31 décembre 2020. Dans ces conditions, en refusant de délivrer le visa sollicité, la commission n'a pas commis d'erreur de fait ou porté une inexacte appréciation sur l'adéquation de la qualification et de l'expérience professionnelle de l'intéressé à l'emploi proposé, dont il se déduit un risque de détournement de l'objet du visa.

6. En troisième lieu, la circonstance, à la supposer établie, que le frère du requérant, M. C... B..., aurait obtenu un visa d'entrée en France portant la mention " travailleur saisonnier " afin d'occuper un emploi auprès du même employeur et alors qu'il serait dans la même situation, est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse.

7. En dernier lieu, la circonstance que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a mentionné, dans son courrier portant communication des motifs de la décision litigieuse, l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié, plutôt que l'article L. 313-23 du même code applicable à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de travailleur saisonnier, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de la formation de jugement,

- M. A..., premier conseiller,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2021.

Le rapporteur,

A. A...La présidente,

C. BUFFET

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT02654


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02654
Date de la décision : 06/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUFFET
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : BRUNA-ROSSO

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-07-06;20nt02654 ?
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