Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'institut de formation en soins infirmiers (IFSI) de Vannes à lui verser la somme totale de 177 994,44 euros en réparation des dommages résultant de son exclusion définitive.
Par un jugement n° 1802528 du 17 octobre 2019 le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoire enregistrés les 17 et 18 décembre 2019 et 6 juillet 2020 Mme C..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 17 octobre 2019 ;
2°) de condamner l'institut de formation en soins infirmiers de Vannes à lui verser la somme totale de 177 994,44 euros en réparation des dommages résultant de son exclusion définitive ;
3°) de mettre à la charge de l'institut de soins infirmiers de Vannes la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa demande de première instance était bien recevable comme ayant été présentée dans le délai de prescription quadriennale ;
- les faits qui lui sont reprochés ne présentent pas de caractère de gravité particulière ; la consultation du dossier d'une patiente n'a entraîné aucune divulgation à des tiers ;
- la sanction prise à son encontre présente un caractère disproportionné ;
- la décision est à l'origine d'un important préjudice matériel, évalué à 147 994,44 euros et moral, évalué à 30 000 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 avril 2020, le centre hospitalier Bretagne Atlantique Vannes-Auray, représenté par la SCP Thouvenin-Coudray-Grevy, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de Mme C... au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la demande de première instance était tardive et donc irrecevable ;
- aucun des moyens invoqués par Mme C... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... C..., alors élève de 2ème année à l'institut de formation en soins infirmiers (IFSI) de Vannes, a fait l'objet d'une exclusion définitive par une décision du
22 mars 2011. Cette décision a été annulée par un jugement du 6 novembre 2013 du tribunal administratif de Rennes, confirmé par un arrêt de la cour du 15 décembre 2015 devenu définitif. L'intéressée a, le 6 février 2018, saisi l'IFSI de Vannes d'une réclamation indemnitaire préalable tendant au paiement d'indemnités en réparation des préjudices matériels et moraux qu'elle estimait avoir subis consécutivement à la sanction fautive prononcée à son encontre. Cette demande ayant été implicitement rejetée, Mme C... a saisi le tribunal administratif de Rennes lequel, par un jugement du 17 octobre 2019 dont il est relevé appel, a rejeté sa demande.
Sur les conclusions indemnitaires :
2. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité. Pour apprécier à ce titre l'existence d'un lien de causalité entre les préjudices subis par l'agent et l'illégalité commise par l'administration, le juge peut rechercher si, compte tenu des fautes commises par l'agent et de la nature de l'illégalité entachant la sanction, la même sanction aurait pu être légalement prise par l'administration.
3. Par un jugement du 6 novembre 2013, confirmé en appel comme il a été dit au point 1, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision d'exclusion définitive de
Mme C... prise le 22 mars 2011 par la directrice de l'IFSI de Vannes au motif que l'intéressée n'avait pas été rendue destinataire, avant que le conseil de discipline appelé à émettre un avis sur sa situation ne se prononce, de l'intégralité de son dossier et que ce vice de procédure avait privé l'intéressée d'une garantie.
4. Il résulte de l'instruction qu'alors qu'elle réalisait un stage dans un établissement public de santé mentale Mme C... a, au moyen d'un code d'accès informatique qui lui avait été uniquement confié afin d'accéder au dossier médical des patients suivis au sein de l'unité dans laquelle elle était affectée, consulté à plusieurs reprises le dossier médical d'une personne de son entourage, dans un intérêt personnel et alors que cette personne n'était pas alors prise en charge par l'établissement, ainsi que les dossiers de plusieurs membres de sa famille pour, selon ses déclarations, améliorer ses connaissances professionnelles et assouvir un " fantasme personnel ". Il ressort en outre du courrier adressé le 11 février 2011 à l'EPSM par la mère d'une jeune patiente qui avait été suivie dans cet établissement, courrier dont le contenu n'est pas contesté par elle, que Mme C... a divulgué auprès de tiers ces informations, pourtant couvertes par le secret médical.
5. Mme C..., qui avait été formée à la déontologie s'attachant à l'exercice de la profession d'infirmière et avait été informée à plusieurs reprises de ses obligations en la matière, notamment avant qu'elle ne commence son stage, ne pouvait ignorer les obligations de secret professionnel et médical auxquels elle était tenue en application de l'article L. 1110-4 du code de la santé publique. Dans ces conditions, la consultation de plusieurs dossiers médicaux de patients et la divulgation des informations contenues dans l'un d'entre eux, sans autorisation et sans qu'aucun motif médical ou professionnel ne le justifie, constitue, alors même que la personne au détriment de laquelle cette consultation a eu lieu n'a pas porté plainte, un grave manquement aux obligations professionnelles auxquelles était tenue Mme C....
6. Dans ces conditions la même décision d'exclusion, qui n'est pas entachée de disproportion compte tenu des éléments de fait rappelés ci-dessus, aurait pu être légalement prise dans le cadre d'une procédure régulière, et Mme C... n'établit pas que l'illégalité de procédure constatée par le tribunal puis par la cour dans leurs décisions mentionnées ci-dessus serait la cause des préjudices qu'elle allègue avoir subis.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par l'IFSI de Vannes, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande indemnitaire.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'institut de formation en soins infirmiers, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par Mme C... ne peuvent dès lors être accueillies.
9. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme C... la somme de 1 500 euros à verser à l'institut de formation en soins infirmiers de Vannes au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Mme C... versera à l'institut de formation en soins infirmiers de Vannes la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au centre hospitalier Bretagne Atlantique Vannes-Auray et à l'institut de formation en soins infirmiers de Vannes.
Délibéré après l'audience du 22 avril 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot président de chambre,
- Mme A..., président-assesseur,
- M. Berthon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 mai 2021.
Le rapporteur
C. A...
Le président
I. Perrot
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT04859