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01/06/2021 | FRANCE | N°20NT03548

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 01 juin 2021, 20NT03548


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... F... a demandé au tribunal administratif de Rennes de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et d'annuler l'arrêté du 18 août 2020 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2003538 du 24 août 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a décidé d'admettre M. F... au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire (article 1er) et a rejet

le surplus de sa demande (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête et un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... F... a demandé au tribunal administratif de Rennes de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et d'annuler l'arrêté du 18 août 2020 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2003538 du 24 août 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a décidé d'admettre M. F... au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire (article 1er) et a rejeté le surplus de sa demande (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 novembre 2020 et 1er mars 2021, M. F..., représenté par Me B... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le signataire de l'arrêté en litige n'était pas compétent dès lors qu'il n'est pas justifié de la publication de la délégation lui ayant été accordée, qu'il n'est pas établi que le signataire avait été nommé dans un poste lui permettant de recevoir délégation de signature pour l'acte en litige et que Mme D... n'est pas affectée au pôle régional Dublin ;

- l'arrêté est entaché d'un défaut d'examen dès lors qu'il mentionne, à tort, qu'il habite dans une résidence à Rennes alors qu'il était hébergé chez son frère ; le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur ce moyen dont il était saisi ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que le préfet l'astreint à se rendre tous les jours à la gendarmerie de Rennes alors qu'il réside à Saint-Malo ; le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur ce moyen doit il était saisi ;

- l'allongement de la durée du transfert n'est pas fondé dès lors qu'il ne peut être considéré comme en fuite et est passé en procédure normale à compter du 1er mars 2020 ; la cour doit enjoindre au préfet de produire le procès-verbal de carence, le billet d'avion et la preuve que la remise du billet d'avion a été faite par le truchement d'un interprète dans une langue qu'il a comprise ; le seul refus d'embarquer ne permet pas de justifier d'une intention de vouloir se soustraire de manière systématique aux convocations ;

- il y a lieu de statuer sur la requête dès lors que l'arrêté portant assignation à résidence a reçu exécution ; le préfet ne rapporte pas la preuve qu'il est réellement passé en procédure normale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2021, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en remet à ses écritures de première instance démontrant que les moyens soulevés ne sont pas fondés et précise que M. F... est en possession d'une attestation de demandeur d'asile dès lors qu'il a fait l'objet d'une requalification de sa procédure d'asile en France.

M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. F..., ressortissant afghan né 1er janvier 2000, est entré en France, selon ses déclarations, le 13 juillet 2019. Sa demande d'asile a été enregistrée le 19 juillet 2019 par les services de la préfecture de Ille-et-Vilaine. Les recherches entreprises sur le fichier Eurodac ont révélé que le requérant avait déjà déposé une demande d'asile auprès des autorités autrichiennes. Par deux arrêtés du 19 août 2019, le préfet d'Ille-et-Vilaine a ordonné le transfert de M. F... en Autriche et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par un jugement du 29 août 2019, le tribunal administratif de Rennes a annulé ces arrêtés. Ce jugement a été annulé sur appel du préfet d'Ille-et-Vilaine par un arrêt nos19NT03530, 19NT03531 du 14 novembre 2019 de la cour. Par un arrêté du 18 août 2020, l'autorité administrative a décidé d'assigner à résidence pour une durée de quarante-cinq jours M. F.... L'intéressé relève appel du jugement du 24 août 2020 par lequel le magistrat désigné par le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutient le requérant, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a répondu au point 4 de son jugement aux moyens tirés du défaut d'examen de la situation personnelle de M. F... et de l'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité faute de motivation suffisante.

Sur la légalité de l'arrêté portant assignation à résidence :

3. Aux termes de l'article L. 561-2 du même code : " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : 1° bis (...) fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 (...) Les huit derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois pour les cas relevant des 1° et 2° à 7° du présent I, ou trois fois pour les cas relevant du 1° bis. ".

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté d'assignation à résidence en litige a été signé par Mme A... D..., adjointe au chef du bureau de l'asile à la préfecture d'Ille-et-Vilaine, nommée à ce poste par note du 7 juillet 2017 ainsi que le mentionne l'arrêté du 23 juin 2020, qui disposait d'une délégation de signature à l'effet de signer notamment les décisions relevant de la procédure Dublin III et notamment les arrêtés d'assignation à résidence, consentie par arrêté du 23 juin 2020 du préfet d'Ille-et-Vilaine publié le même jour au recueil des actes administratifs de l'État dans le département d'Ille-et-Vilaine. Cet acte n'étant pas un arrêté de transfert, le requérant ne peut utilement soutenir qu'il ne pouvait être signé que par un agent du pôle régional Dublin. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté de transfert attaqué doit être écarté comme manquant en fait.

5. En deuxième lieu, le préfet d'Ille-et-Vilaine a assigné M. F... à résidence dans une résidence hôtelière située à La Guerche de Bretagne en lui ordonnant de se présenter tous les jours de la semaine à 16h00 à la gendarmerie de La Guerche de Bretagne. Il n'est pas donc, contrairement à ce que soutient le requérant, assigné à résidence à Rennes. Par ailleurs, alors qu'il ne justifie pas être hébergé chez son frère qui réside à Saint-Malo et qu'il a lui-même déclaré, lors de son audition le 17 août 2020, ne pas avoir de domicile et être hébergé " à gauche et à droite ", il n'est pas fondé à soutenir que l'autorité administrative n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle avant de définir le lieu de son assignation à résidence.

6. En troisième lieu, pour les mêmes motifs tenant à l'absence d'hébergement à Saint- Malo, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

7. Enfin, il est constant que M. F... a refusé d'embarquer sur le vol pour l'Autriche prévu le 28 janvier 2020 et que le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a en conséquence déclaré en fuite, estimant que le délai de transfert était alors reporté au 1er mars 2021. Il ressort des pièces produites par le préfet en première instance que la notification de la convocation pour embarquer sur ce vol lui avait été signifiée en langue patchou par le truchement d'un interprète le 23 janvier 2020 et que le préfet a été informé du fait que M. F... ne s'était pas présenté par procès-verbal du 28 janvier 2020. L'intéressé, qui a indiqué, lors de son audition du 17 août 2020, ne pas avoir déféré à cette convocation en raison de sa volonté de rester en France, n'établit ni même n'allègue qu'il était dans l'impossibilité de voyager à cette date. Par suite, le caractère intentionnel de la soustraction de l'intéressé à la convocation qui lui avait été adressé aux fins d'exécution de la mesure d'éloignement est établi et le préfet a pu à bon droit estimer que le requérant était en fuite et que le délai de transfert était par conséquent porté à dix-huit mois au maximum. Dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'assignation à résidence est illégale faute de perspective raisonnable d'éloignement.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris les conclusions relatives aux frais liés à l'instance, doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... F... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2021.

La rapporteure,

F. E...

Le président,

O. GASPON

La greffière,

P. CHAVEROUX

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20NT03548 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03548
Date de la décision : 01/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : GUINEL-JOHNSON

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-06-01;20nt03548 ?
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