Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... F... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 28 avril 2017 par lequel le préfet de la région Bretagne a rejeté sa demande d'autorisation d'exploiter des terres agricoles d'une superficie de 7,1234 hectares situées sur le territoire de la commune de Plouha dans les Côtes-d'Armor.
Par un jugement n° 1704631 du 18 novembre 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 26 décembre 2019, 16 juillet 2020 et 29 septembre 2020 Mme F..., représentée par Me G..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 novembre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 avril 2017 du préfet de la région Bretagne ainsi que la décision implicite de rejet du recours administratif formé contre cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le préfet, et à sa suite les premiers juges, ont estimé que l'EARL Univers Ponies, simple bénéficiaire d'une mise à disposition des terres en litige, devait être regardée comme preneur en place et, par conséquent, relevant du rang de priorité n°1 ;
- la mise à disposition effectuée par M. E... au profit de l'EARL Univers Ponies est irrégulière, dès lors qu'il avait fait valoir ses droits à la retraite en 2012 ; le bail rural consenti à M. E... a donc été résilié à cette date.
Par des mémoires enregistrés les 6 juillet, 4 septembre et 2 octobre 2020 l'EARL Univers Ponies, représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme F... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme F... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 septembre 2020 le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme F... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- l'arrêté du préfet de la région Bretagne du 28 juin 2016 fixant le schéma directeur régional des exploitations agricoles de Bretagne ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant Mme F....
Considérant ce qui suit :
1. En 2001, Mme F... a donné à bail à M. E... des terres agricoles d'une superficie de 7 hectares 12 ares et 34 centiares situées sur le territoire de la commune de Plouha, dans les Côtes-d'Armor. En 2008, M. E... a mis ces terres à la disposition de l'EARL Univers Ponies, qui exploite un centre équestre de loisirs, dont il est l'associé et le salarié. En 2012, M. E... a fait valoir ses droits à la retraite tout en restant salarié et associé de l'EARL Univers Ponies. Le 27 janvier 2017, Mme F..., après avoir signifié son congé à M. E..., a demandé l'autorisation d'exploiter les terres qu'elle lui avait données à bail. Cette demande a été rejetée par une décision du préfet de la région Bretagne du 28 avril 2017. Après avoir formé un recours gracieux, implicitement rejeté par le préfet, Mme F... a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande d'annulation de l'arrêté du 28 avril 2017 et de la décision implicite le confirmant. Par un jugement du 18 novembre 2019, le tribunal a rejeté sa demande. Mme F... relève appel de ce jugement.
Sur la légalité des décisions contestées :
2. Aux termes de l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime : " L'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 peut être refusée : 1° Lorsqu'il existe un candidat à la reprise ou un preneur en place répondant à un rang de priorité supérieur au regard du schéma directeur régional des structures agricoles mentionné à l'article L. 312-1 ; 2° Lorsque l'opération compromet la viabilité de l'exploitation du preneur en place ; (...) ". L'article L. 411-37 du même code dispose que " le preneur associé d'une société à objet principalement agricole peut mettre à la disposition de celle-ci, pour une durée qui ne peut excéder celle pendant laquelle il reste titulaire du bail, tout ou partie des biens dont il est locataire " et que " En cas de mise à disposition de biens (...) le preneur qui reste seul titulaire du bail doit, à peine de résiliation, continuer à se consacrer à l'exploitation de ces biens, en participant sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de l'exploitation. ". Enfin, le schéma directeur régional des exploitations agricoles de Bretagne accorde le rang de priorité n° 1 au maintien de l'exploitation du preneur en place, défini à son article 1er comme un " exploitant agricole, personne physique ou morale, mettant en valeur, à titre exclusif ou non, une exploitation agricole en qualité de titulaire de tout bail rural sur les terres de ladite exploitation. " Ce même article précise que " Lorsque le bien pris à bail est mis, par son détenteur, à disposition d'une société d'exploitation dans laquelle il est associé, il y a lieu de prendre en compte, en comparaison de situation demandeur(s)/preneur, la situation de la société ; ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'en estimant que l'EARL Univers Ponies, qui bénéficiait depuis 2008 d'une mise à disposition des terres louées par M. E... à Mme F..., devait être regardée comme preneur en place et, à ce titre, bénéficiait d'un rang de priorité supérieur à celui de la requérante, le préfet de la région Bretagne n'a pas commis d'erreur de droit.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. E..., après avoir fait valoir ses droits à la retraite, a continué à exploiter les terres objet du litige en qualité de salarié de l'EARL Univers Ponies. Par suite, et alors au surplus que Mme F... n'a jamais demandé la résiliation du bail consenti à M. E... pour ce motif, le moyen tiré de ce que celui-ci aurait été résilié lorsque la requérante a présenté sa demande, ce qui aurait eu pour effet de retirer à l'EARL Univers Ponies sa qualité de preneur en place, ne peut qu'être écarté.
5. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, verse à Mme F... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme F... la somme de 1 000 euros à verser au même titre à l'EARL Univers Ponies.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.
Article 2 : Mme F... versera à l'EARL Univers Ponies la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... F..., à l'EARL Univers Ponies et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
Délibéré après l'audience du 20 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, présidente de chambre,
- Mme Brisson, présidente assesseure,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 juin 2021.
Le rapporteur
E. A...La présidente
I. Perrot
La greffière
A. Martin
La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT04980